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8 mai 2021 6 08 /05 /mai /2021 00:01

Victorin Léon Soyez naît le 11 novembre 1870 à Paris (11e arr.). Il est le fils de Victorine Julie Robberechts et de son mari Louis Antoine Soyez, mécanicien. La famille séjourne rue Amelot mais réside à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Comme la quasi-totalité des habitants du village, elle s’est réfugiée dans la capital pendant le siège de Paris par les troupes allemandes entre le 4 septembre 1870 et le 18 mars 1871.

Après la fin du conflit, la famille retourne à Joinville, où elle réside rue des réservoirs puis rue du Canal (act. rue Henri–Barbusse). Sa mère décède quand Victorin a 7 ans ; son père se remarie en 1878 et emménage dans la commune voisine de Saint-Maur-des-Fossés. Cependant, sa belle-mère décède quand il a 14 ans, six mois après son frère cadet. La disparition de son père, en février 1888 le laisse orphelin à 17 ans avec deux jeunes frères. Son grand-père paternel devient son tuteur.

À partir de septembre 1891, il effectue un service militaire raccourci à un an en tant qu’aîné d’orphelins.

Comme son père, Victorin Soyez devient fabricant d’objets en plumes. Il transforme l’atelier familial de la rue du Pont-de-Créteil, à Saint-Maur, en une société en 1892, qu’il exploite avec son frère Émile sous le nom de Soyez frères. Avec l’entreprise Bardin à Joinville, où travaillait son père jusqu’à la mort du fondateur, la plumasserie est une industrie importante sur les bords de Marne.

Marie Eugénie Platier devient l’épouse de Victorin Soyez en mai 1893 à Paris (17e arr.). Ils s’installent avenue de Marinville, à Saint-Maur.

Toujours à l’instar de son père, qui avait été élu conseiller municipal de Joinville-le-Pont en 1878, Victorin Soyez va s’impliquer dans la vie civique au sein de sa commune de résidence, Saint-Maur. À l’occasion d’une élection municipale partielle, il est élu conseiller municipal en décembre 1895 dans la deuxième section de la commune de Saint-Maur-des-Fossés. Au premier tour, il était arrivé en tête avec 212 voix contre 141 à un radical-socialiste et 109 à un socialiste-révolutionnaire. Faute d’accord entre ces deux derniers, il est élu au deuxième tour par 242 voix contre 146 au socialiste-révolutionnaire. Soyez est présenté, par le journal radical Voix des communes comme « le candidat de M. Lacroix », le maire, conservateur, de Saint-Maur.

Lors des élections municipales de mai 1896, la commune de Saint-Maur est divisée en trois sections. La liste progressiste des partisans du maire emporte les 9 sièges du premier secteur, tandis que 8 radicaux-socialistes sont élus dans le troisième. Soyez, qui conduit les progressistes du deuxième secteur, est élu avec un de ses colistiers au premier tour. Les partisans du maire remportent au second tour les 8 sièges qui restaient en course, donnant ainsi une large majorité aux conservateurs. Pendant le mandat, Soyez est, à quatre reprise, désigné comme délégué sénatorial.

Lors des élections municipales de mai 1900, la division de Saint-Maur en sections électorales a été supprimée. Au premier tour, Soyez arrive en tête des candidats avec 1 533 voix pour 3 840 votants (40%). Cependant, du fait de l’union des radicaux-socialistes et des socialistes-révolutionnaires à l’occasion du second tour, il n’est pas élu. Il ne sera pas candidat aux élections municipales de 1904 ni à celles de 1908. Cependant, cette année-là, il est de nouveau délégué sénatorial en décembre.

L’entreprise des frères Soyez participe à plusieurs expositions universelles et internationales, en 1900 à Paris, en 1908 à Londres et en 1910 à Bruxelles.

Pendant la première guerre mondiale, Victorin Soyez est affecté direction générale des approvisionnements jusqu’en août 1916, où il rejoint le 43e puis le 83e régiment d’artillerie. Il est démobilisé peu après l’armistice en novembre 1918.

Après le conflit, Victorin Soyez poursuit l’exploitation de Soyez frères, qui devient société anonyme en octobre 1930. Les plumes restent l’activité principale et l’entreprise continue la production de cure-dents, mais elle diversifie ses produits avec des tuyaux, raves (lampes de mineur), chalumeaux (pailles), etc.

Une partie des propriétés familiales est expropriée en juillet 1933 pour la construction du futur lycée Marcelin-Berthelot (Saint-Maur). Contestant l’offre qui leur est faite, les Soyez obtiendront satisfaction devant la Cour de cassation.

La production de plumes s’oriente, en 1938, vers les loisirs : jouets, volants pour le badminton, paillantines pour fleurs, tuyaux de plumes pour pinceaux, articles de pêche…

Victorin Léon Soyez meurt le 6 juin 1952 à Paris (11e arr.). Il était âgé de 81 ans, père de trois enfants et résidait boulevard Beaumarchais. Décoré des Palmes académiques en tant qu’officier d’académie en janvier 1907 puis officier de l’instruction publique en février 1914, Victorin Soyez avait obtenu une médaille d'or lors de Exposition universelle de Paris en 1900. Il avait été fait chevalier du Mérite social en août 1937.

Ses deux fils, Émile Louis et Alfred Roger, restèrent en charge de l’entreprise familiale. Ce dernier avait été résistant à l’occupation allemande pendant la deuxième guerre mondiale.

La société Soyez frères est toujours active et contrôlée par Pierre Soyez, cinquième génération à en assumer le contrôle, après son père, Gérard Soyez (1935-2020). En 2017, elle réalisait un chiffre d’affaires de 10,8 millions d’euros avec 84 employés. Depuis 1958, elle est établie à Donzy (Nièvre). Si l’activité plumes a cessé, la production de pailles est au contraire devenue majoritaire, se faisant désormais en plastique comme pour les cure-dents. Premier fabricant européen de pailles, elle en fabriquait 5 milliards en 2017, dont plus de 60% sont exportées. En 2019, l’entreprise a obtenu un financement européen pour se réorienter vers des matières alternatives, en particulier du papier collé, réputé de meilleur impact environnemental.

Personnel de l'entreprise Soyez frères en 2007 à Donzy (Nièvre)

 

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7 mai 2021 5 07 /05 /mai /2021 00:01

Émile Georges Soyez naît le 9 octobre 1872 à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Il est le fils de Victorine Julie Robberechts et de son mari Louis Antoine Soyez, mécanicien, qui vivent d’abord rue des Réservoirs, puis rue du Canal. Il perd sa mère à 4 ans. Son père, qui venait d’être élu conseiller municipal de Joinville en mai 1878 sur la liste républicaine de Gabriel Pinson, se remarie en octobre puis déménage pour la commune voisine de Saint-Maur-des-Fossés.

Le jeune Émile Soyez va encore devoir faire face à la disparition de son frère cadet quand il a 11 ans, de sa belle-mère à 12 ans et son père à 15 ans. C’est son grand-père paternel, Jean Louis Soyez, qui devient son tuteur ; originaire de Seine-et-Marne, il fut vigneron, jardinier puis blanchisseur et s’est installé à Saint-Maur, rue du Pont-de-Créteil.

En 1892, Émile Soyez est ouvrier de la maison Bardin, fabricant d’objets en plumes à Joinville-le-Pont. Il s’associe avec son frère aîné, Victorin, pour créer, en novembre 1893 la société Soyez frères, également spécialisée dans la fabrication d’articles en plumes et de cure-dents, qui en sont un sous-produit. Elle reprend le site de l’épicerie familiale, rue du Pont-de-Créteil.

Au cours du même mois de novembre 1893, Émile Soyez est incorporé au sein du 94e régiment d’infanterie pour faire son service militaire. Il devient caporal en août 1894 puis sergent en septembre 1895. Il prend manifestement goût à l’activité militaire puisque, après son passage dans la réserve en septembre 1896, il participe à neuf périodes d’entraînement de réserve. Ayant suivi une formation pour devenir officier, il est sous-lieutenant en octobre 1897, lieutenant en juillet 1903 puis capitaine en mai 1910.

Yvonne Rosalie Cluzan devient l’épouse d’Émile Soyez en juillet 1904 à Saint-Maur. L’entreprise familiale participe à plusieurs expositions internationales, en 1900 à Paris, en 1908 à Londres et en 1910 à Bruxelles.

Rappelé lors de la première guerre mondiale, il sert dans des régiments territoriaux d’infanterie (100e puis 17e et 96e) et devient chef de bataillon (commandant) en avril 1918. Il est démobilisé après la fin du conflit avec l’Allemagne en décembre de cette année.

Son comportement au front lui vaut une citation à l’ordre de la brigade en mai 1916 : « Officier d’un dévouement absolu. A rendu de grands services en faisant preuve d’une activité et de connaissances techniques remarquables dans la construction d’abris qui ont permis d’éviter à un régiment des pertes importantes lors de bombardements qui ont détruit des cantonnements. »

Après le conflit, Émile Soyez divorce en juillet 1923 et poursuit l’exploitation de Soyez frères, qui devient société anonyme en octobre 1930. Les plumes restent l’activité principale, mais l’entreprise reprend également la production de cure-dents et diversifie ses produits avec des tuyaux, raves (lampes de mineur), chalumeaux (pailles), etc.

Une partie des propriétés familiales est expropriée en juillet 1933 pour la construction du futur lycée Marcelin-Berthelot (Saint-Maur). Contestant l’offre qui leur est faite, les Soyez obtiendront satisfaction devant la Cour de cassation.

La production de plumes s’oriente, en 1938, vers les loisirs : jouets, volants pour le badminton, paillantines pour fleurs, tuyaux de plumes pour pinceaux, articles de pêche…

Émile Soyez meurt le 27 novembre 1939 à Saint-Maur-des-Fossés. Il était âgé de 67 ans et était père de deux filles. Lors de l’Exposition universelle de Paris en 1900, il avait obtenu une médaille d'or. Il avait été décoré des Palmes académiques comme officier de l’instruction publique en mars 1911. Il était titulaire de la Croix de guerre et avait été fait chevalier de la Légion d’honneur en octobre 1918.

Exploitée par les descendants de son frère Victorin, l’entreprise Soyez frères, qui a déménagé dans la Nièvre en 1958, est toujours en exploitation en 2020. Si elle poursuit la production de pailles et de cure-dents, elle a remplacé les plumes par le plastique ; en 2019, elle a lancé un investissement pour les produire désormais à partir de papier.

Logo de l'entreprise Soyez

 

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6 mai 2021 4 06 /05 /mai /2021 00:01

Gustave Émile Lucot naît le 17 septembre 1862 à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Il est le fils de Louise Testel et de son mari Jean Ferdinand Lucot, entrepreneur de maçonnerie.

Au décès de son père, en 1885, Émile Lucot reprend la gestion de l’entreprise familiale, importante société installée rue de Créteil (act. boulevard du Maréchal-Leclerc). L’hebdomadaire local Voix des communes remarque : « Lucot, fils, redevient ce qu’était son père, l’entrepreneur-juré de la commune ». Il devient propriétaire de la société en avril 1890.

Plusieurs des ancêtres d’Émile Lucot ont joué un rôle politique dans la commune. Sous la Révolution française, Louis Toussaint Lucot, blanchisseur, est officier municipal (adjoint au maire). Son petit-fils, Jean Louis Nicolas Lucot est conseiller municipal entre 1830 et 1869 et fondateur de l’entreprise de maçonnerie familiale. Le fils de ce dernier, et père d’Émile Lucot, Jean Ferdinand Lucot est également conseiller municipal entre 1870 et 1885.

Lors des élections municipales de mai 1888, Émile Lucot est candidat sur la liste du maire sortant, Gabriel Pinson. Ce dernier, dont Jean Ferdinand Lucot était un des colistiers, se présente cette fois avec une liste concurrente, celle soutenue par le comité radical-socialiste, sur laquelle figurent plusieurs conseillers sortants. La liste Pinson remporte au premier tour 17 des 21 sièges à pourvoir ; Lucot, avec 237 voix pour environ 560 suffrages exprimés (42%) n’est pas élu, mais il arrive cependant devant les radicaux-socialistes, sauf un. Au second tour cependant, trois de ces derniers remportent le vote, tandis qu’un seul des colistiers de Pinson complète la majorité municipale. Avec 198 voix pour environ 425 suffrages exprimés (47%), Lucot est battu.

Au cours des années 1890, Émile Lucot se désengage de l’activité familiale et déménage rue de Paris.

Dans le domaine sportif, Émile Lucot s’intéresse d’abord à l’aviron. Il est barreur d’une yole de la Société nautique de la Marne, le principal club joinvillais, basé sur l’île Fanac. À la fin du siècle, il pratique la boxe française avec le Cercle d'Escrime de Joinville-le-Pont, qui se transforme en 1899 en Société Sportive de Joinville-le-Pont et s’appuie sur les instructeurs de l’école militaire de gymnastique, basée dans le Bois de Vincennes.

Après l’implantation des usines Pathé sur les bords de Marne, Émile Lucot est embauché par la firme cinématographique. L’activité d’Émile Lucot pendant la guerre n’est pas connue. Il épouse à Joinville en juin 1916 Pauline Émilie Anaïs Hourdequin.

Après le conflit mondial, Émile Lucot travaille toujours pour Pathé, dans leur établissement de Vincennes (Seine, act. Val-de-Marne). Il prend sa retraite au début des années 1930.

Gustave Émile Lucot meurt le 10 avril 1937 à Joinville. Il était âgé de 74 ans et n’avait pas eu d’enfant.

Usines Pathé à Joinville en 1911

 

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4 mai 2021 2 04 /05 /mai /2021 00:01

Jean Ferdinand Lucot naît le 9 novembre 1831 dans la commune qui venait de prendre le nom de Joinville-le-Pont. Il est le fils de Marie Félicité Neveu de son époux, Jean Louis Nicolas Lucot, alors marchand de vins et plus tard entrepreneur de maçonnerie. Il est également l’arrière-petit-fils d’un officier municipal (adjoint au maire) de la période révolutionnaire, Jean Toussaint Lucot.

Probablement vers 1850, Jean Ferdinand Lucot se voit attribuer une concession en Algérie dans le village de Hennaya (act. wilaya de Tlemcen). Il s’agit d’y développer des cultures maraîchères et des vignes. S’il y réside réellement, il semble toutefois être rapidement rentré en France.

En février 1858, Jean Ferdinand Lucot, qui est alors maçon chez son père à Joinville, épouse Louise Testel. Elle est la fille, née d’un premier lit, d’Anne Simonin, épouse, en secondes noces, de son père, Jean Louis Nicolas Lucot. Il reprend ensuite l’activité de maçonnerie de son père à Joinville. En 1864, il obtient le marché de la construction de la gendarmerie de la commune.

En septembre 1870, Jean Ferdinand Lucot est élu membre du conseil municipal que venait de quitter son père, décédé avril 1870. Le maire est Auguste Courtin et son adjoint est Louis Ferdinand Rousseau, tous deux conservateurs. La commune est violemment touchée par les combats entre les forces allemandes et françaises au cours de la bataille de Champigny, qui fait près de trois mille morts, dont une partie sur le territoire de Polangis. La population évacue Joinville, en majorité, et la municipalité s’installe à Paris pendant le siège de la capitale. L’école du Parangon a été transformée en hôpital provisoire.

Après l’arrêt des combats et le retour des joinvillais dans leurs habitations, la commune est occupée par des troupes wurtembourgeoises puis bavaroises. Le pont sur la Marne, qui relie les deux parties du territoire, a été détruit. Jean Ferdinand Lucot est réélu lors du scrutin de juillet 1871, qui reconduit également Courtin et Rousseau. Son mandat prend fin en 1874.

Le maire, Auguste Courtin, ayant démissionné, une élection partielle est organisée en septembre 1876. Lucot est élu conseiller municipal, Louis Ferdinand Rousseau devient maire avec comme adjoint.

Lors des élections municipales de janvier 1878, la liste conservatrice de Louis Ferdinand Rousseau, bonapartiste, est battue par des républicains menés par Gabriel Pinson qui est élu maire. Lucot ne siège plus au conseil.

Un singulier procès sous l’accusation de tentative d’escroquerie est intenté à Lucot en mars 1881 devant le tribunal de la Seine. Le quotidien Le Temps relève que c’est « une de ces causes qui relèvent de la science beaucoup plus que de la loi et où se révèlent les faiblesses et les misères de l'entendement humain ». Chargé, en 1879, de la construction d'un égout à Joinville-le-Pont, Lucot se voit adresser, en avril 1880, l’avis de paiement d’une somme conséquente de 27 800 francs, qu’il se fait alors payer. En novembre 1880, affirmant avoir retrouvé ledit avis et croyant ne pas l’avoir encaissé, il se présente de nouveau pour obtenir le versement de cette somme. C’est ce qui lui vaut de comparaître en justice. La défense cite comme témoins de moralité Gabriel Pinson, maire de Joinville, qui le considère comme « au-dessus de tout soupçon » et Auguste Courtin, l’ancien maire, qui cite de lui des traits d'exquise probité. C’est la déposition de son médecin qui emporte la décision des juges : jeune, Lucot chuta d'un échafaudage, et il est resté sujet à des absences de mémoire. Pour le docteur Laurent, « Il est manifeste que son esprit n’est pas parfaitement net ». Lucot est acquitté. À cette période, l’entreprise Lucot employait régulièrement 200 à 250 ouvriers.

Après que Pinson ait rompu avec les membres les plus radicaux de son conseil, Lucot revient siéger en janvier 1881 au sein de l’assemblée communale. Il est réélu en janvier 1884, toujours avec Pinson comme maire et Eugène Voisin en tant qu’adjoint.

Jean Ferdinand Lucot, qui résidait rue de Créteil (act. boulevard du Maréchal-Leclerc) meurt le 4 février 1885 à Joinville. Il était âgé de 53 ans et père de trois enfants.

L’hebdomadaire Voix des communes, de tendance radicale, commente ainsi sa disparition : « Si M. Lucot était un simple conseiller, ayant consacré ses loisirs aux affaires de la ville, il est probable que Joinville resterait plus calme. Mais M. Lucot n’avait pas de loisirs, tant il s’occupa activement, jusque la dernière heure, de ses propres affaires. Du reste intelligent, actif, dénué des préjugés d’un autre âge, dans lesquels s’encroûtent trop de ses contemporains, il réussit à devenir plus que millionnaire. »

L’enterrement de Lucot est également évoqué longuement par Henry Vaudémont, le rédacteur du journal radical : «  Avec une touchante unanimité, j’ai entendu éreinter M. Lucot sans que jamais une seule voix s’élevât pour prendre sa défense. Le plus modérés le représentaient comme un ours, une façon de sauvage, ne se plaisant qu’à se promener, un mètre sous le bras et à engueuler (c’est le mot) ses ouvriers. Les autres insistaient sur sa ladrerie. (…) [D’aucuns] citaient des histoires de tombereaux qu’il se faisait payer pour déblayer et vendait ensuite pour remblayer. Ils contaient aussi de lamentables aventures survenues à des imprudents qui, calculant mal leur devis, empruntant pour finir leur maison, se trouvaient, en fin de compte, obligés de tout laisser à l’entrepreneur. En présence de toutes ces récriminations, je m’attendais à voir la population protester par une abstention générale. Ah bien oui ! La foule se porta aux obsèques. Le curé pardonna évangéliquement ses votes anticléricaux. (…) L’illustre Hugedé portait sur un coussin les décorations du philanthrope ad patres [sapeur-pompier volontaire et membre de la fanfare]. (…) Si M. Lucot s’est moqué du monde autant qu’on veut le dire, il a joliment bien fait. Lorsqu’un public est vil et plat à ce point, il faudrait véritablement être un saint pour résister à la tentation de le bafouer et de l’exploiter. »

Son fils, Émile Lucot, poursuivra l’entreprise familiale et tentera, sans succès, de continuer la même activité politique.

La gendarmerie de Joinville, construite par Lucot

 

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2 mai 2021 7 02 /05 /mai /2021 00:01

Suite de la biographie d’Achille Mermet

Les élections municipales de mai 1912 à Joinville-le-Pont se présentent dans un contexte particulier. Pour la première fois sous la troisième République, le maire sortant ne se représente pas. Le nombre de listes (quatre) est lui-même inédit : radicaux-socialistes, socialistes SFIO, libéraux-conservateurs et radicaux dissidents. De plus, les trois dernières listes ont pris l’engagement de fusionner au second tour sur une base proportionnelle, sans toutefois vouloir gérer la ville en commun. Une cinquième liste était même envisagée, celle des socialistes évolutionnistes de 1908, mais une partie de ses membres a rejoint dès le premier tour les radicaux dissidents.

L’application de ces règles fait qu’au second tour, alors qu’aucun candidat n’a été élu au premier, la liste coalisée rassemble 10 radicaux dissidents et leurs alliés, sept socialistes et six libéraux-conservateurs. Ils sont tous élus. Les radicaux-socialistes officiels n’ont aucun représentant. Achille Mermet est élu maire par 14 voix sur 23 votants. Il est probable que les socialistes unifiés, et peut-être certains conservateurs, n’ont pas voté pour lui. Le bureau municipal est complété par deux adjoints, Henri Vel-Durand, radical dissident, et Pierre Dalbavie, libéral. En juillet 1913, Vel-Durand est exclu du parti radical.

S’éloignant des attitudes anticléricales des municipalités précédentes, Mermet préside en décembre 1913 l’assemblée générale de l’Union des mères en présence du curé, le père Léon Roger.

Probablement moins motivés par la politique non locale, le groupe radical dissident laisse plus de place à ses alliés parmi les délégués sénatoriaux : en février 1914, il y a sur 9 délégués trois socialistes et quatre libéraux-conservateurs ; en mai de la même année, on note quatre socialistes et trois libéraux-conservateurs.

Le déclenchement de la première guerre mondiale prend de court la municipalité. Comme tous les étés, Mermet est à Noirmoutier, son premier adjoint Vel-Durand est à Arcachon et le second, Dalbavie est absent lui aussi. Ce sont donc des conseillers municipaux qui doivent lire le décret de mobilisation générale, Watrinet à la mairie et Beauvais dans les rues du Haut de Joinville. Mermet revient, en train, le 3 août Mermet et, selon le journal Voix des communes, est sifflé à son arrivée. Les laiteries qui vendent le produits Maggi, marque allemande, sont pillées. Une garde civique, que le maire voulait armer, est créée.

Le maire vient à la mairie tous les jours et même ses adversaires reconnaissent son labeur : secours aux familles, hygiène, ambulances, cérémonies religieuses et civiles. Dalbavie étant malade et Vel-Durand mobilisé, Mermet nomme un nouvel adjoint, Maurice Watrinet, ancien secrétaire général de la mairie et entrepreneur de pompes funèbres. Le conseil municipal fonctionne difficilement ; ainsi, en 1915, c’est le préfet qui impose un budget d’office, car les élus n’ont pu l’examiner à temps.

Malgré le climat d’unité nationale qui prévaut pendant la guerre, les animosités politiques locales perdurent et les radicaux-socialistes, avec notamment Briolay et Rey, s’appuyant sur l’hebdomadaire Voix des communes, attaquent vivement la gestion communale.

La révocation de deux professeurs de musique, début 1915, est une première occasion de critique. L’absence de réunion du conseil municipal est également mise au pilori : depuis août 1914 jusqu’en mai 1915, une seule séance publique a été organisée. La mémoire de la précédente guerre est aussi un sujet : Mermet, qui se dit volontaire de 1870, tient en suspicion l’association des Vétérans, dont Briolay est le trésorier.

Un arrêté du maire d’interdiction partielle de vente de l’alcool dans les débits de boisson est mis en cause par les commerçants, et les radicaux en janvier 1916. Le mois suivant, le ton monte fortement. Voix des communes dénonce le fait que le maire utiliserait, « comme bon lui semble » les fonds remis par la société du Bi-Métal, estimant qu’elle aurait dû être remise au bureau de bienfaisance.

La plupart des membres du conseil municipal réagissent, dans plusieurs lettres signées y compris par les socialistes : ils s’insurgent contre « diffamation et calomnie » visant le maire, assurant : « Nous sommes vos collaborateurs, vos complices ! Non seulement nous approuvons votre manière de faire, mais nous y applaudissons ». Le conseil décide que des poursuites seront demandées contre l’auteur de l’article calomnieux (Louis Rey) – ce qui sera abandonné – et vote félicitations et encouragement au maire. Le socialiste Lebègue, conseiller municipal, lui écrit « M. le maire, vous êtes pour moi un adversaire politique irréductible, mais je reconnais votre scrupuleuse honnêteté. »

Les polémiques suivantes vont porter sur l’approvisionnement de la population en charbon, la vente de viande frigorifiée ou le prêt de la salle municipale au curé qui organise une fête pour les blessés.

L’organe radical reproche en septembre 1916 : « Le maire déserte son poste en temps de guerre, il part pour Noirmoutier ». Il laisse Dalbavie « pour garder la mairie » avec un secrétaire général « accablé de travail ». Dans un des derniers articles de Voix des communes en décembre 1916, avant la suspension de sa parution, Rey s’indigne des difficultés de l’achat de pommes de terre et conclut : « Il n’y a pas de commune plus mal administrée que Joinville ! »

Au contraire, l’ingénieur Félix Marboutin assure que « Mermet apporte le réconfort, soulage les infortunes, visite les affligés, s’associe à toutes les détresses, trouve les paroles qui conviennent à toutes les situations et ne s’éclipse qu’après avoir assuré, sous la forme la plus discrète, l’avenir immédiat des malheureux. »

Mermet encourage la création de jardins potagers de guerre, pour pallier les difficultés d’alimentation des familles, sur les terres de l’ancien château de Polangis, mises à la disposition par le propriétaire, Chavignot. Il laisse les commerçants créer une monnaie locale, pour suppléer l’absence de numéraire. Dans sa commune, un hôpital américain est installé dans l’ancienne école du Parangon. Un vase hôpital canadien se crée également en 1918 dans le Bois de Vincennes.

Mais, de plus en plus souvent retenu par des problèmes de santé, Mermet se fait régulièrement représenter dans les manifestations publiques.

Le mandat de maire de Mermet aurait dû prendre fin en 1916, mais il fut prolongé du fait de la guerre jusqu’en novembre 1919. La ville comptait, au recensement de 1911, 8 349 habitants. 367 Joinvillais seront inscrits comme morts pour la France, en 1926, lors de l’érection du monument aux morts de la commune. Une partie de la population féminine travaille à la cartoucherie du Bois de Vincennes, où une garderie d’enfants est installée à leur intention en 1917. Les bombardements de Paris par l’aviation et l’artillerie allemande (qui font 22 morts et 76 blessés en banlieue parisienne, en février 1918) amènent les Joinvillais à trouver un refuge dans le tunnel du canal de Saint-Maur. Du coup celui-ci fut éclairé à l’électricité en 1918.

Le 1er décembre 1919, Achille Mermet meurt, quelques heures après qu’ait été proclamée la victoire de la liste conduite par son ancien adjoint, Henri Vel-Durand. Il était toujours juridiquement le maire en exercice. Âgé de 70 ans, il n’avait pas eu d’enfant.

Achille Mermet était attributaire de la Cocarde du souvenir, au titre de sa participation à la guerre de 1870-1871. La Société d'encouragement pour l'industrie nationale lui avait accordé une médaille de platine en 1876 puis une médaille de vermeil en 1908. Décoré des Palmes académiques, Mermet était officier d’académie depuis juillet 1889 puis officier de l’instruction publique en juillet 1900. Il avait été fait chevalier de la Légion d’honneur en octobre 1908 avec plusieurs autres scientifiques, au titre de ses 37 ans de service dans l’enseignement à l’époque (il en compta 40 au moment de sa retraite).

Dans le Larousse Mensuel-Illustré d’octobre 1921, l’ingénieur Félix Marboutin, professeur à l'École centrale, publie une notice hagiographique, insistant sur son « dévouement à l’humanité. »

Fin

Achille Mermet

 

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30 avril 2021 5 30 /04 /avril /2021 00:01

Suite de la biographie d’Achille Mermet

En dehors des périodes où il séjourne à Noirmoutier, Mermet revient assumer ses responsabilités municipales à Joinville-le-Pont. Il est mentionné, en octobre 1909, comme provoquant en fin de séance du conseil un « petit incident », relevé par le responsable socialiste local, Émile Lebègue, qui se plaignait de l’absence de débat dans cette assemblée.

La commune de Joinville s’était portée candidate pour l’organisation d’un exposition nationale au cours de l’année 1910. Mermet fait partie de la commission spéciale, mise en place en novembre 1909, pour préparer cet évènement, qui ne verra finalement pas le jour, du fait notamment des évènements du début de l’année. En effet, le débordement de la rivière Marne provoque de considérables inondations à Joinville et dans les communes alentour au premier trimestre 1910. Mermet, dont le logement, situé sur les hauteurs, n’est pas touché, fait partie de la commission chargée de l’organisation du service des désinfections.

Avec d’autres élus, Mermet est mobilisé à partir de mai 1910 pour plaider la cause de la commune auprès du ministre des travaux publics, Alexandre Millerand, du préfet de la Seine puis des sénateurs du département dans le conflit qui l’oppose à un entrepreneur de travaux publics. Cependant, l’enlisement de cette affaire va être un des arguments qui conduiront, en 1911, à tendre fortement les relations au sein du conseil municipal.

De manière inhabituelle, quatre conseillers municipaux élus sur la liste radicale en 1908 à Joinville, décident de répondre à une invitation du parti socialiste SFIO pour rendre compte de leur mandat en février 1911. Watrinet, Vel-Durand, Arnaud et Mermet qui déclare « le maire était trop âgé » et qu’il fallait qu’il donne sa démission ; Eugène Voisin a alors 76 ans et est malade. Une convergence s’esquisse, avec – outre les socialistes – Leteuil, chef des opposants de 1908 et l’avocat Louis Gallas, conservateur. Mermet prend à partie le maire, Voisin, auquel il reproche de se servir de la chose publique au bénéfice de ses amis.

Quelques jours plus tard, c’est le conseil municipal lui-même qui organise son compte-rendu de mandat, en l’absence du maire pour raison de santé. Le groupe des quatre dissidents se manifeste par une entrée conjointe, applaudie par les opposants. Deux d’entre eux, Watrinet, et Arnaud, annoncent qu’ils quittent le comité radical-socialiste. La séance est très agitée, avec d’un côté les deux adjoints, Paul Villain et Georges Briolay, soutenus notamment par Louis Rey, conseiller municipal et principal animateur des radicaux dans la commune, et de l’autre tous les opposants de diverses tendances qui, ensemble, dénoncent l’incurie et la mauvaise gestion municipale. Mermet formule des critiques mais atténue ce qu’il avait dit sur Voisin lors de la réunion des socialistes, ce qui provoque des murmures dans leurs rangs. Il annonce vouloir être libre et indépendant dans ses appréciations tout en restant membre du parti radical, comme Vel-Durand.

Au sein du conseil municipal, les motifs d’affrontement se multiplient : l’entretien d’une route, le comportement d’un élève dans une école communale, la gestion du bureau de bienfaisance et de la caisse des écoles sont autant de motifs de scandales et de polémiques publiques. Deux autres conseillers municipaux, Beauvais et Poitevin viennent renforcer les premiers protestataires. Tous présentent, en avril, leur démission, ce qui provoque en mai 1911 des élections municipales complémentaires, auxquelles ils se représentent. Le comité radical-socialiste écrit qu’il « ne faut réélire aucun de ces messieurs qui ont donné leur démission sans raison probante ». Un de ses élus, Paul Guelpa, considère que « Mermet a vu dans le radicalisme non pas un idéal, mais un moyen ». Mais le principal polémiste, et d’ailleurs la cible de Mermet et Vel-Durand est Louis Rey, également chroniqueur de l’hebdomadaire radical Voix des communes.

La liste des dissidents remporte les élections, Mermet étant réélu dès le premier tour, avec le soutien des socialistes, des libéraux et des conservateurs. Au sein du conseil, les sept opposants élus en mai retrouvent un indépendant élu en 1908 et comptent désormais pour plus du tiers des 23 membres du conseil.

Le comité radical-socialiste fait face à un désarroi qui se traduit par la démission du bureau. Il convoque en juin Poitevin (absent), Vel-Durand et Mermet, qui est parti de Joinville pour l’été. Certains demandent l’exclusion des démissionnaires, auxquels il est reproché d’avoir mené « une campagne équivoque haineuse, de mensonge » ainsi que leurs attaques contre Briolay et Rey.

C’est ce dernier qui, dans Voix des communes, livre en février 1912 un portrait balancé de Mermet : « Notre collègue Mermet, à l’occasion du cinquantenaire de l’association chimique fut, avec d’autres chimistes et professeurs, décoré de la Légion d’honneur pour ses 40 ans de professorat. J’avoue que cela me fit plaisir ; jusqu’alors, Mermet nous avait produit une bonne impression. Il s’était bien étonné d’avoir été élu conseiller, lui qui jusqu’à l’âge de 60 ans avait considéré comme un devoir de ne pas s’occuper d’affaires publiques, à telle enseigne, disait-on, qu’à Noirmoutier ils ne distinguaient pas les royalistes des républicains. Il trouvait cependant que ces derniers n’étaient pas de la haute société, c’était de la ratatoille comme faisait dire Daudet à Tartarin. Nous ne pouvions faire de reproche à Mermet, car il ignorait tout de la politique, c’était le fonctionnaire prêt à servir tous les régimes. On fit observer à Mermet que s’il avait été élu conseiller municipal c’était parce qu’il était porté sur la liste de Voisin qui avait cautionné son républicanisme de circonstance. Au demeurant, Mermet n’était pas désagréable, il avait des naïvetés en affaires et en administration qui déconcertaient, mais toujours affable, bien ganté, portant superbement la tête afin qu’on l’admire, on ne pouvait avoir avec lui que de bons rapports de voisinage au conseil. Les petits airs robespierrot en gilet rouge qu’il se donnait faisaient sourire, il n’était pas méchant pour deux sous, n’ayant pas encore été mordu par Vel-Durand. Je pris l’initiative de lui faire offrir un bouquet par le conseil, je recueillis les adhésions de tous les conseillers. »

À suivre

Intérieur de La Fougeraie, à Noirmoutier

 

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28 avril 2021 3 28 /04 /avril /2021 00:01

Suite de la biographie d’Achille Mermet

La première incursion connue d’Achille Mermet dans le domaine politique se fait lors des élections municipales de mai 1908 à Joinville-le-Pont, où il réside. Il est présent sur la liste du maire sortant, Eugène Voisin, présentée par le comité radical-socialiste présidé par Albert Gallas. Elle remporte 21 des 23 sièges à pourvoir, en laissant un à une liste dite socialiste évolutionniste, composée de dissidents socialistes et radicaux ainsi que de libéraux, et un autre à un indépendant. Les socialistes SFIO, qui se présentaient aussi, n’ont pas d’élu. Mermet accède à sa fonction au second tour, avec 600 voix pour 1 188 suffrages exprimés (50,5%). Eugène Voisin est reconduit, avec comme adjoints Georges Briolay et Paul Villain.

Les séjours estivaux à Noirmoutier du professeur Mermet dans sa villa La Fougeraie et son yacht Milianne ont une finalité d’abord touristique. Cependant, il devient également une personnalité locale. En août 1908, lors d’une excursion sur l’île organisée par le Touring-Club de France, Mermet est un des quatre orateurs à s’adresser aux visiteurs, avec le maire de Noirmoutier, le préfet de Vendée et le président de la Ligue Maritime. Il n’oublie pas son engagement politique, qui s’intensifie après sa retraite de l’enseignement en janvier 1910.

En juillet de cette même année, Mermet est candidat républicain au conseil général dans le canton de Noirmoutier, qui contient les deux communes de l’île vendéenne. Son adversaire conservateur, Jeanneau, étiqueté progressiste, est réélu. Cependant, Mermet se félicite d’avoir su grouper 500 voix qui constitueraient « le noyau des démocrates » face aux « représentants des régimes déchus ».

Un Comité républicain radical de l’île de Noirmoutier est constitué et Mermet est désigné comme président en août 1910. Dans une allocution, reproduite par le quotidien Le Phare de la Loire, il rend hommage aux « vieux et sincères républicains du pays ». Il assure que « notre grand parti démocratique représente l’ordre avec l’honneur et la liberté pour toutes les idées religieuses » et honore les catholiques fervents qui, à côté des libres-penseurs, ne pensent pas que les établissements laïques sont « des écoles du diable », mais des centres éclairés où on apprend le respect de toutes les libertés. Bien qu’il se déclare indépendant, le Comité, selon Mermet, « compte sur la bienveillance de l'Administration, puisque, préfets et sous-préfets sont des républicains radicaux, comme nous ». Il entend défendre « les fonctionnaires qu’on essaye d'intimider, et tous les humbles, tous les exploités, ouvriers de la ferme ou de l’atelier, marins, prêcheurs, palourdiers que l'on traite comme des esclaves, paludiers dont ou fraude les bulletins de vote ».

Lors d’un hommage rendu, en septembre 1910, à M. Stoecklin, greffier, républicain et président de la société de gymnastique du canton au Cercle des Travailleurs de Noirmoutier, Mermet constate l’efficacité de sa candidature cantonale : « M. Jeanneau, réélu, s’est définitivement rallié à la gauche du Conseil général. »

Exerçant également des responsabilités en matière sociale, Achille Mermet est, en 1911, président de la Société de secours mutuels de l’île de Noirmoutier, une structure ancienne qui fonctionnait déjà en 1883 au profit des pêcheurs.

À ce titre, il accueille, en août 1911 Gaston Guillemet, ancien député de la Vendée, président de l’Union des Sociétés mutualistes du département sur le thème des retraites ouvrières, après l’adoption de la loi du 5 avril 1910. Mermet, d’après Le Phare de la Loire, « montre le travailleur d’hier, ouvrier de l’usine, de l’atelier ou des champs, atteint par la vieillesse, brisé par la fatigue et les maladies, incapable de gagner son pain, sans ressources, à charge à lui-même, à la société, obligé de tendre la main en attendant la mort quelque part, sur les grands chemins... Avec la nouvelle loi, au contraire, c’est moyennant un versement quotidien infime, le pain assuré pour les vieux jours ». Mermet s’étonne cependant que la nouvelle loi ne compte pas autant d’adhérents qu’il estimait être en droit d’en attendre. Il reconnaît cependant qu’elle est « perfectible. »

Mermet est également membre du bureau de l’Union des présidents des sociétés de secours mutuels de France.

Au cours du mois d’octobre 1912, participe au congrès du parti radical-socialiste à Tours, en tant que délégué de la Vendée. Il était pourtant à Joinville-le-Pont en conflit avec la structure locale de cette formation.

À suivre

La Fougeraie, maison de Mermet à Noirmoutier

 

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26 avril 2021 1 26 /04 /avril /2021 00:01

Suite de la biographie d’Achille Mermet

Résidant alors à Paris (5e arr.), rue de Poissy, Achille Mermet, professeur lycée Charlemagne et chef du laboratoire de chimie de l’école centrale, épouse Émilie Quirot en juillet 1882 à Joinville-le-Pont. Tous les témoins du mariage sont membres de la Légion d’honneur : Jean Baptiste Dumas est grand-croix, Charles Lenglier, proviseur du lycée Charlemagne, Adrien Javary, professeur à l’École polytechnique et le docteur Léandre Devailly sont tous trois chevaliers.

La famille de la mariée est installée dans une vaste demeure, rue de Paris à Joinville, dans laquelle le nouveau couple va s’installer. Le père d’Émilie, Théodore Quirot est professeur et directeur de l’institution d’enseignement privée laïque du Parangon à Joinville, qui comprend une part importante d’enseignement pratique. La mère de celui-ci, Désirée Lavenue, est la fille adoptive de Jean Marie Molette, chef d’institution et conseiller municipal de Joinville, qui épousa en deuxième noces Louis Ferdinand Rousseau, professeur puis lui aussi directeur du Parangon et maire de Joinville.

Quant à la mère d’Émilie, Jeanne Amiel est la fille d’un conseiller municipal de la commune et la nièce d’un célèbre peintre portraitiste. L’environnement familial dans lequel se trouve Achille Mermet va sans doute contribuer à son aisance financière et à son engagement dans la vie civique.

Il poursuit cependant son œuvre scientifique et pédagogique, non sans une certaine forme d’humour parfois. L’ancien juriste et théoricien anarchiste Émile Gautier, devenu chroniqueur scientifique pour Le Journal, ayant évoqué l’intérêt qu’il y aurait à faire des cures de fraises, Mermet évoqua un échange qu’il eut à ce sujet avec son maître, Dumas. Ce dernier consommait beaucoup de fraises, croyant à leur efficacité contre les douleurs. Il supposait que la lithine pouvait en être en la cause. Spécialiste de l’analyse spectrale, Mermet, après analyse de différentes variétés, constata qu’il y avait de la lithine dans quelques espèces, mais extrêmement peu, ce qui rendait impossible que les fraises puissent avoir l'efficacité nécessaire pour améliorer l'état des rhumatisants. Par contre, il trouva, en quantités énormes, des phosphates. Il conclut, dans une lettre au Journal, publiée en 1902, que consommer de tels aliments n’était donc « pas sans inconvénients. »

L’Union des physiciens est créée en 1906 par un professeur de Rouen, Abel Buguet et Achille Mermet en prend la présidence. C’est la première association de professeurs de sciences dans l’enseignement secondaire. Son bulletin est présenté par Mermet comme une « Mutuelle des Idées ». Un Service de Renseignements accueille les questions des adhérents auxquelles d’autres abonnés répondent dans les numéros suivants. Dans les deux premières années, plus de 200 questions sont posées. Selon la physicienne et historienne des sciences Nicole Hulin, Achille Mermet appelle le professeur à une véritable conversion : de « théoricien distingué », il est « invité à se transformer en praticien habile. »

En 1909, Mermet quitte sa fonction et devient président honoraire, tout en restant membre du bureau. À la fin de l’année, il prend sa retraite de l’enseignement et est nommé professeur honoraire.

Si le domicile de Mermet est à Joinville-le-Pont, il a un second lieu d’attache, l’île de Noirmoutier, en Vendée. Il y séjourne dès la fin du 19e siècle et engage en 1898 la construction d’une propriété, la Fougeraie, dans le site du Bois de la Chaize. Située rue Sainte-Agathe, elle est, en 2011, signalée au patrimoine des Pays-de-la-Loire.

Stationné dans la baie de l’Anglée, le yacht Milianne, un cotre de 27 tonneaux, construit à Bordeaux en 1874, appartient à Mermet en 1902. Naviguant notamment sur les côtes du sud de la Bretagne, il s’inquiète des conditions d’accueil des plaisanciers dans les ports. Ainsi en 1906, il se plaint dans Yachting gazette du mouillage de Saint-Nazaire (Loire-Inférieure, act. Loire-Atlantique) d’où, d’après lui, son yacht revient tel « une dame en robe blanche qui sortirait d’une visite dans une mine de houille ! »

En septembre 1909, Mermet écrit à Arthur Coquard compositeur et critique musical du quotidien L’Écho de Paris, habitué de Noirmoutier, pour lui signaler un phénomène de « mer en feu » particulièrement spectaculaire, auquel il a assisté au large de Pornic (Loire-Inférieure) et qui dure environ 20 minutes. Plusieurs quotidiens parisiens et revues de géographie accueillent son témoignage. Mermet se demande s’il y aurait un lien avec des manifestations sismiques, cosmiques ou météorologiques, qu’il estime particulièrement nombreuses en 1909 dans « notre pauvre globe breloqué comme un sac de noix. »

À suivre

Le yacht Milianne de Mermet

 

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24 avril 2021 6 24 /04 /avril /2021 00:01

Début de la biographie d’Achille Mermet

Ernest Mermet est né le 5 mai 1849 à Villeneuve-sur-Yonne (Yonne) ; il utilisera, dès son adolescence, le prénom d’Achille. Il est le fils de François Marie Mermet et de Marguerite Putois. Son père, originaire de Cerdon (Ain) est alors agent spécial du chemin de fer de Paris à Lyon. Il sera ensuite employé comme architecte de la Ville de Paris. Sa mère est née à Villeneuve-sur-Yonne.

Alors élève de l’école municipale Turgot à Paris (3e arr.), tout juste âgé de 17 ans, Achille Mermet est admis en octobre 1866 à l’école normale de l’enseignement spécial de Cluny (Saône-et-Loire) avec une bourse d’État en pension complète. L’école, dont c’est la première rentrée, a été fondée à l'initiative du ministre de l'Instruction publique Victor Duruy, pour développer les enseignants rejoignant les établissements à vocation technique. Elle s'installa dans les bâtiments de l'ancienne abbaye et fonctionna jusqu’en 1891.

Toujours de manière précoce, à 20 ans, Achille Mermet devient préparateur d'histoire naturelle à l'école normale de Cluny après avoir terminé sa scolarité en 1869. Pendant la guerre franco-prussienne de 1870-1871, Mermet déclara s’être engagé volontairement.

Après le conflit, dans le même établissement de Cluny, il devient préparateur de chimie. Il est reçu premier en septembre 1872 à l’agrégation de sciences physiques et naturelles et devient professeur de l’enseignement spécial au lycée Charlemagne de Paris (4e arr.).

Jusqu’à la disparition de l’établissement en 1891, Achille Mermet se montrera attaché à l'école normale de Cluny, à son évolution et à sa défense. Il fait partie des fondateurs, en 1871, de l’Association amicale des anciens élèves de l'École normale spéciale, dont il devient administrateur en 1874. Il en sera le président de 1882 à 1884. Démissionnaire de ce poste pour raison de santé (il aurait contracté la typhoïde), il restera cependant au sein du comité d’administration de l’association.

Dans son discours de prise de fonction à la présidence, il précise sa conception de l’association. Refusant de la cantonner à la seule aide sociale, il met en avant le développement de l'enseignement spécial et l'amélioration du sort de ses fonctionnaires, qu’il considère comme « des déclassés dans l'enseignement secondaire ». En accord avec ses principes, il contribue à la révision des programmes de l’école et à l’évolution de l’enseignement spécial au sein du cursus des lycées de France. Il plaide pour l’école de Cluny soit déplacée à Paris. En juillet 1890, Mermet fait partie d’une délégation de trois personnes qui tentent, sans succès, de convaincre le ministre de revenir sur la décision, prise par l’Assemblée nationale, de supprimer l’école.

Tout en conservant son enseignement au lycée Charlemagne, Mermet devient en 1873 préparateur en chef des cours de chimie de l'École centrale des arts et manufactures et chimiste des laboratoires de l'École des hautes-études. Il revendique être l’élève du chimiste Jean Baptiste Dumas, membre de l’Académie française, secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences, et qui fut ministre sous la deuxième République avant de devenir sénateur pendant le second empire.

Membre de la Société internationale des électriciens et de la Société d'encouragement pour l'industrie nationale, Mermet mène des recherches, seul ou en collaboration avec B. Delachanal, ingénieur et ancien élève de l'École centrale. Il publie notamment en 1883 un article sur les Creusets de nickel et l’année suivante sur l’Explosion du verre trempé dans la revue La Nature.

Sa principale publication a été un manuel, intitulé Manipulations de chimie : métalloïdes, publié en 1885 et qui connut plusieurs rééditions. Il est de nouveau republié en 1919, dans une version raccourcie. Illustré de 283 figures, le manuel se veut un ouvrage pratique où l'abondance des détails garantit la réussite de l'expérience et la sécurité du manipulateur. Il vise également à permettre des expériences avec une économie de matériel.

À suivre

 

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22 avril 2021 4 22 /04 /avril /2021 00:01

Suite de la biographie d’Eugène Voisin

À la fin de l’année 1911, Eugène Voisin, qui reste très apprécié d’une partie de la population, est un maire diminué sur le plan physique, souffrant des jambes, et très affaibli politiquement parlant. Lorsqu’il faut, en novembre de cette année, inaugurer l’agrandissement de la mairie et deux ponts desservant les communes voisines, Voisin doit charger son adjoint, M Villain, de lire son discours. Il reçoit plusieurs témoignages de reconnaissance, comme des pompiers en octobre.

Par contre, les huit élus sur vingt-trois qui composent désormais la minorité du conseil municipal l’attaquent vivement, dans l’assemblée comme dans la Revue de Saint-Maur, qui devient leur organe. Ils insinuent que, comme entrepreneur, il avait intérêt à rester maire et contestent l’attribution des aides sociales par le bureau de bienfaisance, tout en estimant qu’il serait « au bout du rouleau ». La pratique de l’obstruction des contestataires fait qu’il faut quatre séances du conseil pour examiner le compte administratif.

Les élections municipales de mai 1912 sont l’occasion d’une opération inhabituelle sur le plan politique. Les trois tendances d’opposition à la municipalité radicale-socialiste décident de passer un pacte, prenant prétexte de leur soutien à la représentation proportionnelle. Les radicaux dissidents, les conservateurs et libéraux ainsi que les socialistes unifiés de la SFIO conviennent donc de fusionner leurs listes au second tour, au prorata du score obtenu. Par contre, les radicaux-socialistes officiels décident de se présenter seul.

Eugène Voisin, élu depuis 45 ans et maire depuis 24, décide de ne pas se représenter. Il laisse la place à son adjoint Émile Briolay. Le comité radical-socialiste de Joinville tente de retrouver l’unité de ses membres, mais échoue. La liste radicale sera battue et c’est un dissident, Ernest Mermet, qui devient maire tandis qu’un autre est adjoint, Henri Vel-Durand, et un conservateur, Pierre Dalbavie aussi.

Eugène Voisin meurt le 18 juillet 1914 à Joinville. Il était âgé de 80 ans et père d’une fille, Maria Pauline Louise Voisin, mariée à un entrepreneur du bâtiment, Alexandre Pâquet. Leur fils, Charles Pâquet, fut architecte et animateur d’une association historique à Vincennes.

Bien qu’il ait été radical-socialiste, Voisin ne partageait manifestement pas toutes les opinions anticléricales de la majeure partie des radicaux joinvillais. Il ne se montra jamais en première ligne dans les évènements organisés par les libres-penseurs. Il fut inhumé au cimetière de Joinville après une cérémonie à l’église Saint-Charles, le 22 juillet, quelques jours avant le début de la première guerre mondiale.

Eugène Voisin était titulaire de nombreuses décorations. À titre militaire, il portait la médaille 1870-1871. Il avait obtenu une mention honorable de la mutualité en janvier 1896, la médaille de bronze en janvier 1900, celle d'argent en mars 1907 et l’or en janvier 1908. Les Palmes académiques lui avaient été accordées comme officier d’académie puis officier de l’instruction publique en avril 1899. Il avait été fait chevalier du Mérite agricole en décembre 1904 puis officier. La médaille d'or de l’Encouragement au bien lui avait été accordée. Enfin, il avait été créé chevalier de la Légion d’honneur en juillet 1903.

Une rue de Joinville a été baptisée Eugène-Voisin en janvier 1920 ; c’est l’ancienne rue des Marronniers, où il avait vécu. Un médaillon en bronze portant le portrait de Voisin avait été apposé en juin 1911 dans la mairie agrandie. Son nom figure également sur la plaque des bienfaiteurs de la commune, du fait d’un don fait en 1888.

Parmi les nécrologies publiées, on remarquera celle du quotidien sportif L’Auto, qui remarqua que le disparu « avait fait beaucoup pour la natation. Il avait réussi à faire partager ses idées sportives à la municipalité et avait encouragé toutes les épreuves nautiques qui se disputèrent dans sa ville. »

Fin

 

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