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21 avril 2020 2 21 /04 /avril /2020 01:01

Joseph Marie Kownacki naît le 27 mars 1806 à Plock, en Pologne, alors sous contrôle russe.

Il suivait les cours de l'école de Varsovie lorsque débute, le 29 novembre 1830, le soulèvement national polonais contre la Russie, qui s’est terminé en octobre 1831. L’insurrection est provoquée par l'annonce, fausse, que l'armée polonaise est requise par la Russie pour réprimer les révolutions française et belge de 1830. La population de Varsovie se soulève et l'armée polonaise se joint à elle.

Abandonnant ses études, Kownacki s'engagea sous les ordres du général Desserwicki. Nommé sous-lieutenant de chasseurs à cheval, il prit part à de nombreux combats contre les Russes. La réaction russe à cette révolution polonaise, engageant des forces bien supérieures à la bataille d'Ostrołęka, aboutit à la prise de Varsovie, en 1831. Il s'ensuit une répression sévère ainsi qu'une russification systématique chassant de Pologne de nombreux patriotes qui trouvent bien souvent refuge en France.

Après la défaite, Joseph Kownacki se réfugia en Autriche. Plus tard, il rentra à Varsovie, mais, ne s'y sentant pas en sûreté, il commença un long voyage à travers l'Europe. C'est ainsi qu'en 1834 il arriva en France à Dijon (Côte-d'Or).

Kownacki participa, en qualité d'ingénieur, à la construction de la ligne de chemins de fer d'Orléans à Bourges. Il se maria à Orléans en 1840, avec une jeune couturière, Alexandrine Bullet, qui lui avait déjà donné un fils l’année précédente. Ils auront au total sept enfants. Il vivait à Orléans dans un milieu regroupant les anciens officiers polonais. La mention « officier polonais réfugié », qui était apposée à chaque fois sur les actes d’état-civil, équivalait à peu près à un statut de réfugié politique.

La famille Kownacki puis s'établit à Noyon (Oise) en 1840 et Joseph devient professeur de dessin. Il y resta jusqu'en 1887, collaborant également avec les sociétés archéologiques locales.

À quatre-vingt-un ans, Joseph Kownacki prit sa retraite et d’établit à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), d’abord auprès de sa fille, Emma, professeur et épouse du vétérinaire Jean Baptiste Delpérier. Il est ensuite hébergé par son fils Albert, publiciste et professeur, qui vivait dans la même rue du 42e de Ligne, au sein du quartier de Palissy toujours à Joinville. Sa bru, Gabrielle, était elle-même la fille d’un officier polonais réfugié, François Théodore Krahnass, et elle connut quelques succès en tant qu’artiste peintre. Ses deux petites-filles, Alice et Marthe Kownacka, furent aussi artistes peintres.

En mars 1906, la presse remarque que Joinville-le-Pont possède deux centenaires, chose rare puisqu’on en dénombrait cinq dans les communes du département de la Seine (hors Paris). Le quotidien Le Petit Parisien décrit ainsi Joseph Kownacki : « C'est un grand vieillard, à vénérable barbe blanche. Il jouit d'une santé excellente et a seulement l'oreille un peu dure. Mais la vue est encore très bonne et les jambes le sont aussi ». Une délégation de la municipalité est venue, à l’occasion de Noël la même année, lui remettre une plaquette en argent.

Le décès de Joseph Marie Kownacki survint le 19 janvier 1908 à Joinville ; il était alors âgé de 101 ans et 10 mois.

Comme il était le seul émigré polonais de 1831 encore vivant en France, une cérémonie d’hommage eut lieu le 8 mars 1908 en l'église polonaise de l'Assomption, rue Saint-Honoré à Paris. Mgr Léon Postawka, directeur de la mission polonaise de Paris, salua en lui le « dernier officier de la glorieuse armée polonaise qui combattait pour la patrie et la liberté. »

 

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17 avril 2020 5 17 /04 /avril /2020 01:01

Maurice Morlot naît le 28 décembre 1893 à Champigny-sur-Marne (Seine, act. Val-de-Marne). Il est le fils de Clarisse Louise Leneveu et de Pierre Morlot, ciseleur qui vivent rue des Acacias.

Sans doute est-ce lui qui, alors charpentier et âgé de 18 ans, vivant avenue de Bry dans la commune voisine du Perreux, est renversé par une automobile à Ville-d’Avray alors qu’il circulait à vélo en mai 1912. L’année suivante, en mars, il s’engage pour trois ans à Nogent-sur-Marne, devançant son service militaire, déclarant la profession d’imprimeur. Il est affecté au 5e régiment de chasseurs à cheval. Il passera ensuite dans un régiment de hussards puis dans une unité de génie pendant la première guerre mondiale. Il est démobilisé en août 1919.

Marié avec Émilienne Marie Bauer, native de Romainville, Maurice Morlot vit à compter de 1924, à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne) dans le quartier de Palissy, avenue Galliéni. Il exerce la profession de régisseur de films. Il assure la régie générale du film Le Glas, film de Maurice Charmeroy en 1924, aux studios de Courbevoie et de La Villette celle de deux films d’Alexandre Ryder en 1929 et 1930. En 1931 et 1934, il est l’administrateur de René Hervil toujours à Courbevoie pour Nicole et sa vertu. C’est à Joinville qu’il travaille comme assistant de René Guissart pour Dédé en 1934 et le film musical Toi, c'est moi en 1936. Au studio d’Épinay et dans les environs de Marseille et de Toulon, il assure la régie de l’adaptation de Chéri-Bibi par Léon Mathot en 1937. Toujours en Provence, il administre la réalisation de Bifur 3 par Maurice Cam.

En compagnie d’un autre joinvillais, Alphonse Sauvageau, Maurice Morlot fonde en juin 1933 le Syndicat du personnel français de la production cinématographique, qui rassemble des administrateurs, régisseurs ou assistants-metteurs en scène. Il en est le président. Son organisation adhère à la Fédération nationale des syndicats d'artisans français du film, dont Morlot est le secrétaire général en 1934.

Un des combats menés en 1934, c’est la revendication d’une limitation des techniciens étrangers, notamment allemands, aux tournages en France. En juin 1934, l’assemblée générale du syndicat réunit 83 adhérents.

À l’expiration de son mandat en décembre 1934, Morlot décide de ne pas solliciter son renouvellement, faisant état de l’impossibilité dans laquelle il était de dégager suffisamment de temps pour l’activité syndicale. Il est cependant élu vice-président et René Montis prend la présidence.

Après la réunification de la CGT avec la CGTU en 1936, la Fédération nationale des syndicats des artisans du film décide, le 7 mai 1937, de se transformer en Syndicat général des artisans du film et d’adhérer à la Fédération du spectacle de la CGT. La nouvelle organisation rassemble metteurs en scène, opérateurs de prises de vues, ingénieurs du son et ingénieurs spécialisés, personnel de la production ainsi que la presse filmée. Son objectif est de « maintenir la qualité professionnelle des artisans de la production du film ». Il vise à la signature de la convention collective des techniciens contribue à l'élaboration du texte d'application des quarante heures. Les metteurs en scène André Berlhomieu et Marcel L'Herbier sont respectivement président et secrétaire général, tandis que Sauvageau est vice-président. Ultérieurement, l’organisation sera rebaptisée Syndicat des Techniciens de la Production Cinématographique.

Maurice Morlot meurt le 22 juillet 1973 à Villiers-sur-Marne (Val-de-Marne). Il était âgé de 79 ans. Sa fille Denise sera scripte de cinéma et épousera le réalisateur et résistant Christian-Jaque.

 

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15 avril 2020 3 15 /04 /avril /2020 01:01

Paul Alphonse Sauvageau naît le 8 mai 1877 à Paris (6e arr.). Il est le fils de Joséphine Félicité Foubert et de Paul Jean Baptiste Sauvageau, teinturier. Ils vivent rue de Sèvres.

Alors ouvrier typographe, Sauvageau fait un service militaire raccourci en 1898-1899 après le décès de son père. Il épouse en novembre 1905 à Paris (15e arr.) Georgette Louise Olympe Bili, qui porte le nom d’usage de son beau-père, Maurice Sorelle,

Pendant la première guerre mondiale, il est mobilisé d’abord dans l’infanterie puis, à partir de mars 1917, dans l’aviation, étant affecté au 1er groupe d’aérostation. Il est nommé caporal en juin 1918 et démobilisé fin janvier 1919.

Après le conflit, Sauvageau travaille dans l’industrie du cinéma. En 1923, il est directeur du studio de Pathé-Consortium-Cinéma à Vincennes. À ce titre, il fait partie de ceux qui accueillent, en juillet une visite du bey de Tunis lors du tournage d’un épisode du film de Jean Kemm, L'Enfant-Roi. Son épouse, qu’il a encouragée à devenir actrice et qui utilise le pseudonyme de Georgette Sorelle, joue dans cette production.

C’est également comme costumier que Sauvageau prend part à la réalisation du film Destinée, d’Henry Roussel en 1925 ou Napoléon, d’Abel Gance, en 1927. Georgette Sorelle est aussi au générique de cette œuvre. Elle meurt en août 1929, après avoir terminé peu avant le tournage de La Valse de l'adieu, d'Henry Roussel.

Le Syndicat du personnel de la production cinématographique est fondé en juillet 1933 par Maurice Morlot et Sauvageau en est le trésorier. Il réunit des administrateurs, régisseurs et assistants-metteurs en scène. Son siège est chez son président, avenue Gallieni, à Joinville-le-Pont. Le syndicat adhère à la Fédération nationale des syndicats d'artisans français du film, une structure autonome non affiliées aux confédérations CGT, CGTU ou CFTC.

Au-delà de la gestion financière du syndicat, le rôle de Sauvageau prend une grande importance. Ainsi, début 1934, c’est lui qui sensibilise Jean Châtaigner, chef de la rubrique cinématographique du Journal et président de l’Association professionnelle de la presse cinématographique aux revendications de son organisation. Il rencontre également Bernard Natan, administrateur-délégué de la firme Pathé-Cinéma. Il se prononce également en faveur de la création d'un Comité Intersyndical.

Ce sont Morlot et Sauvageau qui accueillent, dans les établissements cinématographiques de Joinville-le-Pont, le sous-secrétaire d'État et député Adolphe Chéron ainsi que le maire de la commune Georges Briolay, l’adjoint au maire Georges Scornet et Paul Hainsselin, conseiller municipal et lui aussi salarié du secteur du cinéma. Ils se plaignent que « l'emploi de la main-d'œuvre étrangère dans le cinéma avait eu pour répercussion le licenciement d'une grande partie des éléments français, ce qui a augmenté dans une proportion considérable (…) le nombre des chômeurs français déclarés à la mairie ». Jusqu’en juillet, Sauvageau va multiplier les initiatives de son syndicat de de la fédération pour réclamer un décret réglementant l’embauche d’étrangers dans les studios auprès du gouvernement et des parlementaires.

Le président Morlot ne sollicitant pas le renouvellement de son mandat à la tête du syndicat, en décembre 1934, René Montis le remplace et Sauvageau est trésorier-rapporteur.

Après la réunification de la CGT avec la CGTU en 1936, la Fédération nationale des syndicats des artisans du film décide, le 7 mai 1937, de se transformer en Syndicat général des artisans du film et d’adhérer à la Fédération du spectacle de la CGT. La nouvelle organisation rassemble metteurs en scène, opérateurs de prises de vues, ingénieurs du son et ingénieurs spécialisés, personnel de la production ainsi que la presse filmée. Son objectif est de « maintenir la qualité professionnelle des artisans de la production du film ». Il vise à la signature de la convention collective des techniciens contribue à l'élaboration du texte d'application des quarante heures.

Les metteurs en scène André Berlhomieu et Marcel L'Herbier sont respectivement président et secrétaire général, tandis que Sauvageau est vice-président.

Depuis 1932, Sauvageau résidait à Joinville, dans le quartier de Polangis et avait une nouvelle compagne, Marthe Godin. Il se lance dans l’action politique et rejoint Paul Hainsselin sur la liste de l’Union des républicains de Joinville. Très marquée à droite, la liste est conduite par Frédéric Bautsch et Léon Lesestre. Elle se présente comme composée d’hommes d’ordre et d’action, sans aucune préoccupation politique, n’ayant pour but que la bonne gestion communale, et s’oppose au maire sortant, Georges Briolay (radical) et aux formations socialiste SFIO et communiste.

La liste de l’Union des républicains obtient au premier tour une moyenne de 931 voix soit 32,6% des 2 856 suffrages exprimés sur 2 923 votants et 3 433 inscrits. Le Groupement des gauches républicaines suit avec 765 voix (26,8%), suivi par les communistes de Robert Deloche qui ont 671 voix (23,5%) et les socialistes avec Robert Derivière, 352 voix (12,3%). Sauvageau recueille 908 votes (31,7%).

Au second tour, les listes communiste et socialiste fusionnent derrière un ancien combattant, André Blocher, tandis que Georges Briolay maintient sa liste. Pour sa part, l’Union des républicains appelle à barrer la route aux communistes, affichant sa « réprobation pour la turbulence et de la démagogie. »

La liste de droite se renforce, avec 1 160 voix en moyenne soit 41% des 2 899 suffrages exprimés sur 2 924 votants, talonnée par l’union de la gauche à 1 100 voix (39%), tandis que les radicaux sont distancés avec 566 voix (20%). Sauvageau est un des deux seuls candidats de l’Union républicaine à ne pas être élu ; il avait obtenu 1 120 votes (38,6%). Au total, la liste de droite emporte 25 des 27 sièges à pourvoir, la gauche recueillant les deux derniers sièges pour des communistes, dont le futur maire de Joinville, Robert Deloche. Léon Lesestre est élu maire, entouré comme adjoints de Chaussée, Caillon, Béal et Kirbühler.

En mars 1936, avec plusieurs personnalités locales de tendance radicale modérée et opposées au Front populaire, Sauvageau comme Hainsselin rejoint un Comité de conciliation républicaine et de progrès social pour le travail et la paix qui soutient la candidature du député sortant Adolphe Chéron. Il est battu par le communiste André Parsal.

Alphonse Sauvageau meurt le 10 mai 1942, son décès est transcrit sur l’état-civil de Joinville. Il était âgé de 65 ans.

Georgette Sorelle, épouse Sauvageau

 

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11 avril 2020 6 11 /04 /avril /2020 01:01

Début de la biographie de Paul Hainsselin

Eugène Paul Hainsselin naît le 7 septembre 1890 à Paris (15e arr.). Il est le fils d’Anna Archambaudière et de son époux Louis Gentil (dit Eugène) Hainsselin, alors menuisier et scieur à la mécanique.

Militant politique et syndicaliste, élu conseiller prud’homme, le père de Paul, Eugène Hainsselin, devient juge de paix en 1909. Il est nommé dans les Indes françaises, à Pondichéry et ses enfants le rejoignent en août et décembre 1909. Paul reviendra en France en juillet 1910.

Installé de nouveau dans le quartier de Polangis, avenue Pauline, Paul Hainsselin est représentant de commerce pour la firme cinématographique Pathé. D’assez grande taille (1 mètre 78), mais de santé fragile, il effectue son service militaire de 1911 à 1913 comme secrétaire d’état-major. Peu après sa démobilisation, installé rue des Vignerons, à Vincennes (Seine, act. Val-de-Marne), il est rappelé au début de la première guerre mondiale et sert d’abord dans l’infanterie puis au 13e régiment d’artillerie, mais toujours avec un service auxiliaire non-combattant et enfin, à partir de décembre 1916, de nouveau à l’état-major. Il est rendu à la vie civile en avril 1919.

Après-guerre, Paul Hainsselin emménage d’abord à Paris, où il épouse dans le 15e arrondissement Marie Adrienne Brousse en décembre 1919. Ils vivent d’abord à Paris, puis à Vincennes, Champigny et Joinville.

C’est dans cette commune, qui accueille les usines Pathé, qu’Hainsselin va, comme antérieurement son père, engager dans la vie publique. Il y réside de manière intermittente, soit dans les trois quartiers de la commune : Palissy (rue du Cimetière, act. rue de l’Égalité), Polangis (avenue Gabrielle) et du Centre (quai Beaubourg, act. quai du Barrage).

Alors que, en 1912, son père Eugène Hainsselin avait été élu conseiller municipal contre la majorité sortante radical-socialiste, et notamment contre Georges Briolay, Paul Hainsselin rejoint la liste de ce dernier pour les élections municipales de mai 1929. Un groupement des gauches s’est constitué, dans la suite du cartel des gauches au plan national. Il regroupe les radicaux-socialistes, les socialistes SFIO et des socialistes indépendants.

Au premier tour, la liste de Concentration des gauches obtient une moyenne de 910 voix pour 2 126 suffrages exprimés (42,8%), devançant les conservateurs et libéraux de la liste d’Union nationale du maire sortant, Stephen Durande 825 voix (38,8%) et les communistes du Bloc ouvrier et paysan conduits par Roger Bénenson avec 391 voix (18,4%). Pour sa part, Hainsselin recueille 751 votes (35,3%). Au second tour, les gauches progressent avec une moyenne de 1 025 votes (45,9%) contre 929 (41,6%) à la droite et 278 (12,5%) aux communistes.

Hainsselin est élu conseiller municipal, parmi les 22 élus de sa liste face à 5 personnes issues de la majorité sortante. La municipalité est conduite par Briolay qui prend comme adjoints Robert Maxe (radical), Georges Roger (SFIO), Joseph Moutardier (radical) et Georges Scornet (socialiste indépendant).

Au sein du conseil municipal, Hainsselin va se manifester par des positions souvent personnelles, à l’encontre de la majorité.

Dès juin 1929, il refuse que l’on débaptise la rue du Cimetière, où il a vécu, en rue de l’Égalité. En août 1930, il est le seul à s’opposer à l’acquisition d’une arroseuse laveuse pour le nettoyage des rues. À l’été 1932, il tente d’aider à sortir d’un imbroglio, en représentant le conseil municipal au conseil syndical des riverains de la rivière de Polangis, dont le statut est incertain, ce qui fait que son curage n’est pas réalisé.

Le budget pour l’année 1934, voté en décembre 1933, est l’occasion d’une crise importante. Avec deux autres élus de la majorité de 1929, Béal (indépendant) et Galabert (ex-SFIO), Hainsselin rejoint trois conservateurs, Provin, Caillon et Lecuirot, pour voter contre. Du fait d’un nombre important de démissionnaires et décédés, le budget n’est adopté que par 9 voix contre 6, soit un tiers des 27 conseillers théoriques.

Une tension forte existe en 1933 entre la municipalité et un comité des chômeurs, fondé depuis l’aggravation de la situation économique suite à la crise débutée en 1929. Il est soutenu par le parti communiste. En mars, Hainsselin est désigné comme représentant du conseil au sein de la commission paritaire du chômage. Cependant, il désapprouve, comme l’ancien socialiste SFIO Galabert, la décision du maire de demander des travaux d’intérêt général aux chômeurs en contrepartie des allocations qui leur sont versées, ce que le comité appelle du « travail forcé ». Les deux élus présentent leurs démissions, ce qui va obliger à l’organisation d’élections partielles pour combler dix postes devenus vacants. Tirant le bilan de son mandat écourté, l’hebdomadaire Voix des communes qualifie ainsi Hainsselin « d’opinion incertaine, conseiller figurant, élève studieux, il ne consentit jamais à voter quoi que ce soit. »

À suivre

Paul Hainsselin (à droite) en 1936

 

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7 avril 2020 2 07 /04 /avril /2020 01:01

Suite de la biographie de Georges Defert

Après l’avènement de la 5e République, des élections sont organisées le même jour pour les conseils municipaux et les conseils généraux (départementaux) le 8 mars 1959. Le mode de scrutin a été modifié, instaurant le scrutin majoritaire dans les deux assemblées.

Après avoir devancé au premier tour ses concurrents gaulliste (UNR) et démocrate-chrétien (MRP), Defert remporte au second tour la triangulaire qui l’oppose à un communiste et un socialiste. Il est élu conseiller général de la Seine le 15 mars 1959.

Pour le scrutin municipal, malgré la coalition entre l’UNR, le MRP et la SFIO, qui recueille 1 756 voix pour 7 488 suffrages exprimés (23,5%) sur 7 780 votants et 10 276 inscrits, la liste Defert arrive en tête avec 3 084 votes (41,2%), devant les communistes qui en ont 2 412 (32,2%). Il creuse l’écart au second tour avec 52,4% et les 27 sièges.

Au sein de la municipalité, Georges Defert s’entoure d’Albert Gaulin, Léon Belhomme, Jean-Pierre Garchery, Pierre Perly, Georges Derou et Pierre Lambert.

Se rapprochant du Centre national des indépendants et paysans (CNIP), Georges Defert s’oppose à la majorité gouvernementale du général de Gaulle, prenant position en faveur du Non lors du référendum sur l’autodétermination en Algérie en 1962.

Sur le plan local, il obtient le soutien du conseil général en avril 1963, lorsqu’il s’oppose au remplacement du stade municipal par un parking, supposé nécessaire pour un projet de stade de 100 000 places envisagé dans le Bois de Vincennes.

Lors des élections suivantes, Georges Defert est largement réélu, tant lors des scrutins municipaux en 1965 et 1970, que pour les élections cantonales de 1967 et 1970, qui concernent désormais le Val-de-Marne, formé par formé par scission de l’ancien département de la Seine en 1967.

Il poursuit la construction d’immeubles dans la ville et engage la réalisation d’un nouvel hôtel de ville, qu’il inaugure en 1975 après avoir rasé l’ancienne mairie. Son dernier projet, de grande ampleur, est la construction d’un centre nautique avec piscine sur l’île Fanac, qui devrait être alors reliée par une bretelle routière. Il n’aura cependant pas le temps de le mettre en œuvre.

L’ampleur des investissements provoque une hausse considérable des impôts locaux et l’opposition d’une importante partie des habitants.

Georges Defert meurt le 30 octobre 1975 à Joinville, en cours de mandats de maire et de vice-président du conseil général du Val-de-Marne. Il était âgé de 79 ans et avait été fait chevalier de la Légion d’honneur. La place de la mairie de Joinville-le-Pont porte son nom.

Son successeur et allié, Jean Pierre Garchery, perdra les élections de 1977 du fait en particulier du ressentiment par rapport à l’augmentation des impôts locaux.

Fin

La mairie de Joinville, bâtie sur les choix de Georges Defert

 

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5 avril 2020 7 05 /04 /avril /2020 01:01

Suite de la biographie de Georges Defert

À l’issue du conflit de 1939-1945, Georges Defert est devenu ingénieur diplômé de l’Institut industriel du Nord, un établissement de la faculté catholique de Lille. Il est directeur d’une société de transport.

Après la Libération, lors des élections municipales d’avril 1945, la liste d’Union républicaine démocratique (URD), qui s’appuie sur les forces issues de la Résistance et du comité local de Libération, emporte tous les sièges avec 61% des suffrages. Elle est composée de communistes, de radicaux et de socialistes. C’est Robert Deloche (PCF) qui est élu.

Le scrutin suivant, en novembre 1947 est bien plus serré. La liste du Rassemblement du peuple français (RPF, gaulliste), sur laquelle figure Defert est en tête avec 3 066 voix en moyenne pour 6 974 suffrages exprimés (44%) sur 7 073 votants et 8 376 inscrits ; elle obtient 13 sièges. Le PCF et certains radicaux, sur la liste Union républicaine et résistante recueillent 3 017 votes (43,3%) et également 13 sièges. C’est finalement la SFIO, qui n’a eu que 452 électeurs en sa faveur (6,5%) et se contente d’un seul siège, qui permettra cependant la réélection de Robert Deloche. Peu avant la fin de son mandat, ce dernier est exclu du PCF et démissionne de son mandat de maire et conseiller général.

Une élection partielle est organisée pour le remplacer : en l’absence de deux élus de gauche, la candidate communiste Amélie Trayaud a 12 voix mais Defert provoque la scission de la droite en défendant la candidature de Pierre Perly contre celle de Pierre Calmon, candidat du groupe RPF. Avec 5 voix pour le premier et 8 pour le second, la division des élus conservateurs permet à la communiste d’accéder, pour deux mois, en février 1953, à la fonction de maire.

Le scrutin d’avril 1953 se présente donc dans des conditions très différentes. Defert, associé à Jean-Pierre Garchery, a entraîné trois autres conseillers municipaux qui présentent une liste opposée à celle du RPF, sous l’étiquette du Rassemblement des gauches républicaines (RGR), qui regroupe des forces divers, pas toutes de gauches, dont d’anciens membres du PSF.

Bien que l’hebdomadaire anticommuniste Nouvelle Union régionale prenne ouvertement position contre lui, reprochant son attitude lors du vote de février, c’est la liste Defert qui arrive en tête des deux principales formations de droite, bien qu’elles obtiennent chacune six sièges. Son Union pour la gestion des affaires municipales a 1 488 voix sur 6 748 suffrages exprimés (22%), tandis que l'Action municipale et sociale (RPF) en a 1 334 (19,8%). Les démocrates-chrétiens recueillent 620 votes (9,2%) et deux sièges, tandis que les socialistes progressent avec 827 voix (12,3%) et trois élus. Les communistes, une fois de plus alliés à certains radicaux, arrivent en tête, mais leurs 2 405 suffrages (35,6%) ne leur apportent que 10 sièges. Malgré le soutien de la SFIO, ils doivent donc abandonner le poste de maire Defert, qui coalise les 14 voix RGR, RPF et MRP.

Personnellement, Defert avait été soutenu par 1 529 personnes (22,7%). Il prend comme adjoints Pierre Calmon (RPF), Albert Gaulin (indépendant) et Georges Moutenot (MRP).

Dès son premier mandat, Defert va engager une politique d’urbanisme très dynamique, confiant l’Office municipal d’Habitations à loyers modérés (HLM) la construction de plusieurs groupes importants et accueillant d’autres investisseurs, comme Coopération et Famille.

La municipalité Defert conserve les institutions sociales et de loisirs, acquises sous le mandat de Robert Deloche. Il négocie des jumelages internationaux en Allemagne et en Angleterre. Les groupes scolaires sont agrandis.

Son engagement politique s’accentue : Defert est candidat aux élections sénatoriales de la Seine en juin 1958 sur la liste de Georges Laffargue.

A suivre

Joinville-le-Pont en 1976, vue au-dessus du parc du Parangon

 

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3 avril 2020 5 03 /04 /avril /2020 01:01

Début de la biographie de Georges Defert

Georges Maurice Defert nait le 5 avril 1896 à Montreuil (Seine, act. Seine-Saint-Denis). Il est le fils de Clémentine Enault et de son époux Charles Defert, menuisier. La famille s’installe peu après à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), où le père ouvre un atelier de menuiserie dans leur logement, 30, rue de Créteil (act. rue du maréchal Leclerc).

Dès l’âge de 13 ans, Georges Defert devient apprenti menuisier dans l’atelier paternel. Après la mort de son père en octobre 1919, c’est sa mère qui en reprendra la gestion.

Au début de la première guerre mondiale, Georges Defert s’engage pour la durée de la guerre dans le génie (1er RG puis 11e RG). Il est cité à l’ordre du 4e corps d’armée en août 1915. Blessé à Perthes en septembre 1915, il est de nouveau cité, à l’ordre des armées, en octobre 1915. En mai 1918, Defert est promu caporal. Démobilisé en août 1919, il obtient la croix du combattant volontaire en juillet 1936.

Le mariage de Georges Maurice Defert avec Madeleine Cécile Haas a lieu en novembre 1921 à Ville-d’Avray (Seine-et-Oise, act. Hauts-de-Seine). Ils auront deux enfants.

Après-guerre, Georges Defert et son frère Raymond poursuivent l’activité de la menuiserie familiale à Joinville. Un violent incendie en février 1933 les met au chômage et les contraint à s’installer provisoirement dans la commune voisine de Saint-Maur-des-Fossés. Les conditions d’intervention des sapeurs-pompiers émeuvent les voisins, qui lancent une pétition demandant de les équiper de bottes. Le conseil général leur attribue des secours.

C’est à partir de 1925 que Defert s’implique dans la vie politique locale. En avril, il fait partie du Comité d’union des républicains et d’action sociale, fondé en 1912, qui soutient la liste d’Union républicaine pour la défense des intérêts communaux, conduite par Henri Vel-Durand, ancien radical-socialiste qui a rassemblé les libéraux et conservateurs. Le comité est présidé par Félix Soulié. En mars 1935, Defert participe à la transformation du comité en Union des républicains, centrée sur les activités municipales, ce qui lui permet de rassembler l’ensemble de la droite joinvillaise. La nouvelle organisation a pour président René Kirbühler, futur adjoint au maire tandis que Léon Lesestre, qui était à la tête de l’ancien comité et deviendra maire suite au scrutin de mai, est nommé président d’honneur.

L’Union des républicains de Joinville a son siège au café de Paris, place de la Gare. Son programme vise à la diminution des charges écrasantes, l’atténuation des dépenses publiques, la simplification des rouages administratifs et l’application des lois sociales.

Pour le scrutin de mai 1935, la municipalité sortante, élue dans le cadre du Bloc des gauches, unissant radicaux-socialistes et socialistes SFIO, s’est réduite aux premiers. La SFIO et les communistes présentent chacun une liste. Pour sa part, l’Union des républicains rassemble l’essentiel de la droite. Georges Defert, toujours menuisier, figure sur la liste qui emporte, au second tour, 25 des 27 sièges à pourvoir, tandis que deux communistes sont élus sur la liste unifiée de la gauche, les radicaux n’ayant pas d’élu. Léon Lesestre devient le premier magistrat.

Au premier tour, Defert avait recueilli 919 voix pour 2 856 suffrages exprimés (32,2%) sur 2 923 votants et 3 433 inscrits. Il joue un rôle politique dans le conseil, étant notamment élu délégué sénatoriale en septembre 1935. Il s’occupe également de la passation des marchés municipaux.

Defert est en 1936 le président de la section de Joinville du Parti social français (PSF), formation d’extrême droite du colonel de La Rocque, fondateur des Croix de Feu, dont la devise est « travail, famille, patrie ». À ce titre, il co-organise une réunion pour le canton de Saint-Maur le 17 décembre, mais elle est interdite. Le PSF tient une permanence à Joinville au café Clerté, rue de Paris. En avril 1937, sa section accueille au cours de sa réunion mensuelle La Rocque.

Si la politique du PSF est clairement réactionnaire, François de La Rocque, le PSF ne soutint pas le régime de Vichy en raison de son caractère antisémite et défaitiste. En 1942, quand un nouveau conseil municipal est nommé, la plupart des colistiers de Lesestre figurent encore à ses côtés, mais pas Defert.

A suivre

Georges Defert

 

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29 mars 2020 7 29 /03 /mars /2020 00:01

Suite de la biographie de Louis Rey

Louis Rey a eu une activité sociale significative. En 1904, il fonde et administre une société d’assurance décès et d’achats en commun dénommée Les Mille débitants, hébergée dans son domicile quai des Célestins à Paris (4e arr.). Elle s’adresse aux marchands de vins de la région parisienne.

Secrétaire général du syndicat des marchands de vin et liquoristes de Paris depuis 1879 et toujours en poste en 1911, il est, depuis 1877 fondateur et administrateur de bureaux de placement gratuit, qui constituent un des ancêtres des institutions de gestion des services à l’emploi en faveur des chômeurs et des employeurs. Louis Rey est également membre du Syndicat central des chimistes et essayeurs de France, sans doute depuis sa fondation en 1890.

Ses amis politiques radicaux-socialistes ont connu la défaite lors de plusieurs scrutins au début du vingtième siècle : la ville de Joinville est passée en 1912 aux mains de radicaux  dissidents alliés à des libéraux et des conservateurs, avec le soutien des socialistes SFIO et il n’y a plus de conseillers municipaux fidèles au comité radical-socialiste. Le canton de Saint-Maur est aux mains d’un homme de centre-droit, Henri Naudin. Quant à la députation, la 2e circonscription de l’arrondissement de Sceaux a vu la défaite des candidats radicaux au profit du socialiste Albert Thomas en 1910. Même le poste de conseiller d’arrondissement appartient à l’un des dissidents radicaux de Joinville. La République radicale, dont Joinville était l’épicentre dans l’Est parisien à la fin du 19e siècle et à laquelle se vouait Louis Rey est en profond déclin.

Dans la commune, Louis Rey indique qu’il a démissionné du comité radical-socialiste de Joinville en 1911 parce qu’en faisaient partie Henri Vel-Durand et plusieurs autres des dissidents qu’il appelle les Saxons, en référence à la défection des troupes de cet État allemand qui, alors alliées aux Français et à Napoléon 1er, changèrent de camp pendant la bataille de Leipzig en 1813. Rey s’explique : « Je ne pouvais défendre la République en leur compagnie ». Mais, en juillet 1913 Vel-Durand est exclu du parti radical par décision de la fédération départementale tandis que les autres, comme Ernest Mermet, ont cessé d’y adhérer. Rey s’en réjouit dans l’hebdomadaire Voix des communes : « Je puis rentrer, la maison est maintenant propre, l’on ne risque plus d’y coudoyer les traîtres et les renégats. »

Dans sa chronique de Voix des communes, Rey poursuit la défense des valeurs laïques et sociales qui sont les siennes, et les critiques envers la nouvelle majorité municipale. Cependant, l’incomplétude de la collection conservée du journal aux archives, puis son arrêt au début de la première guerre mondiale ne permet guère de suivre son rôle. On sait cependant qu’une affiche est posée en août 1913 pour critiquer à nouveau son rôle dans l’affaire de l’école de Polangis. il s’insurge, à la fin de l’année, de l’absence de toute représentation municipale à l’enterrement d’un ancien élu radical-socialiste, le constructeur de bateaux Petrus Perre.

La reprise de la parution de l’hebdomadaire voit une réorientation des préoccupations de Rey, qui se focalise beaucoup plus sur les questions graves de la vie quotidienne des Joinvillais ; il signe une partie de ses nombreux papiers du pseudonyme de Lécouteux. Il publie ainsi une lettre aux boulangers dans le premier numéro de 1915, leur reprochant de supprimer le portage à domicile sans diminuer le prix. Il s’inquiète de la pénurie de charbon, moyen de chauffage quasi-unique à cette période. Il relaie aussi les protestations des bouchers, pénalisés par l’interdiction d’entrée des marchandises la nuit.

S’intéressant toujours autant à la chose publique, Rey prononce, au nom de la franc-maçonnerie, un éloge de Régis Clavel, receveur des Postes, responsable de la Ligue des droits de l’Homme et militant radical-socialiste, qui est aussi salué par Georges Briolay au nom de ces deux institutions dont il est le responsable local. En mars, il s’insurge contre le fait que le prêtre ait traversé Joinville en habits sacerdotaux pour le premier enterrement d’une victime de la guerre au cimetière municipal. Pour lui, « En temps de guerre comme en temps de paix, la loi de séparation [de l’église et de l’État] doit être respectée. »

Le pavillon dont il avait été expulsé, deux ans plus tôt, restant inoccupé, Rey fait remarquer pourrait loger 2 ou 3 familles. Il conseille les familles de soldats qui ont des difficultés  obtenir les allocations auxquelles elles devraient avoir droit. Il propose sinon qu’elle soit mise à la disposition de la Société des secours aux blessés (la Croix-Rouge). Finalement, le terrain servira pour des plantations de pommes de terre et les arbres finiront en bois de chauffage.

S’il est très patriote, Rey s’inquiète pourtant de ce que « Des gens voient des espions partout ». Ainsi, Andrès, membre du comité radical-socialiste de Joinville et candidat aux élections municipales de 1912, alsacien, soldat français, propriétaire à Polangis, membre de la Symphonie, était en Alsace en visite dans sa famille à la déclaration de guerre ; il est arrêté par les Allemands, s’évade et revient à Joinville. Mais il est dénoncé par la rumeur comme s’étant rendu en Allemagne.

La situation des animaux concerne aussi Rey, qui avait saisi la Société protectrice des animaux, laquelle, après enquête, confirme qu’une décision du maire concernant le stationnement des chevaux leur portait préjudice. Il conteste également la taxe qu’on veut imposer à son chien, qualifié de chien de luxe par la municipalité, alors qu’il l’a déclaré comme chien de garde. Le préfet lui donne raison en 1916.

S’agissant de la vie politique municipale, Rey explique son positionnement, à propos de ce qu’il appelle le devoir du maire : « Nous voulons bien respecter la trêve des partis, respecter l’union sacrée. Est-ce la rompre que de signaler ce qui devrait être fait ? » Il se plaint que le conseil municipal ne fonctionne presque plus, malgré la présence sur place de plusieurs élus. Mais il défend leur honnêteté, face aux rumeurs qui prétendent qu’ils accaparent une partie des allocations destinées aux chômeurs et aux femmes des mobilisés.

Le principal combat de Rey pendant la période de guerre va être autour du charbon. Dès avril 1915, il s’indigne qu’il atteigne, à Joinville, « des prix de famine », alors qu’il est deux fois moins cher à Saint-Maur et Maisons-Alfort où les municipalités ont fait des achats collectifs. Constatant, selon lui en octobre 1915, que « la municipalité ne fait rien », Rey lance le projet d’achat collectif d’une cargaison de charbon à Rouen. Il sera ensuite piloté par Georges Briolay  à partir de juin 1916. Une centaine de personnes souscrivent, venant de Joinville et de communes voisines. La municipalité achète un stock qu’elle compte revend à la population pour faire concurrence à l’achat groupé de Rey et Briolay.

Le prix du gaz est aussi dans le collimateur de Rey. Il remarque en janvier 1916 que des municipalités, notamment socialistes, ont refusé la hausse demandée par la compagnie du gaz, mais pas Joinville, contrairement à Nogent et Saint-Maur. Il approuve les quelques élus SFIO qui se sont prononcé contre l'augmentation. Le conseil de préfecture finira par l’annuler en décembre 1916.

Une très vive polémique va éclater, en janvier 1916, quand Rey reproche au maire de Joinville, Ernest Mermet, de faire des « largesses » avec la subvention que la société du Bi-Métal a remise pour la commune. Selon lui, il aurait dû la remettre au bureau de bienfaisance au lieu de l’utiliser « comme bon lui semble ». Le maire annonce qu’il veut intenter un procès contre Voix des communes, « organe de diffamation et de calomnies ». Les membres du bureau de bienfaisance et les élus, notamment les socialistes, protestent contre l’attaque de Rey et soutiennent Mermet.

Une boucherie municipale ayant été mise en place en mars 1916, vendant de la viande congelée, Rey critique le fait que, étant exemptée de taxes, elle fait une concurrence déloyale aux bouchers. Il soutient que, malgré cela, la viande est plus chère à Joinville qu’à Maisons-Alfort et affirme que la commune aurait le record de la vie chère. Racontant le début de la guerre comme il l’a vécu, Rey parle d’une émeute, le 2 août 1914, sur le marché d’alimentation quand les acheteurs eurent constaté l’augmentation des prix des pommes de terre ; des étals furent renversés. Des laiteries Maggi ont été mises au pillage, car il s’agissait d’une marque allemande.

S’agissant des boissons alcoolisées, Rey s’inquiète du déficit de la récolte de 1915. Il approuve la contestation par des débitants joinvillais de l’arrêté d’interdiction partielle de vente, désapprouvant qu’on utilise des agents pour verbaliser les débits de boisson qui ouvriraient après 22h ou avant 11h.

Annoncé comme souffrant en avril 1916, Rey reconnaît le mois suivant qu’il « a manqué à son devoir et au plaisir d’écrire pour la première fois depuis 9 ans ». Il s’absentera de nouveau en août pour raisons de santé.

Alors que la publication de Voix des communes était stoppée depuis plus d’un an, Louis Rey meurt le 5 août 1918 à son domicile de Joinville, quai Hector-Bisson (act. quai Gabriel-Péri). Il était âgé de 71 ans et n’avait pas eu d’enfant. Il continuait d’exercer son métier d’expert chimiste.

Rey était chevalier de la Légion d’honneur, décoré des Palmes académiques comme officier d’académie, officier du mérite agricole et avait reçu de nombreuses distinctions professionnelles ainsi qu’une médaille militaire.

Fin

La Marne à Joinville gelée, hiver 1917

 

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27 mars 2020 5 27 /03 /mars /2020 00:01

Suite de la biographie de Louis Rey

Après la victoire des dissidents, une des premières décisions du nouveau conseil municipal fut de donner congé, en août 1912, à Louis Rey et à son épouse qui louaient une propriété communale dans le quartier de Polangis, rue des Platanes, après en avoir doublé le loyer. Rey avait obtenu un bail d’une ancienne propriétaire, puis celle-ci avait à son décès légué l’immeuble à la ville, qui avait maintenu le locataire dans les lieux avant d’en faire usage. La famille Rey déménage alors quai Hector-Bisson (act. quai Gabriel-Péri), dans une maison nommée Villa des flots, près du barrage sur la Marne.

Homme aux engagements multiples, Louis Rey avait besoin d’organes de presse pour s’exprimer. Il écrivit dans un quotidien national, Le Voltaire, dans les années 1880. Il eut ensuite une rubrique dans le Bulletin commercial puis dirigea une publication professionnelle, le Bulletin vinicole, dans laquelle il n’hésitait pas à prendre des positions politiques. Après son installation à Joinville-le-Pont, il s’intéressa à la presse locale

L’hebdomadaire Voix des communes, fondé en 1883, fut jusqu’en 1935 (avec deux arrêts de parution au début puis à la fin de la première guerre mondiale) le premier puis un des principaux journaux d’information locale sur la partie Nord de l’actuel Val-de-Marne, couvrant principalement les communes des cantons de Charenton-le-Pont, Saint-Maur-des-Fossés et Nogent-sur-Marne.

Au sein de l’hebdomadaire, une chronique hebdomadaire consacrée à Joinville-le-Pont est créée en juin 1884 et assurée, jusqu’à sa mort en 1896, par Henry Vaudémont. Elle est poursuivie, de manière irrégulière jusque l’été 1901 par Félix Salmon puis par Louis Dehné (alias Ludovic) qui l’assure jusqu’à sa disparition en juillet 1902. Louis Rey devient le chroniquer pour Joinville à partir du 25 juillet 1908. Il avait, les mois précédents, envoyé plusieurs courriers déjà publiés. Pendant cette période, le directeur Alfred Westphal

Alfred Westphal (1869-1928), négociant et industriel était le trésorier de la Ligue des droits de l’Homme. Protestant, il était responsable radical à Charenton, président du Comité central d’union et d’actions républicaines de la 2e circonscription de Sceaux en 1909. Il avait repris la Voix des communes en 1907 après la mort de son président-fondateur, Gaston Meynet, ancien maire d’Alfortville. Il le maintint en tant qu’organe du parti radical-socialiste.

Étant le doyen des rédacteurs de Voix des communes, c’est Rey qui préside à une réunion de toute la rédaction chez Alfred Westphal en mai 1911. Il poursuit sa chronique jusqu’en décembre 1916 et peut-être au premier semestre 1917 (mais la collection pour cette année-là n’est pas conservée aux archives du Val-de-Marne).

Rey avait, comme Henry Vaudémont avant lui, l’ambition de jouer un rôle politique sans nécessairement se mettre au premier plan. S’il n’avait pas le talent littéraire de son prédécesseur, il avait cependant l’art du dialogue théâtralisé. Il publie ainsi, sous le pseudonyme d’Ironiste d’abord puis d’Un radical-socialiste ou d’EB, Les aventures du balai, dans lesquelles il met en scène ses adversaires Eugène Hainsselin et Théophile Leteuil, satyre en 13 épisodes de la vie politique locale en 1908-1909.

Ses critiques acerbes lui valent parfois quelques ennuis. Ainsi, quand en septembre 1908 il traite le conseiller municipal indépendant, le Dr Gripon, de « morphinomane », c’est le rédacteur en chef du journal radical, A. Deyres, qui doit présenter des excuses. La même année, à une date inconnue mais probablement fin novembre, il rencontre en duel Eugène Hainsselin, qui publiait le journal l’Indépendant, qui n’est pas sorti vainqueur de la rencontre, selon Rey. En août 1912, reprochant au responsable d’un petit journal conservateur, Jean Contoux, d’avoir publié une liste de francs-maçons de la région à partir de documents volés, il le traite de « fripon ». Jean Contoux se plaint auprès du gérant de ne pas pouvoir provoquer Rey en duel, car, comme il a 65 ans, il se « couvrirait de ridicule ». Mais il entend demander à Westphal de lui rendre raison « aussitôt qu’il sera rentré de vacances. »

À suivre

Signature de Louis Rey en 1909

 

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25 mars 2020 3 25 /03 /mars /2020 00:01

Suite de la biographie de Louis Rey

Tout en continuant à résider à Paris, Louis Rey prend en location une maison à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), dans le quartier de Palissy, d’abord avenue Naast  puis dans une propriété municipale inoccupée, rue des Platanes. Il y réside, avec son épouse, principalement aux beaux jours.

À partir de 1908, Rey, s’il conserve des activités dans le 4e arrondissement de Paris, en particulier comme membre de la commission scolaire où il siège depuis 1887 et est encore réélu en 1908, va cependant inscrire son activité politique dans sa nouvelle résidence.

Lors des élections municipales de mai 1908, il est présent sur la liste du comité radical-socialiste de Joinville, qui est présidé par Albert Gallas. La liste comprend, derrière le maire Eugène Voisin. Elle s’oppose à deux listes incomplètes, celle du comité socialiste évolutionniste qui comprend d’anciens socialistes comme Eugène Hainsselin et des personnalités plus à droite comme Provin ou Leteuil, et une autre qui a le soutien du parti socialiste SFIO, nouvellement constituée, conduite par Henri Lacroix.

Les 23 candidats radicaux obtiennent 604 voix en moyenne soit 45% des votants. Les 17 évolutionnistes recueillent 500 suffrages (37%) et les 5 socialistes SFIO 252 (18%). Il y a 6 élus au premier tour. Au total, la liste radicale gagne 21 sièges, les opposants évolutionnistes en ont un et il y a un indépendant. Louis Rey est élu au second tour avec 574 voix soit 48,2% des 1 189 votants.

Au sein du conseil municipal, il devient le porte-parole des radicaux, dont l’influence est contestée tandis que le maire, Eugène Voisin, au pouvoir depuis 1888 et dont la santé se dégrade, voit son autorité baisser. Rey polémique, au conseil et par journaux interposés, avec les élus et groupes d’opposition. François Provin, l’élu de la liste évolutionniste, prendra d’ailleurs prétexte du comportement de Rey pour démissionner en novembre 1908 : « je ne saurai siéger au conseil avec le sectaire qui nous traite de ratapoils et de ratichons ». L’autre élu indépendant, le docteur Gripon, qui a au premier semestre 1909 des ennuis familiaux et judiciaires, s’indigne que Rey soit « un intriguant prétentieux et borné. »

Conseiller actif, Rey tient le compte des réalisations, comparant par exemple en septembre 1908 ce qui a été fait par rapport à ce que demandaient les programmes des trois listes. Il s’intéresse en particulier à ce qui touche aux enfants, écoles et patronage, ainsi qu’à l’organisation de séjours pour les enfants de Joinville à la montagne, en l’occurrence dans son Ardèche natale. Rey s’intéresse aussi à l’hygiène publique et à la vie associative. Dans ce domaine aussi, il n’échappe pas à la controverse : ainsi, il encense la société de l’Allaitement familial, laïque, mais est accusé de calomnie pour avoir considéré que l’Union des mères de famille, catholique, faisait un tri parmi les personnes secourues.

Gardien de la ligne politique, Rey est élu électeur sénatorial en décembre 1908. En mars 1909, le conseil municipal et le comité radical et radical-socialiste organise un banquet en l’honneur de la médaille de chevalier de la Légion d’honneur que reçoit Rey et des Palmes académiques qu’obtient un autre radical, Georges Briolay, adjoint au maire.

Une élection partielle étant rendue nécessaire par l’élection au sénat d’Adolphe Maujan Rey soutient le candidat radical Amédée Chenal contre le socialiste SFIO Albert Thomas, appelant les républicains à voter « contre le représentant de la lutte de classes, pour celui qui représente la solidarité de tous les français dans la République sociale ». Il est élu.

À partir de mai 1909, un problème de voirie va dégénérer en crise politique locale. Un entrepreneur, Castella, utilise une rue de Joinville, le chemin de Brétigny (act. avenue du Président-Wilson), pour faire circuler des tombereaux de boues depuis le port sur la Marne provoquant une dégradation de la chaussée. La ville veut qu’il paie les réparations, ce qu’il conteste longtemps. Tous les opposants se retrouvent pour attaquer la majorité municipale, et notamment Rey : les socialistes, les royalistes, les libéraux… Ils utilisent des arguments parfois contradictoires, accusant parfois la ville de ne rien faire, s’inquiétant d’autres fois qu’elle menace une activité qui procure des emplois.

La majorité municipale éclate en juillet 1909 sur un prétexte. Rey voulait organiser un compte-rendu de mandat uniquement auprès de ceux qui avaient voté pour la liste radicale, mais sept de ses colistiers protestent, estimant avoir à rendre des comptes à tous les électeurs. Lors de cette réunion, finalement ouverte à tous, un socialiste traita Rey de « petit Clémenceau », il répliqua « vous êtes une caricature de Jaurès. »

Après avoir visité l’exposition nationale 1909 à Saint-Cloud (Seine, act. Hauts-de-Seine) en septembre, Rey propose d’en organiser une en 1910 à Joinville. Il met en place un comité ad-hoc, mais le projet n’aboutira pas.

La polémique avec l’opposition ne cesse pas ; en novembre 1909, Rey s’en prend au socialiste SFIO Émile Lebègue, lui reprochant d’avoir un arriéré d’impôt, assurant qu’être un « mauvais contribuable amoindrit son autorité de censeur ». Lebègue lui reproche d’être logé dans une propriété communale. Rey répond : « il m’accuse d’être petit et gros, comme si ça l’excusait d’être long et maigre. J’acquitte depuis 6 ans mon loyer à la commune, il n’a pas payé ses taxes. »

Toujours violemment anticlérical, Rey fait adopter une protestation contre l’exécution du pédagogue et anarchiste espagnol Francisco Ferrer, après l’insurrection de Barcelone. Il propose en janvier 1910 de créer un square ou un jeu de boules sur le terrain autour de l’église, ce qui est contesté par le curé, qui fait remarquer que le terrain accueille déjà la morgue.

L’affaire du chemin de Brétigny, que Rey croyait résolue fin 1909, continue cependant en janvier 1910. Une réunion publique, à laquelle participent les sept conseillers municipaux qui se sont détachés de la majorité radicale, exige que, à défaut d’exécution des travaux le 31 janvier, la municipalité démissionne. Cependant, une violente inondation de la Marne touche Joinville ce même mois, laissant tous les quartiers riverains sous les eaux pendant plusieurs semaines.

Malgré le contexte de submersion, la campagne électorale pour les élections législatives générales de mai 1910 est lancée. Face au socialiste Albert Thomas et à un libéral, Daboncourt, le parti radical-socialiste a investi Louis Bonnet, ancien adversaire à l’épée de Rey, mais qui sont réconciliés. Bonnet n’arrive qu’en deuxième position, loin de Thomas. Bonnet s’efface mais un radical indépendant, Adolphe Chéron, se présente au second tour. Rey avait annoncé que, si Bonnet devait se retire, il voterait pour Thomas « parce qu’il est trop intelligent pour ne pas évoluer une fois élu ». S’il dit regretter le vote il assure : « nous ne désespérons pas de la République radicale-socialiste ». Il change cependant d’avis : « J’abandonne Thomas pour venir à Chéron, préférant la grive républicaine au merle des unifiés ». La situation n’est pourtant pas très claire, car si Chéron est soutenu par les radicaux de la circonscription, du fait d’un accord fédéral, Thomas a le soutien du parti radical-socialiste. Thomas est élu. Il sera ministre pendant la première guerre mondiale puis maire de Champigny et directeur du Bureau international du travail après-guerre. Rey n’est pourtant pas peiné du résultat : « Thomas est élu, vive Thomas ! C’est un homme d’une haute culture intellectuelle. Thomas jaunira. C’est le lot des unifiés qui ont quelque chose dans le cerveau que de ne pas rester esclave du syllabus guesdiste ». Les revirements de Rey ont cependant des conséquences locales dont il témoigne dans la rubrique qu’il tient au sein de l’hebdomadaire Voix des communes : « Des évolutionnistes et des ratapoils sont venus dimanche dernier entre 11h et minuit crier sous ma fenêtre avenue des Platanes Vive Thomas !, m’invectivant et me criant de donner ma démission du conseil municipal et conspuant Voix des communes. »

L’échec législatif, dans une circonscription acquise aux radicaux depuis le retour au scrutin majoritaire en 1889, provoque des incidents. Plusieurs commerçants joinvillais assurent, selon Rey « Nous voilà débarrassés des radicaux ! » ou « les démissions pleuvent chez le président Gallas, c’est la débandade ». Reconnaissant la crise, Rey tente de la relativiser. Sur 80 adhérents au comité radical, il compte quatre démissions dont celles de trois élus.

La fin de l’inondation et celle de la période électorale relance de nouveau l’affaire du chemin de Brétigny. Rey est toujours l’objet d’attaques de ses adversaires : le conservateur Louis Gallas parle de lui comme d’un « petit gnome (vous le reconnaîtrez facilement au ruban rouge qui orne, on ne sait trop pourquoi d’ailleurs, sa boutonnière) ». Quant au socialiste Lebègue, il le traite « d’échappé de séminaire, zouave en rupture de courage, chimiste raté, empereur de carton, comédien de la salle des trois escobardes, habile jésuite, petit garçon… ». Rey assure n’avoir jamais mis les pieds au séminaire et compter quelques amis dans le parti SFIO.

La gestion de l’inondation devient aussi une source de polémique. Théophile Leteuil, candidat aux élections de 1908 sur la liste évolutionniste, se proclame président d’un Groupement des sinistrés de Joinville et met aussi en cause la gestion de la caisse des écoles. Rey récapitule attitude « girouettesque » : boulangiste en 1889, radical en 1900, évolutionniste en 1908, socialiste en 1909, proche des libéraux en 1910. Il regrette ces changements, car Leteuil fut son parrain lorsqu’il arriva à Joinville – qu’il lui fournissait du vin « excellent. »

En 1911, la crise s’accentue chez les radicaux avec la démission de leur président local Albert Gallas. L’un d’entre eux s’inquiète : « Y aura-t-il en 1912 une liste radicale et radicale-socialiste ? Y aura-t-il seulement un comité radical ? J’ai peur que non. Dès à présent, ce comité n’existe plus. Ce n’est même plus l’ombre d’un comité ». La réunion de compte-rendu de mandat du conseil municipal le 16 février met en scène la fracture, quatre dissidents (Watrinet, Vel-Durand, Mermet et Arnaud) se faisant applaudir à la fois par les socialistes et les évolutionnistes. Lebègue (SFIO) dénonce « l’incurie et la mauvaise gestion municipale » et appelle la municipalité à démissionner. À 23h, les conseillers municipaux qui, l’hiver, habitent Paris, demandent la permission de se retirer pour prendre leur train : c’est le départ de Guelpa, Roux, Boileau, Nivelet et Rey, tous fidèles du maire Eugène Voisin, souffrant. Des cris de « démission ! démission ! » fusent de la part des unifiés, évolutionnistes et libéraux.

Le libéral Louis Gallas considère que les quatre dissidents « ne veulent plus obéir servilement aux injonctions de la franc-maçonnerie » et reprend dans Le Courrier libéral des assertions de Lebègue qui considère Rey « comme un dégoûtant et répugnant personnage, ayant été chercher la Légion d’honneur qui orne sa boutonnière dans une officine louche de placement gratuit ». Rey assure que « Si la loi de 1904 sur l’abolition des bureaux de placement payant, trafic honteux du travail des prolétaires, a été votée, j’en suis le premier artisan. (…) Sept ans avant la loi de 1884 sur les syndicats, je créais des associations ouvrières et j’y instituai des offices de placement mutuel qui ont été honorées de récompenses aux expositions universelles de 1889 et 1900, économie sociale. Le ministre du travail voulut bien reconnaître la part prise par moi à cette émancipation des travailleurs. »

Un dernier évènement va renforcer la confusion au sein du conseil municipal. Rey dénonce un scandale avec des faits répréhensibles se passant depuis deux ans dans une classe de l’école de Polangis, dénoncés par une mère d’élève. Avec le directeur de l’école, les élus dissidents – qui sont devenus six – reprochent à Rey d’avoir mis l’affaire sur la place publique alors qu’il ne s’agissait que d’enfantillages ; il répond « Que la divulgation ne soit pas correcte, soit ; elle était nécessaire, les scandales ont cessé ». Il assure qu’il défend « la moralité des enfants des pauvres. »

Sept conseillers municipaux ayant démissionné en avril 1911, il devient nécessaire d’organiser des élections municipales complémentaires en mai. Rey qualifie les démissionnaires de « saxons ». Six d’entre eux se représentent. Anciens radicaux, ils ont désormais le soutien des socialistes unifiés et des libéraux. Rey s’étonne de l’attitude d’Henri Vel-Durand, l’un des plus en vue et futur maire de Joinville : « J’ai défendu Vel-Durand quand il était attaqué et qualifié de juif (…) Vel-Durand renierait son meilleur ami, s’il en avait, pour servir ses intérêts ». Les démissionnaires sont réélus face à une liste constituée par des commerçants. Rey assure que la réorganisation du parti radical-socialiste s’impose et annonce vouloir démissionner. Un de ses amis, Paul Guelpa, conseiller municipal, lui envoie une lettre ouverte formulée ainsi : « à SM Rey, empereur de Joinville. Malgré les objurgations de vos amis, vous persistez à rester démissionnaire ? Vous, le fougueux polémiste, vous resteriez étourdi au premier choc ? Descendez de votre trône, soyez le citoyen Rey. Vous prétendez être la cause directe de l’élection des dissidents ; leur succès est une victoire d’intrigues unifiés-réactionnaires. La majorité républicaine du conseil a besoin d’union. »

Répondant à Paul Guelpa, Louis Rey assure « J’ai ri de bon cœur. Pendant 3 ans, nous avons fait notre devoir, rempli notre mandat. J’ai dépensé sans compter mon activité et mon temps, j’ai pris à cœur mon rôle de conseiller municipal. J’ai défendu la municipalité et le conseil municipal attaqués par Lebègue et Leteuil. Je reste empereur, c’est autrement gai que de siéger à côté d’un croquemort comme vous allez être obligé de le faire. Vive Joinville, à bas les Saxons et leurs alliés les calotins ! » S’il ne démissionne pas, il ne siègera plus au conseil municipal.

Le comité radical-socialiste est en désarroi et son bureau démissionne tandis que certains membres demandent l’exclusion des élus dissidents. Vel-Durand répond qu’en attaquant Rey il attaque celui qui voulait être le maître du conseil municipal et qui attaquait tout le monde. Georges Briolay devient le nouveau président du comité. Diot, conseiller municipal, rejoint les sept opposants.

Pour les élections municipales générales de mai 1912, Rey assure qu’il n’est pas candidat. Il soutient par contre le comité radical-socialiste qui compte, selon lui, près de 100 adhérents et appelle « à l’union des radicaux ». Rey approuve « Soldat discipliné du parti, j’obéis, je veux oublier les attaques qui m’ont meurtri parce que j’avais fait mon devoir, j’espère que les citoyens Vel-Durand, Mermet et Poitevin, qui se recommandent du parti, feront de même et nous aideront à combattre la liste que Dalbavie est en train de recruter pour mettre hors de la mairie les républicains radicaux-socialistes dont ils font partie. »

Présentant son propre rôle, Rey indique « L’on m’a présenté aux électeurs de Joinville comme le maire occulte, une espèce d’éminence grise. (…) c’est me faire beaucoup d’honneur, me prêter beaucoup de pouvoirs, il n’en est rien. »

Les élections municipales de mai 1912 voient, au second tour, la victoire d’une alliance inédite entre trois listes présentes au premier tour : les dissidents radicaux, les libéraux et conservateurs et les socialistes SFIO contre la liste radicale conduite par Georges Briolay. Un des dissidents, Ernest Mermet, devient maire.

À suivre

Une caricature du naufrage du radicalisme en 1910

 

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