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19 juillet 2024 5 19 /07 /juillet /2024 01:01

Léopold Augustin Chauveau naît le 30 mai 1874 à Sainte-Maure-de-Touraine (Indre-et-Loire). Il est le fils d’Augustine Deffond, lingère et de son mari, Léopold Chauveau, sabotier.

En octobre 1892, dans la préfecture du département, à Tours, Léopold Chauveau est l’auteur d’une agression de nuit sur le boulevard Heurteloup, près de la gare du chemin de fer d’Orléans. Croisant deux promeneurs, il veut s’emparer de la canne de l’un d’entre eux, mais, comme celui-ci résiste, il sort un couteau-revolver et lui loge une balle dans l’œil gauche. Arrêté, il passe quatre semaines en détention préventive.

La presse locale est surprise que l’affaire n’ait pas été soumise à la cour d’assises, n’ayant pas été qualifiée de crime, malgré la gravité des faits. Il est jugé début mai par le tribunal correctionnel. Chauveau assure qu’il ne se souvient de rien, ayant été complètement ivre. Selon le Journal d'Indre-et-Loire, les parents, « négociants très honorables de Sainte-Maure, sont désespérés de ce que vient de faire leur fils ». Chauveau est condamné à 16 francs d’amende et deux ans de prison. N’ayant pas d’antécédent judiciaire, il bénéficie du sursis, notion créée en 1885 par loi Bérenger.

Dix jours après sa condamnation, devançant le service militaire de deux ans, Léopold Chauveau s’engage dans l’armée, signant en novembre 1892 un contrat de quatre ans et rejoignant le 6e bataillon de chasseurs à pied. En septembre, 1893, nommé caporal, il devient moniteur à l’École normale de gymnastique et d’escrime de Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Promu sergent dans le même établissement, situé dans le Bois de Vincennes, en janvier 1894, il prolonge de cinq ans son contrat en 1896, puis de deux ans en 1901 et pour trois ans supplémentaires en 1903. Il est sergent major instructeur de gymnastique en octobre 1904.

Le sergent Chauveau est, à son tour, victime d’une agression en mars 1897, alors qu’il revenait de Charenton-le-Pont en traversant le Bois de Vincennes. Il est frappé à la nuque d’un violent coup de bâton, mais échappe à ses agresseurs, qu’il tente de poursuivre, sans y arriver.

Pratiquant de nombreuses activités sportives, Chauveau participe aux Jeux olympiques de Paris, organisés en 1900 en même temps que l’exposition universelle. Son équipage de quatre rameurs remporte l’épreuve, une course réservée aux instructeurs de l'école de gymnastique de Joinville en yoles franches.

Léopold Chauveau épouse en mai 1906, à Joinville Marie Thérèse Lucie Latulippe, originaire d’Ivry-sur-Seine (Seine, act. Val-de-Marne). Ils vivent quai Beaubourg à Joinville (act. quai Pierre-Brossolette). Poursuivant sa carrière militaire à l’école de Joinville, il est commissionné en septembre 1907, et obtient le grade d’adjudant, toujours comme instructeur de gymnastique. Il quitte l’armée active en novembre 1910.

En septembre 1908, en compagnie d’un autre (instructeur à l’école de gymnastique de Joinville, Antoine Poulitou, il devient vice-président de la Société Athlétique de Joinville, qui a à sa tête Albert Gallas, artisan mouleur en cuivre, également président du comité radical-socialiste de Joinville.

Au milieu des années 1900, le sergent-major Chauveau dirige les séances de gymnastique de l'Orphelinat de la Seine, installé à La Varenne, dans la commune de Saint-Maur-des-Fossés (Seine, act. Val-de-Marne). Il leur apprend à se développer physiquement par la gymnastique suédoise et les jeux en plein air. Son activité est mise en avant par la Ligue française pour l'hygiène scolaire à partir de 1909. Elle est présentée au troisième Congrès international d'hygiène scolaire, qui se tient à Paris en 1911 puis encore au congrès de l'éducation physique, encore à Paris en mars 1913.

L’adjudant Chauveau, en 1909, accompagne à Sucy-en-Brie (Seine-et-Oise, act. Val-de-Marne) La Laborieuse, société de gymnastique et d’instruction militaire.

Ayant quitté l’armée active, Chauveau est en 1910 l’entraîneur d’une société de préparation militaire, Le Jeune soldat. Il s’installe avec sa famille à Saint-Maur en 1911, dans le quartier de La Varenne-Saint-Hilaire, d’abord avenue Adam puis avenue du Bac, avant de rejoindre la rue de la République puis la rue Émile-Zola.

C’est probablement en janvier 1907 que Chauveau rejoint une loge affiliée au Grand-Orient de France, Les Philanthropes Réunis. Il y retrouve le secrétaire général de la mairie de Joinville, Eugène Doret. Sa participation à la franc-maçonnerie vaut à Chauveau plusieurs attaques dans la presse d’extrême-droite. En juin 1910, le quotidien Le Conservateur reproduit une affiche de l’Association antimaçonnique de France placardée à Paris (1er et 2e arr.) : « La Franc-Maçonnerie, Société secrète, dont toutes les décisions tous les actes, permettent de dire qu’elle est, en France, l'agent de l’Étranger, a créé, depuis quelques années, des écoles spéciales de préparation militaire, dans lesquelles ses adeptes essaient de s’emparer de l'esprit de nos jeunes gens. La Société qui a pour titre Le Jeune Soldat et qui a son siège 6, rue Louvois (2e arrondissement), est de celles-là. (…) Un de ses professeurs les plus assidus, M. Chauveau, adjudant à l'École de Gymnastique de Joinville le-Pont, est un f.*. »

Le quotidien antisémite La Libre parole publie son nom à deux reprises, en mai 1912 puis en avril 1914, mettant en avant ses activités auprès de l’orphelinat et des sociétés de préparation militaire. Un grand nombre de sous-officiers de Joinville, comme Paul André Giansilj ou Antoine Poulitou, sont également francs-maçons.

Au déclenchement de la première guerre mondiale, Léopold Chauveau est rappelé en août 1914 et affecté au 69e régiment d'infanterie. Il est promu officier, avec le grade de sous-lieutenant en octobre la même année puis devient lieutenant en octobre 1916. Il est démobilisé par le 46e régiment d'infanterie en décembre 1918. Dans la réserve, il accède en juillet 1922 au grade de capitaine.

Après la fin du conflit, Léopold Chauveau devient associé de la société Boulbain et Cie, qui pour objet l’exploitation par la fabrication et la vente d’appareils indicateurs de location pour de sièges de théâtre ou de chemins de fer. Elle est basée avenue Émile-Zola, à Saint-Maur, où il fixe son domicile.

Toujours professeur d’éducation physique, âgé de 53 ans, Léopold Chauveau meurt le 9 avril 1928 à Saint-Maur-des-Fossés. Il avait eu une fille, morte en bas âge, et un fils, enseignant à l’Éducation nationale après avoir été prisonnier pendant la deuxième guerre mondiale.

Entre 1894 et 1910, Léopold Chauveau avait reçu près de 25 récompenses et médailles pour ses activités sportives et associatives. Son rôle d’instructeur lui avait valu les Palmes académiques comme officier d'académie en mai 1908. Il avait été décoré de la Médaille militaire en décembre 1910. Il avait aussi été récompensé pour son rôle actif lors des graves inondations de la Marne au premier trimestre 1910.

École de gymnastique et d’escrime de Joinville (Arch. dép. Val-de-Marne)

 

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14 mai 2024 2 14 /05 /mai /2024 21:11

René Octave Diamin naît le 19 septembre 1900 Paris (14e arr.). Il est le fils de Claire Marguerite Léonide Leblanc, fille d’un fabricant de broderies et de son époux Charles Octave Diamin, alors libraire papetier, rue du Mont-Thabor (1er arr.). Il est issu d’une famille d’imprimeurs lyonnais. La mère de René meurt en octobre 1907, il a alors sept ans. Cette même année, il subit une fracture du fémur gauche qui le laissera ensuite handicapé. Son père se remariera ensuite à deux reprises et redevient imprimeur à Paris. La famille vit rue Beautreillis (4e arr.).

À l’âge de 18 ans, il est instituteur et épouse, en septembre 1919 à Paris (4e arr.) une institutrice et orpheline, Germaine Lucie Charlotte Arnal. Appelé pour faire son service militaire en mars 1920 au sein du 117e régiment d'infanterie, il est renvoyé dans ses foyers deux semaines plus tard, du fait de sa déformation du genou et de la hanche. Il est de nouveau convoqué en avril 1921, incorporé au 46e régiment d'infanterie puis, une fois encore, réformé pour cause de handicap après cinq semaines sous les drapeaux.

En 1920, M. Diamin rejoint l’école du Centre à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Son épouse rejoint l’autre établissement scolaire municipal, celui du quartier de Polangis, où ils vivent avenue du Parc.

S’impliquant dans la vie locale, Diamin devient secrétaire du nouveau club cycliste Joinville sportif en février 1922. Il devient trésorier en décembre 1925 et l’est toujours deux ans plus tard.  

Son engagement est aussi politique. Les deux formations de gauche traditionnelles n’ont plus de structure dans la commune de Joinville au début des années 1920 : la totalité des adhérents du Parti socialiste SFIO a rejoint le nouveau parti communiste, tandis que le comité radical-socialiste a cessé de fonctionner. La création le 15 décembre 1923 de la section de Joinville de la Ligue de la République marque la réapparition de la gauche non communiste. Diamin, qui est proche d’un autre des pionniers de la reconstitution de la SFIO, Léon Berthet, devient secrétaire général de l’organisation qui est présidée par René Caperon, syndicaliste CGT, responsable de la Ligue des droits de l’Homme et conseiller municipal de Joinville.

En mars 1924, la Ligue de la République laisse la place au cartel des gauches, présidé par le tapissier Georges Émile Briolay, radical-socialiste et futur maire de la ville. Diamin est de nouveau secrétaire de l’organisation qui, outre les radicaux et la SFIO, regroupe également des socialistes indépendants et le Parti socialiste-communiste.

En 1926, le couple Diamin vit dans la commune voisine de Champigny-sur-Marne, rue Edmond-Rostand. René Diamin, devient, en janvier 1927 le secrétaire de la section socialiste SFIO de Champigny ; il est aussi le responsable de l’Union des sections du canton de Nogent-sur-Marne. Son épouse adhère elle-aussi à la SFIO.

En 1928, les Diamin sont installés à Paris (20e arr.), dans le quartier Saint-Fargeau. Ils résident rue des Pyrénées tous deux rejoignent la section locale de la SFIO. René Diamin est membre de la commission administrative locale du parti en février 1931. Il est également devenu membre du Syndicat national des instituteurs publics en novembre 1928.

En collaboration avec des organismes mutualistes, la Caisse des écoles du 20e arrondissement a ouvert un établissement d’enseignement spécialisé à Montigny-sur-Loing (Seine-et-Marne). L’initiative en revient à Auguste Bénard (1865-1950), industriel, adjoint au maire du 20e arrondissement (1923-1935), chevalier de la Légion d’honneur. Baptisé Le Nid, il s’agit d’un internant qui accueille, pour 11 mois en internat, des enfants en mauvaise santé, notamment parce qu’ils vivent dans des conditions insalubres, et considérés comme en danger d’attraper la tuberculose.

Les époux Diamin deviennent directeurs de l’établissement. Ils sont en poste à Montigny en 1931, bien qu’ils conservent leur adresse parisienne, et y restent jusqu’en 1942. René Diamin est coopté en janvier 1931 au sein de l’association des Naturalistes de la vallée du Loing.

L’école du Nid, qui accueille 125 élèves dans des classes mixtes, avec un enseignement limité à deux heures par jour, plus de très nombreuses activités de jeu et de découverte sur le terrain. L’activité de René Diamin est évoquée dans de nombreux articles de presse. En juillet 1933, l’hebdomadaire local du 20e arrondissement, Paris-demain, salue « un couple d’éducateurs modernes. »

L’écrivain et journaliste Louis Roubaud publie, en septembre 1934, un long reportage dans Le Petit Parisien, où il reconnaît que son scepticisme originel a été vaincu, attribuant ce qu’il appelle « un petit coin de paradis » à « M. et Mme Diamin qui sont jeunes, simples et bons. »

L'Informateur de Seine-et-Marne évoque en février 1936 « les rares qualités d’éducateurs » du couple Diamin. L'Institut coopératif de l'école moderne (ICEM-Freinet) classe René Diamin parmi les pionniers de la pédagogie Freinet.

Les Diamin, y compris leur jeune fils, sont les témoins d’un accident lors d’une course automobile qui fait huit morts à Fontainebleau en mai 1934. Ils sont tous les trois légèrement blessés.

Pendant la deuxième guerre mondiale, à cause de ses problèmes physiques, René Diamin n’est pas mobilisé. Il est réformé à titre définitif en février 1940.

Le préfet de la Seine fait l’éloge, en novembre 1940, de son comportement pour avoir contribué à l’accueil à Montigny d’enfants évacués de la région parisienne après la défaite de l’armée française en juin 1940.

Il est probablement révoqué de son poste à l’école de plein air de Montigny-sur-Loing à l’été 1942. Son nom figure sur la liste des hauts gradés de la franc-maçonnerie, fustigés par les autorités du régime de Vichy, qui est publiée au Journal officiel en septembre 1942. La loi du 13 août 1940 interdit les « sociétés secrètes », y compris la franc-maçonnerie ; elle exige des fonctionnaires une déclaration d’appartenance ou de non-appartenance. Les francs-maçons sont exclus de la fonction publique.

Sa femme est signalée en octobre 1942 comme intervenant dans un site d’accueil d’enfants envoyés par le Secours national au château de Muides, en bordure du parc de Chambord, à Mer (Loir-et-Cher).

René Octave Diamin meurt le 29 février 1980 à Fontainebleau (Seine-et-Marne). Il était âgé de 79 ans et père d’un fils.

Son demi-frère, Roger Diamin (1914-1982), artisan électricien, fut un résistant à l’occupation allemande pendant la deuxième guerre mondiale, engagé dans les Forces françaises de l’intérieur (FFI).

Voir aussi Germaine Diamin, directrice d’une école de plein air

René Diamin (arch. fam.)

 

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8 décembre 2023 5 08 /12 /décembre /2023 00:01

Antoine Joseph Léon Bouise naît le 2 septembre 1872 à Honfleur (Calvados). Il est le fils d’Aline Ernestine Chouquet et de son époux Pierre Bouise, cordonnier et bottier. La famille s’installe ensuite au Havre (Seine-Inférieure, act. Seine-Maritime), rue de Bordeaux.

Devançant l’appel pour le service militaire, Antoine Bouise s’engage dans l’armée pour quatre ans en mars 1892. Il est affecté au 26e bataillon de chasseurs à pied. En septembre, il est nommé caporal. Il ne fera cependant qu’un an sous les drapeaux puisque, en avril 1893, il est démobilisé en tant que fils unique de veuve, son père étant décédé.

En 1898, Antoine Bouise est à Paris (17e arr.), dans le quartier des Batignolles, rue Nollet. Il est nommé en juin commis dans l’administration des ponts et chaussées. En août, il épouse une parisienne, Henriette Françoise Creyssels. Ils vivent en 1904 dans le 15e arrondissement, place du Commerce.

C’est en janvier 1904 que l’admission d’Antoine Bouise dans la franc-maçonnerie est acceptée. Il rejoint la loge L'École Mutuelle et l’Atelier Socialiste, affiliée au Grand-Orient de France, et qui se réunit à son siège, rue Cadet (9e arr.). Il sera mentionné dans la presse comme en faisant partie jusqu’en 1914.

La loge L'École Mutuelle est mentionnée en 1878 ; elle devient L'École Mutuelle et l’Atelier Socialiste en mai 1897. Quand Bouise la rejoint, elle a pour vénérable Pierre Morel, conseiller municipal de Paris. Elle organise, mi-mai 1904, comme elle l’avait fait plusieurs années précédentes, une Fête du travail dans la salle Wagram (17e arr.), « Pour la glorification du travail et l'affirmation des revendications sociales ». Un grand nombre d’autres loges s’associent à l’initiative, qui se conclut par un banquet et un bal. La presse rend fréquemment compte des activités de L'École Mutuelle et l’Atelier Socialiste. Elle prend des positions publiques, par exemple en publiant un ordre du jour en novembre 1904, critiquant me fait que certains députés francs-maçons n’aient pas voté en faveur de « l’épuration des fonctionnaires factieux », allusion à la situation dans l’armée du fait de l’affaire Dreyfus. On verra également les membres de la loge s’associer à des souscriptions lancées dans le quotidien socialiste L’Humanité, comme en juillet 1907 « pour les familles des camarades incarcérés pour leurs idées » ou en octobre 1909 en faveur de l’érection d’un monument pour la militante révolutionnaire et écrivaine Louise Michel.

Les travaux de la loge portent sur des thèmes sociaux, comme le syndicalisme (1909-1910), la crise sociale (avril 1911), les conditions d'application de la loi sur le repos hebdomadaire (juin 1911) ou la désertion des campagnes à la même date. Les questions économiques figurent à son agenda, avec la crise industrielle (juillet 1910), l'abrogation du privilège des propriétaires (avril 1912), l'administration coopérative (novembre 1912). La thématique de l’éducation est très présente, comme en juin 1910 (la crise d’apprentissage), en mars 1913 (instruction dans une démocratie) ou en juillet la même année (l'éducation dans une démocratie, au point de vue industriel, commercial, agricole et technique) puis en février 1914 (l’éducation sociale dans la profession et les relations de l’art et de la démocratie). Les questions philosophiques font partie des échanges, avec l'idée de solidarité dans Auguste Comte (juillet 1910), la morale (mai 1912), puis le mariage (mars 1914) et la morale laïque (avril 1914).

Une partie importante des tenues est consacrée aux questions militaires comme, en mai 1911, « Le leurre de l'armée indigène » et le droit de vote des militaires de carrière ou l’affaire Marix, traitée en janvier 1913, une histoire de concussion d’un capitaine d'artillerie rapporteur du conseil de guerre.

Probablement du fait de sa composition, les thèmes politiques semblent dominants. On voit la loge inscrire à ses échanges la décentralisation administrative et politique en juin 1910, la vie municipale à l'étranger en mars 1911, les partis politiques sous la République et le fonctionnement du parlementarisme en avril 1912, le bilan des 15 années de mandat au conseil municipal de Pierre Morel en décembre 1912 ou le danger que représenterait pour la République la représentation proportionnelle en décembre 1913 et encore le collectivisme en mai 1914. Juste avant la première guerre mondiale, la loge s’interroge sur « les journaux pour tous » en juillet 1914.

La participation d’Antoine Bouise fait qu’il est mentionné à plusieurs reprises par des publications antimaçonniques, à l’image du quotidien de Drumont, La Libre Parole.

Sur le plan professionnel, il est rattaché au service de la navigation de la Seine. Il quitte Paris pour s’installer à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), où la famille réside quai Moisson, sur les bords de Marne. Il est transféré au service de la navigation de la Marne en mai 1913, comme adjoint du chef de la division de Charenton-le-Pont. Il reste en poste pendant la première guerre mondiale. Il se qualifie de dessinateur lors du recensement de la population en 1921 puis devient architecte, disposant de ce titre en 1923.

En juillet 1923, Antoine Bouise est l’un des fondateurs et secrétaire adjoint du Club du chien de défense et de police de Saint-Maur. Il est présidé par René Stussi, natif de Constantinople (empire Ottoman, act. Istamboul, Turquie), résidant au Parc-Saint-Maur et également vice-président du club cycliste Joinville sportif. Des clubs comparables existent à Courbevoie, Sartrouville ou Eaubonne en région parisienne, ou en province à Lyon, Lille et Angers. Le vice-président du club est Julien Périn, adjoint au maire de Joinville, ancien militant socialiste avant-guerre.

Antoine Bouise meurt le 17 décembre 1928 à Paris (13e arr.) où il a été hospitalisé. Il était toujours domicilié à Joinville-le-Pont. Âgé de 56 ans et père de deux filles, dont une décédée en bas âge, il est inhumé à Ivry-sur-Seine et ne laisse pas d’actif successoral.

 

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30 août 2023 3 30 /08 /août /2023 01:01

Suite de la biographie d’Eugène Ramelet

Chef machiniste de l’Opéra-comique, Eugène Ramelet est mobilisé comme 150 autres salariés de l’institutions dès le début de la première guerre mondiale. Du fait de son âge, 42 ans à la mobilisation en août 1914, il aurait dû être affecté à la réserve de l’armée territoriale. Cependant, il se porte volontaire pour rejoindre, en tant que sous-officier, les troupes combattantes.

En septembre, il rejoint le bataillon de marche du 1er régiment de la légion étrangère. Il est nommé adjudant-chef en octobre puis promu officier, en novembre la même année, en tant que sous-lieutenant. Il est blessé gravement à Belloy (Oise) à la tête de sa section de mitrailleuses « qu’il avait installée dans les conditions les plus difficiles sur la position conquise ». Dans une citation à l’ordre de l’armée, il est qualifié comme « Officier de réserve ayant la plus haute conception du devoir. »

Devenu lieutenant en février 1918, il est remis à disposition de son institution d’origine, l’Opéra-comique, pour réaliser une mission aux États-Unis. Il embarque à Bordeaux sur La Lorraine pour rejoindre New-York en septembre. Il est invité à visiter le Metropolitan Opera House. La revue Musical America le présente comme « l'une des plus grandes autorités dans les coulisses de théâtre ». Il soutient l’idée que la scénographie de l'opéra présente une spécificité en fonction de chaque œuvre.

Démobilisé juste après l’armistice, le 13 novembre 1918, Eugène Ramelet est nommé directeur technique de l’Opéra-comique. Il dispose d’un entrepôt, boulevard Berthier (17e arr.).

Encore avec l’architecte Ferret, il collabore en 1923 à la réorganisation du Théâtre du Capitole à Toulouse (Haute-Garonne).

Sans lien direct avec son activité principale, Eugène Ramelet constitue en juillet 1922 avec un tailleur italien, Gaston Venditti, installé rue des Filles-Saint-Thomas (2e arr.), une société, dénommée Ramelet et Venditti, destinée à commercialiser des machines à coudre portatives. Les deux associés dissoudront leur entreprise en septembre 1925 et feront apport de son actif au fabricant des machines.

Ayant quitté l’Opéra-comique, Ramelet est en 1927 directeur technique du Théâtre Mogador, dans la rue éponyme à Paris (9e arr.). Le Figaro salue en avril cette même année à propos de Rose Marie (Otto Harbach) « La conception des décors, la machinerie font le plus grand honneur à l'habileté de M. Ramelet » tandis que Le Gaulois considère qu’il a « monté cette, œuvre de la façon la plus heureuse et la plus somptueuse en même temps ». Mais, quand il réalise Le Chant du Désert du même Harbach, en avril 1930, Le Figaro est plus critique : « On frémit, en lisant sur l'affiche qu'un M. Ramelet a apporté sa direction technique à ces déhanchements de l'ancien Rat Mort. Où la technicité va-t-elle se nicher ? »

Il retrouve la faveur du quotidien du matin parisien pour La Bataille de Claude Farrère à la Gaité-Lyrique en mars 1931, celui-ci saluant « La machinerie ingénieuse et pittoresque de l'excellent technicien, M. Ramelet », tandis que son confrère du soir, Le Temps, juge que « les décors de MM. Bertin et Ramelet font merveille. »

L’hebdomadaire Gringoire félicite Ramelet pour la machinerie de L'Auberge du Cheval-Blanc (Ralph Benatzky), que le Théâtre Mogador affiche en octobre 1932. En septembre1934, c’est pour La Vie Parisienne d’Offenbach que félicite comme ayant fourni un « luxe de présentation scénique », jugé « fort heureux » et ayant produit une mise en scène « extrêmement vivante ». Plusieurs autres journaux ont également des appréciations positives, comme Le Temps qui assure que décors et costumes « charment et éblouissent ». Quant à L’Ami du peuple, après avoir considéré que « Tout » la machinerie fonctionne à souhait », il conclut « bravo, Eugène Ramelet. »

Cette présentation du chef-d’œuvre d’Offenbach est la dernière dont on trouve la trace dans la presse comme attribuée à Ramelet. Il a alors 62 ans. Depuis 1933, il est domicilié à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), où il vit avec sa deuxième épouse, Marie Jeanne Albertine Euphrasie Leblanc, originaire de Haute-Marne. Ils s’étaient mariés en décembre 1925 à Paris (17e arr.) et l’associé de Ramelet, Eugène Ferret, était son témoin. Ils résident avenue d’Hill, une voie rebaptisée avenue de la Plage peu après leur installation, dans le quartier de Palissy.

Pendant la deuxième guerre mondiale, le gouvernement français de Vichy publie le nom d’Eugène Ramelet dans une « liste des dignitaires (hauts gradés et officiers de loge) de la franc-maçonnerie » dans l’objectif des les ostraciser. Curieusement, il y figure à deux reprises, à son adresse joinvillaise en tant que directeur technique de théâtre et à l’adresse de son entrepôt parisien sous le qualificatif de chef machiniste. Son grade (18e degré dans le rite écossais) est bien mentionné. Il est considéré comme membre de la loge Les Admirateurs de l'Univers, fondée au début du XIXe siècle.

Eugène Ramelet meurt le 26 juillet 1949 à Joinville-le-Pont. Il était âgé de 77 ans et vivait toujours dans le quartier de Palissy, avenue de la Plage. Il semble n’avoir eu qu’un enfant, une fille de sa première épouse, décédée en juin 1903 quelques jours après sa naissance.

Décoré des Palmes académiques en tant qu’officier d'académie en janvier 1905 puis officier de l’instruction publique en mars 1911, Eugène Ramelet avait obtenu la Croix de guerre en août 1916 et était chevalier de la Légion d’honneur depuis avril 1917.

Son neveu et homonyme, Eugène François Louis Ramelet (1903-1987), originaire du même village que son père (Séchin, Doubs), a été enregistré par le Service historique de la Défense dans un dossier administratif de résistant à l’occupation allemande pendant la deuxième guerre mondiale.

Fin

Eugène Ramelet en 1924 (Lectures pour tous)

 

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28 août 2023 1 28 /08 /août /2023 01:00

Début de la biographie d’Eugène Ramelet

Eugène François Marie Ramelet naît le 14 mars 1872 à Paris (11e arr.). Il est le fils de Salomé Bülher et de son époux Eugène Ramelet, gardien de la paix. Sa mère est d’origine alsacienne, sa famille ayant fui l’invasion allemande de 1870 tandis que son père est natif de Franche-Comté (Doubs). Ils vivent rue de la Folie-Méricourt.

Alors qu’il est étudiant et réside rue Pierre-Nys (11e arr.), Eugène Ramelet fils s’engage pour trois ans dans l’armée en mars 1890 à Paris (7e arr.). Il est affecté au 52e régiment d'infanterie. En octobre de cette année-là, il devient caporal. Nommé sous-officier, avec le grade de sergent, en juillet 1891, il finit son service militaire en mars 1893.

Devenu chef machiniste l'Opéra-Comique, théâtre lyrique de Paris (2e arr.), Eugène Ramelet est remarqué par la presse à l’occasion de la programmation de Grisélidis, de Jules Massenet en novembre 1901. Gil Blas commente « l’admirable organisation de la machinerie qui a opéré des prodiges », saluant le « jeune et distingué chef machiniste » grâce auquel le fonctionnement de la machinerie « a été absolument merveilleux ». Pour le quotidien parisien, « M. Eugène Ramelet s'est révélé hier comme un maître de machinerie de tout premier ordre ». Parmi d’autres journaux culturels, Le Gaulois qualifie Ramelet « d'habile chef machiniste » (janvier 1904) tandis que Comœdia le classe parmi « les trois mousquetaires qui ont la garde et le souci du plateau de l'Opéra-Comique, de ses frises et de ses dessous » (janvier 1909).

En juillet 1902, à Paris (3e arr.), Eugène Ramelet, qui vit alors rue Richelieu, épouse Hélène Blanche Chap, fleuriste. Ils s’installent dans le 2e arrondissement, rue d’Aboukir puis rue du Sentier. Ils divorceront en juillet 1914.

Secrétaire de l'Association des chefs machinistes en septembre 1909, reçoit avec une délégation de son organisation, le nouvellement créé syndicat des machinistes, affilié à la Confédération générale du travail (CGT). Il y adhérera. Il défend la revendication d’amélioration de leur situation matérielle, remarquant dans Comœdia que les députés viennent de s’octroyer 66% d’augmentation. Avec le soutien des autres chefs machinistes, L'Association des directeurs de théâtres de Paris signe un accord avec le syndicat.

Un an plus tard, à l’occasion d’une grève des machinistes en octobre 1910, Eugène Ramelet regrette son engagement syndical. Il s’en expliquera en mai 1912. Selon lui, « toute entente était impossible avec les révolutionnaires de la CGT » et il mettait en garde « contre les principes dissolvants des organisations révolutionnaires ». Il poursuit son engagement social en étant président en juillet 1912 de l'Œuvre de la maison de retraite du personnel du spectacle, qui installe une maison d’accueil en forêt de Montmorency à Saint-Brice (Seine-et-Oise, act. Val-d'Oise).

En juin 1911, Ramelet embarque vers Buenos-Aires. La traversée en bateau dure 21 jours. Il débarque en avant-garde afin de recevoir les décors envoyés de l'Opéra-Comique pour une tournée dans la capitale de l’Argentine. Il recrute une équipe italo-espagnole afin de disposer la scène de l'Opéra de Buenos-Aires et manier les décors. Prévue pour 36 représentations, la troupe, dirigée par Albert Wolff en fera 39, pour répondre à une très forte demande. Elle crée dans la ville Pelléas et Mélisande (Claude Debussy), puis présente Louise (Gustave Charpentier), La Reine Fiammette (Xavier Leroux), Le Roi d'Ys (Édouard Lalo), Le Mariage de Télémaque (Claude Terrasse), Fortunio (André Messager), Carmen (Georges Bizet), Manon, Griselidis, Le Jongleur de Notre-Dame, ainsi que Werther (Jules Massenet), Lakmé (Léo Delibes), Mignon et Caïd (Ambroise Thomas), et enfin, seule œuvre non française, Madame Butterfly (Giacomo Puccini). Les spectacles rencontrent un franc succès.

Toujours chef machiniste à l'Opéra-Comique, Eugène Ramelet crée en décembre 1910 avec deux ingénieurs, le constructeur Abel Pifre et l’architecte Eugène Ferret, une société anonyme appelée Constructions scéniques et théâtrales ; ils la dissolvent cependant, sans qu’elle ait eu d’activité, en mars 1911.

La collaboration de Ramelet avec Ferret va cependant se poursuivre, notamment pour l’aménagement du théâtre du Casino de Trouville (Calvados) en 1912. Il intervient également à Paris pour la Gaîté lyrique (3e arr.).

Lors du départ d’Albert Carré, directeur de l’Opéra-Comique, en janvier 1914, c’est Ramelet qui s’exprime au nom du personnel de l’établissement.

Plusieurs organismes opposés à la franc-maçonnerie signalent qu’il y est affilié depuis 1906. Au cours d’une cérémonie tenue au siège du Grand Orient de France, rue Cadet (9e arr.), il est initié au 18e degré selon le rite écossais, ce qui lui octroie le titre de « Souverain Prince Chevalier Rose-Croix ». La cérémonie était organisée par les loges Les Amis Bienfaisants et Les Vrais Amis Réunis.

À suivre

Symbole de la loge maçonnique Les Admirateurs de l'Univers

 

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19 juillet 2023 3 19 /07 /juillet /2023 01:01

Suite de la biographie de Louis Gourdel

Le commissaire de police Louis Gourdel, jusqu’ici affecté aux communes du département de la Seine, suivant le parcours habituel de la préfecture de police, est promu commissaire de police de la Ville de Paris en avril 1913. Il est chargé du quartier d'Amérique (19e arr.). il fait arrêter, en août cette même année, trois personnes qui collaient des affiches antimilitaristes sur un immeuble de la rue Bolivar, où il va résider quelques années plus tard.

Pendant la première guerre mondiale, comme tous les chefs policiers, il reste à son poste. Il met en état d’arrestation, en mai 1916, un consommateur qui, dans un débit de vin, tenait des propos antimilitaristes « ce qui lui avait valu une correction méritée de la part des consommateurs indignés » selon Le Petit Parisien.

Après-guerre, la police du 19e arrondissement continue de s’intéresser à l’extrême-gauche. En janvier 1921, il perquisitionne chez un certain Constantin Lebedeff, originaire de Russie, et présenté comme membre d’une organisation de communistes étrangers. En août 1923, il vise les milieux anarchistes ; il fait arrêter Marcelle Weill qui militait pour la libération de Louis Émile Cottin, auteur d’un attentat contre Georges Clemenceau en février 1919.

Devenu en août 1923 commissaire quartier du Mail à Paris (2e arr.), fait cette fois face à des militants d’extrême-droite, après avoir interpellé six camelots du roi collant des affiches « La République, c'est la banqueroute. »

Son quartier accueillant de nombreux journaux, Louis Gourdel va devoir intervenir dans une querelle très culturelle.

Le 24 avril 1926, Louis Aragon, jeune écrivain qui vient de rejoindre le très récent mouvement surréaliste, donne une conférence à la Résidence des Étudiants de Madrid. Le directeur de l’hebdomadaire Les Nouvelles Littéraires, Maurice Martin du Gard, rend compte brièvement de son intervention. Il rapporte que « dès la gare il voulut faire scandale, selon son habitude » puis assure que « notre surréaliste se vantait d'avoir été plusieurs fois arrêté pour un délit qui naît d'une déviation sentimentale. »

Un biographe d’Aragon, Philippe Forest, assure que c’est ce qui provoqua la colère des surréalistes. Il demande à Martin du Gard, littérateur lui aussi et cousin du romancier Roger Martin du Gard, de publier un démenti. Après avoir accepté, celui-ci se rétracte et indique à Aragon qu’il veut bien publier un droit de réponse de sa part, mais qu’il ne voit pas de quoi il devrait s’excuser.

Louis Aragon proteste d’abord, accompagné de l’essayiste Emmanuel Berl, puis décide de se rendre au siège des Nouvelles Littéraires, avec plusieurs de ses amis : les poètes Benjamin et Péret Philippe Soupault, l’écrivain et théoricien du surréalisme André Breton, ainsi que.

L’Humanité assure que « Aragon rejoignant Martin administra au personnage une belle volée, tandis que ses amis s'occupaient de personnages subalternes. La bataille devint vite générale, au grand dommage du mobilier ». Le Temps s’étonne de cette « irruption violente dans une rédaction », rapportant que Louis Aragon frappa Maurice Martin du Gard « à coups de nerf de bœuf » puis que lui et ses amis brisèrent un appareil téléphonique et une glace puis lancèrent une lampe dans la rue par la fenêtre. Le Siècle s’inquiète de ce que « La critique est en train de devenir l'un des métiers les plus périlleux » et commente : « on ne saurait admettre sans tristesse que la pensée soit ainsi soumise à la matraque. »

Appelée par les membres du personnel, la police emmène Aragon et ses compagnons devant Louis Gourdel au commissariat de police du quartier du Mail. Sur la plaine de Martin du Gard, il l’inculpe de coups et blessures et port d’arme prohibée, et ses amis de complicité. Le journal, relatant l’agression, parle d’un « odieux et grotesque attentat ». Il ne semble pas qu’il y ait eu de suites judiciaires, même si l’affaire fut instruite.

Dans son ouvrage posthume Les Mémorables, Maurice Martin du Gard avance une explication dépassant l’article incriminé. Selon lui, Jean Cocteau était haï des surréalistes, tandis que Les Nouvelles littéraires lui donnaient un accueil bienveillant. Ce serait « en représailles du soutien » apporté à Cocteau que, selon lui, Breton et Aragon auraient vandalisé les locaux de la revue. Le Figaro avait proposé une analyse plus politique : les surréalistes avaient des positions en faveur de la syndicaliste et anarchiste Germaine Berton, meurtrière de Marius Plateau, directeur de la Ligue d’Action française, ainsi que contre la guerre menée par la France au Maroc, publiant un pamphlet pour « se désolidariser publiquement de tout ce qui est français en paroles et en actions » - tandis que Martin du Gard « a toujours opposé une sage et souriante mesure aux folles entreprises. »

Louis Gourdel meurt le 8 juillet 1926 à Paris (19e) à son domicile de la rue Bolivar. Il était âgé de 53 ans et père d’une fille, artiste lyrique. Il avait été décoré en août 1910 d’une médaille d’or pour actes de courage et de dévouement, qui gratifiait son attitude lors des inondations séculaires de la Seine, lorsqu’il était commissaire de police à Choisy-le-Roi.

Sa disparition est évoquée par une dizaine de quotidiens parisiens qui soulignent qu’il est décédé subitement à son domicile. Le Soir le décrit ainsi : « très estimé de ses collègues. Magistrat intègre, il avait su s’attirer le respect de ses subordonnés. »

Fin

Louis Aragon, André Breton et Philippe Soupault avec Raymond Queneau

 

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17 juillet 2023 1 17 /07 /juillet /2023 01:01

Début de la biographie de Louis Gourdel

Louis Joseph Marie Gourdel naît le 25 février 1873 à Vitré (Ille-et-Vilaine). Il est le fils de Marie Joséphine Noël et de son époux Jean Marie Louis Gourdel, receveur des contributions indirectes à Châteaulin (Finistère).

Il fait des études de droit à Poitiers (Vienne), où sont installés ses parents. En 1893, il est exempté de service militaire pour obésité.

En 1901, il est à Paris (12e arr.), quai de Bercy, chez ses parents, son père ayant désormais un poste de receveur particulier des contributions indirectes. Louis Gourdel a été embauché par la préfecture de police et épouse en avril 1901 à Paris (5e arr.), Célestine Marie Mazaudier, fille de cultivateurs d’Ardèche.

Cette même année, Gourdel est mentionné, avec son titre de policier, comme membre d’une loge maçonnique du Grand-Orient de France. Dans plusieurs publications, notamment d’extrême-droite, entre 1905 et 1914, cette appartenance lui sera reprochée. Ainsi L'Autorité (1905/05/03), qui cite son nom, critique dans un article La magistrature maçonnique. « Quelle peut être l’indépendance d'un magistrat appelé à trancher un procès ou un différend, puisqu’il est lié par le serment maçonnique et tenu par la justice secrète des Loges ? »

Secrétaire du commissaire (son adjoint) de Montreuil (Seine, act. Seine-Saint-Denis), il est promu en février 1906 aux délégations judiciaires à Paris. Après avoir sans doute réussi le concours de commissaire de police, il est nommé en septembre 1908 inspecteur principal des gardiens de la paix.

Il obtient son premier poste de commissaire de police à Choisy-le-Roi (Seine, act. Val-de-Marne) en septembre 1908. Il doit gérer au début de l’année 1910 le débordement de la Seine, qui frappe particulièrement cette ville lors de la crue centenaire.

En septembre de cette même année, il fait face à des bagarres liées à un mouvement social. Venus de Paris, environ deux cents ouvriers manifestent pour contraindre une douzaine de terrassiers travaillant dans la commune de cesser le travail. Devant leur refus, selon Le Petit Parisien, ils « se ruèrent sur ces derniers, les criblèrent de coups et réussirent à les mettre en fuite. Une fois maîtres de la place, agissant en véritables vandales, ils se mirent à briser tout le matériel. »

Un sous-brigadier, venu avec une dizaine de policiers pour tenter de ramener le calme, est renversé, sa bicyclette étant mise en pièces. Avec l’appui des gendarmes, Gourdel fait arrêter quatre jeunes grévistes. Le quotidien Le Gaulois estime que « l'attaque des travailleurs avait été préméditée par la CGT dans le but de détacher les ouvriers des organisations syndicales non adhérentes à la confédération ». Selon ce journal, « La plupart des terrassiers des fouilles Morillon et Corvol appartiennent, en effet, à une nouvelle association ouvrière nommée la Liberté du Travail ». Il s’agit peut-être d’une structure adhérente à la Fédération syndicaliste des Jaunes de France, dirigée par Pierre Biétry, active pendant cette période.

En octobre 1910, le commissaire Gourdel est muté à Montreuil (Seine, act. Seine-Saint-Denis). Il y reste peu puisque, dès juin 1911, il est affecté à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne) où il succède à Charles Monsarrat. Le commissariat de Joinville, avec une trentaine d’agents, est un gros poste, couvrant des communes de grande taille comme Saint-Maur-des-Fossés, Champigny ou Nogent-sur-Marne. Outre ses fonctions policières, Gourdel est aussi désigné comme membre des conseils de justice de paix des deux cantons de sa circonscription, Nogent et Saint-Maur.

En décembre 1911, il dirige un vaste service d'ordre avec des gendarmes à cheval et des agents de police pour la manifestation nationaliste de la Ligue des Patriotes (extrême-droite), avec à sa tête le tribun Paul Déroulède, à l’occasion de l’anniversaire des sanglants combats de la bataille de Champigny, qui firent plusieurs milliers de morts lors de la guerre contre l’Allemagne du 30 novembre au 2 décembre 1870. Il n’y eut pas d’incident.

Le principal évènement de son passage dans la région pour le commissaire Gourdel fut la fin des deux derniers membres de la bande à Bonnot encore en vie, Octave Garnier et René Valet. Tous deux étaient à la fois des bandits, des militants anarchistes et vivaient, avant le début de leur cavale, en communauté.

Occupant un pavillon à Nogent-sur-Marne, rue du Viaduc, trois semaines après la mort de Bonnot, ils sont assiégés par 500 hommes, policiers et soldats, selon L’Humanité. Les quatre chefs de l’assaut sont le préfet de police Lépine, le chef de la Sûreté Guichard, le chef de la police parisienne Touny et Gourdel. Une intense fusillade se déroule, malgré la disproportion des forces. Dans les rues adjacentes une foule importante se masse. Les bandits sont abattus après que le bâtiment ait été détruit avec une bombe. Ce sont Louis Gourdel et un de ses inspecteurs joinvillais, Pierre Luntuéjoul, qui déclarent le 15 septembre la mort des deux malfaiteurs à la mairie de Nogent. Valet est déclaré comme mécanicien et Garnier en tant qu’ouvrier boulanger, avec comme adresse le lieu de leur décès à Nogent.

Bien que le bâtiment soit largement détruit, le commissaire Gourdel doit le faire garder pendant plusieurs jours, un défilé continu de curieux venant chercher des « souvenirs de la maison sanglante », d’après L’Intransigeant.

À suivre

La maison de Nogent-sur-Marne où furent tués Octave Garnier et René Valet, membres de la bande à Bonnot

 

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15 juillet 2023 6 15 /07 /juillet /2023 01:01

Suite de la biographie de Charles Monsarrat

Toujours en place fin 1920 comme commissaire spécial de police des Halles centrales, dont il a tenu la fonction pendant toute la durée de la première guerre mondiale, Charles Monsarrat est désormais une personnalité en vue : il accueille des visites de parlementaires, de délégués étrangers, par exemple de représentants de la municipalité de Moscou, de jeunes ou d’intellectuels.

Il poursuit son travail de médiation en matière sociale. Ainsi, il va transmettre en décembre 1921 au préfet de police une protestation du syndicat des ouvriers de la viande contre l'emploi des Jeunes gens au-dessous de 17 ans, dans les abattoirs de la Villette et de Vaugirard. En novembre 1928, il s’efforce de mettre fin à la grève des abattoirs, conduite par le syndicat communiste CGTU, en réunissant les patrons camionneurs, commissionnaires et débardeurs pour fixer les nouveaux prix de camionnage et de transport.

Outre ses fonctions quotidiennes, Monsarrat s’exprime sur le devenir du marché. Il convainc, en novembre 1920, le conseil de Paris de déplacer plusieurs équipements. Il s’exprime, en septembre 1921 dans Le Petit Journal, assurant qu’il faut « Réformer les Halles ». Il doute cependant que cela puisse se faire à l'emplacement qu’elles occupent alors, dans le cœur de Paris. Il est conscient des problèmes hygiéniques et sanitaires : « au pavillon de la viande, la marchandise s'accumule sur le sol ; au pavillon de la triperie, on n'ose y pénétrer sans revêtir, une blouse. Le carreau forain n'est même pas couvert ; les légumes sont déchargés sur les trottoirs, sur la chaussée même, parmi le crottin et autres immondices ! » Il aimerait un endroit desservi par voie d’eau et le réseau ferré. Il se félicite cependant d’avoir fait installer, le mois précédent, un entrepôt frigorifique. Il veut le départ du commerce de détail qui occupe alors une grande partie des pavillons. Mais il souligne aussi la nécessité de maintenir un contrôle sur les opérations des commerçants, le marché n’ayant pas encore, selon lui, retrouvé une production normale.

En décembre 1925, Le Journal, qui conclut par un long entretien avec lui une vaste enquête, le présente comme « le vice-roi des Halles » où ses fonctions lui ont valu sympathies et inimitiés. Le journaliste Germain Mandle assure qu’il est « actif et plus documenté qu'un bénédictin ». Il assure qu’il faut agrandir les Halles, de préférence en surface mais aussi en sous-sol.

Prenant sa retraite de la police en juillet 1930, Charles Monsarrat part avec le titre honorifique de commissaire divisionnaire.

Ayant poursuivi ses responsabilités associatives antérieures, il s’est laissé convaincre de participer à certains organismes caritatifs liés au marché des Halles. Il est ainsi Président d’honneur de l’œuvre des orphelins des forts des Halles rn 1927, de la Chanson au sanatorium, de l’association philanthropique La Butte libre de Montmartre et de la colonie de vacances Les P’tits Quinquins.

Sa fonction de président des Enfants de Gayant de Paris l’amène à mettre en place une colonie de vacances qui portera le nom de Charles Monsarrat. Les 25 ans de son mandat à la tête de cette institution son célébrés, avec un peu de retard en 1933 et les 30 ans en janvier 1939, la presse assurant qu’il s’agit d’une « belle œuvre. »

Après son départ de la police, il prend une activité professionnelle dans le secteur privé, comme inspecteur d’assurance en 1931 puis au sein d’une imprimerie en 1936.

Son engagement associatif va se renforcer durant la deuxième guerre mondiale. Il est le président de la Fédération des Retraités de la Seine en 1940 et devient délégué général de la fédération des retraités communaux, départementaux et hospitaliers de France en 1942.

N’ayant pas été mis en cause pour son comportement vis-à-vis des autorités d’occupation, il devient vice-président de la Confédération générale des retraités en 1946.

Charles Monsarrat meurt le 27 octobre 1947 à Paris (13e arr.) où il était hospitalisé. Il résidait toujours rue des Pyrénées où il était installé déjà en 1926. Âgé de 72 ans, il était père de trois enfants. C’est un médaillé de la Résistance, Émile Lerouge, qui déclare son décès.

Le commissaire Monsarrat était titulaire d’une douzaine de décorations. Trois récompensaient des actes de courage et de dévouement : une médaille de bronze en octobre 1902 pour la « capture périlleuse d’un fou furieux armé », une autre en mai 1907 pour la « capture dangereuse d’un meurtrier » puis une médaille de vermeil en août 1910 pour son comportement, en début d’année, lors des inondations séculaires de la Marne. Détenteur des Palmes académiques, en tant qu’officier d'académie en août 1908, il avait été fait officier de l’instruction publique en février 1930 pour « services rendus aux œuvres scolaires. »

Les croix de chevalier puis d’officier du Mérite agricole étaient venues saluer son activité aux Halles de Paris en août 1922 et en juillet 1930. Son travail de médiation entre employeurs et employés a été cause de l’attribution du titre de chevalier du Mérite social en 1928.

La Société française de secours aux blessés militaires (Croix-Rouge) lui avait remis une médaille d’or en mai 1926 pour son assistance aux soldats et réfugiés du département du Nord au cours de la première guerre mondiale.

Enfin, sur proposition du ministre de l’agriculture, Charles Monsarrat était devenu chevalier de la Légion d’honneur en juillet 1928, notamment pour avoir « concouru à l’étude des questions relatives au renchérissement de la vie et s’est acquitté de ses délicates fonctions avec autant d’activité que de tact et d’autorité ». C’est au titre du ministère de la santé publique et de la population qu’il était devenu officier de la Légion d’honneur en juillet 1947, trois mois avant sa disparition. Ce sont notamment les secours aux soldats, prisonniers de guerre et réfugiés, ainsi que son activité en faveur des enfants, qui étaient alors récompensés.

La ville de Douai a donné à une de ses voies le nom de « rue Charles Monsarrat ». D’une longueur de 230 mètres, elle relie la rue du Quatre-septembre (où ses parents ont vécu) à la rue Émile-Morlaix ainsi qu’au boulevard Delebecque. Elle dessert le parc Charles-Bertin et abrite notamment un établissement, hébergeant l’Association des centres sociaux de Douai et le Centre social Gayant. La plaque de rue porte la mention « bienfaiteur de la ville, fondateur des Enfants de Gayant de Paris (1874-1947). »

Fin

Plaque de la rue Charles Monsarrat à Douai

 

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13 juillet 2023 4 13 /07 /juillet /2023 01:01

Suite de la biographie de Charles Monsarrat

En juin 1911, Charles Monsarrat est promu commissaire de police de la Ville de Paris et chargé du quartier de la Monnaie (6e arr.). Il laisse la place de Joinville-le-Pont à Louis Gourdel, venu de Montreuil. En janvier 1913, il est transféré à Belleville (20e arr.). En mai, il arrête rue de Ménilmontant, Gabriel Bonton, dit Gaby, âgé de vingt-huit ans, accusé d’avoir frappé à coups de canne plombée un agent de police lors d’une manifestation faubourg du Temple, le soir du 1er mai. Il est considéré comme liés aux milieux anarchistes des quartiers de Belleville et Ménilmontant. Des brochures révolutionnaires et antimilitaristes sont découvertes chez lui, ainsi que sa canne plombée et deux couteaux-poignards.

Alors qu’il n’était jamais resté très longtemps dans ses postes précédents, le record étant de 30 mois à Joinville, Monsarrat va obtenir, en janvier 1914 une affectation où il va s’installer durablement : celle de commissaire de police spécial des Halles centrales de Paris. Il est chargé des marchés d’approvisionnement de la Ville de Paris, mais aussi des abattoirs de La Villette et de Vaugirard. Il publie, dans le cadre du VIe congrès des pêches maritimes, qui se tient à Tunis en mars 1914, un article sur Le Marché du poisson à Paris.

Sa fonction aux Halles sera primordiale pendant la première guerre mondiale mais aussi à son issue, alors que l’alimentation de la capitale est compliquée par les combats, les destructions et les pénuries.

En 1909, alors qu’il dirigeait le commissariat de Pantin, Charles Monsarrat créa une association, dont il restera le président jusqu’à sa disparition, Les Enfants de Gayant de Paris. Les personnages de la famille Gayant sont des symboles de la ville de Douai depuis le 16e siècle. Chaque année, en juillet, des mannequins géants (signification du mot de gayant dans le parler artésien), sont transportés dans la ville, symbolisant sa défense contre les attaques dont elle a été victime. Le terme Enfants de Gayant désigne les habitants du territoire, et un square de la commune porte ce nom. La société amicale et philanthropique fondée par Monsarrat organise notamment un banquet et un bal annuels, généralement en novembre, pour financer ses activités. Elle apporte ses services aux originaires de cet arrondissement du département du Nord.

Pendant la première guerre mondiale, l’association va avoir une importante action humanitaire. Douai et ses environs sont occupés par l’armée allemande en octobre 1914. C’est toujours le cas en septembre 1918, quand toute la population restante est évacuée vers la Belgique puis que le centre-ville est pillé et incendié, notamment la place d’Armes où avait vécu la famille Monsarrat. Les Enfants de Gayant de Paris apportent 80 000 francs de secours en nature aux soldats du front ou prisonniers de guerre et procurent plusieurs centaines d’emplois aux réfugiés.

Peu avant l’armistice, le 4 novembre 1918, Monsarrat fait adopter, au siège social, rue de Richelieu à Paris, le vœu suivant : « Que les Allemands soient tenus de réparer Intégralement tous les dommages causés et que tous les crimes commis soient justement châtiés en la personne de leurs auteurs responsables ; Qu'avant toute conclusion d’un armistice l’ennemi sait tenu de rapatrier, dans des conditions de transport humaines et convenables, toutes les populations évacuées par la force et emmenées en esclavage ; Que non seulement l'Allemagne soit tenue de rendre matériel pour matériel, outil pour outil, mais soit astreinte à fournir la main-d’œuvre nécessaire à la reconstruction des usines et des immeubles détruits. »

Après l’arrêt des combats, il appelle les originaires de Douai à participer à la manifestation patriotique en l’honneur de l’Alsace-Lorraine organisée place des Ternes à Paris le dimanche 17 novembre.

Dans son activité de surveillance du marché des Halles, Monsarrat a mis en place, le 7 août 1914, soit moins d’une semaine après le début de la guerre, une commission comprenant des marchands de bestiaux, des bouchers, tripiers et charcutiers ainsi qu’un représentant du syndicat des travailleurs des Halles. Il la réunit chaque semaine pour fixer les prix maximums pour les viandes. En octobre 1915, il étend la détermination d’un prix-plafond à toutes les marchandises vendues aux Halles.

Une fois la guerre terminée, Monsarrat doit intervenir pour calmer les affrontements entre les commerçants et groupements de consommateurs. Lors d’une manifestation en août 1919, organisée par les crémiers qui refusaient de vendre leur marchandise moins cher qu'ils ne l'avaient achetée, un journaliste est molesté. Monsarrat se fit d'abord conspuer, puis applaudir quelques instants après, lorsqu'il proposa de soumettre les doléances des mécontents au préfet de police. 100 gardes républicains et 50 agents étaient venus renforcer l’effectif du commissariat. Mais les blocages et incidents conduisirent à la perte de beaucoup de produits, que la chaleur empêchait de conserver. Monsarrat fait arrêter plusieurs spéculateurs sur le marché aux veaux.

En septembre, ce sont les employés des Halles qui expriment leur mécontentement. Au cours d'une réunion syndicale, ils demandent au commissaire Monsarrat d'intervenir pour éviter d’avoir à se mettre en grève.

C’est de nouveau lui que, en janvier 1920, les ouvriers des abattoirs de la Villette et de Vaugirard, en grève, proposent comme arbitre. Il organise et préside la commission d’arbitrage, ce qui permet la reprise du travail.

En mars la même année, il provoque une réunion des bouchers et des tripiers pour traiter du prix des abats qui connaît une hausse « fantastique » selon L’Écho de Paris. Monsarrat l’attribue à la surenchère de centres de production de province pour avoir le monopole de ces ventes. Le commissaire assure que « Ces pratiques, non seulement il les condamne, mais il est résolu à poursuivre, sans pitié, ces spéculateurs. »

À suivre

Charles Monsarrat, commissaire de police en 1907

 

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11 juillet 2023 2 11 /07 /juillet /2023 01:01

Début de la biographie de Charles Monsarrat

Charles Jules Oscar Monsarrat naît le 21 décembre 1874 à Douai (Nord). Il est le fils de Philomène Marie Joseph Ponce et de son époux Étienne Louis Monsarrat, cordier. Ils résident place d’Armes. Sa sœur jumelle, Rosa Julia Philomène, meurt six mois plus tard. Son père (1836-1928) a été président d’honneur des anciens combattants de 1870-1871 dans son département et chevalier de la Légion d’honneur. Le frère aîné de Charles, Jules Monsarrat (1870-1934), docteur vétérinaire, sera officier de la Légion d’honneur.

Après avoir obtenu son baccalauréat, Charles Monsarrat s’engage dans l’armée pour quatre ans en mars 1895. Il est envoyé en Algérie, servant dans le 1er régiment de zouaves et y reste pendant toute la durée de son contrat. Il devient caporal en mai 1896 puis sergent en mars 1898.

Revenu à la vie civile, il épouse à Lille en mars 1900 Gabrielle Aimée Félicie Adèle Vandrisse. Le couple s’installe d’abord à Paris, rue Papillon (9e arr.). Embauché par la préfecture de police du département de la Seine, il est secrétaire de commissariat, adjoint du commissaire.

En mai 1900, il est affecté au commissariat de police d’Ivry-sur-Seine (Seine, act. Val-de-Marne). Il désarme en août 1902, un « étudiant en médecine, parent d'un des plus grands artistes peintres du siècle », selon Le Matin, qui menaçait les passants avec plusieurs armes et qu’on estima victime du surmenage avant de l’hospitaliser à la demande de sa famille. Il est ensuite en poste à Boulogne (Seine, act. Hauts-de-Seine) puis nommé à Paris au quartier de la Roquette. Il occupe ce poste lorsqu’il est le premier reçu, en juin 1905, au concours annuel pour le grade de commissaire de police ou d’officier de paix. Il est nommé inspecteur principal des gardiens de la paix du sixième arrondissement.

Lors des grandes manifestations parisiennes pour le 1er mai 1906, Monsarrat dirige le service d’ordre fixe qui protège l'Institut de France, l'école des beaux-arts, l'école de médecine, ainsi que les patrouilles cyclistes, chargées de la surveillance des imprimeries.

Promu commissaire de police des communes de la Seine, c’est dans à nouveau à Ivry qu’il est nommé pour la première fois en janvier 1907. Il prend la succession de Gustave Pichenot, qui s'est suicidé. Il doit gérer, en août cette année-là, la disparition d’une enfant, dont la famille craint qu’elle ait été violée et assassinée ; elle sera retrouvée et le responsable du rapt arrêté. Plusieurs articles dans la presse relatent les recherches conduites par le commissaire.

Nommé en septembre 1908 à Pantin (Seine, act. Seine-Saint-Denis), Monsarrat va y passer un peu plus d’une année jusqu’en décembre 1909.

Charles Monsarrat rejoint le poste de Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), commissariat important avec une trentaine d’agents, dont la circonscription comprend des villes comme Saint-Maur-des-Fossés, Champigny-sur-Marne et Nogent-sur-Marne. Il est identifié en tant que franc-maçon par le Bulletin hebdomadaire des groupes du Grand-Orient de France, mentionnant une adresse à Paris, rue de Charenton (12e arr.) et sa fonction à Joinville. Il résidera dans cette ville route de la Brie (act. avenue Galliéni).

Dès sa nomination, la rivière qui arrose toutes les communes de sa circonscription, la Marne, connaît une crue séculaire. Champigny est une des localités les plus éprouvées, avec une superficie d'environ 300 hectares complètement submergée. Monsarrat organise un service de bacs pour évacuer les habitants en danger et les faire héberger dans des hôtels de la commune. Avec le début de la décrue, en février 1910, il faut prendre de « rigoureuses mesures d'hygiène » pour éviter la propagation de maladies, et la presse remarque que M. Monsarrat, son secrétaire et de tout son personnel font preuve d’un « inlassable dévouement », n’ayant pas pris un seul moment de repos depuis le début de la crue.

En même temps que la lutte contre les inondations, le territoire doit faire face à un profond conflit social : la grève des métallurgistes de l’usine du Bi-Métal, qui dure trois mois, est soutenue par plusieurs autres groupes d’ouvriers de la Canalisation électrique, à Saint-Maurice, ou Leclère de Montreuil et conduite par la Confédération générale du travail (CGT). Des bagarres se produisent quand les propriétaires de l’usine tentent de faire remplacer les ouvriers qui ont arrêté le travail par des « nettoyeurs », qui doivent également dégager les installations qui ont été recouvertes de boues par la montée des eaux. Une centaine de grévistes conspuent et frappent la vingtaine de « jaunes », tandis que les agents qui viennent s’interposer sont accueillis avec des coups de revolver. Six des meneurs du mouvement sont arrêtés, dont le secrétaire du syndicat, Ingweiller, porteur d’une arme. Cependant, la troupe commandée par Monsarrat ne fit pas feu.

Le comportement du commissaire n’est pas apprécié par les grévistes. Le 20 mars 1910, lors d’une réunion publique tenue dans la commune voisine de Saint-Maurice, ils adoptent la motion suivante : « À Sa Majesté le commissaire de police. Depuis quelques années, de même qu'un empereur vous commandez en chef. Non content de cette quasi-majesté, vous vouliez nous faire subir le régime de votre bon plaisir ; vous vous êtes trompé, nous ne sommes pas vos esclaves, soyez-en persuadé, en prenant connaissance de l'ordre du jour suivant : Les compagnons révolutionnaires de Saint-Maurice protestent contre les brutalités du tyran, chef de la police de Joinville, cherchant par tous les moyens à faire un nouveau Villeneuve, et préviennent tous les exploiteurs que les camarades sont prêts à descendre dans la rue ». Les syndicalistes font référence à la répression du mouvement social des cheminots de Villeneuve-Saint-Georges (Seine-et-Oise, act. Val-de-Marne), qui fit quatre morts le 30 juillet 1908 et 200 blessés parmi les ouvriers, ainsi que 69 blessés dans les forces de l'ordre.

Une demi-douzaine des remplaçants sont arrêtés par Monsarrat pour avoir volé des matériaux dans l’établissement, et l’usine finit par renoncer à briser la grève. Les personnes arrêtées sont condamnées à des peines modérées de quelques jours de prison avec sursis, à l’exception du responsable de la CGT, condamné à six mois fermes. Le quotidien L’Humanité considéra que l'affaire des grévistes du Bi-Métal avait été « machinée dans les conditions scandaleuses que nous avons déjà signalées, par le commissaire de police Monsarrat », qui aurait été « d'accord avec les patrons ». Le journal socialiste en veut la preuve dans la comparution d’un des témoins cités par l'accusation, Lucien Achille Zo qui assura que s’il avait fait une déposition utilisée contre les accusés, c'était « qu'il y avait été forcé par le commissaire de police. »

En octobre 1910, une délégation de la société des vétérans du Wurtemberg (Allemagne) vient inaugurer, à Champigny un monument aux morts, commémorant les pertes lors de la très meurtrière bataille qui eut lieu en novembre et décembre 1870. Compte tenu du contexte nationaliste dans ce haut lieu du souvenir de la défaite française, un service d'ordre très important fut mis en place par le commissaire Monsarrat. Il n’y eut pas d’incident, et une couronne fut déposée avec l'inscription « Les vétérans wurtembergeois à leurs camarades français. »

Le même mois d’octobre 1910, les forces du commissariat de Joinville sont de nouveau mobilisées pour un mouvement social. Deux cents maçons grévistes armés de matraques ont parcouru les communes de Champigny et Saint-Maur cherchant à débaucher les ouvriers qui travaillaient dans les chantiers. Dans cette dernière ville, quai de la Varenne, apercevant trois « renards », ils leur donnèrent l’ordre de cesser immédiatement le travail. Deux des ouvriers obéirent, mais comme le troisième se faisait prier, les grévistes se saisirent de lui et le frappèrent à coups de pied et de poing. Monsarrat avait obtenu le renfort d’un peloton de dragons, et, après une bagarre en arrêta trois pour entrave à la liberté du travail, rébellion et insultes aux agents.

À suivre

Charles Monsarrat, commissaire de police en 1907 (à gauche)

 

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