Louis Louveau naît le 11 mars 1781 à Cossé-le-Vivien (Mayenne). Il est le fils de Françoise Perrine Louise Saulou et de son époux René François Louveau. Le couple a 14 enfants nés vivants, Louis étant le 12e.
La famille Louveau garde le titre de sieur de La Pagerie, un hameau de Cossé-le-Vivien. L’oncle paternel de Louis, Joseph Pierre Louveau (1744-1822), magistrat, fut élu député au Conseil des Cinq-Cents, lors des élections législatives de 1797. Il était membre du Club de Clichy, de tendance républicaine modérée, formé par Germaine de Staël suite à la chute de Robespierre.
Résidant à Paris, Louis Louveau est élu conseiller municipal de Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), le 30 septembre 1831. La commune vient d’abandonner depuis un mois son ancien nom de La Branche-du-Pont-de-Saint-Maur. Laurent Nicolas Pinson, récent maire, est élu en même temps que lui.
Village rural, Joinville accueille des parisiens qui y disposent de résidences secondaires. Louveau habite à Paris, peut-être rue des Francs-Bourgeois, dans le quartier du Marais. Il est recensé dès 1822 à Joinville, où il possède une résidence quai Beaubourg, sur les bords de Marne. Il est désigné comme propriétaire.
Le 28 mai 1837, Louveau est réélu, au suffrage censitaire, arrivant en seconde position sur six candidats derrière Pinson avec 28 voix sur 46 suffrages exprimés et 61 inscrits. Il n’est pas réélu le 18 février 1843 lors du scrutin qui suit la démission de Pinson.
La presse conservatrice (Gazette nationale, Journal des débats) mentionne le nom de Louis Louveau comme participant à plusieurs souscriptions : pour l’extinction de la mendicité en 1829, en faveur des pauvres en 1832, pour la mémoire de Casimir Périer la même année, pour les incendiés de Hambourg en 1842 et pour les victimes du désastre de la Guadeloupe en 1843.
Louis Louveau meurt le 31 janvier 1863 à Neuilly-sur-Seine (Seine, act. Hauts-de-Seine). Il était âgé de 82 ans et célibataire. Il est inhumé au cimetière du Père-Lachaise à Paris (act. 20e arr.)
Château des Alleux, Cossé-le-Vivien (Arch. dép. Mayenne)
Raymond Henri Augustin Baugé nait le 3 juillet 1911 à Bagneux (act. Saumur, Maine-et-Loire). Il est le fils de Raymonde Marie Joséphine Corbineau et de son mari Paul Émile Baugé, dessinateur.
Il fréquent d’abord l’École de viticulture de Saumur, où il obtient un certificat d'aptitude en juin 1924. Il suit un apprentissage comme aide-comptable avec la Chambre de métiers de l’Anjou et reçoit également un diplôme en sténographie. Inscrit à l’école Chevrollier d’Angers, il fréquente la section commerciale et obtient le certificat d’aptitude professionnelle (CAP) d’employé de banque en juillet 1931. Il reçoit le deuxième prix de la Chambre d'apprentissage de l’Anjou. Lors de la fête de l'Association des anciens élèves de l'école de préparation aux banques, Raymond Baugé dirige l’orchestre.
À l’automne 1931, Raymond Baugé est inscrit à la Faculté libre de droit d’Angers. Il est secrétaire de l’Association générale des étudiants d’Angers (AGEA), affiliée à l’Union nationale des étudiants de France (UNEF). Il devient, en juin 1932, directeur de la publication Angers-Étudiant. Il est nommé secrétaire honoraire de l’AGEA en novembre 1932 par l’assemblée générale de l’AGEA qui est suivi d’un « joyeux monôme » dans les rues de la ville. En février 1935, Raymond Baugé est président du Comité des fêtes du Club Universitaire Angevin (CUA) puis, en janvier 1937, il préside les supporters du CUA.
Après avoir réalisé son service militaire en 1933-1934, Raymond Baugé épouse Gisèle Mauricette Vergin en octobre 1938 à Roubaix (Nord). Il est probablement mobilisé pendant la deuxième guerre mondiale.
Après le conflit, la famille Baugé vit à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Elle vit d’abord quai de Polangis, sur la rive gauche de la Marne puis rue Jean-Mermoz, dans le Centre, de l’autre côté de la rivière. Raymond Baugé travaille en tant que représentant commercial.
Lors des élections législatives de mai 1951, Raymond Baugé est candidat sur la liste du Mouvement républicain populaire (MRP, démocrate-chrétien), dans le quatrième secteur du département de la Seine. Elle est conduite par Paul Bacon, député sortant et ministre du Travail. Il figure en sixième position et recueille 32 930 votes. Il n’est pas élu.
À l’occasion des élections municipales à Joinville-le-Pont en avril 1953, conduite par Gaston Moutenot, ancien conseiller municipal (1945-1947). Leur liste arrive en cinquième position avec 9,2% et obtient deux sièges (Moutenot et Baugé). La liste communiste, qui comprend la maire sortante, Amélie Trayaud, est en tête avec 35,6% et dix élus, devant le Rassemblement des gauches républicaines (RGR, centre-droit, 22,1%, 6 sièges) et le Rassemblement du peuple français (gaulliste, 19,8%, 6 élus aussi). La SFIO obtient trois conseillers, avec 12,3%. Du fait de l’alliance entre le RGR, le RPF et le MRP, Georges Defert (RGR) est élu maire et Moutenot adjoint.
En novembre 1953, suite à la démission de Moutenot, Raymond Baugé est élu adjoint au maire. Son mandat prendra fin en mars 1959.
Une nouvelle fois, en janvier 1956, Baugé est candidat sur la liste MRP pour les élections législatives. Dans son document de candidature, il indique qu’il est chef de vente, administrateur du bureau d'aide sociale et de la caisse des écoles ainsi que vice-président de la section locale de l’association des parents d’élèves de l’école libre (APEL, établissements chrétiens). Il recueille 32 408 votes et n’est pas élu.
Sous la cinquième République, le régime électoral change, abandonnant la proportionnelle. Lors des élections municipales de mars 1959, Baugé figure en deuxième position sur une liste regroupant l’UNR (gaulliste, Pierre Calmon) et la SFIO (Depoutot). Elle obtient le troisième score avec 23,5% des suffrages exprimés au premier tour, derrière le RGR du maire sortant (41,2%) et les communistes d’Henri Bideaux (32,2%). Au second tour, qui voit la victoire de Defert avec 52,4% et les 27 sièges à pourvoir, le MRP recule à 13,1%.
Dans le canton de Saint-Maur / Joinville, le scrutin qui a lieu le même jour oppose la plupart des mêmes acteurs : Defert, Bideaux, Calmon et Baugé. Ce dernier arrive en cinquième place, avec 1 309 voix pour 14 827 suffrages exprimés (8,8%) sur 15 369 votants et 21 457 inscrits. Il se retire avant le second tour, qui est remporté par Defert.
En 1961, Raymond Baugé exerce la fonction de secrétaire général d’une fédération syndicale. Peut-être est-ce lui qui a publié, en mars 1958 un article en anglais sur L'importance croissante des métiers dans le domaine de la grande distribution, au sein de la revue syndicale internationale Trade Union Information.
Raymond Henri Augustin Baugé meurt le 3 avril 1993 à Saint-Maur-des-Fossés (Val-de-Marne). Il était âgé de 81 ans et père de trois enfants. En avril 1961, il avait été nommé chevalier de la Légion d’honneur.
La mairie de Joinville-le-Pont dans les années 1960
Émilie Renaudin est née vers 1869. Elle est religieuse catholique, au sein de de la communauté des sœurs Servantes des pauvres à Joinville-le-Pont en 1901. Comme la plupart des membres de cette congrégation, elle est probablement originaire de l’ouest de la France (Anjou, Vendée ou Bretagne).
Cette communauté, dont l’activité est principalement de garde-malades, a été fondée par dom Leduc à Angers (Maine-et-Loire). Elle s’est implantée à Joinville en 1883 à la demande du curé de la paroisse, le père Ernest Jouin, également originaire d’Anjou. Dirigée depuis sa fondation par la mère Agnès de Jésus (Modeste Bondu), établie au 45, rue de Paris, la communauté essaime à Paris, suivant les nouveaux postes de l’abbé Jouin à Saint-Médard puis Saint-Augustin. Agnès de Jésus devient supérieure générale des Oblates Servantes des pauvres, qui suivent la règle de Saint-Augustin et est remplacée comme prieure de Joinville par Émilie Renaudin sans doute en 1896. Six sœurs pensionnaires composent la communauté, installée dans le centre-ville.
Les sœurs ont probablement installé une école, peut-être pour des jeunes filles. L’attitude de la municipalité, largement dominée par les radicaux-socialistes et qui compte nombre de francs-maçons et libres-penseurs, est nettement hostile au début, dans le cadre d’affrontements juridiques entre l’abbé Jouin et les élus. Elle s’améliore ensuite.
Dans le cadre des mesures engagées par le gouvernement pour la dispersion des congrégations, deux décisions contradictoires vont être prises concernant la communauté de Joinville.
En janvier 1902, à une forte majorité, le conseil municipal de Joinville vote le maintien dans sa commune de la congrégation des Servantes des pauvres. Dans le journal radical local, le correspondant de Joinville, Louis Dehné (alias Ludovic), est fort mécontent : « Ils avaient été élus il n’y a pas deux ans sur un programme radical-socialiste. Maintenant qu’ils ont jeté le masque, ils sont cléricaux-nationalistes ». Cependant, en juillet 1904, comme 758 écoles dont 447 de filles, la fermeture de l’école est ordonnée. Mais l’activité de garde-malades perdure.
En 1911, Émilie Renaudin a cédé la fonction de prieure de la communauté à Marie Robin (sœur Marie-Armèle), qui était déjà à Joinville en 1896. Il y a alors sept pensionnaires. Émilie Renaudin a, à ce moment, environ 41 ans.
La date de décès d’Émilie Renaudin n’est pas connue.
Le site des Servantes des pauvres à Joinville-le-Pont
Mathilde Branchard naît le 13 mai 1840 à Angers, Maine-et-Loire (1er arr.). Elle est la fille de Marie Houssin et de Jean Baptiste Branchard, boulangers, qui vivent rue du Cornet.
Devenue religieuse catholique sous le nom de sœur Herménégilde, elle suit une formation d’enseignante à Saint-Savin (Vienne). En 1865, elle reçoit une médaille d'argent pour son parcours scolaire.
En 1872, elle séjourne dans une communauté religieuse de cinq sœurs à Écueillé (Indre), probablement une école, sous la responsabilité de sœur Marie Saint-Saturnin (Célestine Bertin).
Après la généralisation des écoles laïques, l’enseignement religieux devient soumis à autorisation. Pourtant, la congrégation des Sœurs de la Providence, à laquelle appartient Mathilde Branchard, ouvre plusieurs établissements en région parisienne.
Sœur Herménégilde devient directrice de l’école de Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), installée au 58, rue de Paris, à proximité des écoles privées laïques Rousseau et Quirot, installées dans le parc du Parangon. L’école, qui ouvre en 1897, comprend un pensionnat. Outre la directrice, elle compte trois institutrices, deux auxiliaires, une lingère et deux cuisinières.
En 1902, le ministère de l’intérieur, en charge des cultes, consulte les communes sur l’autorisation des établissements ouverts sans autorisation dans le département de la Seine par des congrégations autorisées. Parmi eux figurent deux pensionnats des sœurs de la Providence à Joinville et à Bondy (Seine, act. Seine-Saint-Denis).
Au sein du conseil, le débat est animé. Tous les conseillers municipaux ont été élus, en mai 1900, sur la liste du maire Eugène Voisin, qui avait le soutien du comité électoral radical-socialiste. Elle comprend une majorité de radicaux, francs-maçons et libres-penseurs. Lors du vote en juin 1902, il y aura une abstention, cinq votes pour l’autorisation parmi les conseillers municipaux les plus marqués à droite et treize votes contre, dont le maire et ses deux adjoints, le restaurateur Honoré Jullien et le doreur sur métaux François Nicolas Couppé.
En juillet 1903, la direction des cultes a notifié la fermeture de quarante-trois établissements religieux, dont le pensionnat des Sœurs de la Providence à Joinville. La commune conserve une autre congrégation, celle des Servantes des pauvres, qui ont un service de garde-malades. Les Petites Sœurs de l’Assomption s’installeront, après la première guerre mondiale, dans le parc du Parangon, elles aussi comme gardes-malades.
La suite de l’activité de Mathilde Branchard, qui avait alors 63 ans, ainsi que la date de son décès ne sont pas connus.
André Biscaldi naît le 11 novembre 1892 à Senlis (Oise). Il est le fils d’Ernestine Marie Zorra et de son mari Louis Biscaldi, marchand tailleur. Ses parents sont natifs du Piémont et de nationalité italienne. Ils obtiennent, en février 1894, la nationalité française pour eux-mêmes et pour leurs cinq enfants vivants.
Suivant les cours de l’École libre des frères chrétiens, André Biscaldi y obtient un prix d’honneur en août 1905. Il joue au football comme demi dans l’équipe GSP Saint-Rieul de Senlis, engagée dans le championnat de l’Oise.
Son père ayant acquis une boutique de tailleur pour hommes boulevard Saint-Germain à Paris (5e arr.), la famille vient s’installer rue du Bac.
André Biscaldi est arrêté en compagnie de deux autres camelots en décembre 1910, à tout juste 18 ans, pour avoir manifesté bruyamment dans les rues au sortir de la réunion de Paris (6e arr.) rue Saint-André-des-Arts qui a acté de la scission des organismes royalistes, parmi lesquels l’Action française prend le dessus. Il sort dans la soirée. Ces séjours en prison sont, pour les militants d’extrême-droite, des motifs de gloire en interne. Rapportant que Biscaldi avait raconté cette manifestation à la section de Senlis, le quotidien Action française écrit qu’il « a eu l'honneur d'être arrêté. »
De manière très régulière, André Biscaldi, comme toute sa famille, va participer aux appels de fonds lancés par la presse royaliste. Il en approuve les thèmes. Ainsi, en décembre 1910, il contribue, avec son frère Raoul, à la souscription « Le Juif sera vaincu » dont l’objectif est de « lutter contre la presse juive, contre la presse enjuivée, contre la presse asservie ». Il est de nouveau contributeur de l’appel « Pour la propagande du journal et contre l'or juif » en août 1913.
Biscaldi s’engage, dans les Camelots du Roi, service d’ordre et mouvement de jeunesse du groupe royaliste Action française, dont Charles Maurras est l’inspirateur. Il fait partie du groupe du 14e arrondissement de Paris. En décembre 1910, il rend compte à la section d'Action française de Senlis et du Valois de sa participation à une manifestation des Camelots du Roi et raconte qu’il « a eu l'honneur d'être arrêté. »
Le service militaire d’André Biscaldi débute en octobre 1913. Il est reste donc mobilisé dans son unité, le 171 régiment d’infanterie au début de la première guerre mondiale, en août 1914. Il passe au 35e régiment d’infanterie en septembre 1915 et est blessé, en novembre. Il est soigné à Carcassonne (Aude), à l’hôpital-auxiliaire n° 1.
Traduit devant le Conseil de guerre en décembre 1916 pour « refus d’obéissance sur un territoire en état de guerre », il se voit reconnaître des circonstances atténuantes et doit faire deux mois de prison ; après-guerre, sa condamnation est amnistiée. Transféré au 44e régiment d’infanterie puis au 135e, il est de nouveau hospitalisé à Angers (Maine-et-Loire) à quatre reprises entre mars 1917 et juin 1918, date à laquelle il est réformé pour « maladie mitrale très mauvaise ». Il a probablement été intoxiqué par des gaz de combat. En septembre 1921, une pension de 10% lui sera accordée. Il est démobilisé en décembre 1918.
Ayant séjourné à l’hôpital d’Angers (Maine-et-Loire) en 1917-1918, André Biscaldi y a rencontré Marguerite Jeanneteau, qu’il épouse sur place en novembre 1920. Ils vivent à Saint-Maur-des-Fossés (Seine, act. Val-de-Marne), avenue Godefroy de Cavaignac puis, à partir de 1924, dans la commune voisine de Saint-Maurice, avenue des Canadiens. À partir de 1931, André Biscaldi vit avec Jeanne Dupuis-Guébert, toujours à Saint-Maurice, mais dans la Grande-Rue. Cette dernière est présentée comme son amie dans le recensement de 1931, puis comme sa femme en 1936, bien qu’il n’y ait pas de trace de leur mariage. Ils élèvent la fille d’André Biscaldi et Marguerite Jeanneteau, Janine.
En matière professionnelle, André Biscaldi est géomètre topographe. Il se présente, à partir de 1924 comme métreur-vérificateur. À l’instar de son frère Raoul, et probablement avec lui, il est se déclare comme architecte en 1931. Il cesse probablement cette activité et semble avoir été chômeur en 1935. Il est ensuite contremaître pour l’entreprise de bâtiment Gillet à Paris.
À suivre
Des camelots du roi lors de la fête de Jeanne d'Arc
Joséphine Modeste Bondu naît le 23 novembre 1841 à La Séguinière (Maine-et-Loire). Elle est la fille de Marie Augereau et de son époux Michel Bondu, laboureurs.
Elle fut d’abord bergère à douze ou treize ans, sans avoir fréquenté l’école. À 17 ans, elle entra au noviciat des sœurs franciscaines de Cholet (Maine-et-Loire) en avril 1859 sous le nom de sœur Agnès de Jésus. Elles assurent une fonction de gardes-malades. Dès 1864, la supérieure de la communauté étant paralysée, sœur Agnès fut appelée à la suppléer. Pour être capable d’assumer ses responsabilités, elle apprit à lire et à écrire grâce à la sous-prieure de la communauté. Au décès de la supérieure en 1867, elle prit officiellement le titre et devint mère Agnès.
Après la guerre franco-prussienne de 1870, un moine de l’abbaye de Solesmes, Dom Camille Leduc, décida de fonder une congrégation de servantes des pauvres, pour laquelle il adopta la règle de Saint-Benoit. Il mit à la disposition de la nouvelle œuvre la maison de la rue Saint-Eutrope, à Angers, dont il venait d’hériter au décès de son père. Il sollicita les franciscaines de Cholet, qui acceptèrent et, la nouvelle congrégation des Servantes des pauvres ouvrit en février 1872. Elle établit un noviciat au lieu-dit Les Plaines en août 1873 et reçut son approbation officielle en tant qu’ordre bénédictin en avec à sa tête mère Agnès en mai 1874.
Une laïque contribua à l’établissement de la nouvelle communauté. Françoise Jouin, veuve d’un ébéniste d’Angers, était mère de deux prêtres, Amédée Jouin, qui sera supérieur de l’ordre dominicain, et Ernest Jouin, alors vicaire à Angers et qui devint directeur spirituel des Servantes des pauvres.
En novembre 1883, l’abbé Ernest Jouin, devenu curé de Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), sollicita les Servantes des pauvres d’Angers pour établir une communauté dans sa paroisse. Trois sœurs venues d’Angers vinrent s’y installer, baptisant leur maison du nom de Sainte-Geneviève. La prieure en fut mère Agnès. Outre le service des malades, les sœurs s’attachent, sur les consignes de l’abbé Jouin à prêcher le cathéchisme ; il se réjouit ainsi qu’elles aient converti des agnostiques, une protestante, des juifs, un franc-maçon.
La maison des sœurs servantes des pauvres à Joinville-le-Pont
En conflit avec les autorités municipales, l’abbé Jouin quitte Joinville en 1886. Il assurera ensuite qu’un des motifs de ses mauvaises relations avec la municipalité radicale était l’établissement des sœurs.
L’annonce du départ de Joinville de l'abbé Jouin et de celle possible des sœurs provoqua une pétition, qui obtint 900 signatures, dans une commune qui comptait 3 800 habitants, et fut portée à l'Archevêché. Les sœurs gardes-malades restèrent sur place avec le soutien actif du nouveau curé, Alfred Roustan. Leur maison grandira, abritant 13 gardes-malades en 1936 et rayonnant sur certains quartiers des communes voisines de Saint-Maur et Champigny.
Devenu curé de Saint-Médard à Paris (5e arr.), l’abbé Jouin fait de nouveau appel aux Servantes des pauvres pour sa paroisse. Mère Agnès et trois autres religieuses quittent en novembre 1896 Joinville pour établir la première communauté parisienne de l’ordre. Lorsque le même abbé fut nommé à Saint-Augustin, en 1898, il fit encore une fois appel à elle et à la communauté qui s’y installa en 1901.
Le priorat de la Mère Agnès à Saint-Augustin dura huit années. En 1909, elle célébra le jubilé de ses 50 ans de vie religieuse. À la fin de l’année, malade, elle retourna à la maison-mère d’Angers.
Modeste Bondu meurt le 4 mars 1918 à Angers. Elle était âgée de 76 ans et fut enterrée à proximité du fondateur de l’ordre, Dom Leduc. La messe d’enterrement le 6 mars fut présidée par Mgr Rumeau, évêque d’Angers. Son éloge funèbre a été prononcé par Mgr Jouin, curé de Saint-Augustin à Paris et a été édité.
Peu avant le début de la première guerre mondiale, l'abbé Joseph Sauvêtre quitte la banlieue populeuse de Saint-Ouen pour retrouver la rive gauche parisienne et le quartier latin, en devenant curé de Saint-Etienne-du-Mont, église paroissiale de la montagne Sainte-Geneviève (5e arr.). Il prend la place du chanoine Lesêtre, intellectuel réputé. Le journal mondain Le Gaulois remarque le contraste : « à un homme d'étude et de science, succède un homme d'œuvres ». C’est l'abbé Jouin, ancien vicaire de la paroisse, qui procède à son installation, soulignant que l'abbé Sauvêtre fut « son commensal » et, selon Le Figaro, lui vouait « tendresse, respect et dévouement. »
Pendant le conflit, l'abbé Sauvêtre mobilise ses paroissiens en invoquant Sainte Geneviève, patronne de Paris. Il publie, en septembre 1916, Sainte Geneviève et l'invasion allemande en 1914, brochure illustrée par Mlle Moreau-Wolff. Il réclame qu’une statue de la saine soit dressée près de la Seine. Dans Dieu et patrie (octobre 1916), il répond à la question : « La victoire de la Marne. Y a-t-il eu miracle ? ». Pour Joseph Sauvêtre, il s’agit « d'un miracle relatif, c'est-à-dire d'une volonté toute spéciale de la Providence qui a tout disposé pour permettre à nos armées de remporter la victoire ». Pour lui, « celle qui, en 451, éloigna, par sa prière Attila et ses Huns des murs de Lutèce » a permis que soient repoussés en septembre 1914 « le nouvel Attila et ses hordes barbares. »
En août 1920, l'abbé Sauvêtre émit le souhait d’apposer une plaque commémorant cette bataille qu’il voulait qu’elle comporte le texte suivant : « Le 6 septembre 1914, les armées allemandes étant aux portes de la cité, Paris recourut à son antique patronne. Trois jours durant, la foule vint prier devant la châsse. Sainte-Geneviève entendit ces supplications. Comme Attila, l’ennemi se détournant de la ville fut vaincu sur les bords de Marne. ». Le quotidien LeCri de Paris rapporte la polémique qui s’ensuivit dans les services municipaux. Pouvait-on laisser dire que « Paris » avait invoqué sainte Geneviève ? L’administration des Beaux-Arts « opina que le clergé catholique n'avait pas qualité pour parler au nom de Paris. On demanda donc à M. le Curé de substituer au mot Paris l'expression collective les fidèles de Paris. Et M. le Curé, qui est un homme d'esprit, ne fit pas la moindre difficulté pour accepter ce distinguo. »
Après la légendaire défenseuse de Lutèce, l'abbé Sauvêtre, devenu chanoine honoraire, rend hommage aux prestigieux anciens paroissiens de Saint-Etienne du Mont. Il fait graver dans son église le portrait de Frédéric Ozanam, fondateur des Conférences de Saint-Vincent de Paul en décembre 1919. Il célèbre le tricentenaire de Pascal en présence d’autorités politiques et du bureau de l’Académie française en juin 1923. En décembre la même année, il salue la mémoire du cardinal de Richelieu.
En 1925, il met une chapelle de sa paroisse à la disposition de l’église syrienne de Paris, qui permette d’accueillir la population originaire du Liban et du Levant.
Malade, Joseph Sauvêtre quitte son poste de curé de Saint-Etienne du Mont en en février 1929 ; il est remplacé par Joseph Courbe, premier vicaire de Saint-François-Xavier à Paris.
Il quitte Paris et vit en 1936 à Hyères (Var). Il consacre à son ami, Ernest Jouin, mort en juin 1932, une biographie, au contenu hagiographique, qui montre ses talents d’écriture, parie en 1936 chez Casterman. Elle a été rééditée plusieurs fois. Joseph Sauvêtre tente également d’engager la béatification d’Ernest Jouin ; cependant, sa tentative pour promouvoir la cause du protonotaire pourfendeur de la franc-maçonnerie et antisémite n’aboutit pas.
Il s’installe à Vern-d'Anjou (act. Erdre-en-Anjou, Maine-et-Loire) où son frère cadet Eugène Sauvêtre est curé depuis 1911. En juin 1940, l’église paroissiale Saint-Gervais-et-Saint-Protais est endommagée par un bombardement allemand, puis réparée en 1941.
Joseph Sauvêtre meurt le 25 juillet 1949 à Vern-d'Anjou. Il était âgé de 87 ans et était prêtre depuis 64 ans. Il avait obtenu le prix Montyon de l’Académie française en 1937 pour sa biographie de Mgr Jouin.
Marie Joseph Sauvêtre naît le 27 mai 1862 à Chaudefonds-sur-Layon (Maine-et-Loire). Il est le fils de Françoise Piffard et de son époux Charles Sauvêtre, charron.
Vers 1873, Joseph Sauvêtre vit à Angers et fréquente le petit patronage paroissial de la cathédrale Saint-Maurice initié par le jeune vicaire Ernest Jouin. Il profite des promenades dans la campagne environnante. Il prend part également aux petits spectacles organisés dans ce cadre, La Grammaire d’Eugène Labiche ou l’opérette Les Deux petits Savoyards de Nicolas Dalayrac et gardera ensuite un goût évident pour la mise en scène. Joseph Sauvêtre restera toute sa vie très lié à l’abbé Jouin. Ce dernier raconte, en 1918, l’anecdote suivante : « Je lui avais donné sa première leçon de latin et j'y mis une telle chaleur qu'il faillit s'en évanouir d'émotion. Je cessai du coup mes fonctions pédagogiques. Dès lors, je suis devenu le pourvoyeur des écoles des petits et des grands séminaires. »
De fait, l’abbé Jouin étant devenu en 1875 vicaire de l’église Saint-Etienne du Mont à Paris, il fait venir Joseph Sauvêtre au petit séminaire de Notre-Dame des Champs, dont il fut un des plus brillants élèves selon la presse. Il poursuivit ses études au séminaire Saint-Sulpice, toujours à Paris puis fut ordonné prêtre en 1885.
À ce moment, l’abbé Jouin est curé de Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Le tout nouvel abbé Sauvêtre, qui n’a pas de fonction officielle, le rejoint et s’occupe notamment du catéchisme dans la paroisse.
Toujours sans attribution bien définie, Sauvêtre suit Ernest Jouin, nommé second vicaire de l’église Saint-Augustin à Paris (8e arr.) en août 1886. Ce n’est que cinq ans plus tard, en mars 1891, qu’il est à son tour vicaire à Saint-Augustin. Au départ de l’abbé Jouin en 1894, il se voit confier la direction du patronage paroissial, fondé par ce dernier et qui a pris une certaine ampleur.
Retrouvant une cure, celle de Saint-Médard (Paris, 5e arr.), Ernest Jouin fait de nouveau appel à son disciple, et obtient qu’il soit nommé, en juin 1895, second vicaire de sa nouvelle paroisse. Il se charge d’œuvres caritatives. Il met également en scène les pièces musicales produites par l’abbé Jouin, notamment La Nativité et La Passion, des mystères chantés qui jouissent d’une certaine réputation, malgré les réticences d’une partie de l’épiscopat. Après le départ de Jouin pour la cure de Saint-Augustin en 1898, Sauvêtre, resté à Saint-Médard, poursuit ses représentations et est nommé premier vicaire.
Quittant le centre intellectuel de Paris, l'abbé Sauvêtre est nommé curé à Saint-Ouen (Seine, act. Seine-Saint-Denis) en janvier 1907. L’archevêque de Paris, le cardinal Richard, décide de dédoubler certaines paroisses des quartiers populaires du département de la Seine : Montreuil, Asnières, Clichy et le quartier de Clignancourt à Paris (18e arr.) sont concernées. Sauvêtre devient ainsi le premier curé de l'église neuve Notre-Dame du Rosaire. Le quotidien socialiste L’Humanité, qui note cette nomination alors qu’il n’évoque pas habituellement les mouvements du clergé, fait remarquer que « la séparation a libéré l'évêque de l'obligation de demander une autorisation » pour faire cette modification des circonscriptions du culte catholique, ce qui était le cas jusqu’en 1905.
Dans sa nouvelle paroisse, l'abbé Sauvêtre s’efforce de promouvoir le « théâtre chrétien », moyen selon lui de concourir « au relèvement moral de la classe ouvrière ». Il ouvre, en novembre 1908 la salle Jeanne-d'Arc. Il y représente de nouveau en décembre 1909 puis en janvier 1911 La Nativité et en mars 1910 La Passion. Le quartier culturel Comoedia remarque en voyant La Passion en avril 1911 qu’il s’agit d’un « spectacle, d'amateurs, qui, avec des facilités de mise en scène bien utilisées, a été non sans raison applaudi. »
Il accueille aussi en février 1910 une pièce sociale de Noyal-Méricour, Notre pain quotidien, qui raconte les épisodes d'une grève ou, en mars 1912, Joseph, opéra biblique d’Étienne Mehul.
Joseph Sauvêtre s’implique également dans le domaine social. Il fait ouvrir une chapelle, dédiée au Sacré-Cœur de Cayenne, dans un quartier très populaire où vivent de nombreux cheminots. Il lance, en décembre 1913 dans le quotidien conservateur L’Univers un appel en faveur des habitants de « la zone » : « Là, vivent un millier de familles, sans autre abri que des baraquements dont se contenteraient à peine des animaux. Là, dans une promiscuité funeste, vivent des familles de huit et dix personnes. Là, des vieillards abandonnés attendent vainement leur admission dans quelque asile; là, des orphelins, sollicitent d'être recueillis ; là, des femmes chargées de quatre, cinq et six enfants, demandent du pain et des vêtements pour leurs pauvres petits ». Il appelle « les désœuvrés et les riches » qui « passent dans leurs équipages et automobiles pour aller au champ de course » à soulager ces « misères sans nom. »
Il préside en avril 1914 une réunion de propagande de la section de Saint-Ouen du syndicat des employés, pilier de la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) et encourage ses paroissiens à se syndiquer.
L’évêque d’Angers ayant accepté le départ d’Ernest Jouin pour Paris, il devient en 1875 vicaire de Saint-Étienne-du-Mont, église paroissiale de la montagne Sainte-Geneviève (5e arr.). C’est un quartier estudiantin, avec la Sorbonne, l’école Polytechnique, la faculté de droit ou le collège de France, ainsi que cinq collèges ou lycées. Deux années plus tard, il est chapelain de la basilique Sainte-Geneviève, toute voisine, où il se charge de prédication, tout en reprenant des études théologiques, qui lui permettront, en septembre 1879, d’obtenir le grade de maître en théologie et le diplôme de docteur, délivré à l’abbaye de Flavigny. La basilique devait être désacralisée et redevenir le Panthéon en 1880.
Atteint d’une pleurésie, l’abbé Jouin était en ce qui le concerne parti en convalescence à Arcachon (Gironde), où il assume quelques fonctions au sein de l’église Saint-Ferdinand pendant un séjour de 18 mois. De retour à Paris début 1882, L’abbé Jouin est nommé curé de Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne) en juillet.
Il prend la succession de l’abbé Georges Moreau (1842-1897), prêtre et essayiste, qui allait ensuite, en tant qu’aumônier en prison acquérir une certaine réputation en affichant son opposition à la peine de mort et aux mauvais traitements dont étaient victimes les prisonniers. Le nouveau curé rejoint une paroisse récente, puisque créée en 1860. Il n’a probablement pas de vicaire, mais un de ses anciens élèves du patronage d’Angers, l’abbé Joseph Sauvêtre, vient le rejoindre, sans fonction officielle. Il restera son ami pendant toute sa vie et sera son biographe.
À Joinville-le-Pont, Ernest Jouin a affaire à plusieurs élus républicains et radicaux, comme le maire, Gabriel Pinson, le restaurateur Honoré Jullien ou Jules-Ferdinand Baulard, ancien ouvrier devenu industriel, un temps communard et ardent défenseur de la cause laïque. Conseiller municipal de Joinville depuis 1881, ce dernier devint conseiller général de Charenton en 1884, puis député en 1889. Les relations virent à la confrontation.
Le nouveau curé hérite d’un conflit, provoqué par un contrôle, en 1881, des comptes du conseil de fabrique qui gère les fonds de la paroisse par le secrétaire général de la mairie, Fontaine. Les élus municipaux trouvaient que les recettes des pompes funèbres, perçues par le prêtre, responsable de la morgue municipale, étaient maigres. L’audit établit qu’il manquait à l’appel 1 200 francs. Le curé répondit qu’il avait mis cette somme dans sa poche, « ainsi que ça se fait toujours ». Il refusa de reverser les fonds ; l’archevêque de Paris assura qu’il n’avait fait que « suivre un usage ancien commun aux paroisses suburbaines ». En conséquence de ce refus, la municipalité décida de supprimer l’indemnité de logement versée au prêtre, qui ne disposait pas d’un presbytère. Dans un souci d’apaisement, l’archevêque nomma, en juin 1882, l'abbé Moreau aumônier de l'hôpital militaire Beaujon à Paris.
Plutôt que de chercher la conciliation, l’abbé Jouin va se lancer dans un combat juridique épique, transformant son bureau en un cabinet de conseil. L’affaire des recettes des pompes funèbres sera clôturée par une lettre du ministère de l’intérieur et des cultes de mars 1884 : « il y a lieu de prendre acte de l’aveu de M. l’Archevêque qui reconnaît qu’une bonne comptabilité ne saurait admettre cet usage ». Cependant, l’administration conclut : « mais la restitution des sommes perçues soulèverait de nombreuses difficultés ». Par contre, plusieurs questions connexes occuperont les tribunaux parisiens.
À la demande du conseil municipal, le ministre décide de dissoudre en février 1885 le conseil de fabrique qui, outre le curé et le maire, membres de droit, comprend des deux délégués du préfet et trois personnes nommées par l’archevêque. Un nouveau conseil doit être composé et le préfet nomme sur proposition du maire, deux francs-maçons notoires, Jules Ferdinand Baulard et Honoré Jullien, tandis que l’archevêque tarde à nommer ses remplaçants. Ayant à faire approuver le budget, le curé convoque, en avril, le maire et les membres de l’ancien conseil révoqué. Mais le maire, Gabriel Pinson, vient avec les nouveaux désignés. La séance se termine par des cris et des échauffourées, qui l’amènent à porter plainte pour avoir été jeté à terre. Lors du premier procès en juillet 1885, Jules Ferdinand Baulard indiquera que les membres révoqués les ont traités de « canailles, libres-penseurs, francs-maçons, buveurs d'absinthe et de vermouth » tandis que l’abbé Jouin assure que le maire a qualifié ses supporteurs de misérables et de voleurs.
Un des fabriciens est condamné en première instance à six jours de prison, peine commuée en appel en novembre en 16 francs d’amende. Après cassation en janvier, ils écopent tous de 25 francs d’amende en février 1886. En dernière instance, le conseil d’État confirme les peines, la révocation des membres du conseil et la qualification de « rébellion contre la loi » de leur attitude.
Pendant les péripéties judiciaires, l’abbé Jouin avait diffusé une Lettre aux paroissiens, tandis que le conseil municipal répliquait en diffusant le courrier du préfet révoquant le conseil de fabrique, dont les anciens membres publiaient une Lettre à la population dénonçant des « cabales montées par M. le maire à tous les carrefours de la commune » et « un parti prix haineux. »
À côté de son combat contre les autorités municipales, l’abbé Jouin obtient l’installation, en novembre 1883, d’une communauté de Servantes des pauvres, venues d’Angers, sous la conduite de mère Agnès (Modeste Bondu). Les trois premières sœurs, en plus de leur fonction de garde-malades, auraient obtenu des conversions : « des agnostiques, une protestante, des juifs, un franc-maçon » selon le biographe d’Ernest Jouin.
Il est également proche des sœurs Céleste et Caroline Amiel, issues d’une famille qui a compté plusieurs conseillers municipaux et un célèbre peintre portraitiste. Elles font don à la paroisse d’une maison, devenue le presbytère.
Manifestement inquiet de la tournure prise par l’affrontement politique entre le curé et les élus, l’archevêque tente de convaincre l’abbé Jouin de demander son déplacement. Il finit par décider de le nommer vicaire de l’église Saint-Augustin à Paris en juillet 1886. Une pétition, diffusée en particulier par les sœurs Servantes des pauvres et les demoiselles Amiel et qui aurait eu 900 signatures, avait demandé son maintien.
Commentant, en 1917, son départ de Joinville, l’abbé Jouin l’interpréta ainsi : « Je fus chassé par une municipalité franc-maçonne pour avoir fondé les sœurs Servantes des pauvres. »
Ernest Jouin naît le 21 décembre 1844 à Angers (Maine-et-Loire). Il est le fils de Françoise Cousin et d’Amédée Marin Jouin, artisan ébéniste.
Après le décès de son père quand il a quatre ans, Ernest Jouin est confié à sa grand-mère, à Bierné, puis à sa tante, à Ménil, jusqu’à ses sept ans. Il fut, comme ses deux frères, inscrit au réputé collège de Combrée (Maine-et-Loire), où il souffrit cependant, du fait d’une constitution fragile, des conditions spartiates de l’internat. Négligeant quelque peu le grec et le latin, s’intéressant plus à la littérature française, Ernest Jouin affirma sa vocation religieuse dès l’adolescence : « Aujourd'hui, 28 juillet 1861, moi, Jouin Ernest, âgé de seize ans, je me suis consacré au Cœur de Jésus. (…) De plus, aujourd'hui, j'ai fait à Jésus vœu de chasteté. »
Il décida, l’année suivante, de rejoindre son frère aîné Amédée, qui venait d’entrer comme novice dans l’ordre dominicain. Le noviciat était situé à l’abbaye Saint-Pierre de Flavigny-sur-Ozerain (Côte-d'Or) et Ernest Jouin y fut admis en septembre 1862. Il prit alors le nom de frère Mannès, son frère étant devenu le frère Augustin.
Pour son éducation religieuse, Ernest Jouin rejoignit ensuite le noviciat de Saint-Maximin (Bouches-du-Rhône), où il devint profès en septembre 1863, le même jour que son frère. Le régime conventuel ne lui réussissant guère en matière de santé, il séjournait l’été chez sa mère, puis revenait à Saint-Maximin avant d’être de nouveau affecté à Flavigny en 1865. Face à ses difficultés persistantes, il renonça en 1866, rentra à Angers et intégra le séminaire. Il fut ordonné prêtre en février 1868.
Toujours souffrant, il ne fut pas chargé d’un ministère plein, mais désigné comme surveillant des études du jeune François, fils du comte Roullet de la Bouillerie, dans son château de Lathan à Breil (Maine-et-Loire). Quand son élève intègre un collège jésuite, il fut nommé en juillet 1879 vicaire de Brézé, petite paroisse du Saumurois. Il retourne à Anger comme vicaire de la paroisse Saint-Joseph en avril 1871 puis, en septembre la même année, vicaire de la paroisse cathédrale Saint-Maurice. Pendant cette période, sa mère fut l’instigatrice de la création de la Congrégation des Servantes des Pauvres, vouée au service des malades indigents.
L’abbé Jouin crée un patronage pour les enfants, jouant quelques pièces de théâtre. Il a un succès limité, mais il accueille notamment Marie Joseph Sauvêtre, futur prêtre et qui restera toute sa vie le disciple et l’ami très proche de Jouin.
Selon sa correspondance, Ernest Jouin semble s’être beaucoup ennuyé pendant ces années en Anjou. Son frère Amédée était devenu prieur des dominicains à Lille, mais venait souvent à Paris pour les réunions de son ordre. Le second frère, Henry, handicapé, était entré dans l’Administration des Beaux-Arts, et sa mère l’avait rejoint à Paris. L’abbé Jouin obtint alors de son évêque d’être envoyé, lui aussi, dans la capitale. Ses deux frères furent décorés comme chevalier de la Légion d’honneur.