Suite de la biographie d’Ernest Jouin
L’abbé Ernest Jouin, exfiltré de la cure de Joinville-le-Pont, est nommé second vicaire de église Saint-Augustin à Paris (8e arr.) en août 1886.
Il entreprit la rédaction de ses Explications logiques du Catéchisme, premier de ses nombreux essais. Il réalise également, en compagnie de l’abbé Joseph Sauvêtre, un voyage, au pas de course, en Scandinavie.
Devenu premier vicaire, l’abbé Jouin se lance également dans l’écriture de pièces chantées, en commençant par La Nativité (1893), pour laquelle il emprunte des musiques à Grieg, Berlioz ou Gounod notamment.
En l’abbé Jouin 1894, est de nouveau nommé curé, à l’église Saint-Médard (5e arr.), retrouvant ainsi le quartier latin de Paris. Il appelle à ses côtés l'abbé Joseph Sauvêtre, qui l’avait déjà suivi précédemment comme vicaire de Saint-Augustin et est, selon Le Figaro (1895/06/26), « le plus intelligent et le plus zélé des auxiliaires. »
C’est au cours d’une représentation de la Nativité en février 1895 à la salle des fêtes de Saint-Pierre de Chaillot (Paris, 16e arr.) que Mgr François Désiré Mathieu, évêque d'Angers, le nomme au chapitre de sa cathédrale à titre honorifique. La presse remarque qu’il « est assez rare de voir un évêque créer un prêtre chanoine sur les planches d'un théâtre ». En septembre la même année, Mgr Michel André Latty, évêque de Châlons (act. Châlons-en-Champagne, Marne), lui attribue la même distinction pour son propre diocèse.
Dans sa paroisse, il fonde, avec l’abbé Bossard, un patronage, qu’il emmène dans des randonnées en forêt et en montagne, y compris sur le Mont-Blanc. Il obtient l’installation d’une nouvelle maison des Servantes des pauvres, toujours sous l’autorité de mère Agnès. Comme celle de Joinville, c’est l’abbé Jouin qui en assume la charge. Se montrant souvent fort généreux, il dispose manifestement de ressources importantes dont même l'abbé Sauvêtre ignore l’origine. Il subventionne, par exemple, des fouilles archéologiques à Éphèse et la publication des six premiers volumes du Recueil des écrivains chrétiens orientaux, devenu ensuite une vaste œuvre scientifique.
En décembre 1898, après avoir cru qu’il serait nommé évêque du Mans, l'abbé Jouin, retourne à Saint-Augustin où il est cette fois nommé curé. Il ne quittera plus ce poste, où il restera en fonction pendant 34 ans ce qui, ajouté aux huit années de vicariat, fait qu’il aura séjourné 42 ans dans ladite paroisse. Un de ses collègues, l'abbé Schuster, remarquera en 1917 que « Saint-Augustin est le fief des curés décapités. »
Poursuivant la rédaction de ses spectacles édifiants, Ernest Jouin produit Notre-Dame de Lourdes (oratorio, musique d’Alexandre Georges, 1900), La Passion (musique d’A. Georges, 1902, version augmentée en 1906), Clotilde (1907), Bernadette (1908) et Jeanne d'Arc (musique d’A. Vivet, 1909). Seules La Nativité et La Passion eurent une diffusion importante.
On lit dans Notre-Dame de Lourdes :
Quelle est l'âme
Dont la flamme
A le parfum de l'encensoir ;
Si limpide,
Si candide
Que la Vierge descend la voir ?
Parallèlement, le chanoine Jouin lance la publication d’une revue mensuelle, Le Catéchisme, qui paraît de 1900 à 1908. Il est fait une fois de plus chanoine honoraire, de la cathédrale de Paris cette fois, en 1905.
L'abbé Jouin voulut combattre le modernisme, porté notamment par Alfred Loisy, en s’appuyant sur l'autorité des Pères de l'Église. Il tenta de mobiliser un groupe de prêtres parisiens autour de ce projet, qui resta inabouti.
Au début du XIXe siècle, le curé de Saint-Augustin est un des plus farouches opposants à la séparation de l’église et de l’État, mise en œuvre par la loi du 9 décembre 1905. Lors de l’inventaire des biens de l’église Saint-Augustin, réalisé en application de cette loi le 31 janvier 1906, l’abbé Jouin convoqua une « messe de deuil » et à l’instigation de son clergé, l’inspecteur en charge de cette opération fut empêché d’entrer dans la sacristie. S’adressant à ses paroissiens il leur déclare « Vous êtes la paroisse sous les armes (…) notre protestation est pacifique, mais je sais maintenant que, s'il faut demain une protestation plus énergique, vous serez là. »
Il met en place une « garde de l’église », se réservant pour lui la nuit et s'étant installé pour ce faire dans une des tours de l'église. Elle fonctionne pendant quatre mois. L’inventaire fut cependant fait en novembre et l’attitude du curé de Saint-Augustin lui valut d’être un des trois curés parisiens inculpé par un juge d’instruction en décembre 1906. Il convoque, le 12 décembre, une nouvelle « messe de deuil » qu’il appelle par un texte qui se finit comme ceci : « il faut que notre deuil, si triste et si profond qu'il puisse être, soit un deuil armé. Garder la foi ne suffit plus, nous devons la défendre. »
Il comparut le 12 avril 1907 devant la 9e chambre du tribunal correctionnel de la Seine. Il assura que par armes, il entendait « les armures de la vérité et de la foi ». Défendu par Me Danet, il fut condamné à 16 francs d'amende, mais le verdict qualifiait également la loi de 1905 comme étant « d'exception exorbitante », ce qu’il présenta comme une victoire.
Ernest Jouin publia en 1921 un essai intitulé La Judéo-maçonnerie et la loi de séparation.
Comme à Joinville et à Saint-Médard, l’abbé Jouin recrute les Servantes des pauvres, qui s’implantent une fois encore avec pour supérieur la mère Agnès.
À suivre

commenter cet article …