Guillaume Laisné est ordonné prêtre du diocèse d’Avranches (Manche) le 3 avril 1665, puis fait des études à la faculté de Paris et devient bachelier en théologie de la Sorbonne en février 1678.
En 1678, il est sacristain de Saint-Étienne-des-Grès (parfois improprement nommée Saint-Étienne-des-Grecs), une des plus anciennes de Paris, déjà en usage en 857 et démolie en 1792. Elle était la seconde station du pèlerinage de saint Denis, qu’une ancienne tradition présentait comme le fondateur de l’édifice.
Laisné est en même temps titulaire de la « chapelle simple non sujette à résidence de Saint-Léonard du Pont-de-Saint-Maur », qui existe depuis le 13e siècle et accueille principalement les visiteurs franchissant le pont sur la Marne, l’un des deux seuls en amont de Paris avec celui de Charenton, ainsi que les bateliers déchargeant le bois venu de Haute-Marne.
Cette même année, il passe devant notaire un accord avec Pierre de Laistre, malade, pour échange la charge de chanoine de Saint-Étienne-des-Grès, dont dispose ce dernier, contre la chapelle du Pont-de-Saint-Maur, située sur le territoire actuel de Joinville-le-Pont.
Le clergé de Saint-Étienne s’oppose à la prise de possession de la chanoinie par Guillaume Laisné car il estime qu’il ne justifiait pas « de bonnes vies et mœurs ». Laisné fournit plusieurs attestations dans ce sens et obtient en justice une décision favorable.
Guillaume Laisné se voit attribuer, le prieuré et châtellenie royale de Bouzencourt, dans le diocèse d’Amiens (act. commune Le Hamel, Somme). La fonction est vacante après la résignation de Laurent du Chatelet de Frenières. Contestés en justice, ses droits sur l’abbaye sont reconnus en première instance par un jugement de la prévôté de Paris, au Chatelet en avril 1694, confirmés en appel en février 1695 puis en troisième instance par la cour de Rome en juin 1695. Il porte désormais les titres de prieur, seigneur et châtelain de Bouzencourt.
L’abbaye de Bouzencourt est détruite lors de la Révolution.
Guillaume Laisné ne doit pas être confondu avec son homonyme, prieur de l’abbaye Saint-Jean-de-Brou à Mondonville (act. Eure-et-Loir), historien du diocèse de Chartres, mort en 1655.
Situation de Bouzencourt, dans la Somme, au nord d'Amiens (carte de Cassini)
Pierre Masson naît en février 1631 à Paris. Ordonné prêtre, il est bachelier en théologie et licencié et docteur en droit de l’université de la Sorbonne. Il est d’abord chapelain de la cathédrale Notre-Dame de Paris, puis de Saint-Léonard, au village du Pont-de-Saint-Maur (act. Joinville-le-Pont). Il occupe probablement cette fonction vers 1660-1670.
La chapelle est située au débouché rive droite du pont de Saint-Maur (précédemment nommé pont Ollin, puis pont des Fossés) qui est, avec celui de Charenton, l’un des deux ouvrages sur la Marne en amont de Paris. Il est contigu à un port de déchargement de bois flottant venant de la Haute-Marne. L’édifice, doté d’une petite crypte, sert principalement aux bateliers et des voyageurs pour lesquels des messes sont dites. Les habitants du village sont rattachés jusqu’en 1693 à la paroisse de Fontenay-sous-Bois, qui couvre l’essentiel du Bois de Vincennes (alors dénommé Vilcene).
Devenu chanoine, Pierre Masson officie à l'église Saint-Étienne-des-Grès à Paris (act. 5e arr.), un des plus vieux édifices religieux de la capital, mentionné en 857 et détruit en 1792. Elle constituait la seconde station du pèlerinage de saint Denis, auquel une ancienne tradition attribuait sa fondation.
En 1673, Pierre Masson devient curé de l’église paroissiale Saint-Jean-Baptiste de Choisel (Seine-et-Oise, act. Yvelines). Dans sa fonction, il est réputé avoir gouverné la paroisse « avec beaucoup de prudence, et de fermeté, menant une vie assez solitaire et retirée, donnant son temps à l'étude, et a la connaissance des belles lettres », d’après une inscription funéraire dans l’église de Choisel.
Selon F. de Guilhermy et R. de Lasteyrie, qui publièrent l’épitaphe, « Ce fut sans doute l'amour de la vie solitaire et retirée (…) qui détermina le chanoine Pierre Masson à préférer l'obscurité de la cure de Choisel au rang que pouvaient lui assigner son savoir et ses grades universitaires. Il donna tous ses soins à l'embellissement de son église. La plupart des menuiseries qu'il fit faire sont encore en place. Les initiales de son nom, PM, gravées sur la chaire, ont été respectées. Cette chaire, élégamment sculptée et rehaussée de dorures, est ornée d'une statue de saint Jean l'Évangéliste, d'un écusson armorié, d'une couronne fleurdelisée au pourtour de l'abat-voix, et d'un aigle au sommet. »
Le curé fait agrandir le chœur et exécuter de beaux ouvrages de menuiserie tels les lambris, bancs fermés et les stalles ou, en 1683, la chaire en bois sculpté. Ces éléments ont été sauvegardés.
Pierre Masson meurt le 27 juillet 1691 à Choisel. Il est enterré sur place et une plaque en marbre noir dans l’église maintient son souvenir : « Requiescat in Pace - Aegidius et Petrus Masson, hic Nepos, ille frater Mærentes. »
L’abbé Bauller a été nommé vicaire de l’église Saint-Joseph des Épinettes à Paris (17e arr.) en juillet 1929. Il soutient en 1931 le syndicalisme chrétien de la CFTC en souscrivant en faveur de sa propagande. Il devient aumônier du groupe des scouts de la paroisse en 1933.
Au printemps 1944, il prend la succession de Jacques Hollande en tant que curé de Sainte-Anne de Polangis à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Désigné pour prendre la tête de la mission de Paris par le cardinal Suhard, l’abbé Hollande devint un des fondateurs des prêtres-ouvriers en France. La paroisse couvre les quartiers de la rive gauche de la Marne, Palissy et Polangis, qui est principalement sur Joinville mais également en partie à Champigny-sur-Marne.
En mai 1948, aux côtés de Gilberte Pierre-Brossolette et de l’abbé Augustin Baudot, curé l’autre paroisse joinvillaise, Saint-Charles-Borromée, l’abbé Bauller, rend hommage à Joinville aux héros de la Résistance à l’Allemagne nazie. Gilberte Pierre-Brossolette, épouse de Pierre Brossolette, mort pendant l'Occupation en 1944, était vice-présidente socialiste du Conseil de la République (Sénat).
L’abbé Jean Lamour remplace l’abbé Bauller à la cure de Polangis en octobre 1953.
Augustin Baudot naît en 1883. Il est ordonné prêtre en 1906. En 1911, il est vicaire au Petit-Colombes, dans la commune de Colombes (Seine, act. Hauts-de-Seine). En mai, il est victime d’un escroc belge, qui met à profit la charité de prêtres parisiens ou de banlieues en leur présentant une lettre frauduleusement signée d'un ecclésiastique de Charleroi (Belgique). Il est condamné, par défaut, à dix mois de prison et 50 francs d'amende en août 1912. La qualité d’abonné du quotidien royaliste l’Action française d’Augustin Baudot est mentionnée en juin 1914.
Peu après le début de la première guerre mondiale, en octobre 1914, l'abbé Baudot a été nommé vicaire à Saint-Jean-Baptiste de Neuilly (Seine, act. Hauts-de-Seine). Il y restera plus de seize ans.
En août 1930, l'abbé Baudot est en vacances avec un prêtre de ses amis, l'abbé Lozet, professeur à l'école Bossuet à Paris. Ils se trouvaient au large de Saint-Cast (Côtes-du-Nord, act. Côtes-d’Armor) et revenaient du Cap Fréhel sur le bateau de ce dernier, L'Hermine. Ils aperçurent une périssoire vide, puis virent deux baigneurs agrippés à son bord, deux étudiants parisiens tombés à l'eau ; ils les ont ramenés sains et saufs.
Devenu premier vicaire de la basilique Saint-Denis (Seine, act. Seine-Saint-Denis) en février 1931, l'abbé Baudot y reste jusqu’en 1937. En avril, il est nommé curé de Saint-Charles-Borromée à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Il prend la suite de Victorin Martin mort en fonction en janvier.
C’est dans l’église Saint-Charles qu’est célébrée en décembre 1938 la messe annuelle à la mémoire des morts du cinéma, qui se tenait les années précédentes dans l’autre lieu de culte communal, l’église Sainte-Anne de Polangis. Le changement de lieu est peut-être dû à la petite taille de l’édifice de Polangis.
Pendant la deuxième guerre mondiale, l'abbé Baudot participe en décembre 1943 au déjeuner des vieux, organisé par l’association des familles françaises de Joinville, présidée par le Dr Bitterlin, conseiller municipal, et auquel est présent le maire Émile Lesestre et ses adjoints, nommés par le gouvernement de Vichy.
En mai 1948, aux côtés de Gilberte Pierre-Brossolette et de l’abbé Bauller, curé de Polangis, l'abbé Baudot, rend hommage aux héros de la Résistance à l’Allemagne nazie. Gilberte Pierre-Brossolette, épouse de Pierre Brossolette, mort pendant l'Occupation en 1944, est vice-présidente socialiste du Conseil de la République (Sénat).
Sur la demande de la section locale du parti gaulliste le RPF, dont Pierre Calmon est le président pour Joinville, l'abbé Baudot dit une messe en mémoire du maréchal Leclerc en novembre 1951.
Présenté comme malade en octobre 1953, l'abbé Baudot quitte la cure de Saint-Charles en 1954, est âgé d’environ 71 ans. Il y revient deux ans plus tard, en mai 1956, pour célébrer ses noces d’or sacerdotales, à l’occasion d’une cérémonie célébrant le centenaire de la pose de la première pierre de l’église paroissiale. La date de son décès n’est pas connue.
Paul Louis Marie Joseph Charles naît le 8 octobre 1872 à Sancergues (Cher). Il est le fils de Francine Dumoulin et de son mari, Pierre Sébastien Émile Charles, instituteur public.
Ordonné prêtre, probablement en 1897, il devient en janvier 1898 vicaire à Sainte-Geneviève de la Plaine-Saint-Denis (Seine, act. Seine-Saint-Denis). Il s’y occupe des enfants, animant un « patronage florissant, mais pauvre », selon La Croix.
Transféré en mars 1899 au sud de la capitale, vicaire de Saint-Germain de Vitry-sur-Seine (Seine, act. Val-de-Marne), il est affecté en mars 1901 dans la même fonction à Saint-Joseph-des-Carmes à Paris (5e arr.). On le retrouve en novembre 1908 vicaire à Notre-Dame d'Auteuil (16e arr.) puis il revient au quartier latin, toujours au même poste, à Saint-Etienne-du-Mont (5e arr.).
Nommé curé de Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne) en 1921, successeur de l'abbé Léon Roger, il va rester neuf ans dans la paroisse Saint-Charles-Borromée, qui couvre les quartiers de la rive droite de la commune. Il organise, en février 1930, une vente de charité pour la construction d'une salle paroissiale.
Cette même année, en novembre, il est nommé aumônier des Petites-Sœurs des Pauvres de Saint-Denis-de-l'Estrée, dans le quartier de la Chapelle, à Paris (18e arr.). Il démissionne en juin 1934 pour raison de santé.
Paul Charles décède le 20 septembre 1953 à Paris (14e arr.). Il était âgé de 80 ans et résidait à la Maison Marie Thérèse, établissement d’hébergement des prêtres âgés, fondé par Céleste de Chateaubriand et situé 92, avenue Denfert-Rochereau.
Plusieurs autres abbés Charles sont mentionnés dans la presse, mais ne peuvent pas être assimilés à lui. L’un d’entre eux, qui réside à Paris-Auteuil en 1909, se propose par petite annonce dans pour donner des leçons de français, anglais, latin et grec. Un autre (dont l’initiale est M) est rédacteur à La Croix et à Unita cattolica (Florence) ; il publie en 1910 Que penser du Sillon ?, mouvement catholique de gauche fondé par Marc Sangnier. Un troisième est vicaire à Saint-Sulpice en 1914. Un autre, prénommé Jean, professeur au collège Stanislas, est cité comme témoin au procès Villain pour l’assassinat de Jaurès en 1919. Le dernier abbé Charles, docteur en théologie, ancien professeur de philosophie et curé de Beaumont rédige un pamphlet violemment antisémite Justesolution de la question juive, Renaissance française, 1909.
Au milieu des années 20, la grande affaire secouant la paroisse de Vitry-sur-Seine va être celle de l’affiche « À l’ombre de la croix ». Apposée sur certains murs de la ville fin mai 1923, elle accuse le curé Théophile Covin d’avoir une maîtresse. Nous reproduisons ci-dessous le texte de l’affiche tel que le quotidien communiste L’Humanitél’a publié en janvier 1926.
À l’ombre de la croix
Au n° 77 de l'avenue Dubois, se trouve un immeuble confortable, paraît-il, surtout vers le troisième étage, C'est là qu'habite une dame G. née A. veuve inconsolable qui, chaque dimanche, va à la messe, sans parler de la semaine.
Dans le même immeuble habile le curé Covin, face pudibonde et bien portant, qui, se prenant sans doute pour l'ange Gabriel, venait, la nuit, consoler ladite dame et lui parler de Jésus.
Il avait totalement oublié le commandement où Dieu dit « L'œuvre de chair tu ne feras qu'en mariage seulement. »
Tout se serait bien passé, si le fils de la veuve, d'une entrée brusque et inattendue, n'eut trouvé le ministre de Dieu en costume d'Adam, mordant à la pomme d'Ève, et ne s'était avisé de lancer par la fenêtre soutane et pantalon.
Puisque le chef de l'Église de Vitry ne respecte même plus les sentiments d'un fils pour sa mère, continuerez-vous plus longtemps, bons pères de famille, à lui envoyer vos femmes et vos filles ? Si cet exemple ne vous suffit pas et que vous vouliez être « chefs de gare », c'est que vous l'aurez bien voulu.
Un Chrétien.
L’affiche avait été polycopiée dans une salle du café de l'Angélus. Sur plainte de l’abbé Covin, une enquête fut ouverte. La police porta d’abord ses soupçons sur les francs-maçons, supposés être ennemis du curé. C’est finalement un petit journal communiste de Choisy-le-Roi, Germinal, qui avait reproduit l'affiche accompagnée d'un commentaire qui fut condamné pour diffamation le 13 décembre 1923 par la 12e chambre du tribunal correctionnel de la Seine, aux sommes conséquentes de 200 francs d'amende et 2 000 francs de dommages-intérêts.
Cependant, après cette décision de justice, un vicaire de Vitry, l'abbé Gautier, toujours selon L’Humanité, « tint des propos fort irrespectueux pour son supérieur chez une paroissienne qui l'avait invité à sa table ». Décidément bien informé, le journal de gauche explique qu’ensuite « cette brave dévote s'en alla trouver le curé pour lui confier les étranges paroles du vicaire. Le curé, rouge de colère, s'écria : - C'est lui, le misérable, qui a rédigé l'affiche ! Ah, j'aurais dû m'en douter ! »
Le tribunal diocésain, l'officialité de Paris, fut saisi. Six religieux, experts en écriture, assurèrent que l’écriture reproduite sur l’affiche était celle du vicaire et la justice ecclésiastique conclut à la culpabilité de l'abbé Gautier. Il fit appel et tenta de faire citer un marchand forain, M. Chéron, qu’une tenancière de café croyait être l’auteur du libelle. Mais Chéron, qui était également trésorier du comité intersyndical de Vitry refusa de comparaître devant le tribunal d’appel de l'officialité de Versailles, malgré la promesse d’un défraiement. Définitivement condamné devant la cour catholique en novembre 1925, l'abbé Gautier fut frappé d'interdiction d’exercice de sa fonction.
Mais, banni par la justice religieuse française, Gautier indiquait vouloir en appeler à la cour de Rome et, en attendant, tenta sa chance devant la justice civile, en la personne du juge de paix d’Ivry-sur-Seine (Seine, act. Val-de-Marne). L'audience avait attiré à la justice de paix d'Ivry une affluence nombreuse le 13 janvier 1926, plus de deux cents curieux n'ayant pu, selon L’Humanité, trouver place dans le tribunal. Gautier accuse Chéron d’avoir imité son écriture et d’être le véritable scripteur de l’affiche. Si Mme Daviot, la cafetière, soutient l’abbé Gautier, plusieurs témoins, notamment communistes, dédouanent au contraire Chéron.
C’est le cas également du curé Covin qui transmet une lettre : «. Je vous écris, bien que nous soyons séparés par nos croyances religieuses comme par nos opinions politiques. Mais on me dit que vous êtes accusé d'avoir écrit, il y a deux ans et demi, un placard anonyme qui m'a injurié et diffamé publiquement. Or, je sais que ce n'est pas vous qui avez écrit cette affiche et je vous autorise à dire partout que je sais que ce n'est pas vous. C'est que j'en connais l'auteur et que je l'ai fait punir comme il méritait de l'être. Ce sont des experts qui l'ont découvert. On me dit qu'une femme Daviot (ancienne veuve Martin, de la place de l'Église) voudrait soutenir celui qui vous accuse. Cette personne a déclaré, le 3 juillet 1923, à un inspecteur de la police qu'elle ne savait rien. Si elle ne savait rien cinq semaines après l'affaire, comment peut-elle dire qu'elle sait maintenant quelque chose ? Je le répète, moi qui ai été victime de cette abominable affaire, je suis sûr que ce n'est pas vous qui avez écrit le texte qu'on a copié. »
On rit souvent dans cette audience, où le juge a quelques difficultés à maintenir le calme. Chéron, affirmant son innocence, considère, d’après L’Humanité, que « si le curé a aimé une de ses paroissiennes, il a bien fait. »
Me Barquissau, défenseur de Chéron, s’en prend aux tribunaux ecclésiastiques. Il s'étonne qu'au XXe siècle un tribunal ecclésiastique ose déclarer, en des attendus rédigés en latin, que les témoignages d'ouvriers, spécialement communistes ou anarchistes sont sans valeur, ajoutant que « la profession d'ouvrier n'est pas de celles qui élèvent les cœurs et anoblissent les caractères ». Lucien Barquissau était président de la Fraternelle rationaliste et membre du conseil juridique de l'Union fédérative de la libre-pensée.
Dans un arrêt, présenté comme très documenté par L’Humanité, le juge de paix débouta l'abbé Gautier de son instance et le condamna pour abus de citation et campagnes diffamatoires à 300 francs de dommages et intérêts envers M. Chéron ainsi qu’aux dépens. «... Si nous n'avons pas, sous le régime de la loi de séparation des églises et de l'État, à nous occuper de la validité des décisions ecclésiastiques, par contre, nous devons rechercher la vérité dans une affaire injurieuse ». Il rappela que des rois de France, Charles V en 1371 puis François 1er en 1539 avaient considérablement réduit le champ des officialités, avant qu’elles ne soient abolies par l'Assemblée constituante le 11 septembre 1790. Le juge considérait qu'il n'y avait pas lieu d'accueillir les décisions prises, mais il en tint compte à titre de simples renseignements, pour arriver à faire toute la lumière. Or, il assura que la preuve de la responsabilité de Chéron n'avait pas été administrée.
Théophile Covin naît le 19 juin 1872 à Paris (11e arr.). Il est le fils d’une alsacienne ayant opté pour la nationalité française, Marie Thérèse Frindel, piqueuse de bottines, et de Stéphane Covin, enfant abandonné à la naissance, devenu mécanicien. Comme ses quatre frère et sœurs plus âgés, Théophile Covin est légitimé par le mariage de ses parents un an pile après sa naissance dans le même arrondissement parisien.
Après des études à l'Institut catholique de Paris, Théophile Covin, devient prêtre en 1898. Il est nommé vicaire à Levallois-Perret (Seine, act. Hauts-de-Seine) en janvier 1899. Il y dirige la congrégation des sœurs Maronites de la Sainte Famille, qui servent à l’hôpital Notre-Dame du Perpétuel secours.
En juin 1904, il est affecté à une paroisse parisienne, en tant que vicaire à Saint-Lambert de Vaugirard (15e arr.). Il y vit la séparation de l’église et de l’État et affiche son conservatisme politique. Ainsi, il participe en février 1906 à une souscription lancée par le quotidien d’extrême-droite La Libre parole « en faveur des Français arrêtés ou blessés en défendant la liberté de conscience ». En mars 1907, c’est dans le journal catholique La Croix qu’il donne en « hommage aux religieux et aux prêtres persécutés. »
Nommé vicaire à Sainte-Marthe des Quatre-Chemins à Pantin (Seine, act. Seine-Saint-Denis) en avril 1907, il est responsable de l'œuvre des hommes. Il devient vicaire de Notre-Dame de Clignancourt à Paris en avril 1911. Il s’y charge notamment de l’éducation religieuse des jeunes filles et des messes funéraires.
Resté dans ses fonctions pendant la première guerre mondiale, l’abbé Covin est nommé curé de Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne) en octobre 1915, successeur de l’abbé Léon Roger. Il y reste tout juste un an, et c’est son prédécesseur qui reprend son poste tandis que l'abbé Covin prend possession de la cure de Saint-Germain de Vitry-sur-Seine (Seine, act. Val-de-Marne). Pendant cette année, il « s’est efforcé de maintenir les traditions chrétiennes » selon La Semaine religieuse de Paris. Il était seul prêtre dans la paroisse Saint-Charles-Borromée de Joinville, puisque son vicaire était mobilisé, et la population desservie était de 5 000 personnes. Elle est double à Vitry avec trois vicaires.
Théophile Covin va rester curé de Vitry pendant 16 ans. Arrivé au milieu de la première guerre mondiale, il est sensible aux situations humanitaires, étant par exemple membre du comité local de la Société de secours aux blessés militaires (Croix-Rouge) en 1924.
Comme dans ses fonctions antérieures, l’abbé Covin défend des opinions conservatrices. Ainsi, en mars 1925, l'abbé Covin préside une réunion de 600 catholiques de Vitry-sur-Seine, selon La Croix, « Pour les libertés catholiques », assisté du colonel Philippe et de M. Rouilly, ingénieur. Le conférencier est l’essayiste Joseph Santo (1869-1944), militant catholique et monarchiste, auteur d’ouvrages sur la question juive et très opposé à la franc-maçonnerie. Il avait été conseiller municipal de Nancy. Pendant la rencontre, J. Santo demande « pour les religieux anciens combattants, la place que les défaitistes d’hier tentent de leur refuser » et appelle à défendre les Sœurs de Charité « qui se dépensent sans compter dans la banlieue parisienne et que les sectaires veulent persécuter. »
A suivre
Couverture d'un livre de Joseph Santo : "Le communisme? jamais! jamais! jamais!"
Victorin Joseph Marie Martin naît le 27 mai 1872 à Vachères, village de la commune de Présailles (Haute-Loire). Il est le troisième des 14 enfants de Marie Mélanie Mialon et de Jean Louis Adrien Martin, propriétaire cultivateur.
Ordonné prêtre en 1897, l’abbé Martin devient en janvier 1898 professeur au petit séminaire Saint-Nicolas du Chardonnet à Paris (5e arr.).
Il est nommé dans son premier poste paroissial, en septembre 1902, comme vicaire à l’église Saint-Michel des Batignolles de Paris (17e arr.). Il y vivra la séparation de l’église et de l’État puis la première guerre mondiale et y reste 17 ans. Toujours vicaire, Victorin Martin officie à partir de décembre 1919 à Saint-Pierre de Montrouge, Paris (14e arr.).
C’est en novembre 1930 que l’abbé Martin prend possession de la cure de Saint-Charles-Borromée, à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), où il succède à l'abbé Paul Charles. Il y vivra la période du Front populaire.
Victorin Martin meurt en fonction le 26 janvier 1937 à Joinville. Il était âgé de 64 ans.
Léon Joseph Roger naît le 16 mai 1863 à Paris (6e arr.). Il est le fils d’Henriette Roustain et de son mari, Édouard Roger, employé au ministère des finances.
Après des études au séminaire Saint-Sulpice d’Issy-les-Moulineaux, Léon Roger est ordonné prêtre dans le diocèse de Paris sans doute fin 1888. Il demande à être affecté la paroisse de Puteaux (Seine, act. Hauts-de-Seine), où il rejoint, en janvier 1889, selon La Semaine religieuse de Paris (1915) « des prêtres d'élite vivaient ensemble, s'adonnant, dans une communauté d'esprit et de sentiments, à l'apostolat des ouvriers, nombreux dans cette localité. »
L’abbé Roger demeura quatorze ans à Puteaux puis fut nommé, en décembre 1903, vicaire de l’église Saint-Médard à Paris (5e arr.). Il est le directeur des œuvres de Sainte-Rosalie, qui s’intéressent aux familles pauvres du quartier et sont assurées par les sœurs de Saint-Vincent de Paul. Il succède aux Prêtres de la Mission, lazaristes, qui en étaient chargés.
Nommé curé de Saint-Charles Borromée à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne) en juillet 1910, Léon Roger arrive au moment où la paroisse vient d’être divisée. Couvrant la totalité de la commune depuis 1860, elle voit son ancienne chapelle de secours Sainte-Anne de Polangis érigée en nouvelle paroisse. Saint-Charles couvre désormais pour l’essentiel les quartiers de la rive droite de la Marne. Roger prend la succession de l'abbé Amédée Lassier, curé de Joinville depuis 1904, nommé curé de Saint-Eustache à Paris. Mais l’abbé Roger constate que, malgré une fréquentation du catéchisme à Polangis sensiblement plus importante que dans son église (153 en 1914), le nombre de ceux fréquentant Saint-Charles n’avait pas sensiblement diminué (114). L’abbé crée une salle de patronage, pour l’éducation religieuse et les œuvres. Il initie la fondation d’une œuvre des Mères chrétiennes.
Assurant le service paroissial à Joinville au début de la première guerre mondiale, l’abbé Roger, est nommé curé de Notre-Dame Auxiliatrice de Clichy (Seine, act. Hauts-de-Seine) en octobre 1915. Il y célèbre en février 1916 une messe pour les victimes des bombardements assurés par un Zeppelin, ballon dirigeable allemand.
Dès octobre 1916, Léon Roger reprend sa cure de Joinville, son successeur, l'abbé Théodore Covin, ayant été nommé curé de Vitry-sur-Seine (Seine, act. Val-de-Marne). Le 11 novembre 1918, après que le tambour-affichiste municipal ait annoncé l’armistice mettant fin à la guerre, l’abbé Léon Roger fit sonner les cloches de l’église à toute volée pendant une demi-heure, à l’unisson des autres lieux de culte de France. Il organisa un Te Deum pour célébrer la fin du conflit et pour le repos des âmes des combattants morts pour la France.
Remplacé à la cure de Joinville en 1921 par l'abbé Paul Charles, ancien vicaire de Saint-Etienne du Mont, Léon Joseph Roger meurt le 10 avril 1944 à Paris (14e arr.). Il résidait alors à la Maison Marie-Thérèse ; établissement d’hébergement des prêtres âgés, fondé par Céleste de Chateaubriand et situé 92, avenue Denfert-Rochereau.
Les deux frères de l’abbé Roger ont été des inventeurs. Ernest Roger (1864-1943) fut ingénieur et l’un des inventeurs, au sein de la société fondée par Eugène Ducretet, de la télégraphie sans-fil ou TSF, qu’il met au point en 1896-1898, en parallèle avec les travaux de Marconi. La société devient Ducretet-Roger en 1908, quand le fils, Fernand Ducretet, prend la succession de son père. Fernand Ducretet meurt en août 1928 des suites de son exposition aux rayons X, qui allaient également rendre stérile Ernest Roger. Rachetée en 1930, la société pris le nom de Ducretet-Thomson.
Le frère cadet, Henri Roger (1869-1946), qui prit le nom de Roger-Viollet en accolant le patronyme de son épouse, Jeanne Viollet, au sien, fut ingénieur chimiste, astronome et photographe. Sa fille, Hélène Roger-Viollet, journaliste et militante féministe, fonda en 1938 l’Agence Roger-Viollet, qui fut reprise, après son assassinat en 1985, par la ville de Paris.
Émile Berthelot naît le 4 avril 1862 à Paris (11e arr.). Il est le fils de Thérèse Jeanne Rousseau, marchande de vins, et de son époux François Berthelot, ébéniste. Émile Berthelot va travailler dans une maison de bourse. Il épouse en avril 1886 à Paris (12e arr.) Marie Désirée Rosalie Gaucher, fille de marchands de fruits. Berthelot résidait alors avec son père à Charenton-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Ils s’installent chez les parents de son épouse.
Au cours des années 1890, la famille s’installe à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), dans le quartier nouveau en cours de développement de Polangis, avenue Jamin. Ils ont semble-t-il une certaine aisance et hébergent, outre leur jeune fille, le père François Berthelot.
Sensible aux questions sociales, Émile Berthelot participe, en septembre 1895, à une Souscription organisée par le journal la Petite République au profit des « affamés de Carmaux » qui recueille dans la commune de Joinville des dons de plus de 260 personnes en faveur des grévistes de la verrerie. La récolte est assurée par la coopératrice Victoria Vaudémont et un militant radical-socialiste, Pierre Jules Tireau avec le journaliste Henry Vaudémont. Deux mois plus tard, Berthelot réalise une quête en faveur des victimes de la catastrophe de l'usine de Bi-Métal de Joinville-le-Pont, où une explosion de chaudière a fait quatre victimes et a mis les 200 ouvriers au chômage.
C’est une évolution législative qui va bouleverser la vie d’Émile Berthelot. En juin 1898, une réorganisation du marché financier de Paris est initiée par un amendement du député du Rhône député Henry Fleury-Ravarin, inspiré par Georges Cochery, ministre des Finances du gouvernement Jules Méline. Ce texte transforme le privilège des agents de change en un monopole exclusif, les maisons de coulisse ou d’arbitrage de la place de Paris étant en conséquence forcées de mettre fin à leurs opérations.
Le rapporteur général du budget, Camille Krantz, député des Vosges, minimisait l’impact social de cette mesure à la tribune de l’Assemblée nationale : « Messieurs, on exagère... Nous ne devons pas ajouter foi aux petits papiers qui nous sont envoyés à profusion, touchant la situation des salariés ». Le quotidien financier La Cote de la Bourse, citant Jean de La Fontaine, y voit une forme de mépris des employés, « canaille, sotte espèce. »
En application des nouvelles règles, Émile Berthelot, âgé de 37 ans, est congédié pour le 1er juillet. Il n’attendra pas cette date et se suicide le 17 juin 1898, se pendant le soir dans son logement à Joinville. Il est découvert le matin par sa famille. Le Syndicat des employés de bourse et de banque, auquel il était affilié, annonce son décès dans un lettre ouverte au ministre, signée de son président, E. Payne, et de son secrétaire, Georges Astruc, conseiller municipal, antinationaliste d'Asnières (Seine, act. Hauts-de-Seine) : « C'est la première victime de la disparition du marché libre ». Le syndicat menait campagne depuis janvier 1897 contre ce qu’il estimait être une « atteinte au marché financier français par des mesures qui, du même coup, atteindraient cinq mille familles d'employés et renforceraient un monopole contraire en son principe à la doctrine républicaine et aux idées libérales dans toutes leurs nuances. »
Le quotidien de Clémenceau, La Justice y voit la « conséquence immédiate et navrante » de la réorganisation du marché : « Émile Berthelot (..) avait une situation qui paraissait brillante. Mais il avait une famille : sa femme, ses enfants. La maison de coulisse qui l'occupait, fermée par la volonté de Cochery le remercia. Il chercha un emploi et n'en trouva nulle part. La misère allait s'installer à son foyer ». La Cote de la Bourse considère qu’il s’agit du « premier résultat (…) d’une mesure qui n’a rien de progressiste. »
La fille d’Émile Berthelot, Blanche, se maria avec Henri Drevet, tapissier, résistant à l’occupation allemande de la France pendant la deuxième guerre mondiale et adjoint au maire de Joinville à la Libération et jusqu’en 1950.