Pierre Joseph Germain Lucien Régneron naît le 3 janvier 1912 à Pont-sur-Yonne (Yonne). Il est le fils de Germaine Paule Clémence Pierre et de son époux, Lucien Alexandre Antoine Régneron, employé de chemin de fer.
Pierre Joseph Régneron est ordonné en tant que prêtre catholique du diocèse de Paris en 1938. Il est nommé en juillet vicaire de la paroisse Saint-Joseph des Quatre-Routes, à Asnières (Seine, act. Hauts-de-Seine).
L’année suivante, en juillet 1939, l’abbé Régneron devient vicaire de la paroisse Saint-Charles-Borromée à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Le curé est l’abbé Augustin Baudot. En octobre 1953, il représente sa paroisse à la cérémonie d’installation du nouveau curé de Sainte-Anne de Polangis, l’autre paroisse de la commune, l’abbé Jean Lamour. Le prélat installateur est le chanoine Jacques Hollande, ancien curé de la paroisse de Polangis, et alors supérieur des prêtres ouvriers de la Mission de Paris.
En décembre 1953, l’abbé Régneron célèbre une messe pour le maréchal Leclerc à la demande du Rassemblement du peuple français (RPF, gaulliste), en l’absence du curé, toujours l’abbé Baudot, malade.
Pierre Joseph Régneron meurt le 19 novembre 2006 à Paris (14e arr.). Il était âgé de 94 ans.
Ayant fermé en 1931 son cabinet de Champigny-sur-Marne pour en ouvrir un à Paris (10e arr.), rue de la Grange-aux-Belles, le docteur Harry Kaganoff va se spécialiser en gynécologie, et notamment dans les accouchements. Il déplacera son activité dans le 17e arrondissement, boulevard Malesherbes en 1937 et s’associera à la création d’une clinique médicale, chirurgicale et obstétricale rue Geoffroy-Saint-Hilaire dont il est, à parité avec M. Alphonse Barroso-Rebello, le premier porteur de parts.
Parallèlement à son activité libérale, le docteur Kaganoff intervient dans des établissements visant en particulier la population juive pauvre, en particulier immigrée. C’est le cas, à partir de 1931 du dispensaire Linas-Hatzédek à Belleville et de la clinique W. Tiomkine rue du Buisson-Saint-Louis (11e arr.) en 1933. Le Dr Kaganoff précise que cette institution accueille plus de 50 malades par jour et que Juifs et non-Juifs du quartier en bénéficient. Dans sa spécialité, il participe également en 1937 au dispensaire La Mère et l’Enfant, situé rue Amelot (11e arr.). Le docteur poursuit également son activité de conférencier, avec en décembre 1931, une intervention à Pavillons-sous-Bois (Seine, act. Seine-Saint-Denis) pour soutenir la vaccination antituberculeuse. Il contribue également régulièrement aux collectes effectuées par les instances communautaires juives.
L’activité publique de Kaganoff va prendre une dimension sioniste, en appui à l’installation des Juifs dans la Palestine mandataire et au lien de leur communauté avec les Juifs de France.
En 1929, le Dr Kaganoff devient un cadre du Sporting-Club Maccabi, établissement sportif international qui dispose d’une section française. Lors d’une manifestation du club en mars 1931, il explique : « Le peuple juif était devenu un peuple cérébral. Mais avec le cerveau on ne peut pas construire des routes, labourer la terre, il faut des muscles. Le Maccabi prépare ce type juif, sain de corps et d’esprit, qui s’est si bien développé en Palestine. »
Lors d’un autre évènement en mai 1933, à laquelle participait lord Melchett, président d’honneur de l’Union mondiale Maccabi, ainsi que l’ancien ministre Henry Paté, le Dr Kaganoff précisa ses conceptions. Pour lui, il y avait « nécessité, pour les nouvelles générations, de se développer physiquement, surtout dans les pays où les Juifs sont constamment menacés ». Parlant de de la France, il souligna son rôle dans la défense des juifs persécutés. Pour lui, se référant à son expérience personnelle, « Si la France, dit-il, était à nouveau menacée, la jeunesse juive immigrée n’hésiterait pas à imiter ceux qui, en 1914, sont allés aux Invalides s’engager dans l’armée française. »
C’est dans les locaux du Maccabi France que le Dr. Kaganoff, président, rend compte en juin 1934 de son voyage en « Eretz-Israël ». Il décrit Jaffa « ville essentiellement arabe », Sarona, « village allemand » (au sens de peuplé de Juifs allemands), et Tel-Aviv, dont « l’aspect général est celui d’une cité américaine », dont il regrette qu’elle soit construite en béton armé et estime qu’il « faudra un jour [la] balayer et reconstruire sans hâte ». Selon Harry Kaganoff, « Pour retrouver le style juif, il faut aller à Jérusalem, la ville conservatrice par excellence ». Commentant la situation générale, il estime, dans le compte-rendu qu’en fait L'Univers israélite, que « Le travail ! c’est la raison d’être des Juifs palestiniens. Et l’on travaille moins pour s’enrichir que pour servir le pays. Rendre la Palestine capable de recevoir des milliers de frères, c’est là leur rêve. »
Harry Kaganoff embarque une nouvelle fois en mars 1935 de Marseille pour la Palestine. Il assiste à la deuxième Maccabia, évènement sportif qu’il compare à des Jeux olympiques juifs. Il est réélu président du club français en novembre.
La Conférence palestinienne de France se tient en octobre 1936, dans les Salons de l'Hôtel Lutétia à Paris. Elle rassemble 150 délégués des associations juives de Paris et de province. Elle donne naissance à un comité dénommé Vaad Bitzaron Oubitahon, pour faire campagne pour la sécurité du peuple juif après les attentats dans le territoire sous contrôle britannique. Le Dr Kaganoff en est membre. Il est l’un des fondateurs, en mai 1937, encore à Paris, de l’Association des sionistes traditionalistes Mizrahi et l’un des membres de son comité ; le mouvement assure qu’il continue « la tradition française de libéralisme et de foi. »
En janvier 1939 fait l’historique du travail de reconstruction en Palestine devant le Cercle amical féminin propalestinien, rendant hommage notamment aux premiers colons, des intellectuels ayant fui les pogromes russes.
Sur le plan professionnel, le docteur Harry Kaganoff fait face, en mars 1939 à une mise en cause qui lui vaut d’être arrêté pour « manœuvres criminelles abortives » en compagnie d’une sage-femme, propriétaire d'une clinique d'accouchement rue de Chabrol à Paris (10e arr.). ayant choisi Me Etienne Nouveau comme défenseur, il « proteste de sa parfaite correction » et indique que ses interventions ont toujours été faites sur des femmes qui présentaient un commencement de fausse-couche et qu’elles étaient motivées dans l'intérêt de la santé des patientes pour éviter un accident.
L’hebdomadaire d’extrême-droite Le Défi, dirigé par l’avocat antisémite Jean Charles Legrand, créateur du Front de la jeunesse, même campagne contre « la vaste entreprise des médecins étrangers, Juifs et Allemands, montée pour estropier et mutiler les femmes françaises ». Il se réjouit de l’incarcération, commentant l'enquête qui aurait établi « les crimes commis par ce Kaganoff contre notre race. »
L’affaire ne semble pas avoir de suites, et, en 1955, le casier judiciaire de Kaganoff est vierge de toute condamnation. C’est cependant cette même année que Harry Kaganoff est inscrit au Fichier central de la Sûreté nationale, qui recense des personnes dont l’activité publique, notamment politique, est sous surveillance.
La situation de Harry Kaganoff pendant la deuxième guerre mondiale et l’occupation allemande n’est pas connue. Ni lui ni sa famille directe ne sont victimes du conflit et sa mère, comme ses sœurs et son frère ou sont épouse survivent aux persécutions antisémites. Par contre, plusieurs membres de la famille de sa femme meurent en déportation.
Après le conflit, le docteur Kaganoff poursuit son activité, d’abord à Paris (7e arr.), avenue Duquesne, puis dans le 17e arrondissement, avenue du Colonel-Moll.
Son engagement public se concentre désormais sur la vie de deux organisations de soldats : l’Association des anciens combattants engagés volontaires juifs dont il a été un des fondateur et vice-président depuis 1919 puis président en 1947. Et l’association des anciens combattants volontaires juifs, à la vice-présidence de laquelle il accède en 1946. Il ouvre le sociétariat de ces mouvements aux combattants du deuxième conflit mondial.
En juin 1935, Kaganoff était déjà intervenu, au nom des combattants Juifs palestiniens, lors de la Conférence mondiale des anciens combattants Juifs, qui avait réuni à Paris, dans l’amphithéâtre de La Sorbonne les représentants de quinze nations.
Il préside, en juin 1964, la manifestation du souvenir organisée au cimetière de Bagneux (Seine, act. Hauts-de-Seine) rendant hommage aux « martyrs morts pour la France, pour la liberté » et souhaitant « Shalom » à tous les pays, ajoutant « et surtout à Israël qui en a tant besoin. »
Une de ses dernières interventions publiques est l’inauguration, en janvier 1965, à Levens (Alpes-de-Haute-Provence) de la Maison de repos et de convalescence des anciens combattants.
Harry Kaganoff meurt le 9 septembre 1967 à Paris (17e arr.), dans son domicile de la rue du Colonel-Moll. Il était âgé de 74 ans et ne semble pas avoir eu d’enfant.
Fin
Portrait de Harry Kaganoff (Notre volonté, 06/1964)
Harry Hirsch Kaganoff-Kagan naît le 2 juin 1893 à Mstislawe, ville alors en Russie (act. Biélorussie). Il est d’origine juive, fils de Rebecca Ratner et de son époux Joseph Kaganoff-Kagan. Selon le recensement de l'Empire russe de 1897, la ville comptait 49% de Juifs ; il y en avait toujours 20% lors du recensement soviétique de 1939. Tous ceux qui résidaient encore dans la ville, soit entre 850 à 1 300, sont assassinés le 15 octobre 1941 par les forces allemandes dans le cadre de la « Shoah par balles. »
La famille Kaganoff quitte Mstislawe, deux sœurs de Harry voyant le jour en 1907 et 1910 à Zaporijia (Russie, act. Ukraine).
La situation sociale de la famille n’est pas connue. Elle est cependant probablement confortable. En 1916, Harry Kaganoff fait des études de médecine à Bordeaux (Gironde). Il s’engage volontairement, en juillet, dans la légion étrangère pour la durée de la première guerre mondiale et sert donc avec les troupes françaises. Il est nommé en novembre 1917 médecin sous-aide-major (sous-officier, grade équivalent à celui d’adjudant-chef). Promu officier en septembre 1918, comme médecin aide-major de deuxième classe (sous-lieutenant), il est affecté au 172 régiment d'infanterie. Au cours des combats, qui lui valent deux citations, il est blessé au front par un « petit projectile ». Il obtiendra en février 1920 une première pension chiffrée à 20%, doublée en janvier 1922, sa brèche osseuse entraînant une « baisse de l’aptitude au travail et à la mémoire. »
Après la fin du conflit, Harry Kaganoff reprend ses études médicales à Bordeaux. Il présente en novembre 1919, avec deux collègues, MM. Rocher et Lescalle, le cas de cinq blessés guéris de pseudarthrose par la méthode de Delagénière, c’est-à-dire par greffons ostéopériostiques tibiaux. Adhérent à la Société anatomoclinique de Bordeaux en décembre 1919, il exerce à Orléans (Loiret) en janvier 1922, date à laquelle il est naturalisé français par décret.
Il soutient sa thèse à la faculté de médecine bordelaise en avril 1924. Devenu docteur, Harry Kaganoff exerce comme médecin dans l’Orne, installé en août la même année dans la commune de Le Sap, où il signale à la justice le meurtre d’une cultivatrice du village voisin d’Orville.
Rejoignant la région parisienne, Harry Kaganoff ouvre un cabinet à Champigny-sur-Marne (Seine, act. Val-de-Marne). Il est installé rue Mignon avec sa mère, un frère et deux sœurs. En plus de son activité médicale, Kaganoff prend des responsabilités civiques. Depuis 1919, il est vice-président de l’Association des anciens combattants engagés volontaires juifs. Il assure, à titre honorifique, le même rôle dans le Vélo-club de Champigny en décembre 1927.
En novembre 1926, des juifs ayant quitté l’empire russe suite à la révolution bolchévique, constituent une association cultuelle, considérant que leurs besoins ne sont pas couverts par les institutions dépendant du Consistoire israélite de Paris, pour des raisons de langue et d’usages. Baptisée Ohel Jacob, elle finance notamment la création d’écoles à Paris et dans quelques villes de banlieue. Les israélites de Joinville et de Champigny se regroupent pour former une école (Talmud Tora), située à Champigny, route de Villiers, mais fréquentée par une majorité de joinvillais. Elle est financée par l’association Ohel Jacob et le docteur Kaganoff en est le président en 1928.
En 1929, on compte 9 écoles du réseau Ohel Jacob ; 3 sont situées à Paris et comptent 250 élèves. Les 9 de banlieue totalisent et celle de Joinville Champigny est la plus importante, avec 45 élèves.
Tout en maintenant ses cours, l’union israélite locale change de dénomination et de caractère en 1930. Elle devient l’association Ohavé Shalom (Les Amis de la Paix), abandonnant son identité d’origine russe. L’hebdomadaire Tribune juive considère que « ce groupement a ceci de remarquable qu’il se compose d’israélites originaires les uns de Pologne et les autres de Turquie. »
Personnalité identifiée, Harry Kaganoff donne des conférences qui sont mentionnées dans la presse. En avril 1928, Les Cahiers des droits de l'homme (LDH), signalent son intervention à Champigny. La même année, en novembre, L’Univers israélite évoque sa causerie au Cercle Salonicien, à Paris, devant l’Union des femmes juives françaises pour la Palestine. Il participe aussi à des réunions de nature politique. Il est ainsi, en juin 1929, un des orateurs du meeting de protestation organisé « Contre les pogromes de Lemberg » (Pologne, act. Lviv, Ukraine) par la Ligue internationale contre l’antisémitisme. De nombreux intellectuels et personnalité sont présents.
Le docteur Kaganoff inaugure, en tant que président de l’association Ohavé Shalom, en mai 1930 un oratoire implanté dans leur local campinois. Il s’exprime, dans la ville proche d’Alfortville, en octobre 1930, toujours au titre de cette fonction. Il cesse cependant probablement de l’exercer l’année suivante, lorsqu’il déménage pour installer son cabinet à Paris. C’est sans doute dans la première moitié des années 1930 que se produit le mariage d’Harry Kaganoff avec Rebecca Wygodzka, native de Vilnius (Pologne, act. Lituanie).
À suivre
Rue de Villiers à Champigny-sur-Marne (Arch. dép. Val-de-Marne)
Georges Guy Gérard Legras naît le 3 juin 1927 à Tours (Indre-et-Loire). Il est le fils d’Adrienne Élisabeth Lelong et de son mari Jacques Georges Ernest Legras, voyageur de commerce. Ils vivent, avec les grands-parents paternels, rue Avisseau, dans le quartier de la cathédrale.
En 1931, la famille est installée à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), au centre-ville, rue Émile-Moutier. Le père est devenu projectionniste ; il sera ensuite ingénieur du son. La ville de Joinville comporte plusieurs sites importants consacrés au cinéma (studios de production et entreprises de traitement des films notamment).
Pendant la deuxième guerre mondiale, on trouve un « Georges Legras » enregistré, sans autre précision, dans les Dossiers administratifs de résistants conservés par les archives du Service historique de la Défense.
Après le conflit, Georges Legras est assistant monteur en cinéma. Le 10 novembre 1949, il se trouve dans l’immeuble du 19, rue Saint-Georges à Paris (9e arr.). Anciennement utilisé par la Légion des volontaires français contre le bolchevisme (LVF) pendant l'occupation allemande de Paris, il a été affecté après la Libération à plusieurs organisations liées au parti communiste, notamment le Front national, qui y a son siège, comme des mouvements d’anciens combattants.
Georges Legras et une de ses collègues, Ina Brocki, travaillaient au 4e étage. Ils sont retrouvés recroquevillés, complètement carbonisés, par les sauveteurs sur le palier du 3e étage. L’accident a fait une autre victime, Germaine Fromentin, et huit blessés.
Plusieurs sociétés d’exploitation de films avaient une activité dans l’immeuble : Armor, Miramar et le studio Saint-Georges. L’enquête a estimé que le feu aurait pris dans les sous-sols, suite à un court-circuit, et aurait embrasé des pellicules de film stockées dans les caves, dans des conditions non conformes à la règlementation. Il s’est ensuite propagé très rapidement dans les étages.
Georges Legras a été déclaré mort le 10 novembre 1949 à Paris (9e arr.). Il était célibataire, âgé de 22 ans et toujours domicilié chez ses parents à Joinville-le-Pont et son corps a été inhumé dans le cimetière communal de cette ville.
Des obsèques solennelles ont été organisées pour deux des trois victimes, Germaine Fromentin et Georges Legras. Elles se sont déroulées le 19 novembre à la Maison des Métallurgistes, rue Jean-Pierre-Timbaud à Paris (11e arr.). Tous les deux ont été salués comme des camarades de lutte et des militants par des dirigeants du Front National, tels Laurent Casanova, Pierre Villon. Plusieurs hauts responsables communistes étaient présents, comme Léon Mauvais et Charles Tillon.
Jacques, le père de Georges Legras, a été candidat communiste lors des élections municipales de Joinville-le-Pont en mars 1965.
Lutte contre l’incendie dans l’immeuble, L’Humanité, 11/11/1949
Jacques Georges Ernest Legras naît le 25 juillet 1903 à Paris (20e arr.). Il est le fils Blanche Ernestine Marie Denis et de son époux Georges Victor Alexis Legras. Ils vivent cours de Vincennes et son père est voyageur de commerce. Son père avait été marié une première fois en janvier 1894, mais son épouse était décédée dix jours plus tard ; il avait contracté une nouvelle union avec Blanche six mois plus tard.
La famille d’installe dans la commune de Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), située de l’autre côté du Bois de Vincennes, où ils résident rue de Créteil (act. boulevard du Maréchal-Leclerc), dans le centre-ville, en 1911. Après la première guerre mondiale, pendant laquelle ni le père, trop âgé, ni le fils, trop jeune, ne sont pas mobilisés, les Legras déménagent à Tours (Indre-et-Loire), d’abord rue Bernard-Palissy puis rue Avisseau, dans le centre de la commune. Jacques épouse en décembre 1925 à Saint-Calais (Sarthe), Adrienne Elisabeth Lelong, couturière. Il est voyageur de commerce, comme son père. Suite au décès de celui-ci, en janvier 1927, puis à la naissance de leur enfant en juin, le nouveau couple et la mère de Jacques reviennent à Joinville-le-Pont.
Ils vivent dans le quartier central, rue Émile-Moutier. Toujours employé commercial en 1931, Jacques Legras devient projectionniste de cinéma ; il sera ingénieur du son en 1949. En novembre cette année-là, son fils unique, Georges, âgé de 22 ans et qui travaille également dans le cinéma, comme assistant monteur, meurt dans un incendie à Paris (9e arr.). Il se trouvait alors dans l’immeuble de la rue Saint-Georges qui abritait plusieurs organisations liées au Parti communiste, dont le Front national ; ainsi que des maisons d’édition ou des sociétés cinématographiques. Les obsèques des trois victimes du feu rassemblent de nombreuses personnalités proches du PCF.
Vivant toujours à Joinville-le-Pont, Jacques Legras est candidat, en mars 1965 lors des élections municipales sur la liste d’Union démocratique conduite par Henri Bideaux, ancien conseiller municipal et commerçant. Redevenu représentant de commerce, Legras figure en quatorzième position, avec l’étiquette communiste comme 24 des autres postulants, mais la liste comprend également un socialiste, un radical-socialiste et un républicain.
Au premier tour, la liste communiste arrive en deuxième position, avec une moyenne de 2 316 suffrages soit 29,9% des 7 758 exprimés pour 7 974 votants et 10 441 inscrits. Elle est devancée par le maire sortant, Georges Defert (divers droite), qui obtient 45,4% et précède une liste gaulliste, qui a 26,6% des votes et se retire. Au second tour, la liste communiste recueille 38,1% des bulletins déposés. Elle n’a pas d’élu.
Jacques Legras meurt le 4 février 1980 à Paris (13e arr.) où il était hospitalisé. Il résidait toujours à Joinville-le-Pont, rue des Réservoirs, était veuf et âgé de 76 ans.
Obsèques de Georges Legras, fils de Jacques Legras, 19 novembre 1949
Léopold Augustin Chauveau naît le 30 mai 1874 à Sainte-Maure-de-Touraine (Indre-et-Loire). Il est le fils d’Augustine Deffond, lingère et de son mari, Léopold Chauveau, sabotier.
En octobre 1892, dans la préfecture du département, à Tours, Léopold Chauveau est l’auteur d’une agression de nuit sur le boulevard Heurteloup, près de la gare du chemin de fer d’Orléans. Croisant deux promeneurs, il veut s’emparer de la canne de l’un d’entre eux, mais, comme celui-ci résiste, il sort un couteau-revolver et lui loge une balle dans l’œil gauche. Arrêté, il passe quatre semaines en détention préventive.
La presse locale est surprise que l’affaire n’ait pas été soumise à la cour d’assises, n’ayant pas été qualifiée de crime, malgré la gravité des faits. Il est jugé début mai par le tribunal correctionnel. Chauveau assure qu’il ne se souvient de rien, ayant été complètement ivre. Selon le Journal d'Indre-et-Loire, les parents, « négociants très honorables de Sainte-Maure, sont désespérés de ce que vient de faire leur fils ». Chauveau est condamné à 16 francs d’amende et deux ans de prison. N’ayant pas d’antécédent judiciaire, il bénéficie du sursis, notion créée en 1885 par loi Bérenger.
Dix jours après sa condamnation, devançant le service militaire de deux ans, Léopold Chauveau s’engage dans l’armée, signant en novembre 1892 un contrat de quatre ans et rejoignant le 6e bataillon de chasseurs à pied. En septembre, 1893, nommé caporal, il devient moniteur à l’École normale de gymnastique et d’escrime de Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Promu sergent dans le même établissement, situé dans le Bois de Vincennes, en janvier 1894, il prolonge de cinq ans son contrat en 1896, puis de deux ans en 1901 et pour trois ans supplémentaires en 1903. Il est sergent major instructeur de gymnastique en octobre 1904.
Le sergent Chauveau est, à son tour, victime d’une agression en mars 1897, alors qu’il revenait de Charenton-le-Pont en traversant le Bois de Vincennes. Il est frappé à la nuque d’un violent coup de bâton, mais échappe à ses agresseurs, qu’il tente de poursuivre, sans y arriver.
Pratiquant de nombreuses activités sportives, Chauveau participe aux Jeux olympiques de Paris, organisés en 1900 en même temps que l’exposition universelle. Son équipage de quatre rameurs remporte l’épreuve, une course réservée aux instructeurs de l'école de gymnastique de Joinville en yoles franches.
Léopold Chauveau épouse en mai 1906, à Joinville Marie Thérèse Lucie Latulippe, originaire d’Ivry-sur-Seine (Seine, act. Val-de-Marne). Ils vivent quai Beaubourg à Joinville (act. quai Pierre-Brossolette). Poursuivant sa carrière militaire à l’école de Joinville, il est commissionné en septembre 1907, et obtient le grade d’adjudant, toujours comme instructeur de gymnastique. Il quitte l’armée active en novembre 1910.
En septembre 1908, en compagnie d’un autre (instructeur à l’école de gymnastique de Joinville, Antoine Poulitou, il devient vice-président de la Société Athlétique de Joinville, qui a à sa tête Albert Gallas, artisan mouleur en cuivre, également président du comité radical-socialiste de Joinville.
Au milieu des années 1900, le sergent-major Chauveau dirige les séances de gymnastique de l'Orphelinat de la Seine, installé à La Varenne, dans la commune de Saint-Maur-des-Fossés (Seine, act. Val-de-Marne). Il leur apprend à se développer physiquement par la gymnastique suédoise et les jeux en plein air. Son activité est mise en avant par la Ligue française pour l'hygiène scolaire à partir de 1909. Elle est présentée au troisième Congrès international d'hygiène scolaire, qui se tient à Paris en 1911 puis encore au congrès de l'éducation physique, encore à Paris en mars 1913.
L’adjudant Chauveau, en 1909, accompagne à Sucy-en-Brie (Seine-et-Oise, act. Val-de-Marne) La Laborieuse, société de gymnastique et d’instruction militaire.
Ayant quitté l’armée active, Chauveau est en 1910 l’entraîneur d’une société de préparation militaire, Le Jeune soldat. Il s’installe avec sa famille à Saint-Maur en 1911, dans le quartier de La Varenne-Saint-Hilaire, d’abord avenue Adam puis avenue du Bac, avant de rejoindre la rue de la République puis la rue Émile-Zola.
C’est probablement en janvier 1907 que Chauveau rejoint une loge affiliée au Grand-Orient de France, Les Philanthropes Réunis. Il y retrouve le secrétaire général de la mairie de Joinville, Eugène Doret. Sa participation à la franc-maçonnerie vaut à Chauveau plusieurs attaques dans la presse d’extrême-droite. En juin 1910, le quotidien Le Conservateur reproduit une affiche de l’Association antimaçonnique de France placardée à Paris (1er et 2e arr.) : « La Franc-Maçonnerie, Société secrète, dont toutes les décisions tous les actes, permettent de dire qu’elle est, en France, l'agent de l’Étranger, a créé, depuis quelques années, des écoles spéciales de préparation militaire, dans lesquelles ses adeptes essaient de s’emparer de l'esprit de nos jeunes gens. La Société qui a pour titre Le Jeune Soldat et qui a son siège 6, rue Louvois (2e arrondissement), est de celles-là. (…) Un de ses professeurs les plus assidus, M. Chauveau, adjudant à l'École de Gymnastique de Joinville le-Pont, est un f.*. »
Le quotidien antisémite La Libre parole publie son nom à deux reprises, en mai 1912 puis en avril 1914, mettant en avant ses activités auprès de l’orphelinat et des sociétés de préparation militaire. Un grand nombre de sous-officiers de Joinville, comme Paul André Giansilj ou Antoine Poulitou, sont également francs-maçons.
Au déclenchement de la première guerre mondiale, Léopold Chauveau est rappelé en août 1914 et affecté au 69e régiment d'infanterie. Il est promu officier, avec le grade de sous-lieutenant en octobre la même année puis devient lieutenant en octobre 1916. Il est démobilisé par le 46e régiment d'infanterie en décembre 1918. Dans la réserve, il accède en juillet 1922 au grade de capitaine.
Après la fin du conflit, Léopold Chauveau devient associé de la société Boulbain et Cie, qui pour objet l’exploitation par la fabrication et la vente d’appareils indicateurs de location pour de sièges de théâtre ou de chemins de fer. Elle est basée avenue Émile-Zola, à Saint-Maur, où il fixe son domicile.
Toujours professeur d’éducation physique, âgé de 53 ans, Léopold Chauveau meurt le 9 avril 1928 à Saint-Maur-des-Fossés. Il avait eu une fille, morte en bas âge, et un fils, enseignant à l’Éducation nationale après avoir été prisonnier pendant la deuxième guerre mondiale.
Entre 1894 et 1910, Léopold Chauveau avait reçu près de 25 récompenses et médailles pour ses activités sportives et associatives. Son rôle d’instructeur lui avait valu les Palmes académiques comme officier d'académie en mai 1908. Il avait été décoré de la Médaille militaire en décembre 1910. Il avait aussi été récompensé pour son rôle actif lors des graves inondations de la Marne au premier trimestre 1910.
École de gymnastique et d’escrime de Joinville (Arch. dép. Val-de-Marne)
Édouard Fortuné Chauveau naît le 22 mai 1864 à Tours (Indre-et-Loire), dans le quartier Saint-Symphorien. Il est le fils de Louise Silvine Breton et de son mari, Fortuné Chauveau. Sa mère, fille d’un tailleur de pierre tourangeau, est d’abord couturière, puis ouvrière en soie. Le père est tisseur en soie.
En 1884, Édouard Chauveau est doreur sur bois à Tours et membre de la société de gymnastique locale. Il est recruté pour le service militaire en décembre 1885 et affecté au 31e régiment d'infanterie. Nommé caporal en octobre 1886, il est transféré en janvier 1887 à l’École normal de gymnastique et d’escrime de Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), établissement militaire situé dans le Bois de Vincennes (act. Paris, 12e arr.). Il devient moniteur de gymnastique en août 1887. À la fin de ses quatre années de service, il s’engage pour cinq ans en novembre 1889 et est devenu sous-officier, avec le grade de sergent.
Parallèlement à son activité militaire, Chauveau participe à des manifestations sportives, comme lors d’une fête vélocipédique organisée à la Varenne Saint Hilaire (Saint-Maur-des-Fossés) en août 1887, une course de tricycles réservée aux militaires. Il participe à un concours de tir à Tours en juin 1889.
Le mariage d’Édouard Chauveau avec Marie Augustine Louise Joséphine Lemoine est célébré à Paris (11e arr.), en avril 1890. D’origine bretonne, Marie est couturière, native de Saint-Georges-de-Reintembault (Ille-et-Vilaine). Les parents de la mariée, Auguste Lemoine et Marie Hautebas, viennent également s’installer à Joinville-le-Pont, dans le quartier de Palissy, rue de Brétigny (act. avenue du Président-Wilson). Auguste Lemoine, qui est menuisier, devient membre du comité radical-socialiste communal.
Pour leur part, Édouard et Marie Chauveau résident dans la Ferme de la Faisanderie, dépendance de l’établissement militaire, au sein du Bois de Vincennes. Marie Chauveau est membre du comité des dames de la section de Saint-Maur, Joinville et Charenton de la Société de secours aux blessés militaires (Croix-Rouge).
Promu maître de gymnastique en juin 1890, Édouard Chauveau se réengage, de nouveau pour cinq ans, en novembre 1894 et devient sergent-major en août 1895. Il est commissionné à l’issue de son contrat en novembre 1899 et quitte l’armée, en juillet 1901, bénéficiant d’une retraite proportionnelle au temps passé dans l’armée, soit 15 ans et 8 mois, d’un montant de 576 francs. Affecté dans la réserve, il fait une période d’exercice en septembre 1906 puis est libéré des obligations militaires en octobre 1910.
Comme ancien sous-officier, Chauveau peut théoriquement postuler pour des emplois réservés (agent d’octroi, facteur, magasinier ou garçon de bureau par exemple). Il fait le choix de devenir professeur de gymnastique au collège et aux écoles communales de la ville de Pontoise (Seine-et-Oise, act. Val-d'Oise). La famille s’y installe, d’abord rue Victor-Hugo puis rue d’Ennery et enfin rue Gambetta. Il donne également des leçons particulières de gymnastique, de boxe, de canne, de bâton d’escrime, de gymnastique médicale et de natation.
Dans sa nouvelle commune de résidence, Chauveau devient le moniteur chef de Société de tir du 12e territorial, régiment d'infanterie de réserve. C’est peut-être à son domicile pontoisien que, en août 1929, un jardinier qui descendait à la cave avec une baladeuse à la main, a été électrocuté et tué sur le coup.
Son épouse Marie étant décédée en septembre 1921, Édouard Chauveau va contracter une nouvelle union avec Esther Eugénie Guillot en septembre 1928 à Barbonne-Fayel (Marne). Ils résident dans cette commune en 1931, alors qu’il a pris sa retraite. Il se remariera une troisième fois en août 1941 à Pontoise avec Berthe Léa Vallier ; ils résideront à Barbonne-Fayel où il meurt le 25 décembre 1945, âgé de 81 ans.
Après avoir obtenu des médailles d’argent et de vermeil pour son activité de gymnastique et d’escrime de 1889 à 1893, Édouard Chauveau reçoit la Médaille militaire en janvier 1902. Son fils unique, Marcel, officier d’infanterie, meurt au combat durant la première guerre mondiale.
École de gymnastique et d’escrime de Joinville (Arch. dép. Val-de-Marne)
Edith Augustine Delaby naît le 26 juillet 1926 à Paris (13e arr.). Elle est la fille de Marie Camille Lucie Luneau et de Constantin Delaby. Sa mère décède le jour même de son accouchement. Son père est mécanicien et vit à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne).
Le bébé est confié à sa grand-mère maternelle, Marie Louise Hérault née Saugereau, veuve, vivant à La Chapelotte dans le Cher. Elle rejoint son père en été 1934 à Joinville, à l’âge de huit ans, à la mort de son aïeule. Il passe plusieurs annonces pour essayer de lui trouver une compagnie en 1934 et 1937, soulignant qu’il dispose d’un jardin anglais et d’un piano, puis se remarie en mai 1937 à Joinville avec Jadwiga Domanska. Veuve et native de Pologne, elle a francisé son prénom en Edwige Sophie. C’est elle qui va élever la jeune fille.
Pendant la deuxième guerre mondiale, son père meurt en mai 1941 à Toulouse (Haute-Garonne). Il sera reconnu en tant que « victime civile » du conflit, reconnaissance accordée aux personnes qui ont subi des préjudices directs en raison des actions de l'ennemi, des bombardements, des représailles, des actes de sabotage, ou comme victimes de la répression et des persécutions raciales ou politiques.
Restée à Joinville avec sa belle-mère à la Libération, Edith Delaby rêve, selon le quotidien France-Soir, « d’épouser un GI et partir pour le moderne pays des merveilles ». Elle rencontre le soldat Charles Blair Ellsworth d'Arcy Waterbury, citoyen des États-Unis, d’origine acadienne et natif de Terre-Neuve (Canada) avec lequel elle se fiance en novembre 1945. Leur fils Charles Bruce Delaby naît en juillet 1946 à Paris, alors que Charles Waterbury est retourné à New-York.
Pour rejoindre son fiancé, Edith Delaby embarque le 28 décembre 1946 à bord d‘un avion Constellation, quadrimoteurs à hélices construit par Lockheed, sur un vol de la compagnie TWA (Trans World Airline). L’appareil s’écrase à proximité de l’aéroport de Shannon, en Irlande, où il devait faire escale. Il emportait quatorze passagers et neuf membres d'équipage. L’avion est tombé sur une île fluviale, dans une zone marécageuse d’accès compliqué, et sa chute a provoqué une explosion violente. L’accident cause douze morts, dont neuf passagers, tous les autres étant blessés, pour la plupart grièvement.
Lors de l’arrivée des secours, une hôtesse rescapée tend l’enfant à un des premiers sauveteurs, déclarant : « Ce petit bébé s’appelle Charles. Il est le fils d’une épouse de GI. Sa mère est morte dans mes bras ». C’est ce que rapportera la presse américaine du jour.
La presse parisienne pourra rectifier les dépêches d’agence : en fait, Edith Delaby a survécu. Elle souffre de brûlures sévères et d’une fracture à la cheville. Le bébé Charles est moins grièvement atteint, bien qu’ayant une jambe cassée.
Les avions Constellation ont connu plusieurs accidents ; celui qui transportait Edith Delaby avait convoyé à Washington, début 1946, le président du conseil français, M. Léon Blum.
Edwige Delaby, sa belle-mère, rejoint Edith à Limerick, où elle est hospitalisée. Charles Waterbury vient chercher sa fiancée et son fils et embarque avec eux pour New-York le 2 mars 1947. Ils s’installent à Newark, dans le New-Jersey, Belmont Avenue et se marient le mois suivant dans la même ville. Son mari est mécanicien.
Ils s’installent ultérieurement à Newcastle, en Californie. Edwige Delaby émigre également, épouse en décembre 1947 à Manhattan (New York) avec Alexander Schwindt puis vit aussi en Californie, à Pasadena, où elle décède en septembre 1986.
Veuve en 2006, Edith Waterbury meurt le 25 mai 2013 à Newcastle (Cal.). Elle était âgée de 86 ans et mère de deux enfants.
Constantin Émile Delaby naît le 11 mars 1880 à Abscon, commune du bassin houiller du département du Nord. Il est le fils de Marie Joseph Héroguet et de son mari Henri Delaby. Son père est mineur et la famille vit au coron des Lillois. Illettré, le père ne sait pas signer à la naissance de Constantin ou de son frère aîné ; cependant, il est capable de le faire en août 1882 quand sa première sœur voit le jour. La famille a alors déménagé à Aniche, commune voisine d’origine de la mère. Henri Delaby meurt en janvier 1894, quand Constantin a 13 ans.
N'étant pas l’aîné, Constantin Delaby, qui est alors ajusteur mécanicien, est convoqué pour le service militaire. Il intègre le 8e régiment de hussards en novembre 1901 à Cambrai. Promu brigadier en septembre 1902, il devient sous-officier comme maréchal des logis en mai 1903. Il retourne à la vie civile en septembre 1904.
Après avoir quitté l’uniforme, Constantin Delaby travaille dans la Marne. Il est condamné, en décembre 1905 par le tribunal correctionnel de Reims à 25 francs d’amende pour « complicité d’adultère ». Il s’agit peut-être de ses relations avec Marie Hortense Lavigne, dont il a un fils, Henry Jules, né en mai 1907 à Loivre (Marne), lequel est déclaré comme étant de mère inconnue par Constantin Delaby, qui le reconnaît. Il est légitimé par leur mariage en décembre 1912 à Lille ; Marie Hortense avait divorcé de son premier mari en mai 1906.
En juillet 1910, l’entreprise de cycles qu’avait créée Constantin Delaby est mise en liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de Cambrai. Il s’installe début 1912 à Lille où il est contremaître.
Rappelé au début de la première guerre mondiale en août 1914, Constantin Delaby obtient le grade d’adjudant en avril 1915. Il est détaché, comme ajusteur, en juillet 1917 dans un service automobile à Villeneuve-la-Garenne (Seine, act. Hauts-de-Seine). Puis, en octobre 1917, il est affecté à l’usine Delaby et Langlois, rue des Rondeaux à Paris (20e arr.) ; il s’agit peut-être d’un établissement qu’il aurait fondé. En janvier 1919, il est détaché dans une usine de Nîmes (Gard) puis démobilisé en février.
Après le conflit, Constantin et Marie Hortense Delaby sont séparés et divorcent. Lui s’installe à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), villa René-Robert (une voie disparue).
Il dispose d’un magasin à Joinville et d’un atelier dans la commune voisine de Champigny-sur-Marne, route de Villiers. Il crée en février 1920 une société avec plusieurs négociants, C. Delaby & Cie, puis la dissout en mai 1922. Il poursuit ensuite son activité à titre personnel. Il fabrique notamment des cadres de vélos.
Constantin Delaby se remarie en février 1921 à Joinville avec Marie Camille Lucie Luneau, originaire de La Chapelotte (Cher), fille d’un bourrelier. Ils ont leur domicile dans le quartier du Centre, puis rue du Pourtour-des-Écoles. Le fils de Constantin, Henri Delaby, les rejoint et vit avec eux en 1926.
Camille meurt en juillet 1926, en donnant naissance au deuxième enfant de Constantin Delaby, Edith Augustine. Elle est d’abord hébergée par sa grand-mère, dans le Cher, puis rejoint son père à l’été 1934. Il passe plusieurs annonces pour essayer de lui trouver une compagnie en 1934 et 1937, soulignant qu’il dispose d’un jardin anglais et d’un piano. Constantin Delaby se remarie en mai 1937 à Joinville avec Jadwiga Domanska, native de Pologne et veuve, qui a francisé son prénom en Edwige Sophie.
Conservant toujours son activité de mécanique générale à Champigny en 1931, Delaby semble cependant avoir réorienté ses sources de revenus. Dans le recensement de 1931, il se déclare comme représentant. Mais il semble bien qu’il se consacre également beaucoup aux courses de chevaux. L’hippodrome de Vincennes est proche de son domicile. En mars 1927, Constantin Delaby est condamné à 300 francs d’amende pour « délits de courses. »
Quelques années plus tard, il va de nouveau avoir maille à partir avec la justice. La presse relate « l’arrestation mouvementée d’un bookmarker ». Un inspecteur de la brigade des jeux le soupçonnait de prendre des paris clandestins quand il le croise dans rue de Paris, dans le centre-ville de Joinville. Delaby qui attendait dans son auto arrêtée et un cycliste s’arrêta près de lui pour et remettre une enveloppe, présumée contenir des listes de paris. L’inspecteur sauta sur le marchepied de la voiture, mais Delaby démarra aussitôt, renversant le cycliste, tandis que le policier se cramponnait au parebrise du véhicule. Il dut stopper peu après, à l’entrée du Bois de Vincennes et fut conduit au commissariat de police de Saint-Maur puis envoyé au Dépôt. L’inspecteur et le cycliste avaient été légèrement contusionnés. En janvier 1934, le tribunal correctionnel de la Seine l’a condamné à quatre mois de prison avec sursis et 500 francs d’amende pour « violence à agents » et « exploitation illicite de paris sur les courses de chevaux en novembre et décembre 1933. »
En 1936, Constantin Delaby déclare exercer l’activité de menuisier.
Il meurt au cours de la deuxième guerre mondiale le 24 mai 1941 à Toulouse (Haute-Garonne). Il était âgé de 61 ans et père de deux enfants. Le Service historique de la Défense le classe en tant que victime civile, reconnaissance accordée aux personnes qui ont subi des préjudices directs du fait des événements liés à la guerre en raison des actions de l'ennemi, des bombardements, des représailles, des actes de sabotage, ou pour les victimes de la répression et des persécutions raciales ou politiques.
Son fils Henry deviendra ingénieur et continuera à vivre à Joinville-le-Pont. Sa fille Edith survivra à un accident d’avion en décembre 1946 en Irlande, alors qu’elle émigrait avec son bébé vers les États-Unis.
Pierre Hélias naît le 17 mai 1860 Vayres, Haute-Vienne fils Jean Hélias & Jeanne Devoyon, lieu-dit de la Grange. Son père, qui porte un nom breton mais est bien originaire du Limousin, est alors coquetier (il fait le commerce d’œufs) puis sera marchand de chevaux.
Lorsqu’il fait son service militaire, en novembre 1881, Pierre Hélias exerce le même métier. Il intègre le 23e régiment de dragons à Limoges. En octobre 1882, il devient trompette dans son unité. Toujours sous les drapeaux, il est condamné en justice civile par le tribunal correctionnel de Meaux (Seine-et-Marne) en août 1884 à six jours de prison pour « outrage public à la pudeur ». Il est démobilisé en septembre 1885.
Il quitte la Haute-Vienne pour s’installer à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne) en tant que jardinier cultivateur dans le quartier de Palissy. Il épouse en novembre 1885 à Joinville Marie Guillion, également jardinière et originaire de Meaux.
Son père vend en septembre 1886 à Pierre Hélias le terrain qu’il exploite rue de Brétigny à Joinville.
Au cours des années 1890, les luttes ouvrières dans le midi suscitent un grand mouvement d’opinion, soutenant les grévistes des mines de charbon puis ceux des verreries. À Joinville, une souscription est lancée en septembre 1895 « Pour les affamés de Carmaux », relayée par un organe de presse radical-socialiste local, Voix des communes. À l’instigation de Victoria et Henry Vaudémont, touts deux coopérateurs, plus de 260 souscripteurs participent à la collecte de fonds, dont environ 180 dans les quartiers de Polangis et Palissy, encore en construction. Hélias fait partie des donateurs dont les noms sont aussi publiés par un quotidien national, La Petite République.
Sa première épouse, Marie Guillion, aura eu quatre enfants pendant leur mariage, et il reconnaîtra la première-née, qui n’était probablement pas de lui. Après son décès en janvier 1891 à 32 ans, Pierre Hélias se retrouve avec cinq enfants de moins de cinq ans.
Il se remarie en mars 1893 à Saint-Denis (Seine, act. Seine-Saint-Denis) avec Louise Joguin-Rouxelle, elle aussi jardinière. Sa seconde femme accouchera à neuf reprises, donnant naissance à sept enfants vivants ; elle meurt en octobre 1904, alors qu’elle est hospitalisée et que son dernier enfant est sans-vie. Elle n’a alors que 30 ans. L’aînée des douze fils et filles survivantes, Léonie, a 19 ans.
Une nouvelle fois, Pierre Hélias reprend une compagne légale, Claudine Martin, veuve de Charles Frachot, tous les deux originaires du Nivernais. Les noces sont célébrées en avril 1906 à Joinville. Ayant déjà 52 ans, elle ne lui donne pas de descendance, mais les nouveaux époux élèvent une fille qu’elle a eu de son premier mariage.
À partir de 1908, le quartier de Palissy est secoué par une polémique qui touche ensuite toute la commune. Un entrepreneur fait remonter depuis le port sur la Marne les boues issues du dragage de la rivière dans des charrois. Des riverains se plaignent des dégradations de la voirie et des odeurs. D’autres soutiennent l’utilité de cette activité, qui crée de l’emploi. La polémique prend une tournure politique en 1910. Le maire, Eugène Voisin, en poste depuis 1888, est en mauvaise santé, ne veut pas se représenter lors des élections municipales de 1912 et délègue à ses adjoints la situation. L’opposition de droite y voit une opportunité pour dénoncer l’incurie d’une municipalité radicale-socialiste ; elle est rejointe par la gauche, qui vient de fonder le Parti socialiste SFIO. Et aussi par plusieurs figures radicales qui ne voient pas d’un bon œil la succession leur échapper au profit de l’adjoint, Georges Briolay.
Le point d’orgue de cette crise se situe en juillet 1910 : tous les opposants et mécontents appellent à une réunion publique sur le sujet. Hélias fait partie des 19 personnes qui appellent à la tenue de la rencontre, que la municipalité refuse. On trouve aussi les Lebègue, secrétaire de la section socialiste, Leteuil, opposant en pointe, Dalbavie, qui est à la tête des libéraux, le futur maire Stephen Durande… La réunion sera très agitée. Elle provoque une division au sein des radicaux, qui conduira à leur défaite en 1912.
Trop âgé pour être mobilisé pendant la première guerre mondiale, Pierre Hélias perd son fils aîné, Prosper, qui est tué en novembre 1916 dans la bataille de la Somme.
Après le conflit, Hélias continue son activité de maraîchage mais l’exploitation familiale a considérablement diminué. Il cesse vers le milieu des année 1920.
Plusieurs de ses enfants ont des ennuis avec la justice. René, le cinquième du premier lit, est arrêté à Saint-Ouen (Seine, act. Hauts-de-Seine) pour escroquerie en mai 1921. L’avant-dernière, Élise est consignée en avril 1924 après ce qui est qualifié par la presse de « rixe entre femmes ». Elle porte plusieurs coups de couteau à son adversaire, en pleine nuit, rue des Vertus (Paris, 3e arr.), la blessant sans gravité.
À Joinville, Hélias était membre de la section locale de la Société nationale des vétérans des armées de terre et de mer, fondée pour assurer une retraite à ceux qui avaient participé à la guerre de 1870-1871, première association d’anciens combattantes.
Pierre Hélias meut le 3 juin 1937 à Ivry-sur-Seine (Seine, act. Val-de-Marne), où il était à l’hospice des incurables. Âgé de 77 ans, il avait conçu ou élevé 15 enfants.
Henri Hélias, petit-fils de Pierre Hélias (arch. fam.)