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18 novembre 2021 4 18 /11 /novembre /2021 00:01

Charlotte Annette Étiennette Fruton naît le 25 avril 1898 à Paris (6e arr.). Elle est la fille d’Annette Dupré et de son époux, Étienne Joseph Fruton, employé de commerce. Ils vivent rue Mayet.

En 1911, la famille est installée à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), avenue Ratel, dans le quartier de Polangis. Étienne Fruton est devenu ouvrier dans les usines cinématographiques Pathé, situées dans le même quartier, tandis qu’Annette Fruton travaille au grand magasin parisien Le Bon Marché.

Une bourse d’internat à l’école primaire supérieure et professionnelle de Melun (Seine-et-Marne) est accordée à Charlotte Fruton pour l’année scolaire 1913-1914. Ayant obtenu un diplôme d’institutrice, elle ouvre après-guerre une institution privée, installée en 1922, toujours dans le quartier de Polangis, quai de Béthune. Elle intègre la formation musicale dans son école qui fonctionne toujours en 1932. Proche des milieux chrétiens, elle est par exemple la correspondante du centre de vacances de la Maison Sainte-Thérèse de l’Enfant-Jésus, aux Sables-d’Olonne (Vendée).

Elle reprend ensuite des études, pour devenir médecin. Elle soutient sa thèse en 1938, présentant un ouvrage court mais remarqué sur Mérimée et la médecine, éditée ensuite chez un imprimeur de Tournan-en-Brie (Seine-et-Marne). L’écrivain André Billy apprécie dans Le Figaro en juillet 1939 : le romancier Prosper Mérimée « avait une grande préoccupation de sa santé et faisait l'analyse de ses troubles physiques avec autant de lucidité que celle de ses sentiments et de son caractère. C'est ce qui a permis au docteur Charlotte Fruton de porter sur ses maladies des diagnostics si bien motivés ». Dans la Revue d'histoire littéraire de la France, le romancier Pierre Trahard, spécialiste de l’auteur de Colomba, remarque que la Faculté de Médecine a non seulement « conféré le grade de docteur à Mlle Fruton, mais elle lui a attribué un prix, soulignant ainsi la valeur scientifique de son travail ». Il considère que « la santé d'un écrivain peut avoir une influence sur son œuvre », citant notamment Edgar Poe, Baudelaire, Verlaine, Rimbaud et Émile Verhaeren. Et il s’interroge : « Le goût de Mérimée pour l'étrangeté, le mystère, la violence, les mœurs primitives et sauvages, l'instinct brutal, l'amour physique, est surtout intellectuel et volontaire. N'y entrerait-il pas néanmoins des éléments d'ordre physiologique ? » Il rend ensuite hommage au travail de Charlotte Fruton, « à sa précision scientifique et à l'élégance de ses analyses, qui dépassent déjà l'étude médicale et abordent avec sûreté la psychologie de l'homme. »

Au cours de la deuxième guerre mondiale, le Dr Fruton a établi son cabinet dans son logement de Joinville. Elle a une spécialisation en stomatologie et exerce dans les hôpitaux de Brévannes (Limeil-Brévannes) et d’Ivry (tous deux act. Val-de-Marne). Elle est la seule femme parmi les dix praticiens de la commune.

En février 1944, Charlotte Fruton se marie à Paris (13e arr.) avec l’ingénieur Joseph Turco, originaire de Tunisie et naturalisé français en août 1933.

Après le conflit mondial, Charlotte Turco-Fruton est membre du Mouvement populaire des familles. C’est un mouvement d'action catholique qui s’est radicalisé sur le plan politique à la fin des années 1940 et auquel l'épiscopat catholique retirera son mandat à l'automne 1949 pour créer l'Action catholique ouvrière (ACO). Pendant la guerre, le curé de la paroisse Sainte-Anne de Polangis était l’abbé Jacques Hollande, supérieur à partir de 1944 de la Mission de Paris et fondateur des prêtres-ouvriers.

Une autre personnalité des milieux chrétiens engagés socialement, Henri Melchior, syndicaliste et plus tard délégué permanent du Secours catholique pour Paris et la banlieue, vit également à proximité. Comme Melchior, Charlotte Turco-Fruton adhère au Mouvement républicain populaire (MRP, démocrate-chrétien).

En août 1950, elle fait partie des organisateurs de l’anniversaire de la Libération célébré dans la commune, avec les responsables des partis de gauche, les anciens combattants de la Résistance et deux autres mouvements féminins, l’Union des Femmes françaises (proche des communistes) et les Jeunes filles de France. Avec Mme Fabre, Charlotte Turco-Fruton représente le Mouvement populaire des familles.

Lors des élections municipales de mai 1953, elle figure en cinquième position sur la liste du MRP à Joinville. Le MRP obtient deux sièges, derrière les communistes qui en ont dix, deux listes de droite (six chacune) et les socialistes SFIO avec trois élus. Le MRP avait recueilli, en moyenne, 620 voix pour 6 748 suffrages exprimés soit 9,2%, la liste communiste ayant 35,6%, les gaullistes du RPF 19,3%, les divers-droite 19,7% et les socialistes 12,3%. C’est Georges Defert, membre du Rassemblement des gauches républicaines, élu sur la liste divers droite, qui devient maire, avec l’appui du MRP.

Le scrutin de mars 1959 se déroule avec un nouveau scrutin majoritaire. Le MRP figure sur une liste commune avec la RPF gaulliste et les socialistes SFIO, mais Charlotte Turco-Fruton a rejoint le maire sortant, Georges Defert qui emporte, au second tour avec 52,4%, les 27 sièges à pourvoir devant les communistes (34,1%), l’alliance perdant un grande partie de ses voix du premier tour à 13,1%. Mme Turco entre au conseil municipal, qui ne compte que deux femmes, plus petit chiffre depuis qu’elles sont éligibles. Defert est réélu maire.

Charlotte Turco-Fruton meurt le 15 mai 1985 à Cannes (Alpes-Maritimes). Elle était âgée de 87 ans et est inhumée à Joinville. Elle n’avait pas eu d’enfant.

Une maison à Polangis

 

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16 novembre 2021 2 16 /11 /novembre /2021 00:01

Georges Armand Garreau nait le 1er janvier 1845 à Milly (Seine-et-Oise, act. Milly-la-Forêt, Essonne) chez sa grand-mère Gabrielle Céline Mathieu de Dombasle née Bertier, alors veuve et directrice de la poste aux lettres de cette localité. Il est le fils de Gabrielle Adélaïde Mathieu de Dombasle et de son mari, Adrien Garreau. Il fera ensuite usage du nom Garreau-Dombasle. Sa mère est issue de familles de propriétaires terriens et aristocrates de Lorraine.

Il est probablement élevée par sa grand-mère maternelle, au moins pendant le voyage de sa mère au Chili et en Océanie (1847-1849) après qu’elle se soit séparée d’Adrien Garreau. Gabrielle Céline Mathieu de Dombasle avait alors quitté Milly pour devenir directrice de la poste de Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne).

Devenu journaliste en 1867, Georges de Dombasle (son nom de plume) collabore au journal Le Soir (1880-1892) puis au quotidien Le Siècle (à partir de 1890). Il est aussi rédacteur de L’Informateur parlementaire. Se présentant comme homme de lettres, il est le secrétaire général du Dictionnaire du commerce, de l’industrie et de la banque, paru chez Guillaumin à partir de 1898.

Le mariage de Garreau-Dombasle avec Louise Rosine Duchon est célébré en septembre 1874 à Dammarie (Eure-et-Loir). Vers 1880, ils quittent Paris pour Puteaux puis Levallois-Perret et Neuilly-sur-Seine (Seine, act. Hauts-de-Seine), enfin Taverny (Seine-et-Oise, act. Val-d’Oise).

Pour l’exposition universelle de 1900 à Paris, il est membre d’un comité d’admission des exposants. Il est secrétaire de l’Union des industries nationales en 1908 et adhère à la Société de géographie commerciale de Paris en 1905.

Georges Garreau-Dombasle meurt le 26 octobre 1912 à Taverny. Il est inhumé à Joinville-le-Pont. Âgé de 67 ans, il était chevalier de la Légion d’honneur depuis novembre 1900 et père de deux enfants.

Il est l’oncle du diplomate et résistant Maurice Garreau-Dombasle (époux de la poète et résistante Man’ha Garreau-Dombasle), et l’arrière-grand-oncle de l’actrice Arielle Dombasle.

Tombe Dombasle à Joinville

 

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14 novembre 2021 7 14 /11 /novembre /2021 00:01

Gabrielle Adélaïde dite Adèle Mathieu de Dombasle naît le 17 septembre 1819 à Nancy (Meurthe-et-Moselle). Elle est la fille de Céline Gabrielle Bertier et de son mari Joseph Antoine Mathieu de Dombasle.

Sa mère est l’héritière, du côté paternel, de la famille, riches négociants en denrées coloniales, ayant développé leur activité à Saint-Marc (Saint-Domingue, act. Haïti), avant de créer – après s’être rallié à la Révolution en 1789, le vaste domaine agronomique de Roville, dans la banlieue de Nancy. Du côté maternel, elle descend des comtes de Rennel et notamment de Marguerite Gabrielle, chanoinesse-comtesse de l’abbaye de Neuville-les-Dames (act. Ain).

Le père d’Adèle, Joseph Antoine Mathieu de Dombasle, officier d’état-major, était le frère de Christophe Joseph Alexandre Mathieu de Dombasle (1777-1843), agronome, gestionnaire de Roville dont il fit le précurseur des écoles supérieures d’agriculture en France. La famille fit d’abord faubourg Saint-Pierre puis dans le domaine de Brabois, principalement installé sur la commune de Villers-lès-Nancy.

En février 1842, Adèle de Dombasle épouse à Paris Adrien Garreau, violoncelliste et compositeur, plus tard professeur au conservatoire de musique de Toulouse. Ils avaient déjà eu une fille en novembre 1841 à Paris, Gabrielle Thelcide Berthe Garreau. Leur deuxième enfant, Ferdinand, naît en juillet 1843 à Paris (2e arr.) où ils résident, Neuve-Saint-Georges. Le troisième, Georges, naît à Milly-la-Forêt (Seine-et-Oise, act. Essonne) en janvier 1845. Gabrielle de Dombasle y est directrice de la poste aux lettres, ayant dû prendre une activité après le décès de son mari en janvier 1834. À ce moment, Adèle de Dombasle est peut-être déjà séparée d’Adrien Garreau.

Après avoir probablement laissé la garde de sa fille à son mari Adrien Garreau, et sans doute ses deux garçons à sa mère, Adèle de Dombasle obtient du préfet de police un visa pour se rendre à Valparaiso (Chili) et, de là, en Océanie. Elle quitta Bordeaux en septembre 1847 à bord du navire de commerce Le Gange. Sur le même bateau, un autre voyageur est enregistré, Edmond Ginoux de La Coche. Ils se connaissaient vraisemblablement déjà, et vont faire le trajet ensemble jusqu’en Polynésie.

Ginoux de La Coche est né en novembre 1811 à Annecy (duché de Savoie, act. Haute-Savoie). Sa famille, noble, légitimiste et catholique, l'envoie faire des études chez les pères Jésuites à Forcalquier (Basses-Alpes, act. Alpes-de-Haute-Provence). Ils vivent ensuite à Toulon (Var) puis à Vesoul (Haute-Saône). Orienté vers l'armée, il échoue au concours d’entrée à l’école de la Marine de Brest (Finistère), poursuit des études à Grenoble puis s’engage en octobre 1830, âgé de 19 ans, dans le 54e régiment d’infanterie basé à Briançon (Hautes-Alpes).

Envoyé en Algérie en décembre 1833, il combat les rébellions arabes puis est renvoyé à Marseille en janvier 1835. Il se lance dans le journalisme, écrivant dans des organes républicains : la Sentinelle des Pyrénées à Bayonne (Basses-Pyrénées, act. Pyrénées-Atlantiques), le Progrès d’Arras (Pas-de-Calais) puis Le National à Paris. Fréquentant des cercles intellectuels et progressistes à Paris, franc-maçon, il s’affiche opposé à la politique coloniale du régime du roi Louis-Philippe. La France venant d’annexer les îles Marquises et d’installer un protectorat sur Tahiti, Ginoux de La Coche décide de partir en mai 1843 pour « vivre auprès des Sauvages pour mieux les étudier ». Il séjourne d’abord aux Marquises, puis à Tahiti, où il est nommé procureur du roi et apprend le tahitien. Il crée ensuite L’Océanie Française, hebdomadaire, première publication en français dans le Pacifique Sud. Mais le journal doit cesser sa parution en juin 1845, sur ordre du ministre de la marine et des colonies, le baron Ange René Armand de Mackau, qui se méfie de Ginoux de La Coche.

Il rentre alors en France, où il présente à Guizot, ministre des Affaires étrangères, un rapport sur la situation aux Marquises et à Tahiti. Ce dernier lui confie alors une nouvelle mission dans le Pacifique, où il part donc en compagnie d’Adèle de Dombasle en juin 1847. Arrivés à Valparaiso en mars 1848, ils décident de se rendre aux Marquises à bord d’un trois-mâts chilien, le Lenievez Martinez, où séjournent deux semaines en août et septembre 1848 puis se rend à Tahiti. Mais le nouveau gouverneur des Établissements français de l’Océanie, Charles-François Lavaud, connaissait et détestait de Ginoux, qui l’avait attaqué dans des articles du National. Il l’expulsa au bout de neuf jours de séjour. Après un long périple en Amérique du Sud, aux Antilles et aux États-Unis, il retourna en France en 1850.

Pendant les péripéties politiques auxquelles est confronté son ami, Adèle de Dombasle dessine la population autochtone et ses habitations. Elle se heurte aussi à la prévention du gouverneur, qui vient vérifier dans son hôtel que de Ginoux et elle ne partagent pas la même chambre. Il laisse à Adèle de Dombasle le choix entre rester seule ou accompagner de Ginoux sur son chemin de retour. Elle décide de rentrer, mais suit son propre chemin, via le Brésil. Elle est en France en 1851 et publie plusieurs témoignages de ses observations aux Marquises, par exemple, dans Politique nouvelle, « Visite à la grande prêtresse. »

Pour l’ethnologue Émilie Dotte-Sarout, les dessins d’Adèle de Dombasle ont un niveau de détail exceptionnel, ce qui permet d’identifier les plantes ou les tatouages sur les polynésiens, ce qui en fait une source d’information archéologique unique. L’enseignante remarque que de Dombasle documente de manière précise les observations qu’elle fait. Sur place, elle avait adopté le nom local d’Atéra.

Lors de son premier séjour, Edmond de Ginoux avait rapporté environ cinq cents objets polynésiens, ou originaires des Fidji, des Tonga, des Samoa, etc. après son retour, il s’installa à Nice où, en 1857, il acquit une villa dans laquelle il entreposa sa collection. Il rédigea un catalogue raisonné de 337 objets, terminé en 1866 et édité en 2012. Adèle de Dombasle vint également résider à Nice.

Après l’hospitalisation en 1867 d’Edmond de Ginoux à Marseille, Adèle de Dombasle prit soin de sa collection puis, suite à sa mort en juillet 1870, elle acheta la villa. Les objets de la collection de Ginoux furent vendus, en 1874, à un hollandais, le baron Lycklama A Nijeholt. Installé à Cannes, ce dernier fit don de l’ensemble en 1877 à sa ville. Elle l’installa dans le musée municipal, dénommé musée de la Castre (act. musée des explorations du monde). Les pièces exposées comprennent également des objets rapportés par Adèle de Dombasle, comme le collier de la grande-prêtresse Hina.

En août 1875, Adèle de Dombasle se marie avec Gustave Dardel à Nice. Ils s’installent dans l’ancienne propriété d’Edmond de Ginoux.

Gabrielle Adélaïde dite Adèle Mathieu de Dombasle meurt le 8 novembre 1901 à Monaco (principauté de Monaco). Elle était âgée de 82 ans.

Son fils aîné Ferdinand Garreau-Dombasle (1843-1896), est professeur à l’école des mines d’Alais (act. Alès, Gard) et décoré des Palmes académiques. Il est le père du diplomate et résistant à l’occupation allemande pendant la deuxième guerre mondiale, Maurice Garreau-Dombasle, époux de la résistante et poète Man’ha Garreau-Dombasle. Il est l’arrière-grand-père d’Arielle Sonnery de Fromental, épouse Bernard Henri-Lévy, dite Arielle Dombasle. Adèle Mathieu de Dombasle est donc la trisaïeule de l’actrice et chanteuse.

Le second fils, Georges Garreau-Dombasle (1845-1912), est un homme de lettres et journaliste réputé, chevalier de la Légion d’honneur. il est inhumé à Joinville-le-Pont.

Dix-sept œuvres d’Adèle de Dombasle sont conservées dans des collections publiques, au musée Jacques-Chirac du quai Branly, à Paris.

 

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12 novembre 2021 5 12 /11 /novembre /2021 00:01

Suite de la biographie de Gabrielle Céline de Dombasle

Gabrielle Céline de Dombasle devient veuve, en janvier 1834, au moment du décès de son époux, Joseph Antoine Mathieu de Dombasle, officier d'état-major. Elle reste vivre dans le domaine de Brabois, à Villers-lès-Nancy, où se marie, à l’âge de 16 ans, sa fille aînée, Caroline, en décembre 1834, avec Lucien Salmon. Il fut l'un des trois arbitres d’une sentence arbitrale rendue entre son oncle Christophe Joseph Alexandre Mathieu de Dombasle et son grand-père, Antoine Bertier au sujet de la gestion de l’établissement agricole de Roville.

Blason des Mathieu de Dombasle

Sa seconde fille, Gabrielle Adélaïde dite Adèle, se marie en février 1842 à Paris avec Adrien Garreau, artiste musicien, professeur au conservatoire de musique de Toulouse (Haute-Garonne).

Les ressources financières de Gabrielle Céline de Dombasle sont probablement assez limitées ; elle se fait recruter en avril 1843 comme directrice de la poste aux lettres de Milly (Seine-et-Oise, act. Milly-la-Forêt, Essonne). Contrairement aux grands bureaux de poste urbains, réservés de fait aux hommes, les femmes peuvent accéder à la direction des bureaux ruraux, le terme de receveuse n’étant pas encore en usage. C’est une fonction qui est assez fréquemment attribuée à des veuves d’aristocrates ou de militaires.

Peu payé, le métier assure cependant une certaine considération, tout en imposant une responsabilité financière et un temps de travail considérable. En effet, les bureaux étant ouverts 7 jours sur 7, il n’y a pas de temps de repos. Les responsables ont certes droit à 15 jours d’absence, mais c’est sous réserve d’embaucher, à leur frais et sous leur responsabilité un remplaçant.

En 1845, Gabrielle Céline de Dombasle est toujours à Milly, et c’est chez elle que naît le troisième enfant de sa fille Adèle. Peu après, elle obtient la direction d’un autre bureau de poste, toujours classé comme rural, à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Il est probable qu’elle emménage en compagnie des deux plus jeunes parmi les trois enfants d’Adèle : Ferdinand Joseph, né en 1843, et Georges Armand, né en 1845. En effet, Adèle, séparée de son mari, entame en 1847 un voyage en Océanie, à Tahiti et aux îles Marquises, en passant par le Chili, d’où elle ne reviendra qu’en 1849 ; plusieurs des gravures qu’elle a réalisées sont exposées à Paris au musée Jacques-Chirac du quai Branly.

La poste aux lettres de Joinville-le-Pont est mentionnée à partir de 1838 ; elle est desservie par la poste aux chevaux de Champigny-sur-Marne. Gabrielle Céline de Dombasle figure comme directrice dans les annuaires à compter de 1848 ; le nom de son prédécesseur n’est pas connu. Le bureau est situé quai Beaubourg (act. quai du Barrage), dans le quartier du Centre.

Mme de Dombasle participe, en 1856, à la collecte de dons en faveur de l'armée d'Orient, 52 personnes et deux groupes souscrivant à Joinville. Sa fille aînée, Caroline, devenue veuve, se remarie à Joinville en octobre 1861 avec Nicolas Martignon, notaire.

L’administration des postes accorde, en octobre 1865, une modeste retraite de 428 francs par an à Gabrielle Céline de Dombasle, qui était toujours en poste à Joinville. Le décret mentionne qu’elle souffre d’infirmités ; elle était alors âgée de 68 ans et avait 22 ans et demi d’ancienneté.

La succession à la direction du bureau est accordée à une autre aristocrate d’origine auvergnate, Antonine de La Chassaigne de Sereys, veuve Potrolot de Grillon. Elle deviendra l’épouse du colonel Broutta et exercera sa fonction jusqu’en 1896.

Après sa retraite, Gabrielle Céline de Dombasle vit à Paris (16e arr.) chez sa fille aînée et son gendre, Caroline et Gabriel Nicolas Martignon, rue Guillou. Elle y meurt le 7 juillet 1870. Elle était âgée de 73 ans et est inhumée à Joinville dans un caveau qui accueille également plusieurs de ses descendants, dont son petit-fils, Georges Garreau-Dombasle, journaliste, chevalier de la Légion d’honneur, ainsi que ses deux épouses, Louise, née Duchon et Lucie, née Faure.

Un autre de ses petits-fils, Ferdinand Garreau-Dombasle, professeur à l'École des mines d’Alès, est le père du diplomate et résistant à l’occupation allemande pendant la deuxième guerre mondiale, Maurice Garreau-Dombasle, lui-même époux de la résistante et poète Man’ha Garreau-Dombasle. Leur fille, Francion Garreau-Dombasle, a épousé Jean Louis Melchior Sonnery de Fromental ; ce sont les parents d’Arielle Dombasle, épouse de Bernard Henri-Lévy.

Gabrielle Céline de Dombasle est donc la quadri-aïeule de l’actrice.

Fin

Tombe des Dombasle à Joinville-le-Pont

 

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10 novembre 2021 3 10 /11 /novembre /2021 00:01

Début de la biographie de Gabrielle Céline de Dombasle

Céline Gabrielle Bertier naît le 12 ventôse an 5 (2 mars 1797) à Nancy (Meurthe-et-Moselle). Elle est la fille de Marie Dorothée de Rennel et de son mari Thomas Joseph Bertier, qui vivent place de la République.

Sa mère, née à Nancy en 1758 et morte à Méhoncourt (Lorraine, act. Meurthe-et-Moselle) en 1807, est la fille du comte Joseph Balthazar de Rennel et de son épouse, Marguerite Gabrielle, également née de Rennel. En décembre 1758, à l’âge de huit mois, elle est reçue comme chanoinesse-comtesse de l’abbaye de Neuville-les-Dames (act. Ain). À l’instar d’autres établissements, comme ceux de Remiremont (Vosges), Baume-les-Dames (Doubs) ou Saint-Martin de Salles en Beaujolais (Rhône), elle faisait partie des abbayes nobles, où seules étaient admises des filles pouvant prouver une noblesse suffisante (16 quartiers de noblesse). Les pensionnaires ne faisaient pas vœu de célibat et pouvaient quitter l'abbaye et se marier. Une des sœurs cadettes de Marie Dorothée de Rennel, Charlotte Gabrielle, la rejoignit en 1761, à l’âge de quatre mois. Pour la différencier, elle fut désignée sous le nom de Mlle de Lescut, autre titre porté dans la famille. Le couvent fut dispersé, comme toutes les congrégations religieuses, en 1790. Marie Dorothée de Rennel épousa Thomas Joseph Bertier le 8 nivôse an 3 (28 décembre 1794) à Roville-devant-Bayon (Meurthe, act. Meurthe-et-Moselle) ; la mention d’état-civil omettait la particule.

Blason des de Rennel

Le père de Gabrielle Céline, Thomas Joseph Bertier, négociant en épices et denrées coloniales était le fils d’Antoine Bertier. La famille, riche, est alliée à plusieurs maisons nobles, comme les Robert de Jubainville à Bar-le-Duc. Lesté d’un baccalauréat en philosophie obtenu à Nancy (1779), il étudie le commerce pendant deux ans à Hambourg puis s’établit comme planteur à Saint-Marc (act. département de l'Artibonite, Haïti), dans la colonie française de Saint-Domingue. Selon la généalogie familiale établie par Cédric Touvet, « il acquit rapidement une fortune considérable. Il devait vendre des propriétés de colons, mais il lui est arrivé, à l'occasion, de vendre des esclaves faisant partie du lot ». Il revint en France en 1789, se déclara en faveur de la Révolution et fut nommé officier de la garde nationale de Nancy. Il acheta une vaste propriété à Roville-devant-Bayon en 1791. Maire de la commune et conseiller général de la Meurthe pendant plus de 50 ans, il fut député, membre de la Chambre des représentants durant les 100 jours, après le retour de l’île d’Elbe de Napoléon Ier.

Maison des Bertier à Nancy

Avec son père, Thomas Joseph Bertier fut le fondateur de l’établissement agricole de Roville, qui s’étendait sur 190 hectares. Ils en confièrent la gestion en 1820 à l’agronome Christophe Joseph Alexandre Mathieu de Dombasle (1777-1843) qui en fit le précurseur des écoles supérieures d’agriculture en France.

Gabrielle Céline Bertier avait épousé, en février 1817 à Méhoncourt (Meurthe, act. Meurthe-et-Moselle), Joseph Antoine Mathieu de Dombasle (1780-1834), frère du précédent, vicomte et lieutenant d'état-major. Ils vivaient à Villers-lès-Nancy, où ils étaient propriétaires du domaine de Brabois. Ils eurent deux filles, Marie Joséphine Caroline (1818-1877) et Gabrielle Adélaïde dite Adèle (1819-1901).

À suivre.

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8 novembre 2021 1 08 /11 /novembre /2021 00:01

Eugène Louis Albert Brégeot naît le 12 février 1869 à Pompey (Meurthe-et-Moselle). Il est le fils de Marie Lucie Thomassin et de son mari, Charles Joseph Brégeot, employé de la compagnie des Chemins de fer de l'Est.

Après avoir suivi les cours de l’école normale d’instituteurs, Eugène Brégeot commence dans l’enseignement à Longwy, Pont-à-Mousson et Verdun entre 1889 et 1892. Du fait de son statut, il effectue un service militaire de moins d’un an, entre novembre 1890 et septembre 1891. Il avait été nommé caporal en mai et servait dans des régiments d’infanterie (69e puis 154e). Il sera ensuite nommé sergent dans la réserve en août 1896.

À partir de 1896, il est affecté en région parisienne, d’abord à Ivry-sur-Seine (Seine, act. Val-de-Marne), l’année suivante à Malakoff (Seine, act. Hauts-de-Seine) et celle d’après à l’école de la rue de Valmy à Charenton-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne).

C’est dans la commune de Charenton qu’Eugène Brégeot va s’engager dans la vie publique. Il est, à partir de janvier 1900 au moins, collaborateur de l’hebdomadaire radical-socialiste Voix des communes dans lequel il écrit toujours en 1906. En mai 1902, il est secrétaire de l’Union des radicaux-socialistes de la 2e circonscription de Sceaux, circonscription qui est celle de diffusion du journal. C’est lui qui signe, en mars 1903, une adresse de l’Union à Émile Combes, président du conseil radical-socialiste, où ils lui expriment « l'expression respectueuse de leur confiance et de leur dévouement » en lui demandant de « poursuivre énergiquement la suppression de toutes les congrégations autorisées ou non » car ils sont « convaincus de l'action néfaste et antirépublicaine de toutes les congrégations, attendu qu'il est constant que le cléricalisme est l’adversaire irréductible de tout progrès et que la congrégation est la forme la plus redoutable du cléricalisme. »

Il n’est pas établi qu’Eugène Brégeot ait rencontré Marie Henry Brégeot (1855-1896), alias Gringoire et Henry Vaudémont. Ils ont cependant de nombreux points communs et Eugène Brégeot le connaissait manifestement bien. Les deux ont une origine lorraine dans des familles d’instituteurs ; ils ne semblent cependant pas avoir de liens familiaux. Henry Vaudémont fut chroniqueur et rédacteur en chef de l’hebdomadaire Voix des communes, et Eugène Brégeot utilisa dans ce journal le pseudonyme « Eugène Vaudémont ». Il était secrétaire de l’Union des radicaux-socialistes de la 2e circonscription de Sceaux, dont Henry Vaudémont fut aussi, dans les années 1890, un des responsables. Ils furent tous deux conseillers municipaux, élus avec l’étiquette radicale-socialiste. Enfin, ils étaient également franchement anticléricaux et francs-maçons, Eugène Brégeot faisant partie à l’origine de la loge Germinal de Joinville-le-Pont, commune où résidait Henry Vaudémont, lequel appartenait cependant à une loge parisienne (Jérusalem des Vallées égyptiennes).

Restant actif politiquement à Charenton, Eugène Brégeot est transféré à la rentrée de 1900, comme instituteur adjoint, à l’école de la rue Gobert à Clichy (act. rue Calmette à Clichy-la-Garenne). Il y restera jusqu’à l’été 1929. Il réside rue du Bois.

Le mariage d’Eugène Brégeot avec Marthe Marie Dubourgnoux, strictement civil, est célébré en mai 1904 à Paris (17e arr.).

Au cours de la première guerre mondiale, Eugène Brégeot est mobilisé, mais maintenu à son poste d’instituteur à Clichy. Après le conflit, il poursuit son engagement dans sa cité de résidence. Il rejoignit la loge maçonnique Les Précurseurs de Clichy.

En novembre 1919, Eugène Brégeot est candidat aux élections municipales sur la liste de Louis Gaudier, radical-socialiste. Il est élu et la liste remporte 31 des 32 sièges à pourvoir contre un à des socialistes indépendants.

Dans le cadre de son activité municipale, Brégeot est commissaire général du concours international de gymnastique organisé à Clichy en décembre 1922. Il est également secrétaire de l’association locale des anciens combattants à partir de novembre 1919.

Lors des élections municipales de mai 1925, le maire Louis Gaudier ne se représente pas. C’est son adjoint Desormeaux qui conduit la liste radicale. Au premier tour, ce sont les candidats communistes qui arrivent en tête (36,5%), devant les radicaux (34%), les socialistes (23,8%) et une liste indépendante (5,6%). Au second tour, les communistes emportent tous les sièges avec une moyenne de 46,7% des suffrages exprimés, les radicaux étant battus avec 43,4%, les socialistes reculant à 9%.

Ayant pris sa retraite de l’enseignement en octobre 1929, Eugène Brégeot, résidant toujours à Clichy, cesse un temps de travailler mais reprend une activité puisqu’en 1936, il est recensé comme employé, chez un notaire de Clichy. Il perd son épouse en octobre de cette année, puis son fils unique, âgé de 32 ans, en mars 1937.

Eugène Brégeot meurt le 30 janvier 1940 à Clichy. Il était âgé de 70 ans. En janvier 1904, il avait été décoré du Mérite agricole en tant que chevalier puis en février 1912 comme officier. C’est cependant son rôle de publiciste qui était récompensé, et non pas une activité en lien avec l’agriculture.

L’école de la rue Gobert à Clichy

 

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6 novembre 2021 6 06 /11 /novembre /2021 00:01

Suite de la biographie d’Adrien Moucheraud

Tout, en continuant de travailler en imprimerie, et alors encore militant anarchiste, Adrien Moucheraud est professeur de la section Aviation de l'Ecole supérieure de navigation aérienne pour la session 1889-1890. Le terme « aviation », utilisé depuis 1863, désigne alors la navigation aérienne qui, à cette époque, relève exclusivement de l'aérostation. Ayant produit lui-même son ballon, il fit sa première ascension le 10 mai 1890 à Paris, face à la toute récente tour Eiffel.

Il poursuit sa collaboration avec l’école l’année suivante. En août 1894, il a un premier accident de ballon. Il fête, en août 1896, sa centième ascension dans les Ardennes. Après une chute en août 1897, il est recueilli en mer par un remorqueur, à deux milles de la côte.

S’efforçant de motoriser ses ballons, Moucheraud subit un nouvel accident après l’explosion de fulminate de mercure, servant à actionner un moteur de son invention, en mars 1898.

Attiré, comme plusieurs milliers d’européens du continent, par la lutte des protestants de l’État libre d’Orange et de la République sud-africaine du Transvaal contre les colonisateurs anglais, Moucheraud se rend au Transvaal où la seconde guerre des Boers a été déclenchée en octobre 1899. Il rentre en France en septembre 1900 pour accompagner la visite de plusieurs généraux des deux républiques rebelles, conduits par le président Kruger. Moucheraud est présenté, dans les cérémonies officielles, comme « chargé de la défense aérienne au Transvaal ». Sa carte de visite stipule qu’il est « aéronaute des Républiques sud-africaines ». Environ 400 français figuraient parmi les quelques 7 400 membres de la Légion des étrangers, dont le colonel en retraite Georges de Villebois-Mareuil. Après de violents combats, et une répression féroce contre la population civile, les troupes britanniques mettent fin à l’indépendance des deux États et les intègrent à leur empire colonial en mai 1902.

Membre de l'Académie aéronautique de France, Moucheraud y est nommé pilote en février 1903. Il assure également la fonction d’archiviste-bibliothécaire. Il participe en tant que capitaine-pilote du ballon Prosper-Lambert à l’Exposition universelle de Saint-Louis, ville du Missouri (États-Unis) qui accueille, la même année, les troisièmes Jeux Olympiques de l'ère moderne.

Le mariage d’Adrien Moucheraud avec Victorine Marie Schmitt est célébré en février 1905 à Ivry-sur-Seine (Seine, act. Val-de-Marne) où ils résidaient alors. Il déclare exercer la profession d’imprimeur.

En 1906, il fait partie de la mission Wellmann qui, à bord du ballon dirigeable America, entendait survoler le pôle Nord à partir du Spitzberg. Moucheraud était chargé des observations scientifiques. Mais l’expédition ne put avoir lieu cette année-là. Remise en 1909, le ballon de la mission explosa à Christiania (act. Oslo, Norvège).

Une ascension de Moucheraud sur le Roitelet, ballon de 250 m3, est signalée à Bousval, (Brabant wallon, Belgique) en janvier 1907.

Adrien Moucheraud meurt le 7 novembre 1912 à Paris (5e arr.). Il est enregistré avec comme profession aéronaute, et résidait rue Linné. Il était âgé de 47 ans et ne semble pas avoir eu d’enfant.

Son frère Paul Moucheraud (1866-1945), ouvrier lithographe, qui fut avec lui militant anarchiste à Paris (1884-1894), était devenu socialiste à Joinville-le-Pont (1904). Il poursuivi son activité d’imprimeur à Saint-Maur-des-Fossés.

Fin

Les parents de Paul et Adrien Moucheraud

 

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4 novembre 2021 4 04 /11 /novembre /2021 00:01

Début de la biographie d’Adrien Moucheraud

Eugène Adrien Moucheraud naît le 17 mars 1865 à Paris (4e arr.) Il est le fils de Victoire Honorine Tiphaine, placière, et de son époux Lambert Moucheraud, peintre en bâtiment. Ils vivent rue de la Verrerie.

Adrien Moucheraud, ayant quitté l’école après 12 ans, fut placé en apprentissage de lithographe dans une imprimerie. Il va partager l’engagement militant de son frère, cadet d’un an, Paul Moucheraud, au sein du mouvement anarchiste, vraisemblablement dès 1884. Le 18 décembre 1885, il est arrêté après avoir posé des affiches du Comité exécutif révolutionnaire, pour appeler à une réunion, place du Chatelet, le jour suivant.

Le 11 juin 1886, il est condamné à Paris à deux mois de prison pour provocation d’un attroupement et le 11 septembre 1886, à quinze jours de prison pour la même raison.

En 1887, il créa en collaboration avec Jahn, Murjas, Paillette et Tennevin, l’hebdomadaire L’Avant-garde cosmopolite dont il fut l’imprimeur-gérant et qui eut huit numéros. Dans son éditorial, il écrivait « Oui, nous les jeunes, nous marcherons de l’avant et rien n’empêchera notre marche. Si sur notre route nous trouvons des obstacles, nous les briserons comme les vagues de la mer brisent les rochers… » Le premier numéro avait été tiré à 4 000 exemplaires.

Comme son frère Paul, il était membre de la Ligue des anti-propriétaires, fondée par Couchot, qui s’était spécialisée dans les déménagements « à la cloche de bois. »

Le 30 avril 1887, encore avec son frère Paul, après une réunion publique organisée par le groupe L’Avant Garde à Saint-Germain-en-Laye (Seine-et-Oise, act. Yvelines) ils avaient ouvert le feu contre des membres d’un groupe qu’ils qualifiaient de réactionnaires et qui leur jetaient des pierres.

Aux élections municipales de mai 1887, Adrien Moucheraud se présenta à Paris dans le 5e arrondissement, comme « candidat abstentionniste ». Il déclara : « Je ne préconise pas le suffrage universel, parce que voter, c’est s’avilir, c’est-à-dire qu’on est une bête incapable de se conduire. Quand la masse ne sera plus abrutie par la société actuelle, elle n’aura plus besoin de voter, pour arriver à la transformation de l’État social. »

Il fréquenta la plupart des groupes anarchistes parisiens. Lors d’une réunion le 8 octobre 1887, salle Gaucher, organisée par le groupe Germinal, il fit l’éloge de l’action individuelle qui qui contribue plus « à la révolution sociale que ne le feraient toutes les réunions. »

Au printemps 1888 Adrien Moucheraud demeure quai d’Anjou et est l’un des animateurs de la Ligue des antipatriotes dont son frère Paul est le secrétaire. Fin 1888, il est secrétaire de La Jeunesse socialiste des Écoles avec Georges Brunet ; il demeure à ce moment quai de la Tournelle à Paris.

Le 22 avril 1892, une perquisition était effectuée à son domicile du boulevard Saint-Germain à Paris ; la police y saisit des affiches et le manifeste La Jeunesse socialiste des Écoles, signé de son nom. Le 10 janvier 1893, il était arrêté aux abords de la Chambre des députés. Une perquisition effectuée le 1er janvier 1894, ne donna aucun résultat.

Le 3 mars 1894, le préfet de police délivra un mandat d’amener à son encontre pour association de malfaiteurs. Le 4 mars, le commissaire de Saint-Germain des Prés perquisitionna sa chambre de Moucheraud. Il avait refusé d’ouvrir la porte de son logement du boulevard Saint-Germain tout en proférant des injures, selon le policier, qui recourut à un serrurier pour forcer l’entrée. Parmi les documents saisis figuraient une carte du géographe Élisée Reclus, qu’il avait rencontré à la Société de géographie. Emmené au commissariat, il se déclara nihiliste et ami de Padlewski, assassin à Paris du général russe Séliverstoff, proférant des menaces envers les policiers puis le juge d’instruction. Ce dernier, nommé Meyer, désigna le 4 mai 1894, deux médecins afin d’examiner son état mental de afin de déterminer s’il était responsable de ses actes ou devait être enfermé dans une maison d’aliénés. Le rapport conclut à sa responsabilité tout en notant une grande exaltation. Il fut mis en liberté provisoire le 16 juin. De nouveau poursuivi par la préfecture, sur le même motif, il indique, le 1er juillet, ne plus s’occuper d’anarchie mais uniquement de son travail de lithographe et d’aérostation. Arrêté cependant, il est libéré le 10 juillet de la prison de Mazas. Le juge délivra, le 20 juin 1895, un non-lieu pour l’inculpation d’association de malfaiteurs. Comme son frère, Adrien n’eut plus d’activité dans les milieux anarchistes.

À suivre

Profession de foi abstentionniste d'Adrien Moucheraud

 

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2 novembre 2021 2 02 /11 /novembre /2021 00:01

Suite de la biographie de Paul Moucheraud

Paul Moucheraud fait un service militaire, probablement de deux ans, au sein du 91e régiment de ligne à Mézières (act. Charleville-Mézières, Ardennes) de 1888 à 1890.

Revenu à la vie civile, il reprend son activité militante et est de nouveau soumis à des mesures judiciaires et policières. Une perquisition à son domicile de la rue Charlemagne (Paris, 4e arr.) le 22 avril 1892 conduit à découvrir des journaux anarchistes. Il est ensuite « arrêté à titre préventif le 1er mai » selon Le Figaro, puis relâché.

Une autre perquisition, le 1er janvier 1894, ne donne aucun résultat ; elle fait suite à l’attentat commis par Auguste Vaillant à la chambre des députés le 9 décembre, qui a conduit à des mesures de police contre la mouvance anarchiste. Il est inculpé cependant pour « association de malfaiteurs ». De nouveau le 4 mars 1894, le domicile de Paul Moucheraud est perquisitionné, ce qui permet au commissaire du quartier de Saint-Merri de l’incarcérer, en même temps que son frère, à la prison de Mazas après avoir saisi une copie du Petit catéchisme socialiste du critique d’art Adolphe Tabarant. Il avait refusé d’ouvrir la porte de son logement du boulevard Saint-Germain tout en proférant des injures, selon le policier, qui recourut à un serrurier pour forcer l’entrée. Commentant les arrestations, le quotidien L'Écho de Paris, estime que les anarchistes arrêtés, 168 à Paris et 60 en banlieue, « Ce sont toujours les mêmes » que lors des précédentes rafles dans ce milieu.

Il est libéré le 4 juin. Mais dès le 30 juin 1894, le préfet de police délivre un nouveau mandat de perquisition sous l'accusation d’association de malfaiteurs et le commissaire de quartier de Saint-Gervais s’empare de sa correspondance ainsi que d’un autre pamphlet, L'attaque de la Bourse. De nouveau emprisonné, il sort le 9 juillet 1894. Le 18 juin 1895, le juge d'instruction Meyer l'a acquitté de toutes les accusations.

Après ce verdict, Paul Moucheraud semble avoir abandonné son engagement militant au sein du mouvement libertaire. Marié en décembre 1894 à Paris (4e arr.) avec Louise Hélène Blanche Bernard, il s’installe vers 1898 à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), où naissent ses quatre enfants.

À Joinville, Paul Moucheraud s’éloigne de ses convictions anarchistes antérieures. Ainsi, pour la déclaration de la naissance de sa fille Jeanne Lucie en novembre 1902, il choisit comme témoins un agent de police et un conseiller municipal, alors radical-socialiste, Théophile Leteuil. Lors de la naissance de son fils en juin 1904, il est assisté à l’état-civil d’un militaire, adjudant à l’école de gymnastique de Joinville.

En mai 1904, Moucheraud est candidat sur la liste socialiste-révolutionnaire qui se présente aux élections municipales. À cette date, la principale formation dans la commune est un groupe du Parti socialiste de France (Unité socialiste révolutionnaire), qui s’est détaché six mois auparavant du Parti socialiste français. Les deux dirigeants de ce groupe, Émile Lebègue et Henri Lacroix, sont à la tête des sept candidats, qui forment une liste incomplète, puisqu’il y a 21 sièges à pourvoir. Au premier tour, Moucheraud obtient 138 suffrages exprimés pour 1 119 votants (12,3%) sur 1 363 inscrits. Les socialistes n’ont pas d’élu, la liste de la municipalité sortante radicale-socialiste emportant 20 sièges, laissant le dernier à un élu de droite. Eugène Voisin est réélu maire.

Après la disparition de son épouse en juin 1907, Moucheraud rencontre des difficultés pour élever sa famille. En juillet, il sollicite du conseil général l'admission de ses enfants aux pupilles de la Seine. En novembre 1911, il lui demande qu'une de ses filles puisse intégrer un internat primaire. La famille réside alors boulevard de Champigny, à la Varenne, un quartier de Saint-Maur-des-Fossés (Seine, act. Val-de-Marne).

Pendant la première guerre mondiale, il n’est probablement pas mobilisé, ayant atteint la limite de 48 ans au moment de la mobilisation des catégories de réservistes les plus anciennes.

Il est décoré de la médaille du travail comme ouvrier imprimeur lithographe à la société Champenois, et demeure encore à La Varenne en février 1925.

Yves Paul Moucheraud meurt le 30 janvier 1945 à Créteil (Seine, act. Val-de-Marne). Il était toujours domicilié à Saint-Maur et âgé de 78 ans.

Son frère, Adrien Eugène, né en 1865, qui avait partagé son militantisme dans le mouvement anarchiste jusqu’en 1893, réalisa de nombreuses ascensions en ballon. Il fut également en 1899 « aéronaute des Républiques sud-africaines » et accompagnait les généraux boers lors de leur visite à Paris en 1902. Il exerçait comme son frère la profession d’imprimeur,  lors de son mariage à Ivry-sur-Seine (Seine, act. Val-de-Marne) en 1905.

Fin

Paul Moucheraud

 

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31 octobre 2021 7 31 /10 /octobre /2021 01:01

Début de la biographie de Paul Moucheraud

Yves Paul Moucheraud naît le 27 août 1866 à Paris (4e arr.). Il est le fils de Victoire Honorine Tiphaine, placière, et de son époux Lambert Moucheraud, peintre en bâtiment. Ils vivent rue de la Verrerie.

Devenu ouvrier lithographe dans une imprimerie, il s’engage très tôt dans le mouvement anarchiste. Il est cité comme participant, salle Lévis à Paris, à un affrontement entre des socialistes de tendance blanquiste des et anarchistes le 28 décembre 1884. Il fréquente plusieurs groupes libertaires : La Vengeance, La Lutte, L'Avant-garde Cosmopolite, Le Cercle International, L'Aiguille, Le Groupe anarchiste du 5e arrondissement… Il est secrétaire de la Ligue des antipatriotes. Son frère, aîné d’un an, Adrien Eugène, partage ses engagements.

En 1885, il est signalé à la prison politique de Sainte-Pélagie, à Paris (5e arr.). Il y retourne l’année suivante.

Arrêté le 15 juillet 1886 place de la République, il se plaint d’avoir été molesté par les agents du commissariat de la rue de Trois-Bornes. Il est inculpé pour agressions et insultes envers les policiers et emprisonné pendant huit jours à la prison de Mazas à Paris (12e arr.). Le quartier Le Cri du Peuple publie un entretien dans lequel il relate son « passage à tabac ». Il livre aussi une statistique : sur cent personnes arrêtées en même temps que lui, « une quarantaine avaient sur le visage et le corps couverts d’ecchymoses, et étaient accusés d’avoir frappé et insulté les sergents de ville. »

Le 17 août 1886, il est de nouveau condamné à trois jours de prison pour insultes à agents. Lors d’une réunion dans une salle de la Montagne Sainte Geneviève, à Paris, le 17 octobre 1886, il intervient pour engager les soldats à se débarrasser de leurs chefs car « la besogne des officiers ne consiste qu’à mener les hommes à la boucherie ». En septembre 1886, une nouvelle condamnation à 15 jours de prison vient sanctionner un collage d’affiches du 13 décembre 1885 pour avoir convoqué les ouvriers sans travail à un meeting de protestation contre le bal organisé par le comité des fêtes du commerce et de l'industrie parisiens. Un journal, peu suspect de sympathie pour leur cause, L’Intransigeant, dénonce « l’intolérance scandaleuse du président, qui n’a pas même laissé le prévenu Villaret présenter sa défense ». Il était un des trois autres typographes condamnés en même temps que Moucheraud.

Lors d’une réunion à Chatou (Seine, act. Hauts-de-Seine) du groupe L'Avant-garde en mai 1887, au cours de laquelle des militants célèbres comme Louise Michel, intervenaient, il participe à des échanges de tir au pistolet avec un groupe de réactionnaires. Ses compagnons et lui assurèrent avoir ouvert le feu pour « épouvanter la foule qui les poursuivait ». Comme son frère Adrien, il était membre de la Ligue des antipropriétaires spécialisée dans les déménagements « à la cloche de bois » et fondée par Couchot, membre du groupe La Lutte.

En 1888, Moucheraud est présenté comme ancien gérant du journal Terre et Liberté, un journal que le quotidien La Lanterne présente comme « l’organe officiel de l'anarchie. »

Un des faits d’armes de Moucheraud est, en mars 1888, la convocation par affiches dans la salle Rivoli d’une « Grande réunion publique sous la présidence d’honneur du général Boulanger. Protestation contre les injustices du ministère envers le général. Devant la mesure inique qui frappe un général républicain et patriote, nous invitons tous les patriotes à protester énergiquement, et nous faisons un appel pressant à tous les républicains, afin de prendre une résolution énergique. Orateurs inscrits : MM. Michelin, Laguerre; Laisant, députés, Henri Rochefort, journaliste. Prix d’entrée : 0,50 centimes ». Plus de deux cents personnes se rendirent sur place mais, après avoir attendu pendant une heure, ils se levèrent et voulurent réclamer leur argent ; mais les organisateurs de la réunion avaient disparu en emportant le produit des entrées, soit une centaine de francs. Aucune des personnes mentionnées comme devant intervenir n’avait été contactée ; elles étaient toutes représentatives du mouvement boulangiste (populiste). Seul jugé en mai la même année parmi les quatre personnes soupçonnées d’avoir organisé l’escroquerie, Moucheraud, arrêté au moment où il allait s'embarquer au Havre, se voit infliger un mois de prison. Les organisateurs du meeting avaient eu d’abord l’intention de faire une réunion antiboulangiste, mais, au dernier moment, l’avaient transformée en meeting boulangiste. Selon Le Figaro, il aurait dit à l’instruction : « Nous espérions, attirer ainsi plus de monde et par conséquent faire une plus forte recette ! » Moucheraud a prétendu qu'il avait bien écrit aux orateurs boulangistes dont les noms figuraient sur l'affiche, et que, n'ayant reçu d'eux aucune réponse, il en avait conclu qu'ils acceptaient son invitation. En quittant l'audience, il aurait déclaré, selon Le Temps : « Je laisse à la justice du peuple le soin de juger la justice bourgeoise. »

À suivre

Paul Moucheraud, 27 ans

 

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