Mise à jour de la biographie de Basile Nicolas Crapart, publiée le 15 octobre 2014.
Basile Nicolas Crapart naît le 26 mars 1764 à Pontault-Combault (act. Seine-et-Marne) où vivent ses parents, cultivateurs, Marie Anne Buissonneau et Basile Crapart. Il épouse Marie Adélaïde Labour à Dampmart (Seine-et-Marne) en novembre 1786. Ils auront au moins quatre enfants.
Il exerce en l’an 9 et l’an 10 la profession d’aubergiste dans le village du Pont-de-Saint-Maur. Son établissement est situé rue du Pont (act. rue Jean-Mermoz).
Il est membre de la municipalité élue en fructidor an 9 (1801) à La Branche-du-Pont-de-Saint-Maur (qui deviendra Joinville-le-Pont en 1831) en tant que notable. Le maire est Laurent François Pinson.
Construite au 13e siècle et fréquentée notamment par les bateliers de la Marne, la chapelle Saint-Léonard avait été réparée en 1792. C’était le seul lieu culte de la nouvelle commune, fondée en 1790, et elle avait fait office d’église paroissiale, même si elle n’en avait pas le statut, avant l’interdiction des cultes sous la Révolution. Elle était désormais en très mauvais état et le sous-préfet de l’arrondissement de Sceaux autorisa sa démolition par un arrêté du 19 ventôse an 11 (10 mars 1803). Crapart est adjudicataire des matériaux de la chapelle pour la somme de 325 francs tandis qu’un autre aubergiste, Lemaire, devient locataire du terrain pour 12 francs par an. Seule la crypte fut conservée ; bien que classée, elle fut cependant détruite en 1953.
Basile Nicolas Crapart meurt le 29 octobre 1849 à Montrouge (Seine, act. Hauts-de-Seine). Il résidait, route d’Orléans, à la maison de retraite de la Rochefoucauld, et était veuf et âgé de 85 ans.
Louis Antoine Philip naît le 7 mars 1876 à Paris (4e arr.). Il est le fils de Marie Antoinette Lesbros et de son époux Daniel Dominique Philip, typographe. Ses parents sont originaires des Hautes-Alpes.
Vivant rue Saint-Paul, dans le même arrondissement, la famille s’installe, en 1902 avenue Gille, à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), dans le quartier de Palissy. Son père sera conseiller municipal de Joinville de 1908 à 1912. S’il y est domicilié, Louis Antoine Philip quitte cependant rapidement les lieux, car il est nommé, en juillet 1902, commis de comptabilité au secrétariat général du gouverneur français de Madagascar.
En octobre 1903, Louis Antoine Philip épouse à Nogent-sur-Marne Jeanne Alice Toussaint. Ils s’installent, avec un enfant, à Tananarive (Madagascar) en novembre 1908. Il est alors administrateur adjoint puis deviendra administrateur colonial en 1919. Le mariage ne va guère durer car, en juillet 1912, les époux Philip divorcent ; cependant, Louis Antoine Philip se remarie, toujours à Nogent, en décembre 1912 avec Lucie Suzanne Toussaint, sœur cadette de sa première épouse. Cette dernière contracte un nouveau mariage à Tananarive, où elle reste jusqu’à son décès en avril 1957.
Pendant la première guerre mondiale, Louis Antoine Philip est lieutenant au sein du 12e bataillon de chasseurs malgaches qui combat en métropole, dans l’Aisne, au sein de la division marocaine de la Xe armée. Le régiment obtient trois citations collectives à l’ordre de l’armée. Philip est également cité à l'ordre de l'armée, le 10 novembre 1918, pour avoir « A enlevé sa compagnie dans, un élan superbe à l'assaut d'une position fortement organisée et malgré un tir violent de mitrailleuses prenant ses sections de flanc. Est tombé très grièvement blessé, ayant la satisfaction de voir sa troupe atteindre l'objectif qui lui était assigné avant d'être évacué du champ de bataille. 2 blessures, 2 citations ». Il sera ensuite, dans la réserve, nommé capitaine en juin 1928.
Reprenant son activité civile, Philip réside à Fort-Dauphin (act. Tôlanaro) au sud-est de Madagascar en 1921. Il est chef du district de Marovoay, dans la province Majunga (nord-est de l’île) en 1926. Il prend sa retraite en 1930 en tant qu’administrateur de première classe et s’installe à Asnières (Seine, act. Hauts-de-Seine).
Après la deuxième guerre mondiale, la famille Philip est installée à Antibes, route de Grasse, villa Rose de Mai. Lucie Philip y meurt en mai 1949. Louis Antoine Philip décède le 12 août 1968 à Antibes. Il était âgé de 92 ans. En janvier 1919, il avait été fait chevalier de la Légion d’honneur à titre militaire. Il était également décoré de la Croix de guerre 1914-1918 et de la médaille militaire.
Mise à jour de la notice publiée le 8 novembre 2018. Suite de la biographie d’Antoine Berné
Tout en continuant à disposer d’un logement à Paris, la famille Berné s’installe à Joinville-le-Pont, dans le quartier nouvellement loti de Palissy, sur la rive gauche de la Marne. Elle réside rue de Brétigny (act. avenue du Président-Wilson).
En février 1878, fait partie de la commission d’initiative qui « invite les chambres syndicales ouvrières, les sociétés de production, de consommation et tous les amis du travail à concourir à la formation d’un grand parti d'étude et d’action », dénommé Ligue républicaine du travail contre le paupérisme. Le siège est situé dans le magasin de l’Association des ouvriers tailleurs, rue de Turbigo. Plusieurs responsables de la société font, comme lui, partie des fondateurs comme Bance, Godfrin, Boyer et Toussaint notamment.
Le principal maître d’œuvre de la Ligue est Joseph Pioche, publiciste, employé de commerce et membre de plusieurs coopératives de consommation et de production. Le programme de la Ligue vise à : « Substituer : 1° Au régime, si compliqué et si onéreux des intermédiaires commerciaux, la méthode rationnelle, morale et peu coûteuse de la corporation: clé de voûte de la solidarité est de l’émancipation économique des travailleurs. 2° Au régime financier du monopole, le crédit professionnel gratuit. 3° A l’imprévoyance administrative et à la chanté impuissante, l’assurance industrielle obligatoire contre le chômage, les infirmités prématurées et la vieillesse. »
La Ligue préconise l’abrogation des lois restrictives de la liberté du travail et la création d’un Impôt proportionnel au revenu. Elle ne semble pas avoir eu d’existence au-delà de son lancement au premier trimestre 1878.
À la même période, Berné s’engage dans la vie politique de sa commune, à Joinville-le-Pont. Antoine Berné fait partie des 17 conseillers municipaux, dont 16 républicains et un orléaniste, élus au premier tour en janvier 1878 pour les 21 postes à pourvoir. La liste bonapartiste de Louis Ferdinand Rousseau n’a « obtenu que très peu de voix » selon le quotidien Le Siècle. Gabriel Pinson, républicain, héritier d’une longue dynastie d’élus locaux, est élu maire de la commune. Au sein du conseil figure également Francois Blaize (1824-1900), ouvrier lunetier, fondateur d’une importante coopérative, la Société des lunetiers (ancêtre d’Essilor).
Resté directeur de l'Association générale d'ouvriers tailleurs, Berné invite ses associés à l’accompagner lors du dépôt d’une couronne sur la tombe de François-Vincent Raspail, chimiste et député républicain. Il préside, en juin 1879, le banquet de l’association au côté de Victor Schœlcher, sénateur. Une collecte est réalisée pour les amnistiés de la Commune de Paris et, en octobre la même année, l’association met des vêtements à la disposition du Comité central d'aide aux amnistiés. Fonctionnant toujours correctement, la coopérative a ouvert une seconde adresse sur le boulevard de Sébastopol à Paris. Berné a quitté sa fonction de directeur en mars 1879.
Alphonse Demeestère, hôtelier, conseiller municipal de Joinville et futur responsable du comité radical-socialiste de la 2e circonscription de l’arrondissement de Sceaux (département de la Seine), organisa en septembre 1879 dans sa commune une collecte en faveur d’un ancien communard, amnistié et indigent, Adolphe Morandy. Pinson, le maire de Joinville, hostile à cette initiative, fait voter un blâme contre Demeestère par la majorité du conseil. Cependant, sept élus, dont Berné, refusent de s’y associer et expriment leur opposition dans la presse.
Lors des élections municipales de 1881, qui voient la reconduction de Pinson, Berné n’est pas réélu. C’est le cas de tous les conseillers municipaux qui avaient refusé le blâme envers Demeestère.
Antoine Berné meurt vers le 6 septembre 1883, à l’âge de 54 ans. Son enterrement civil est organisé le 8 septembre au départ de son domicile parisien, 10, place de la Bastille, probablement à Joinville-le-Pont. Son épouse, Marie Ernestine Berné décède le 28 avril 1884 à Joinville. Deux personnalités locales, dont il était proche, déclarent le décès : Albert Bleunard (1827-1911), principal de collège en retraite et Francois Blaize, tous deux conseillers municipaux de Joinville.
En janvier 1884, Berné, présenté comme propriétaire, est tiré au sort post-mortem pour faire partie d’un jury de cour d’assises.
Mise à jour de la notice publiée le 8 novembre 2018. Suite de la biographie d’Antoine Berné
Si la grève de 1867 et ses suites judiciaires ont été néfastes pour les tailleurs parisiens coalisés et notamment Antoine Berné, elle contribue cependant à attirer l’attention sur leur coopérative, l'Association générale des ouvriers tailleurs. Le nombre des associés fut multiplié par quatre et atteignit 220, le capital étant triplé à 50 000 francs.
Les membres de l'Association s’engagent de manière régulière dans la vie politique. Ainsi, en mai 1865, Berné, avec Joly et de nombreux autres tailleurs, souscrit pour offrir à la veuve d’Abraham Lincoln, une médaille d’or, portant les inscriptions suivantes : Liberté — Égalité — Fraternité à Lincoln, président deux fois élu des États Unis, la démocratie française reconnaissante ». L’appel mettait en avant le fait que Lincoln, assassiné le 14 avril 1865, était un honnête homme qui avait aboli l’esclavage, rétabli l'union, et sauvé la république « sans voiler la statue de la liberté. »
Le lancement par Napoléon III d’un plébiscite pour faire approuver ses réformes constitutionnelles, en mai 1870, amène les deux directeurs de l'Association des ouvriers tailleurs, Brudon et Berné, à initier un Manifeste des membres de sociétés coopératives et des ouvriers parisiens aux habitants des campagnes : « Frères, A la veille d'un vote qui peut peser d'un grand poids sur les destinées de la patrie, il est bon que la voix des travailleurs des villes arrive jusqu'aux travailleurs des campagnes. (…) Pour nous, nous voterons Non ». Si le Non l’emporte dans les grandes villes telles que Paris, Marseille, Lyon, Bordeaux et Toulouse, il se contente, au niveau national, d’un score de 17,2%.
La chute de l’Empire et la proclamation de la République, en septembre 1870, va modifier la situation de la coopérative. Dans une lettre au géographe anarchiste, Élisée Reclus, publiée en janvier 1871 dans son hebdomadaire, La République des travailleurs, organe d’une section parisienne de l’Association internationale des travailleurs, Berné décrit ce que Reclus présente comme « Le socialisme en action » : « Dès le 8 septembre [1870, quatre jours après la proclamation de la 3e République], notre association s’adressait au maire de Paris pour obtenir de lui l’équipement de la garde nationale, Le 19, un traité signé [Charles] Floquet et [Jules] Ferry nous accordait 100 000 vareuses à façons (…). Immédiatement nous convoquâmes la corporation en assemblée générale, à laquelle nous dîmes : ‘’Le marché nous est personnel, mais si vous le voulez, il profitera à tous. Considérez-vous comme nos associés. (…) Le bénéfice, quel qu’il soit, sera réparti au marc le franc [au prorata] des sommes gagnées par chacun’’. (…) Nous avons payé le double pour la main-d’œuvre que ne payent nos concurrents, la Ville ne dépensant pas un sou de plus en notre faveur. (…) Nous avons jugé qu’il importait de créer dans chaque arrondissement un atelier municipal auquel la mairie locale pourrait faire des commandes directes, et employer en travail suffisamment rémunérateur un argent mieux dépensé qu’en aumônes. (…) Nos sept ateliers dans les 4e, 5e, 9e, 17e, 18e et 19e arrondissements occupent déjà plus de 2 000 personnes (…). Trente-cinq mille personnes (…) sont inscrites sur nos livres comme ayant participé à nos travaux et devant par conséquent participer à nos bénéfices. Ce sera, croyons-nous, la première fois que le principe de la répartition du bénéfice au travail aura été appliqué sur une si grande échelle ». Les nouveaux statuts de l’association introduisent un article qui stipule que « La femme est admise à faire partie de la Société au même titre que l’homme. Il faut toutefois que la femme en puissance de mari obtienne son autorisation. »
Au cours d’une assemblée générale des ouvriers tailleurs de Paris, le 21 février 1871, Berné propose la fusion de l’association qu’il dirige et de la chambre syndicale. Contestant ceux qui qui critiquent l’émission d’actions de cent francs, il souligne : « il faut toujours un capital et l’association future, comme celles qui existent, ont besoin de cet argent ». La fusion reste à l’état de projet et Berné ne semble pas avoir joué de rôle politique pendant la Commune de Paris (mars-mai 1871).
En mars 1873, Berné et Bance font part aux lecteurs du quotidien Le Rappel des progrès qu’ils considèrent que leur structure a accomplis. « Nous venons encore d'agrandir nos magasins de vêtements sur mesure pour répondre aux besoins de notre nouvelle clientèle. Si nous sommes heureux de pouvoir vous signaler nos progrès, c'est surtout au point de vue de l'exemple que nous donnons aux autres travailleurs qui voudraient bien nous imiter, mais qui ne se figurent pas assez la possibilité de la réussite. Il n'y a pourtant qu'à vouloir; car, vous le savez, aucune société coopérative ne commencera plus modestement que nous avons été obligés de le faire. Et pourtant, aujourd'hui, certains du présent, nous songeons à l'avenir. Nous venons de voter la révision de nos statuts pour créer une caisse de retraite. »
Avec plusieurs personnalités politiques et des économistes, Berné prend part à la fondation, en mars 1875, de la banque du Crédit coopératif.
L’Association des ouvriers tailleurs participe à plusieurs expositions internationales, comme celle de Philadelphie (États-Unis) en 1876, où elle reçoit un diplôme d’honneur et une médaille, où celle de Paris en 1878. Elle compte 228 adhérents en 1876. Si sa réussite est saluée par la presse, les milieux économiques s’interrogent parfois sur le modèle social qu’elle présente. Ainsi, L'Économiste français écrit en décembre 1876 : « Nous sommes donc toujours en présence d’une entreprise de patrons capitalistes qui, quel que soit leur nombre, ne font pas, au demeurant, autre chose que ce que font beaucoup d’autres patrons et capitalistes isolés opérant pour leur propre compte. (…) Les ouvriers intelligents, ordonnés, prévoyants réussissent presque toujours à améliorer leur condition. (…) L’association permet de vaincre plus aisément certains obstacles, elle comporte, en revanche, des difficultés et des dangers auxquels échappent les entreprises individuelles. »
Chaque année, à partir au moins de novembre 1876, l’Association des ouvriers tailleurs organise un vaste banquet réunissant ses membres, leurs familles mais également des personnalités politiques de gauche : députés, sénateurs, conseillers municipaux de Paris et représentants de la presse républicaine. Ainsi, à Saint-Mandé (Seine, act. Val-de-Marne) en 1876, on note la présence de Louis Blanc, de Georges Clemenceau, de Charles Floquet ou du député de la 2e circonscription de l’arrondissement de Sceaux Alfred Talandier, tandis que Victor Hugo et Léon Gambetta se sont faits excuser. Berné explique cette invitation : l’Association s’est adressée à tous, sans acception de nuances, parce que, divisés sur le terrain de la politique, tous sont ou doivent être d’accord au point de vue des réformes sociales. La soirée s’est terminée par une collecte en faveur des familles des détenus politiques, notamment des anciens communards.
Mise à jour de la notice publiée le 8 novembre 2018. Début de la biographie d’Antoine Berné
Antoine Berné naît le 13 décembre 1828 à Moissac (Tarn-et-Garonne). Il est le fils de Jeanne Chaubet et de son mari Jean Berné, tailleur d’habits.
Il épouse, en août 1859 à Paris (2e arr.) Marie Ernestine Sainton, originaire de Loudun (Vienne).
Exerçant, comme son père, le métier de tailleur d’habits coupeur, fait partie d’un groupe de seize ouvriers tailleurs qui constituent, le 15 octobre 1863 l'Association générale des ouvriers tailleurs de la ville de Paris. Selon le journaliste Jean Barberet, qui fait l’historique de l’association dans le quotidien Le Rappel en août 1874, ils « se dirent qu'il était temps d’essayer la mise en pratique des principes que, depuis longtemps déjà, ils étudiaient en théorie ». Ils souscrivent au capital pour une somme importante de 3 000 francs, partiellement libérés.
Quatre d’entre eux travaillent au sein de la coopérative, qui a la forme d’une société en commandite, sous la responsabilité de Jean Mathieu Sauva, gérant. Elle est installée rue de Grenelle-Saint-Honoré à Paris (4e arr., act. rue Jean-Jacques-Rousseau) mais, après six mois, le propriétaire exige qu’ils retirent de leur enseignes la mention « association d’ouvriers ». Quoique payant d'avance, ils ont du mal à trouver un propriétaire qui accepte de les héberger, et s’installent rue Fontaine-Molière (1er arr., act. rue Molière).
Après deux exercices légèrement bénéficiaires, les fondateurs lancèrent un appel à leurs collègues de la corporation, pour les engager à se joindre à eux en décembre 1865. Ils transformèrent la structure en société à responsabilité limitée où chaque nouvel entrant devait acquérir une action de cent francs, en payant à l’entrée le quart de son prix. Selon Mathieu Brudon, qui s’exprimait en mars 1871 dans L’Ouvrier de l’avenir, « Un petit nombre de nos collègues répondit à notre appel, malgré la facilité des versements, qui étaient de un franc par semaine; la confiance est si difficile à établir entre semblables ! On est habitué à ne l’accorder qu’au monde officiel ou financier ». Malgré la déception de ce faible recrutement, la société nouvelle est formée en octobre 1866 à Paris avec 53 associés et un capital de 17 000 fr. Berné fait partie des sept membres du conseil d’administration. Il est probable qu’il ait exercé une fonction de direction dès cette période ; il est en tout cas désigné comme un des deux directeurs dans des communications publiées dans la presse à partir de mai 1870. Il partage alors cette fonction avec Brudon. En 1873, il est associé avec Pascal Bance. Il poursuit son rôle directorial entre 1874 et 1878 avec Toussaint puis en 1879 avec Serre. Il quitte la fonction en 1880.
Parallèlement au fonctionnement de la coopérative, Berné joue un rôle dans l’organisation sociale des tailleurs parisiens. La France a reconnu le droit de grève et d’action syndicale en 1864, mais par contre le droit d’association reste très limité par une loi de 1834.
Au cours du premier trimestre de l’année 1867, les ouvriers tailleurs parisiens revendiquent une hausse de leur rémunération et, face aux tergiversations des patrons, entament une grève. Berné devient un des animateurs du mouvement. Il profite de cette occasion pour faire de la propagande en faveur de la coopération de production. Le quotidien de droite La Presse, qui veut la fin du conflit, utilise la fonction de Berné dans sa société pour soutenir qu’elle le disqualifie en tant que représentant des tailleurs.
Pour soutenir les grévistes, et notamment pour financer leur subsistance, plusieurs personnes, dont Berné, constituent une Association fraternelle de solidarité et de crédit mutuel des ouvriers tailleurs, basée rue Rochechouart à Paris (9e arr.). Le préambule des statuts assure que « Les ouvriers tailleurs, résolus à résister, par tous les moyens que leur donne la loi, contre l’avilissement toujours croissant des salaires, et décidés à maintenir la limite de dix heures de travail au plus, afin de donner plus de temps à leur famille et à la culture de l’intelligence, ont décidé de fonder une Société dans le but de soutenir ces conditions ». Les animateurs de la grève font appel à la solidarité internationale, notamment celle des tailleurs britanniques, dont les syndicats versent une contribution à la caisse de grève et s’engagent à ne pas prendre de travail de la part de patrons français.
Le parquet du tribunal de Paris engage des poursuites pour association illicite de plus de vingt personnes et atteinte à la liberté du travail. Six personnes, dont Berné et Bance, président de la société, sont jugées le 2 août 1867 devant la sixième chambre correctionnelle ; seul le premier chef d’inculpation est alors retenu.
Berné est le premier des inculpés interrogés : « Nous n’avons pas cru du tout mal faire; nous avons imité ce que nous voyions faire ouvertement devant nous. [Question du président] Vous étiez plus de vingt personnes ?— [Réponse de Berné]. Oh ! Nous étions plus de deux mille. Q. Quel était le but de l’association? — R. De protéger nos intérêts, de faire respecter la dignité de l’homme. Q. La dignité de l’homme en tant qu’ouvrier tailleur. A quelles époques avaient lieu les réunions? — R. Elles n’avaient pas lieu à époques fixes. D. Dans quel but la Société s’est-elle réunie ? — R. C’était plutôt pour la grève que comme Société ; le comité proprement dit n’a pas eu le temps de fonctionner. D. Avez-vous quelque chose à ajouter? — R. Non, nous avons cru faire ce qui existait dans toutes les corporations, notre but était d’avoir quelques fonds pour subvenir à une grève quelconque. »
Le réquisitoire du procureur Pelletier reconnaît le droit de coalition, mais conteste le droit d’association. Pour lui « L’enjeu du procès, c’est la liberté du travail ! » Il souligne que Berné est membre du comité dirigeant. La défense est assurée par des avocats réputés, connus pour leur engagement politique et social : Ernest Picard, Emmanuel Arago, Emile Durier et Charles Floquet. Ce dernier, principal intervenant des plaidoiries, considère que « l’association découle du droit de coalition » et se félicite qu’il y ait eu 2 832 adhérents.
Le jugement rendu est sévère. Dans ses attendus, le tribunal relève que « si l’association est utile au développement des grèves, elle ne doit pas moins, dans l’intérêt de la sûreté publique, rester soumise à l’autorisation du gouvernement ». En application des articles 291 et 292 du Code pénal, issus de la loi du 10 avril 1834; la sentence « déclare dissoute la Société fraternelle de solidarité et de crédit mutuel des ouvriers tailleurs »; Bien que retenant « des circonstances atténuantes »; il condamne Berné, Bance, Coulon, Jeanroy, Jalinier et Deguergue chacun à cinq cents francs d’amende, somme importante. En appel, en absence des accusés, le jugement est confirmé le 23 août 1867. La Cour de cassation rejette leur recours le 7 février 1868, confirmant que les lois restrictives du droit de réunion et du droit d'association subsistaient.
Le procès a eu un grand écho dans la presse parisienne mais aussi en province. Le quotidien conservateur L’Univers commente ainsi : « On sait que la grève des ouvriers tailleurs s'était imposée avec un caractère de persistance telle, que la justice crut devoir faire des poursuites. Ces poursuites ont abouti à un jugement qui condamne six de ces ouvriers à 500 fr. d'amende et solidairement aux dépens. Mais le point important, c'est la dissolution de la société fraternelle de solidarité et de crédit mutuel des ouvriers tailleurs. Cette suppression a une grande portée, si l'on considère que presque foules les professions parisiennes ont constitué des sociétés de ce genre. Cette suppression frappe donc le principe de la grève dans sa base même. »
Une année plus tard, en juin 1868, le journal des milieux d’affaires, Le Temps revient sur ledit procès. « Nos lecteurs se souviennent encore de ce qui est arrivé l’an passé à la Société fraternelle de solidarité et de crédit mutuel des ouvriers tailleurs. Le jugement et l’arrêt qui ont prononcé la dissolution de cette société, et qui en ont frappé les membres d’une amende assez forte, ne sont pas encore oubliés. En voici la doctrine ou à peu près « Les ouvriers ont le droit de se coaliser ; ils ont la faculté de fonder des sociétés de crédit ; mais il leur est interdit de créer des caisses pour soutenir leurs coalitions; la combinaison de ces deux choses permises, la coalition et le crédit, devient un délit punissable sous le nom d’association non autorisée ». Pareille mésaventure vient d’échoir à l’Association internationale des travailleurs, frappée deux fois en trois mois par la justice, et qui a été avant-hier l’objet d’un sévère arrêt confirmatif ». Cette organisation est la première Internationale, qui regroupe des militants socialistes, communistes et anarchistes.
Rémy Jules Martin naît le 19 janvier 1900 à Dadonville (Loiret). Il est le fils de Marceline Claire Garreau et de son époux, Jules Alfred Martin, qui habitent le hameau de Denainvilliers. Ce dernier est jardinier, probablement au château du lieu-dit.
Château de Denainvilliers (Wikipédia)
Étant alors cultivateur, Rémy Martin est mobilisé en mars 1920 dans le cadre de son service militaire au 8e régiment d’artillerie. Il devient brigadier en janvier 1921 puis est hospitalisé, le mois suivant, pour sept semaines à l’établissement militaire de Percy à Clamart (Seine, act. Hauts-de-Seine) pour bronchite. Démobilisé en mars 1922 il sera promu, dans la réserve, maréchal des logis en juin 1927.
À la sortie de l’armée, Rémy Martin devient gardien de la paix dans la police parisienne. Il vit d’abord dans un casernement boulevard du Palais à Paris (4e arr.). Après avoir épousé, en septembre 1923 à Isserpent (Allier) Mathilde Terrenoire, ils s’installent en 1925 à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne) où il travaille probablement. Ils vivent d’abord dans le centre de la commune rue de Paris puis s’installeront dans le quartier de Polangis d’abord avenue Oudinot puis rue Bourguignon.
Complémentairement à son activité professionnelle, Rémy Martin est actif au sein de la société de secours mutuels dite Amicale de la préfecture de police. Il est collecteur de cette mutuelle en 1933 et délégué pour Joinville-le-Pont en 1938.
Pendant la deuxième guerre mondiale, Rémy Martin est affecté spécial à son poste au sein de la police de Paris jusqu’en juin 1944. Son épouse étant décédée en 1940, il se remarie en février 1943 à Joinville avec Joséphine Rouillé, ancienne commerçante divorcée.
Joséphine Rouillé devant son commerce, vers 1929
Après le conflit, il devient officier de paix en janvier 1955 avec le titre de brigadier-chef en juillet 1955. Il est alors à Charenton-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne).
Rémy Martin meurt le 21 février 1971 à Créteil (Val-de-Marne). Il était âgé de 71 ans et père de deux enfants, issus de son premier mariage. Il avait obtenu en avril 1933 une mention honorable du fait de son activité mutualiste. Pour la même cause, il est décoré du Mérite social en mars 1938.
Le décès d’Henri Vel-Durand, en septembre 1928, fait que Stephen Durande devient maire par intérim et prononce le premier des onze discours des funérailles. À ce titre, il prononce également, selon l’hebdomadaire de centre-droit, Gazette de l’Est, une « oraison funèbre » lors de la séance de l’assemblée communale le même mois.
Pour compléter le conseil municipal, des élections municipales partielles sont organisées en octobre 1928. Comme lors du scrutin de 1925, elles voient trois listes : le centre-droit, avec le dirigeant sportif Émile Lecuirot, les communistes derrière Bénenson et le cartel des gauches, conduit par le radical-socialiste Briolay. C’est ce dernier qui emporte les trois sièges. Les communistes, quant à eux, avaient présenté une candidate, Mme Martin, dont les bulletins furent annulés, car les femmes n’étaient ni électrices, ni éligibles.
Pour l’élection du maire, les voix se sont réparties au premier tour : les deux adjoints, Stephen Durande et Provin ont chacun huit voix, Briolay en a trois et deux conseillers municipaux, Liou et Gillot en reçoivent une. Provin annonça ne pas être candidat et, au second tour, Stephen Durande a été élu par quatorze voix contre trois à Briolay et une à Liou. Deux élus n’avaient pas voté au tour initial, ils sont cinq à le faire au deuxième. Provin devient premier adjoint et Louis Caillon, second adjoint.
Le premier investissement d’importance du nouveau maire est de faire construire un nouvel hôtel des postes, rue de Paris, en face de la mairie, remplaçant celui du quai du Barrage, qui existait depuis le second Empire.
Lors des élections municipales de mai 1929, les prédictions des journaux divergent. Le Petit Parisien estime que Joinville-le-Pont fait partie des communes « où les éléments de gauche rivalisent d'efforts pour renverser les municipalités modérées ». Le Matin croit que « La municipalité sortante présidée par M. Stephen Durande, recueille, au cours de la campagne, une force nouvelle et ne semble pas menacée ». Pour L’Avenir « La lutte sera circonscrite, à Joinville-le-Pont entre la liste du maire sortant, M. Stephen Durande, radical modéré, et une liste plus accentuée à gauche, à la tête de laquelle se trouve M. Briolay, conseiller municipal sortant, élu il y a très peu de temps, lors d'une élection complémentaire. Radical-socialiste, M. Briolay fait alliance avec les SFIO. Les deux listes arriveront avec un nombre sensiblement égal de voix. Aussi, est-il difficile de prévoir l’issue de la bataille. »
Les résultats du scrutin donnent, au premier tour, une avance à la liste de concentration républicaine, dont les candidats recueillent, en moyenne, 43% des suffrages exprimés quand les gauches républicaines suivent avec 36% et le Bloc ouvrier et paysan, du PCF, se situe à 16%, le solde se répartissant entre quelques radicaux indépendants, dont Liou et Gillot.
Le second tour marque, au contraire, un progrès des gauches, malgré le maintien des communistes. Avec 46%, les candidats conduits par Briolay emportent 22 des 27 sièges à pourvoir, le nombre de membres du conseil municipal ayant augmenté, tandis que la liste de Durande en a 5 avec 42%, mais lui-même est battu. L’extrême-gauche se tasse à 12%.
S’il cesse de jouer un rôle politique, Stephen Durande n’abandonne pas son activité publique à Joinville-le-Pont. En décembre 1930, il participe, avec les représentants des commerçants et la municipalité, à la formation d’un syndicat d’initiative. Il poursuit aussi sa présence dans les associations, notamment dans le club sportif USJ, dont il est réélu président entre 1930 et 1938.
Vers 1924, Stephen Durande avait acquis un petit château auprès du comte Charles de Goascaradec à Saint-Michel-des-Loups (Manche, act. Jullouville). Il versait à sa veuve, la comtesse Maria, ancienne couturière, une rente mensuelle de 200 francs et elle vivait dans une petite maison voisine, dans le hameau de Perrières, village de granitiers. Se croyant persécutée par le jardinier de Stephen Durande, Anatole Lebranchu, elle tire sur celui-ci en août 1934, sans l’atteindre. Elle a été arrêtée.
Stephen Durande meurt le 15 novembre 1951 à Joinville. Il était âgé de 76 ans et père de deux enfants.
Il avait obtenu, en mars 1925, une médaille d'argent pour actes de courage et de dévouement. Décoré comme chevalier du Mérite agricole en février 1914, il était officier depuis avril 1923 en tant que constructeur de matériel d'élevage et horticole. Pour services rendus à l’éducation physique, il avait obtenu les Palmes académiques entant qu’officier d’académie en mars 1926 puis comme officier de l’instruction publique en avril 1932.
Son épouse, engagée dans les œuvres sociales de la commune, avait obtenu une médaille d’honneur du grand prix humanitaire en décembre 1927.
Son premier fils a été appelé lui aussi Stephen Durande. Le second, Jean Stephen Durande fut récompensé, à l’âge de neuf ans, en 1924, pour avoir sauvé un camarade de la noyade en Marne.
Revenu à la vie civile, Stephen Durande va prendre une part croissante dans la vie locale. Toujours président du Groupement de Polangis et Palissy, il répond à la proposition de fusion faite par l’Union des commerçants de Joinville, qui représente le vieux Centre, sur la rive droite de la Marne.
Sur le plan sportif, Stephen Durande est en octobre 1919 le président-fondateur de l’Union sportive de Joinville (USJ). Basé dans le restaurant familial Les Bibelots du Diable, quai Hector Bisson, le club est principalement axé sur la natation en Marne, mais comprend d’autres sections, comme le basket ou la marche. On retrouve dans l’exécutif de la société Pierre Bureau, entrepreneur de maçonnerie, socialiste indépendant, Georges Briolay, figure de proue des radicaux-socialistes ou Fernand Paraiso, petit-fils d’un esclave africain au Brésil, originaire du Dahomey (act. Bénin), officier de l’armée française et futur résistant à l’occupation allemande pendant la deuxième guerre mondiale. En juillet 1921, Durande met à disposition de l’USJ un gymnase qu’il aménage sur un des sites de son entreprise, à Champigny-sur-Marne, route de Villiers. Le club procède également, en février 1927, à l’élection de la reine de Joinville.
Les élections municipales de Joinville-le-Pont, repoussées pendant le conflit mondial, sont organisées en novembre 1919. Durande figure sur la liste conduite par Henri Vel-Durand, adjoint au maire et, comme le maire sortant, Achille Mermet, radical dissident. Il s’est allié avec des socialistes indépendants et, effet de l’union nationale à l’œuvre pendant la guerre, avec les radicaux-socialistes officiels auxquels il s’était pourtant vivement affronté.
Le scrutin oppose la liste d’Union républicaine et sociale à celle du parti socialiste SFIO présente une liste conduite par Georges Laruelle, ainsi qu’au Bloc indépendant de la droite conservatrice et libérale, derrière Jules Beauvais. Les candidats de la majorité sortante obtiennent une moyenne de 44% des suffrages exprimés contre 30% aux socialistes et 26% à la droite. Durande recueille 798 voix sur 1 694 votes exprimés (47%) pour 1 715 votants et 2 491 inscrits. La droite s’étant retirée, l’Union républicaine et sociale remporte le scrutin avec plus de 63% des voix et tous les sièges. Durand a 961 bulletins en sa faveur sur 1 518 (63%). Le soir du deuxième tour, Achille Mermet, décède ; même s’il ne s’était pas représenté, il était toujours le maire en fonction.
Henri Vel-Durand est élu maire, avec comme adjoints Julien Périn, socialiste indépendant (ex-SFIO) et Stephen Durande. Il est, avec Théophile Leteuil et la recette municipale, un de ceux qui sont chargés de reprendre les jetons de la monnaie de guerre émise Groupement des commerçants, industriels et habitants de Joinville, dont la valeur cesse en décembre 1922. Ils sont échangés à leur valeur faciale et permette aussi de régler les taxes municipales.
Critiqué par le maire, Henri Vel-Durand, qui lui reproche ses absences, le premier adjoint, Julien Périn, qui s’en défend, est démis de ses fonctions en septembre 1923. Durande est élu à l’unanimité à sa place, tandis qu’un autre socialiste indépendant, Léon Roux, devient deuxième adjoint. Rancunier, Périn attaque dans le journal radical Voix des communes : « Le 1er adjoint [Durande], (passé par de louches combinaisons) a gardé la présidence de la commission de la voirie qui revient au 2e adjoint. De grâce, quittez la voirie ! »
Les élections municipales de mai 1925 signent la rupture de l’union de 1919 avec les radicaux-socialistes et le rapprochement avec la droite conservatrice, ainsi que l’apparition d’une candidature communiste. Un cartel des gauches non communistes est initié par une section de la Ligue de la République. Voix des communes accuse le maire sortant d’être « un pilier d’église », qui « défend les intérêts des gros capitalistes ». Le journal radical critique l’atteinte à l’urbanisme que serait, selon lui, l’extension de l’usine Pathé qui « masqua une partie des bords de notre belle rivière, empoisonna l’air » ainsi que les Studios de cinéma : établissement « informe, hideux, moitié caserne, moitié cage à gorilles. »
La liste d’Union républicaine pour la défense des intérêts communaux, conduite par Vel-Durand, attire un socialiste indépendant et un radical dissident, mais marque surtout le retour des représentants de la droite locale. Elle présente un programme revendiquant que les lois de laïcité soient « appliquées sans rigueur et sans sectarisme », souhaite le maintien de l’octroi, et propose des économies dans les dépenses budgétaires. Sa liste arrive largement en tête, avec 47,5% des voix au premier tour, loi devant le cartel des gauches à 28,4% et les communistes à 21,1%. Malgré le retrait de ces derniers, l’union de centre-droit remporte les 27 sièges à pourvoir au second tour avec 1 080 voix en moyenne, soit 47,5% des suffrages exprimés. Vel-Durand est réélu maire, Stephen Durande premier adjoint et François Provin prend la dernière place du bureau municipal.
Ayant conservé ses fonctions à la tête de l’Union sportive joinvillaise, Stephen Durande est également président de la Société symphonique communale en 1924. Il est réélu dans cette fonction jusqu’en 1927 au moins. Avec l’appui marqué des usines Pathé, elle organise dans un des restaurants de la ville plusieurs concerts chaque année, généralement en juin et autour de Noël.
En matière sociale, Stephen Durande devient vice-président de la section locale de la mutualité maternelle de Paris en mars 1924. Intéressé à la colombophilie, il avait participé en avril 1914 à l'exposition d'aviculture de Saint-Maur en présentant des pigeons Mondains et Carneaux. Il fonde en mars 1925 l’association Le Ramier de Joinville, qu’il préside. À ses différents titres, Durande joue un rôle dans l’organisation des fêtes des quartiers de Polangis et Palissy.
Continuant son activité professionnelle, Durande participe en mai 1926, à Suresnes (Seine, act. Hauts-de-Seine), au 12e Congrès de la Fédération des groupements industriels et commerciaux de la Région parisienne.
Henri Célestin Stephen L’Hôpital naît le 22 avril 1875 à Paris (1er arr.). Il est déclaré comme fils d’Antoinette L’Hôpital, artiste dramatique, qui vit rue du Faubourg-Saint-Martin, et d’un père non dénommé. Sa mère épouse en novembre 1897 à Joinville-le-Pont, où ils vivent alors, Étienne Claude Auguste Durande, dit Stephen Durande, également artiste dramatique et directeur de théâtre. Ce dernier reconnaît Stephen Durande junior comme son fils en juin 1894.
Son arrière-grand-père, Claude Auguste Durande (1764-1835), médecin, était chevalier de l'Empire puis baron en 1811. Il fut maire, de tendance légitimiste, de Dijon (Côte-d'Or) de 1806 à 1815 puis ensuite de 1815 à 1818. Jean Edme Durande, probablement son frère, avocat modéré, avait également été maire de la ville en 1794-1795. Une voie a été baptisée rue du Docteur-Durande dans l’ancienne capitale des ducs de Bourgogne. Il avait acquis le château Durande à Ahuy (Côte-d'Or), datant du XVIe siècle, qui fut en grande partie détruit par un incendie en décembre 1924 ; il n’appartenait alors plus à la famille.
À Joinville, la famille Durande vit rue de rue de Brétigny (act. rue du Président-Wilson), dans le quartier de Palissy. Ils exploitent, à proximité en bords de Marne, l'auberge des Bibelots-du-Diable, quai Hector Bisson (act. quai Gabriel-Péri), guinguette célèbre pour ses bals et concerts. En avril 1895, Stephen Durande sauve deux passagers d’un bateau, dont le navigateur s’est noyé ; le quotidien Le Petit Parisien remarque qu’ils « doivent la vie au jeune Stephen Durande, qui n'en est pas à son premier acte de courage et qui a fait preuve dimanche d'un sang-froid et d'une énergie qui lui ont valu les félicitations de tous ceux qui assistaient à ce sauvetage émouvant. »
Les Bibelots-du-Diable, à Joinville-le-Pont
En novembre 1896, Stephen Durande est dispensé de service militaire à cause de sa mauvaise vue. Sur le plan professionnel, il est serrurier. Il a monté une entreprise à Joinville, spécialisée dans les grilles et marquises, les clôtures pour parcs et châteaux. Il est également mécanicien agricole, constructeur de matériel d'élevage et horticole.
Le mariage de Stephen Durande avec Jeanne Gabrielle Lucot a lieu en avril 1900. Elle est voisine de l’auberge familiale du quai Hector-Bisson et fille d’un architecte des chemins de fer, militant conservateur dans la commune.
S’impliquant dans la vie locale, Stephen Durande prend la présidence du Groupement amical des industriels, commerçants et des habitants de Palissy-Polangis, les deux quartiers de la rive gauche de la Marne. Il s’implique, en 1909, dans une commission qui travaille sur un projet d’exposition nationale qui aurait pu se tenir à Joinville en 1910. Cependant, notamment du fait des graves inondations du début de cette année, le projet est abandonné.
En matière politique, Durande fait partie de ceux qui appellent à une réunion publique en juillet 1910 pour critiquer « l’incurie municipale » au sujet de l’entretien de la rue de Brétigny, abîmée par le passage des transports d’un entrepreneur depuis la Marne. à cette occasion, il se rapproche à la fois des libéraux, des conservateurs mais aussi des socialistes, qui ont trouvé ce moyen pour attaquer les radicaux-socialistes qui tiennent la mairie à ce moment.
Pendant la première guerre mondiale, si la forte myopie de Durande le rend toujours inapte au service armé, il est cependant affecté dans des fonctions auxiliaires, d’abord auprès du 9e puis du 19e escadron du train des équipages. En novembre 1915, il est détaché auprès de sa propre entreprise.
Il conçoit un système permettant aux chiens de livrer des soupes chaudes aux soldats du front dans des voitures adaptées. Il en entreprend la production, sur les plans de M. Hachet-Souplet. Un harnais épousant la forme du poitrail sur lequel est fixé un pivot mobile vient s'ajuster à un timon passant au-dessus leurs dos. L’Association pour le dressage du chien de guerre a fait établir des modèles de chariot à mitrailleuse se transformant en civière, des cuisines roulantes de tranchées, des paniers de ravitaillement, des tonneaux à eau. Elle recommande l’usage de la voiture de ravitaillement Durande. Ce dernier rejoint, en mars 1918 le 6e régiment de dragons. Il est démobilisé en mai 1919.
Le Groupement des commerçants, industriels et habitants émet des jetons, d’une valeur de de 20 ou 50 centimes, qui pallient le manque de liquidité du fait des opérations militaires. Frappés en aluminium, les jetons portent, à l’avers, les armes de la ville et au revers, la valeur en centimes, avec la mention du groupement et de la commune. La création de monnaies locales est répandue en France pendant la guerre, leur usage pouvant être interne à entreprise, étendu à une commune, à la circonscription d’une chambre de commerce voire à plusieurs départements comme en Provence.
À suivre
Jetons de monnaie de guerre à Joinville-le-Pont, 1918
Étienne Claude Auguste Durande naît le 13 décembre 1841 à Valbenoîte (act. Saint-Étienne, Loire). Il est le fils de Clarisse Adèle Leclercq et d’Étienne Jules Durande, qi ne sont pas mariés. Son père est capitaine d'artillerie, attaché à la manufacture d'armes de Saint-Etienne. Il meurt peu après la naissance de son fils, en septembre 1842.
Son grand-père, Claude Auguste Durande (1764-1835) était chevalier de l'Empire, il est devenu baron en 1811. Il était médecin. De tendance légitimiste, il fut maire de Dijon (Côte-d'Or) de 1806 à 1815 puis ensuite de 1815 à 1818. Jean Edme Durande, probablement son frère, un avocat modéré, avait également été maire de la ville en 1794-1795. Une voie a été baptisée rue du Docteur-Durande dans l’ancienne capitale des ducs de Bourgogne. Il avait acquis le château d’Ahuy, à proximité, datant du XVIe siècle. Son fils et lui y moururent. Le bâtiment, qui portait également son nom, fut en grande partie détruit par un incendie en décembre 1924.
Le château Durande à Ahuy
Vivant avec sa mère à Saint-Vigor-le-Grand (Calvados), Auguste Durande y épouse Félicité Julie Martin en janvier 1860 à Bayeux, dans le même département. Ils s’établissent à Puteaux (Seine, act. Hauts-de-Seine), rue Saulnier, où Auguste Durande est mercier. Il se déclare en faillite en avril 1864, signe un concordat avec ses créanciers en novembre et sort de la procédure en janvier 1865.
Durande s’oriente ensuite vers le secteur du théâtre et adopte le prénom de Stephen. En 1870, il est administrateur du Casino-Grétry de Liège (Wallonie, Belgique), une salle de bal et de spectacles, théâtre et jardin d’été, ouverte en 1865.
Le Casino-Grétry de Liège
Devenu veuf, Stephen Durande se remarie à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne) en novembre 1879 avec Antoinette L’Hôpital, dont il avait eu un fils quatre ans plus tôt. Ils vivent dans cette commune, rue de Brétigny (act. rue du Président-Wilson), dans le quartier de Palissy.
Stephen Durande est rédacteur en chef d’un journal hebdomadaire politique et littéraire, Le Mousquetaire, entre 1883 et 1885. En avril 1883, il précise son orientation : « Le Mousquetaire personnifie le dévouement complet au Roi et l’obéissance aux ordres de ses représentants. (…) La bannière sous laquelle nous marchons est celle de Jeanne d’Arc ; le drapeau qui nous abrite est celui du Béarnais, père du peuple. (…) Vive le Roi ! ». Son journal est affilié à l’Union royaliste. Il cesse de paraître après dix-huit numéros et est remplacé en 1884 par L'Intérêt social, qui paraît également chaque semaine toujours avec Stephen Durande à la tête de la rédaction. Il est mentionné lors des funérailles du comte de Chambord en septembre 1883.
En matière théâtrale, Stephen Durande dirige la salle des Bouffes-Parisiens. Son épouse exploite à Joinville l'auberge des Bibelots-du-Diable dans le quartier de Palissy, quai Hector Bisson (act. quai Gabriel-Péri), célèbre guinguette, qui attire la clientèle parisienne le dimanche. Elle sert du vin, fait hôtel-restaurant, organise des bals et des concerts. Malgré une faillite en octobre 1892, ils peuvent en reprendre l’exploitation après un accord avec les créanciers en décembre.
Ayant constitué une troupe à son nom, la compagnie Stephen, Durande fait représenter lors des fêtes de Jeanne d’Arc à Bourges (Cher) en mai 1898 des tableaux vivants sur le drame historique de la Pucelle d’Orléans. Il appelle les habitants à pavoiser et illuminer.
Stephen Durande meurt le 9 mai 1906 à Joinville. Il était âgé de 64 ans. Son fils et homonyme sera maire de la commune après-guerre.