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8 mars 2025 6 08 /03 /mars /2025 00:01

En profitant de la Journée internationale des droits des femmes, le 8 mars, nous voulons mettre en avant quelques femmes, liées à Joinville-le-Pont, qui ont mené une action féministe, sans cependant oublier le caractère peut-être anachronique de ce terme dans certains de ces portraits.

L’ordre de classement est alphabétique

Astié de Valsayre, duelliste et suffragiste

Marie Rose Astié de Valsayre (1846-1915), née Claire Tastayre, épouse Astié, musicienne, volontaire pendant la guerre de 1870, officière de santé, écrivaine, journaliste, militante féministe et socialiste, syndicaliste, libre-penseuse.

Voir :

Juliette Derrien, commerçante parmi les premières conseillères municipales

Juliette Galland épouse Derrien (1913-1995), marchande foraine, militante communiste et féministe, une des premières femmes conseillères municipales en France, élue à Joinville-le-Pont (1945-1947).

Adèle de Dombasle, aventurière en Océanie

Adèle Mathieu de Dombasle épouse Garreau puis Dardel (1819-1901), dessinatrice, aventurière en Océanie (1847-1848).

Gabrielle de Dombasle, première fonctionnaire de Joinville

Gabrielle Céline Bertier épouse Mathieu de Dombasle (1797-1870), directrice de la poste aux lettres de Milly (1843-env. 1846) puis de celle de Joinville-le-Pont (env. 1846-1865).

Voir :

Ida Faubert, poète haïtienne

Ida Salomon épouse Laraque puis Faubert (1882-1969), poète et militante féministe, fille d’un président haïtien.

Marguerite Kundmann-Deloche, secrétaire de Louis Aragon

Marguerite Kundmann épouse Deloche (1914-1999), secrétaire de Louis Aragon puis libraire, résistante à l’occupation allemande pendant la deuxième guerre mondiale, militante communiste, pacifiste et féministe.

Marguerite Lauze et les Brigades internationales en Espagne

Marguerite Tribondeau épouse Lauze (1908-1986), secrétaire dans une société cinématographique, syndicaliste, féministe, militante communiste, volontaire en Espagne au moment du déploiement des Brigades internationales (1937).

Fanny Noger, femme de martyr de la Résistance

Fanny Nouger épouse Noger (1896-1984), militante féministe à Noisy-le-Grand.

Eugénie Peauger, syndicaliste des Postes

Eugénie Chégu, veuve Basséras, épouse Peauger (1860-1905), receveuse des Postes à Chaulnes, Survilliers, Rosny-sous-Bois et Joinville-le-Pont, responsable associative et mutualiste, coopératrice, syndicaliste, militante féministe, décorée des Palmes académiques.

Voir

Henriette Serval, ouvrière et résistante

Henriette Barbotte épouse Mény puis Serval (1905-1990), femme de ménage, serveuse puis ouvrière d'usine, militante communiste et associative, résistante à l’occupation allemande pendant la deuxième guerre mondiale.

Amélie Trayaud, seule femme maire de Joinville

Amélie Duteyrat épouse Trayaud (1883-1963), employée des transports parisiens, militante communiste, résistante à l’occupation allemande pendant la deuxième guerre mondiale, conseillère municipale (1944-1959) et maire de Joinville-le-Pont (1953).

Victoria Vaudémont, coopératrice et libre-penseuse

Victoria Bès dite Vaudémont (1859-1917), coopératrice à Joinville-le-Pont, Champigny-sur-Marne et Paris, libre-penseuse.

Portrait d’Astié de Valsayre

 

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6 août 2023 7 06 /08 /août /2023 01:01

Suite de la biographie de Marie Rose Astié de Valsayre

Au tournant du 20e siècle, installée à Joinville-le-Pont, Astié de Valsayre poursuit de manière régulière son activité politique, sociale et féministe. On la voit ainsi participer de manière rituelle à tous les anniversaires de la libre-pensée ou sur socialisme révolutionnaire, où elle prononce des discours de circonstance mentionnés dans la presse : le 9 janvier pour l’anniversaire de la mort du révolutionnaire Auguste Blanqui, 18 mars, pour le début de la Commune de Paris, le 1er mai, en souvenir des massacres des ouvriers de Chicago et de ceux de Fourmies, le 28 mai, pour la fin de la Commune, le 3 août pour l’anniversaire de la naissance et de la mort d’Étienne Dolet, brûlé vif après avoir été condamné par l’Inquisition…

La vie privée d’Astié de Valsayre, qualifiée par un journaliste comme « Une des plus jolies femmes de Paris », intéresse la presse. On annonce en 1893 son divorce d’avec Albin Rousselet, son compagnon depuis une dizaine d’années ; on annonce aussi son mariage avec Louis Champy. Elle dément les deux. Elle annonce une candidature à l’Académie française, à laquelle elle ne donne guère de suite. Mais elle va effectivement se consacrer, de plus en plus à des travaux littéraires.

Des nouvelles signées d’Astié de Valsayre paraissent dans Le Cri du Peuple, L’Express et dans L’Humanité. Le secret d'Hermine sort sous le pseudonyme de Fernand Marceau ; l’anarchiste Han Ryner n’aime pas ce « petit feuilleton très sombre, très patriotique, très révolutionnaire et très empoignant » où un « ange féminin et français » fait face à un « salaud de prince allemand. »

Dans les œuvres on compte aussi un conte grivois, L'Amour à la hussarde, réédité en 2022.

En compagnie de Camille Hayot, qui est sans doute un acteur ayant vécu à Lausanne, Astié de Valsayre s’essaie à l’art dramatique, en proposant deux pièces au Théâtre-Populaire de Belleville en 1904 et 1905. Mais ni La Grande Coupable, ni La Chasse aux millions ne semblent avoir été jouées.

La dernière intervention publique connue d’Astié de Valsayre fut, en avril 1914, le discours qu’elle fit, en compagnie de Séverine avec celle que la presse qualifiait de doyenne des féministes, Hubertine Auclert.

Claire Tastayre, alias Marie Rose Astié de Valsayre, meurt le 8 juin 1915 à Paris (13e arr.), à l’hôpital de la Salpêtrière. Elle était âgée de 68 ans et toujours domiciliée à Joinville-le-Pont. Le contexte de la guerre fait qu’il n’y a pas eu de notices nécrologiques dans les journaux de l’époque. Par contre, plusieurs publications ultérieures rendront compte de son activité et de sa personnalité ; elles feront l’objet d’un article prochain.

Fin

Marie Rose Astié de Valsayre

 

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4 août 2023 5 04 /08 /août /2023 01:01

Suite de la biographie de Marie Rose Astié de Valsayre

Après avoir dissout en décembre 1889 la Ligue des femmes socialistes, Astié de Valsayre constitue, en juillet 1890, la Ligue de l’affranchissement des femmes. Elle a la participation de citoyenne Léonie Rouzade et le soutien de dirigeants socialistes, comme Jean Allemane, qui vient de fonder le Parti ouvrier socialiste révolutionnaire après avoir quitté la FTSF, ou Henry Louis Champy, un ancien communard et conseiller prud’homme. Une des premières actions de la nouvelle ligue est d’ailleurs de solliciter l’inscription des ouvrières comme électrices aux prochaines élections générales prud'homales. Le ministre du commerce répond en août qu’il ne le peut pas, renvoyant la demande à la commission parlementaire compétente ; le quotidien y voit Le Soleil « un bel enterrement de première classe ! » En novembre, le syndicat des blanchisseuses tentera, sans succès, de présenter des candidates à son instigation.

Astié de Valsayre participe à la création de la Revue européenne, dans les bureaux de laquelle elle installe le siège de sa ligue. Le féminisme connaît toujours des polémiques internes ; la Ligue de l’affranchissement des femmes adresse ainsi « un blâme sévère » à Séverine, la journaliste libertaire Caroline Rémy, coupable, à leurs yeux, d’avoir demandé à son compagnon, Georges de Labruyère, de sa battre pour elle en duel face à un homme partisan du boulangisme. La Ligue considère « que toute, femme, qui ne veut pas avoir la responsabilité de ses actes, en obligeant un homme à se battre pour elle, commet un crime en toute circonstance. »

Lors des grèves des ouvriers des dentelles de Calais, en octobre 1890, Astié de Valsayre, encourage « l'union défensive des sexes ». Elle poursuit son combat anticlérical, participant au congrès de la Libre-Pensée et déclarant que « le prêtre est l'ennemi mortel de l'amélioration du sort de la femme ». En décembre, sa ligue assimile le budget des cultes à un « vol légal. »

En décembre, commentant une affaire d’avortement jugée à Toulon (Var), la Ligue de l’affranchissement des femmes s’insurge contre « la coutume de blâmer les femmes, qui disposent de ce qui leur appartient le mieux : leur corps ». L’année suivante, après un nouveau drame à Paris, elle est plus explicite : « l’état social donne ainsi à la femme le droit d’avortement. »

En janvier 1891, Astié de Valsayre est secrétaire du Syndicat des couturières qui organise son congrès de fondation le mois suivant avec une cinquantaine d’ouvrières. Elle dénonce aussi la concurrence des « congrégations religieuses exploitant sur une grande échelle l'industrie du blanchissage » et responsables ainsi de « la misère féminine ».

En mars, elle tente également, sans y parvenir cette fois, de constituer un Syndicat des filles de brasserie, les « verseuses. »

La Ligue de l'affranchissement des femmes quitte parfois le terrain social, comme en mars 1891 où elle demande « la suppression en France des courses de taureaux, ces inutiles scènes de boucherie. »

Astié de Valsayre participe à la naissance de l'Union universelle des femmes, annoncée à Paris en avril 1891. Clémence Royer y proclame : « Surtout ne demandons rien, mais prenons tout. Un jour viendra où le monde sera entre nos mains. »

Manifestant le 1er mai à Paris Astié de Valsayre s’est plaint d’avoir reçu, place de la Concorde des coups de pèlerine. Mais elle n’en veut pas aux sergents de ville, qu’elle traite de « vils esclaves » selon le quotidien La République française.

Polémiquant avec d’autres militants, elle regrette que l’on ait refusé qu’elles puissent signer la pétition en faveur d’un chemin de fer métropolitain.

Faisant une conférence en juin 1891 sur La question féminine à Paris, Astié de Valsayre elle a de nouveau plaidé pour faire la femme l’égale de l’homme, relevant que la liberté du costume puisqu'elle a pour but de donner ainsi aux femmes accès à beaucoup de professions, que leur ferment justement leurs vêtements.

Cette même année, en septembre, Astié de Valsayre signale qu’elle réside désormais à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne) ; sa villa sera dévalisée en décembre 1898, lors de vacances qu’elle passait dans le sud de la France.

Elle est en 1891 la compagne du docteur Albin Rousselet, rédacteur en chef de la revue de l’Assistance publique. Sa vie familiale n’est pas sans heurts ; le deuxième fils qu’elle a eu de son défunt mari, Gaston, né en 1872, a quitté le domicile familial dès ses 13 ans. Il a de nombreux ennuis avec la police, arrêté une première fois pour vagabondage puis, en novembre 1891 pour vol. La presse parisienne ne manque pas de relater l’inconduite du fils. Elle-même le traite de « vaurien ». À ses intervieweurs, Astié de Valsayre assurera qu’elle avait un enfant « presque tous les ans » ; cependant, seuls deux garçons survécurent, tandis qu’une fille ne vécut que quelques mois.

L’installation sur les bords de Marne permet à Astié de Valsayre de pratiquer plus régulièrement le cyclisme.

En décembre 1892, la Ligue de l'affranchissement des femmes décide de présenter une quinzaine de candidates pour les élections municipales à Paris. Elles essaient, sans y réussir, d’enrôler l’actrice Sarah Bernhardt. Astié de Valsayre ne fait pas partie de la liste « faute de pouvoir tout faire ». Mais elle prépare avec elles le programme : protection de l'enfant, de la femme et des faibles, lutte contre la spéculation, dénonciation des guerres coloniales, comme au Tonkin, demande d’exclusion des curés des activités sociales. Face à plusieurs défections, Astié de Valsayre rejoint la demi-douzaine de candidates. Elle adresse dans le même temps une pétition à la Chambre des députés, demandant l’inscription de certaines femmes sur les listes électorales ; une commission rejette sa demande.

Une réunion électorale, organisée en avril 1893 rue de la Montagne-Sainte-Geneviève à Paris (5e arr.), est totalement perturbée par les lazzis des étudiants qui y sont venus pour s'amuser. Comme en 1889, les bulletins de vote à son nom dans le 7e arrondissement ne sont pas décomptés.

Les élections sénatoriales de janvier 1894 voient de nouveau Astié de Valsayre se présenter, sous l’étiquette de « candidate à perpète ». Elle prend un programme original « 1° N'aller au Sénat que pour dormir ; 2° N'y ouvrir la bouche que pour bailler ; 3° Porter une perruque blanche, pour avoir l'air suffisamment abrutie. »

En novembre 1895, après avoir démenti des rumeurs répandues dans la presse sur sa retraite politique, Astié de Valsayre fait partie du comité d’accueil de Louise Michel qui débarque gare Saint-Lazare à Paris, revenant de son exil à Londres. Elle l’accompagne à son meeting de la salle Tivoli-Vauxhall. Au retour de la longue tournée en province de l’ancienne communarde et déportée, Astié de Valsayre intervient à ses côtés dans la conférence qu’elle tient en juin 1897 sur L’imminence et la nécessité de la révolution sociale.

Exclue d’un Congrès féministe, tenu à Paris en avril 1896, Astié de Valsayre, proteste par une lettre contre « ces affreuses bourgeoises, qui ne connaissent pas le premier mot de la question ouvrière, qui semblent ignorer que la galanterie n'est concédée aux femmes qu'en échange de leurs droits et qui, véritables accapareurs, prétendent garder les deux ».

L’activité d’Astié de Valsayre ne se limite pas au domaine politique. Elle devient secrétaire d’un patronage de jeunes filles du 6e arrondissement de Paris en septembre 1890. Il les accueille gratuitement les dimanches et fêtes pour leur offrir des activités sportives et récréatives.

Au cours des années 1890, Astié de Valsayre rédige, en le signant Mère Marthe, un petit ouvrage, L’Aisance par l'économie (1892), d’une tonalité très classique à l’image des livres sur la vie domestique, expliquant que la femme doit se lever tôt, travailler beaucoup et savoir se taire. Le relatif succès du livre fait qu’il est réédité en 1902 et signé alors Grand-Mère Marthe. Ce texte est très éloigné des thèses défendues par ailleurs par Astié de Valsayre.

Renouant avec la littérature patriotique, en 1896, Le Secret d'Hermine est publié sous le nom de Fernand Marceau. Reprenant le pseudonyme de Jehan des Etrivières, elle donne peu après un texte érotique, L'Amour à la hussarde.

Dans son Histoire de la littérature française, parue en 1909, le critique Léo Claretie range Astié de Valsayre parmi les écrivains socialistes, au côté de Jules Guesde et Paul Lafargue notamment. Mais le journaliste anarchiste Han Ryner considère qu’elle a une écriture de « cantinière. »

L’activité principale d’Astié de Valsayre est toujours le journalisme. Elle fonde et dirige, de 1897 à 1901, La Femme de l'avenir, où elle publie en particulier des articles sur l'instruction des jeunes filles ou sur l'hygiène.

Sensible au thème du racisme, qu’elle fustige à plusieurs reprises, Astié de Valsayre écrit en décembre 1898 à un journal antisémite : « J’apprends que L'Antijuif organise une équipe de photographes pour prendre les instantanés des Françaises achetant chez les Juifs, et que ces photographies seront exposées dans la salle des dépêches. Je serais particulièrement flattée de figurer dans celte galerie de « mises à l’index ». Craignant donc d'être absente quand se braqueront les appareils, je m’empresse de vous faire savoir que ma photographie est à votre disposition. Un mot m’apprenant que vous me faites l’honneur de m’admettre, et mon photographe vous l’enverra immédiatement. Astié de Valsayre, secrétaire général de l’affranchissement ». Le directeur de l’hebdomadaire, qui publie sa lettre, Jules Guérin, estime qu’elle est « une des plus jolies femmes de Paris », oratrice distinguée, élégante et spirituelle. Mais il lui reproche d’avoir « demandé qu’on coupât les curés en morceaux », même s’il y voit une fantaisie d’artiste.

À suivre

Marie Rose Astié de Valsayre

 

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2 août 2023 3 02 /08 /août /2023 01:01

Suite de la biographie de Marie Rose Astié de Valsayre

Devenue une oratrice en vue, Astié de Valsayre participe de manière régulière aux actions politiques. Elle est ainsi l’oratrice principale, assistée d’Eugénie Potonié-Pierre, d’une réunion publique organisée dans la grande salle de la Bourse du travail le 15 novembre 1888 « pour la réorganisation du syndicat des dames ». Elle est cependant mécontente de l’organisation de cette réunion par le Parti socialiste possibiliste FTSF, considérant que le montant fixé pour l’adhésion au syndicat écarte de nombreuses femmes du peuple. Elle démissionne alors de la commission de réorganisation.

Mais elle va s’intéresser aux luttes menées par des travailleuses, en tenant, en janvier 1889, sous l’égide du mensuel L’Union Internationale des Femmes, un meeting au bénéfice d’ouvrières teinturières en grève, conjointement avec Louise Michel, icône de la Commune de Paris, revenue au début de la décennie du bagne de Nouvelle-Calédonie. Elle critique, dans un article dudit journal, l’inégalité salariale fondée sur le concept selon lesquels les femmes seraient des êtres inférieurs : « l’ouvrière travaille le double de l’ouvrier pour gagner moins que lui. »

Toujours avec Louise Michel, Astié de Valsayre tient au cours de l’année 1889 plusieurs réunions à Paris et en banlieue sur les questions sociales. Elle soutient l’idée que « la femme doit être socialiste parce qu'elle est l'opprimée ». Elle n’oublie pas ses combats pour le droit des femmes à s’habiller comme elles le veulent. Ainsi, elle écrit au préfet du département de la Seine en février de cette année-là : «Ayant été faire une conférence à Fontenay-sous-Bois, le 10 de ce mois, par le temps de grande neige que vous avez vu et, grâce aux jupons qui s’imprègnent jusqu’à la ceinture, en étant naturellement revenu avec un refroidissement ; Considérant que le costume féminin n’est possible que pour les femmes qui n’ont rien à faire, je vous préviens que dorénavant je m’habillerai en homme, chaque fois que mes occupations le nécessiteront. »

Parmi les thèmes favoris d’Astié de Valsayre figure celui de l’éducation. La différence entre le baccalauréat féminin et celui des garçons fait que les filles n’ont pas le droit de s’inscrire aux études de médecine. Elles doivent d’abord faire deux années complémentaires d’études pour maîtriser les langues anciennes et matières scientifiques qui étaient écartées du cursus des lycées qui leur étaient réservés. Une des conséquences est qu’elles n’ont pas accès à l’internat des hôpitaux, dont l’âge limite est fixé à 27 ans, et Astié de Valsayre demande au ministre de l’éducation de changer en premier lieu cette limitation pour les filles, avant d’égaliser les programmes en vigueur dans les études secondaires. Mais au fond, ce que Astié de Valsayre revendique, c’est « Une éducation virile, scientifique et anticléricale des citoyennes. »

Rédactrice du journal l'Égalité, prend part au Congrès français et international du droit des femmes tenu à Paris en 1889 en tant que déléguée du Cercle des femmes indépendantes de France. Elle y fait une communication sur les « Recherches sur la dissolution des mœurs et sur les moyens d'y remédier » ; sa conclusion est claire, il faut « la parfaite égalité des deux sexes et la concession à la femme de tous les droits donnés à l’homme sans exception. »

En août 1889, Astié de Valsayre prend l’initiative de fonder la Ligue des femmes socialistes, dont elle devient la déléguée. En septembre, elle participe en tant que telle au congrès de la Libre pensée. Le premier objectif de la Ligue est de présenter Des candidatures féminines aux prochaines élections législatives.

Léonie Rouzade, qui avait déjà candidaté à Paris aux municipales de 1881 et aux législatives de 1885, fait partie des quatre candidates promues par la Ligue mais elle ne donnera pas suite. Elles seront trois à tenter de s’aligner : Eugénie Potonié-Pierre, Émilie Saint-Hilaire et Astié de Valsayre. Cette dernière se présente dans la circonscription de Clignancourt à Paris (18e arr.) revendiquant l’étiquette de socialiste. Dans son programme, elle fait figurer l’abolition de la réglementation de la prostitution et la suppression du mariage.

Une réunion, convoquée par la Ligue des femmes socialistes le 19 septembre à Montmartre se fait devant une salle comble d’environ 300 femmes selon la presse, un millier pour les organisatrices. Mais l’ambiance est hostile ; ainsi, la majorité applaudit quand, selon le quotidien Le Matin, une assistante déclare que les femmes ne doivent pas s'occuper de politique.

Dans son carnet d’une candidate, pour L'Égalité, Astié de Valsayre convient qu’elle n’a pas pu « dominer le tumulte » mais se félicite qu’un ordre du jour ait été voté la félicitant, avec les autres intervenantes « de l’énergie qu'elles déploient chaque jour pour obtenir l’émancipation de la femme. »

Le préfet met de nombreux obstacles au dépôt des candidatures, même s’il ne peut les empêcher de faire campagne. Les voix qu’elle recueille ne sont pas comptées. Le général Boulanger (populiste, alors réfugié en Angleterre) obtient la majorité absolue et est déclaré élu, mais il est bientôt jugé comme inéligible et Jules Joffrin (socialiste)  proclamé à sa place.

En octobre, lançant un appel Aux femmes dans L'Égalité, Astié de Valsayre proclame « Mes sœurs, il n’y a plus d’hommes ! Le mâle se meurt, le mâle est mort et celui qui se pare de ce nom n'est plus digne de le porter ! » et elle conclut : « Il y a quelques années j’avais déjà songé à organiser un bataillon de franches-tireuses pour ces cas douloureux où il faut bien répondre à la violence par la violence !... Puisqu’il n’y a plus d’hommes, c'est actuellement le vrai moment. »

La Ligue des femmes socialiste restera une organisation politique, soutenant les grévistes, dénonçant les conditions de travail dans les couvents, promouvant les droits politiques des femmes. Cependant, suite à un conflit avec le directeur du quotidien L'Égalité, qui l’hébergeait, Astié de Valsayre démissionne en novembre 1889. Elle reproche à Roques de vouloir interdire l’adhésion d’hommes à son organisation.

À suivre

Marie Rose Astié de Valsayre

 

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31 juillet 2023 1 31 /07 /juillet /2023 01:01

Suite de la biographie de Marie Rose Astié de Valsayre

S’intéressant toujours à la médecine, Astié de Valsayre qui avait été mordue en juillet 1878 par un chien enragé à son domicile de la rue Saint-Jacques, avait elle-même cautérisé ses plaies au fer rouge, selon son témoignage, avec l’aide de son mari d’après ce dernier. Le docteur Astié meurt en juin 1881. Il lui lègue un certain capital.

Suivant, dans la presse, les travaux de Louis Pasteur, elle lui propose, en novembre 1884, soit plus de six mois avant qu’il n’en fasse les premiers essais, de lui inoculer son vaccin antirabique. Le chimiste lui répond : « Il serait très dangereux, madame, de tenter l'épreuve ». Elle insiste, sans succès, en mettant les journaux au courant de ses démarches.

En avril 1886, ayant entendu que le docteur Gruselbach, de l'Université d'Uppsala (Suède) aurait mis au point un dispositif de conservation d’être humain en les plongeant dans le froid pendant plusieurs années (cryonie) elle lui écrit pour se porter candidate. Elle n’aura pas de réponse.

Marie Rose Astié de Valsayre publie dans la seconde partie des années 1880, des textes littéraires généralement courts, comme Le retour de l'exilé, poème patriotique, qu’elle signe Jean Misère, en 1887 ou une épître, la Deuxième aux Pharisiens, la même année où elle s’adresse au grand quotidien, Le Petit Journal, en lui demandant de cesser de publier des annonces mercantiles pour les « somnambules et tireuses de cartes. »

L’intérêt d’Astié de Valsayre pour le sport, joint à sa préoccupation de l’émancipation féminine et à son patriotisme, vont provoquer sa notoriété d’une manière spectaculaire.

En octobre 1884, un journaliste du quotidien le Cri du Peuple, ayant traité Astié de Valsayre de « Veuve vautour », elle lui demanda une réparation par les armes. Mais le publiciste, nommé Polignac refusa de se battre avec une femme ; en compagnie de deux personnes, dont son compagnon Albin Rousselet, elle le roua de coups dans un café.

En décembre 1885, reconnaissant que ce qu’elle avait écrit dans les Amazones du siècle pouvait être considéré comme une offense à certaines des personnes visées, Astié de Valsayre se mit à leur disposition si elles voulaient se battre et le signifia notamment à Eugénie Pierre. Cette dernière refusa : « Je suis absolument contre le duel, et le sexe des combattants ne changerait pas mon opinion. Le duel, ce reste de barbarie, n’a jamais rien prouvé. Si Mme de Valsayre a pu m'offenser, elle m'a loyalement demandé de lui tendre la main en signe de pardon, ce que j'ai fait. »

C’est au tour d’une Américaine, miss Shelby, de se frotter, en mars 1886, à la vindicte belliqueuse d’Astié de Valsayre. Lors d’une conversation, la féministe américaine affirme la supériorité dés doctoresses françaises sur les doctoresses américaines. Comme Astié de Valsayre conteste l’affirmation, elle la traite d’idiote ; la française lui jette alors son gant au visage. Elles conviennent de régler leur différend à l’épée, sur le champ de bataille de Waterloo (Belgique). N’ayant pas trouvé de français acceptant ce rôle, les quatre témoins seront tous américains. Au second engagement, l’Américaine a été légèrement touchée au bras ; puis elle présente ses excuses à Astié de Valsayre, qui salue alors la noblesse de son comportement.

Un mois plus tard, elle s’en prend à la maréchale Booth, anglaise et responsable en France de l'Armée du Salut. Elle lui reproche les « doctrines pernicieuses » de son organisation et lui intime de quitter la France ou d’accepter son défi. La missionnaire protestante refuse de se battre, et se dérobe également au débat public que la militante laïque française veut lui imposer.

Quelques semaines après, Astié de Valsayre tint seule, et devant un petit public, une conférence sur L’escrime et la femme mettait en avant son opinion que la pratique de l’escrime contribuait à leur réhabilitation physique tout en renforçant leur rôle central de leur mission en tant que mères.

Une pétition contre « l’abus des droits paternels » est adressée à chambre des députés en janvier 1887 par Maria Martin, militante féministe qui la signe au nom du « suffrage des femmes », et Astié de Valsayre, qui s’exprime « pour les mères de France. »

C’est toujours sous la forme pétitionnaire auprès des élus du peuple que Astié de Valsayre soulève, en juillet 1887 une autre question qui va soulever une considérable masse d’articles dans la presse. Elle y demande, pour les femmes, « la liberté du costume ». L’assemblée charge une commission d’étudier les arguments. Elle explique : « Dans toutes les bagarres de terre ou d'eau, la femme, en raison de son costume, est une victime prédestinée à la mort, et les accidents de tramways survenant pour le même motif sont quotidiens. À la seule pensée des malheureuses ainsi empêchées de fuir lors de l'incendie de l'Opéra-Comique, il semble logique et humain d'éliminer la loi routinière qui interdit aux femmes de porter le costume masculin, tout aussi décent, quoi qu'on en puisse dire, surtout Incontestablement plus hygiénique. Au nom de celles qui ne sont pas esclaves du luxe, je viens vous prier, messieurs, de bien vouloir décréter la liberté du costume, liberté qui, après tout, ne peut nuire à personne. »

Un an plus tard, la 17e commission de la Chambre des députés considère « qu'il n'y a pas matière à œuvre législative » du fait que « Aucune loi n'impose aux femmes les vêtements compliqués dont elle se recouvrent et le port de l'habit masculin n'est interdit aux femmes que par mesure de police. »

Poursuivant son engagement, Astié de Valsayre rejoint une des premières organisations socialistes, l'union fédérative du centre, adhérente à la Fédération des Travailleurs socialistes de France (FTSF). Elle participe au congrès d’août 1887 en tant que déléguée du groupe le Droit des femmes, qui se présente comme une société du suffrage des femmes. Elle intervient pour défendre l’existence de l'Assistance publique, en se félicitant de sa laïcisation. La FTSF, de tendance possibiliste, est dirigée par Paul Brousse. Astié de Valsayre interviendra désormais régulièrement dans ses débats.

A suivre

Marie Rose Astié de Valsayre

 

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29 juillet 2023 6 29 /07 /juillet /2023 01:01

Suite de la biographie de Marie Rose Astié de Valsayre

Pendant la guerre franco-prussienne de 1870, Marie Rose Astié de Valsayre, qui était mère d’un garçon de deux ans et venait de perdre une fille de quatre mois, était sans doute encore professeure de musique. Elle décide de s’engager auprès des troupes françaises combattant l’avancée des allemands en tant qu’ambulancière. Lors des combats sur le plateau d'Avron (Seine, act. Seine-Saint-Denis), qui durèrent d’octobre à décembre 1870, elle est a eu le lobe de l'oreille entamé par une balle. Elle en gardera une surdité partielle.

Il est probable qu’elle ne s’est pas impliquée dans la Commune de Paris, le régime socialiste qui prit le contrôle de la ville en refusant la capitulation devant les troupes germaniques. Mais elle est liée à Henry Louis Champy, ouvrier coutelier, élu au Conseil de la Commune, déporté en Nouvelle-Calédonie après la défaite de l’insurrection en mai 1871. À son retour, il adhère au Parti ouvrier socialiste révolutionnaire. Plusieurs dizaines de journaux les prétendirent mariés en 1891, ce qu’elle démentit.

En avril 1872, Astié de Valsayre donne naissance à son deuxième garçon.

Si les compositions musicales de celle qui se faisait alors appeler Marie de Valsayre lui avaient déjà apporté une certaine notoriété, ce sont ces études qui la mirent en avant dans la presse parisienne. En novembre 1874, venant de recevoir un certificat de grammaire, elle se présente devant une Commission d’inspecteurs de l'Académie, parmi 36 candidats, pour suivre un cursus médical. Son examen a porté sur l’appréciation critique du Misanthrope, pièce de Molière. Le Soleil indique qu’il y eut dix reçus et qu’elle fut « en première ligne ». C’était quelques années plus tôt, en 1868, que le droit de s’inscrire pour des études médicales avait été ouvert aux femmes, mais aucune n’avait encore été diplômée comme médecin. Astié de Valsayre publia une brochure en 1874, Certificat de grammaire, à l’usage des officiers de santé et pharmaciens, qui était une sorte de guide pour préparer l’examen.

Pendant une dissection dans un cours d'anatomie, elle se piqua et fut amputée d'une phalange de la main gauche. Une autre agression vint, en juillet 1878, d’un chien enragé qui la mordit aux deux mains. Elle cautérisa elle-même les plaies au fer rouge, avec l’aide de son mari, le docteur Astié. Ce sont cependant les suites de sa blessure de guerre qui la conduire à abandonner, en 1879, la voie qui aurait pu l’amener au titre de docteur. Camille Delaville, dans Le Constitutionnel (1887/02/14) explique : « Mme Astié est fort savante, mais sourde, elle n'entend que la moitié des questions des examinateurs et aime mieux être refusée que d'avouer cette innocente infirmité. »

Cependant, ayant réussi les trois années de scolarité requises, elle eut le titre d’officier de santé, équivalent à celui d’infirmier actuellement.

Elle se tourne vers la presse, devenant secrétaire d’Émile de Girardin, patron du quotidien La Presse. Elle écrit également des articles scientifiques dans Civilisation, par exemple en 1880 sur le Père Galien d'Avignon, sous le titre La Science et le clergé, ou sur l’astronome allemand Pierre Ungeschick. L’hebdomadaire La Femme de France publie un texte d’elle sur La Femme et la science, en septembre 1879. Elle soutient que « être mère de par la nature, c’est-à-dire involontairement, n’est rien ; tandis qu’être mère de par l’instruction est une œuvre grandiose » et elle appelle : « mes sœurs ; continuez à secouer le joug avilissant de l’homme ! » Un de ses lecteurs s’étonne « Mme Astié de Valsayre ne serait-elle pas un homme caché sous un pseudonyme féminin ? Je dois vous l’avouer, j’ai fait une enquête dans votre quartier ; j’ai appris que vous existiez réellement, ce qui m’a stupéfié. »

Les publications scientifiques se poursuivent, sur la Cuisine physiologique en juin 1880 puis une tentative en anthropologie au sujet du Croisement des races en octobre la même année.

Astié de Valsayre est associé aux travaux du groupe de l'enseignement secondaire des jeunes filles, qui fait suite à l’adoption en décembre 1880 de la proposition de loi du député Camille Sée. Le texte législatif institue les collèges et lycées publics de jeunes filles, mais « les dispense de certaines études pour faire place aux travaux et aux occupations de leur sexe ». Les langues mortes sont exclues, la morale tient lieu de philosophie et l'enseignement scientifique reste élémentaire. Au contraire, Astié de Valsayre dépose en mars 1883 un Mémoire sur l'enseignement secondaire des jeunes filles et la question du latin, plaidant pour leur accès à un baccalauréat identique à celui des garçons. Elle envoie en mai 1883 aux députés un Mémoire sur l'utilité de l'enseignement de grammaire dans l'instruction de la femme. Elle explique que, malgré son titre universitaire, on ne lui permet pas d’enseigner aux jeunes filles. Elle soutient également que, si ces dernières pouvaient apprendre le latin, on cesserait de les discriminer en matière salariale dans les institutions éducatives.

Sous un pseudonyme masculin, Jehan des Étrivières, Astié de Valsayre publie en 1882 un pamphlet, Les Amazones du siècle, sous-titré les Gueulardes de Gambetta. Elle y attaque Louise Michel, Léonie Rouzade ou Eugénie Potonié-Pierre, toutes féministes dont elle sera ensuite proche. En décembre 1885, après de vifs échanges, elle reconnaîtra dans L’Événement qu’elle les avait « sottement attaquées. »

À suivre

Marie Rose Astié de Valsayre

 

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27 juillet 2023 4 27 /07 /juillet /2023 01:01

Début de la biographie de Marie Rose Astié de Valsayre

Claire Léonie Ferdinande Tastayre naît le 30 août 1846 à Paris. Elle est la fille naturelle de Claire Rosalie Tastayre. Son père n’est pas dénommé dans son état-civil. Ses parents ne la reconnaissent pas légalement. Cependant, selon son biographe, Eutrope Lambert (1842-1916), elle fut élevée par sa mère, et très partiellement par son père. Il le décrit ainsi, sans le désigner par son nom : « Son père, d'une famille noble et ruinée par les révolutions, donnait des leçons de droit, — et la médiocrité, pour ne pas dire la misère, régnait au logis. Hélas ! chaque fois que le gentilhomme pauvre arrêtait son regard sur le petit berceau qui contenait toutes ses espérances, il devenait triste et songeait à conquérir une fortune. Si bien qu'un jour il s'embarqua pour l'Amérique, d'où il ne revint jamais. La fièvre l'avait emporté quelques jours après son arrivée ! » Pour le journaliste Jean Bernard (Express, 1900/06/01), son père était un avocat breton. Sa mère était originaire d’une vieille famille du Pas-de-Calais qui, bien que non noble, avait émigré sous la révolution. Elle fut institutrice.

Le même Eutrope Lambert – un poète qui lui voua toute sa vie une grande admiration -, décrit ensuite son enfance : « Les premières années de Marie de Valsayre [un pseudonyme qu’elle adopta ensuite] s'écoulèrent comme les flots bruyants d'un fleuve qui court vers la mer. L'impatience semblait mêlée au sang de cette enfant. Il fallait qu'elle courût avec les petits drôles du quartier, qu'elle se déchirât, qu'elle battit les chats et les chiens, qu'elle crevât les yeux aux petits oiseaux et qu'elle fit enrager sa mère, — sa pauvre mère qui s'imposait tant de travail et de privations pour l'élever. — Cependant, il y avait quelque chose qui calmait le petit démon, quelque chose qui la rendait douce — elle, la méchante, — la musique ! — Oh ! comme elle s'arrêtait au milieu de ses innocentes cruautés quand les vibrations d'un piano arrivaient jusqu'à elle ou que la musique militaire passait sous ses fenêtres. Alors elle devenait toute sérieuse et son regard semblait inspiré ; puis elle courait dans un coin de la chambre, revenait traînant une vieille guitare, — le seul de ses jouets qui eût survécu, — et, la posant devant elle, pinçait les cordes pour en tirer des accords. Sa vocation était trouvée et sa mère lui fit donner des leçons de solfège et de piano. L'étude calma un peu sa turbulence sans la faire disparaître. Ses progrès furent rapides, et à six ans, dans les petites solennités classiques, c'était toujours elle qu'on choisissait pour chanter ou tenir le piano. Ce n'est pas tout : Marie voulut aussi apprendre à jouer du violon, et, bon gré mal gré, il fallut lui donner un maître italien. Puis elle perfectionna son chant avec Duprez ; déjà les romances qu'elle chantait prenaient cette expression ravissante qui est le charme de son talent. Elle semblait aimer plus particulièrement ce genre de musique qui est le plus sympathique et le plus beau ; mais de fréquents vomissements de sang survinrent, et elle y renonça pour s'adonner entièrement à l'étude de l'harmonie, de la fugue et du contre-point. A treize ans, Marie de Valsayre entrait dans le monde des artistes et était reçue membre de plusieurs sociétés musicales. Une schotisch : Follette, — composée à cinq ans et corrigée par elle, — venait de paraître chez Meissonnier. Son talent sur le violon la faisait rechercher. Digne émule des jeunes sœurs Milanollo, elle exécutait sur cet instrument, avec une pureté et une délicatesse infinies, les morceaux les plus difficiles. »

Élève du Conservatoire de musique de Paris, Marie de Valsayre devient ensuite professeur de violon et de piano. À partir de 1862, quand elle a donc 15 ans, et jusqu’en 1866, elle publie des romances, chœurs ou opérettes, notamment sur des textes d’Eutrope Lambert, Joseph Gouverneur et Théodore Leclerc. Ces œuvres lui valent une certaine notoriété, dans la société aristocratique et bourgeoise parisienne.

En avril 1863, elle donne un premier récital, jouant au piano des œuvres de Beethoven et les siennes. Elle en donne un autre, sur l’Hippodrome d’Auteuil, en août la même année. Le Conseiller des artistes salue, en février 1864, sa « musique intelligente et sentimentale ». Le Grand dictionnaire universel du XIXe siècle de Pierre Larousse qualifie ses mélodies de « pleines de sensibilité ». Cependant, en août 1865, La Semaine musicale considère à propos d’une de ses compositions, Un Ange, que « Le chant ne manque pas de charme mais la prosodie est très-défectueuse ». Les personnes auxquelles elle dédicace ses œuvres sont des artistes, comme son professeur Eugène Gérard, ainsi que des personnes de la bonne société parisienne, notamment des aristocrates.

C’est également à 15 ans qu’elle assure s’être mariée ; cependant, la célébration officielle à la mairie du cinquième arrondissement n’aura lieu qu’en juin 1869, sept ans plus tard. Son époux est Louis Charles Astié, docteur en médecine originaire du Tarn. Dans un entretien paru en 1892, elle raconte : « j'ai toujours fait, douloureusement et consciencieusement, mon devoir d'épouse » mais assure que « par malheur », « le docteur Astié, était alcoolique ». Elle adopte le patronyme « Astié de Valsayre », auquel elle ajoute parfois, mais rarement, les prénoms Marie Rose.

Sa mère, qui partageait alors la vie d’un lithographe d’origine suisse, Marcelin Maggi, meurt quand Marie a 18 ans, en janvier 1865.

Le premier garçon des époux Astié, Octave, était né en février 1868 et sera reconnu à l’occasion du mariage ; une fille, Anne, naîtra deux mois après les épousailles légales mais ne vivra que quatre mois.

La famille vit dans à Paris (5e arr.), d’abord rue du Val-de-Grâce puis rue Saint-Séverin.

À suivre

Marie Rose Astié de Valsayre

 

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15 février 2023 3 15 /02 /février /2023 00:01

Marguerite Kundmann naît le 23 novembre 1914 à Paris (12e arr.). Elle est la fille de Bension Kundmann et de Chaïna Peila Frankenstein. L’orthographe des noms et prénoms des parents est variable ; on trouve notamment Koutmann et Frankestein pour les patronymes et Benzion ou Chaïna Pula pour les prénoms. Ils font également usage des formes francisées de Benjamin et Pauline.

Bension Kundmann est casquettier, originaire de Berëzovo, dans l’oblast de Tcheliabinsk, en Russie, au sud du massif de l’Oural et en limite de la Sibérie. De confession juive et disposant alors de la nationalité russe, il a pu divorcer d’un premier mariage conclu en France en décembre 1904 sur décision de l’autorité rabbinique de Paris. Il n’est pas remarié, du point de vue de l’état-civil français, à la naissance de Marguerite mais épousera sa mère en juillet 1930 à Saint-Maur-des-Fossés (Seine, act. Val-de-Marne), ce qui légitimera son origine. Toute la famille (dont Marguerite) obtient, en mars 1927 par décret la nationalité française. 1935

En mai à Paris (17e arr.), Marguerite Kundmann, qui travaille comme sténodactylographe, donne naissance à Hélène Deloche, fille reconnue par Robert Deloche. Ils sont installés ensemble, avec leur fille, en 1936 à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), rue du Canal, dans le quartier du Centre.

Il est probable qu’il faille l’identifier avec Koudmann qui fait partie d’une liste de 24 collaborateurs du comité central du parti communiste français, qui participent à une souscription « Pour chasser Laval, les fascistes et les renégats » publiée en août 1935 dans le quotidien communiste L’Humanité. Parmi les autres personnes mentionnées figure Deloche.

À partir de juin 1937, Marguerite Kundmann, qui prend désormais le nom de Marguerite Deloche, devient une oratrice fréquemment mobilisée, en tant que représentante du Comité mondial des femmes contre la guerre et le fascisme. Fondé à Paris en 1934 lors du Congrès mondial des femmes, présidé par Gabrielle Duchêne. Sa section française compte alors 200 000 adhérentes. Le Comité se situe dans la continuité du Mouvement pacifiste Amsterdam-Pleyel et fait campagne en faveur du Front Populaire en France ainsi que pour les républicains espagnols.

Élu conseiller municipal communiste de Joinville-le-Pont en mai 1935, Robert Deloche devient le représentant du PCF auprès des mouvements communistes en Afrique du Nord ; il est également candidat, sans succès, aux élections législatives de 1936. Un hebdomadaire local très anticommuniste, l’Union régionale, mentionne en octobre 1937 qu’il a « déménagé, laissant femme et enfant seuls » et que ces dernière « vont aller habiter à Montreuil », où résident les parents de Marguerite.

On retrouve Marguerite Deloche à Mâcon (Saône-et-Loire) en juin 1937 puis à Bourges (Allier) en décembre la même année. Dans cette dernière ville, elle intervient au sein de l’hôtel des Syndicats pour dénoncer « le grand malheur de l’Espagne, conséquence de la préméditation fasciste ». Elle relie la situation à « une série d’attentats et d'assassinats » qui a précédé « aussi bien en Italie et en Allemagne qu’en Espagne, la révolution fasciste » et appelle à « la vigilance républicaine. »

En janvier 1938, Marguerite Deloche participe à un « grand meeting avec les orateurs de Front populaire » à Franconville (Seine-et-Oise, act. Val-d’Oise). Cette année-là, elle prend en décembre la parole dans une assemblée organisée par le Secours populaire à Suresnes (Seine, act. Hauts-de-Seine) où elle demande « la libération des papas pour les rendre à leurs enfants à l'occasion des fêtes de Noël. »

L’année suivante, elle participe à plusieurs manifestations du mouvement Paix et Liberté en janvier à Sevran (Seine-et-Oise, act. Seine-Saint-Denis) et Aubervilliers (Seine, act. Seine-Saint-Denis), dans cette dernière ville avec Charles Tillon, député et futur ministre. Elle contribue à des meetings du pour l'aide à l’Espagne républicaine en février à Paris (10e arr.) et en mars à Vendôme (Loir-et-Cher).

Le Comité mondial des femmes se dissout après le déclenchement de la deuxième guerre mondiale en octobre 1939. Le mois suivant, Marguerite et Robert Deloche se marient à Pontault-Combault (Seine-et-Marne).

Sur son attitude pendant le conflit, on dispose du témoignage de sa fille Hélène, devenue Mme Robineau et celui de Christiane Dormois, vice-présidente nationale Fédération nationale autonome des pupilles de la nation et des orphelins de guerre (FNAPOG). Du fait que Robert Deloche a été Interné pour faits de Résistance au camp de Châteaubriant, puis s’en est évadé et parce qu’elle est d’ascendance juive par sa mère, Hélène doit vivre « cachée avec sa grand-mère dans la mansarde d’un cabaretier, place de Verdun à Joinville-le-Pont. »

Christiane Dormois décrit Marguerite Deloche comme une « grande résistante parisienne », devenue agente de liaison des Francs-tireurs et partisans (FTP), mouvement de résistance proche du parti communiste.

À la Libération, d’après le récit d’Hélène Robineau, Marguerite Deloche et elle-même accueille avec sa mère les survivants de la Shoah à l’hôtel Lutétia à Paris en 1945. Elles rencontrent l’écrivain Louis Aragon dont Marguerite Deloche devient la secrétaire. Renate Lance–Otterbein, docteur en littérature, indique que c’est Marguerite Deloche qui a tapé Les Communistes, roman d’Aragon paru en 1949.

Elle publie, dans la revue Femmes françaises, proche des communistes, en juillet 1946, une nouvelle sur l’expérience de la déportation.

En tant que responsable de l’association des Amies de La Paix, Marguerite Deloche est une des organisatrices de la journée du souvenir et de la paix organisée le 11 novembre 1947 conjointement avec l’Amicale des Veuves Orphelins, Ascendants, Victimes de deux guerres, l’Association des familles des fusillés massacrés de la Résistance, le CRL, l’ARAC, les Anciens FTP-FFI, Comité Parisien de la FNDIRP, Association départementale des déportés du Travail, Association départementale des anciens prisonniers de guerre.

À Joinville-le-Pont, Robert Deloche, qui a libéré la mairie le 25 août 1944 à la tête d’un groupe de FTP, est devenue président du comité local de Libération et désigné comme faisant fonction de maire, avant d’être élu dans ce poste en 1945 puis réélu en 1947, devenant également conseiller général de la Seine la même année. Il démissionne de ce mandat en janvier 1953, est exclu du parti communiste qui met en cause « les écarts de sa vie privée », puis renonce en mars à son poste de maire ; il est remplacé par Amélie Trayaud, deux mois avant l’échéance électorale.

C’est ce même mois de mars 1953 que le divorce de Marguerite et Robert Deloche est prononcé par le tribunal civil de la Seine.

Marguerite, qui reprend son nom de Kundmann, exploite la librairie Ars Una, située boulevard Malesherbes à Paris (17e arr.) jusqu’en 1967. Elle participe à une souscription publiée en mars 1998 par L’Humanité, qui indique qu’elle réside à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine).

Marguerite Kundmann meurt le 10 janvier 1999 à Paris (8e arr.). Elle était âgée de 84 ans et mère d’une fille.

Portrait présumé de Marguerite Kundmann-Deloche (arch. fam.)

 

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15 août 2022 1 15 /08 /août /2022 00:01

Juliette Maria Galland naît le 3 novembre 1913 à Verzenay (Marne). Elle est la fille de Lucie Eugénie Jeannin et de son époux René Galland, vigneron. Son père meurt à la guerre en octobre 1914, quand elle a moins d’un an. Sa mère vit ensuite à Paris (18e arr.), rue des Saules, où elle est pâtissière, et se remarie en septembre 1924 avec un pâtissier d’origine alsacienne, Aimé Marius Blind. Elle meurt en mai 1928, quand Juliette Galland a 14 ans. Elle continue à vivre avec son beau-père, qui se remarie en juin 1929 avec une manucure, également native de Sélestat.

Selon la notice du Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français (Maitron), Juliette Galland exerce les métiers de coiffeuse puis de lingère. Elle n’a cependant pas de profession déclarée lors de son mariage, en janvier 1937 avec Pierre Derrien, garçon boucher. Ils s’installent à Champigny-sur-Marne (Seine, act. Val-de-Marne).

Pendant la deuxième guerre mondiale, Pierre Derrien, militant communiste et engagé dans les Francs-tireurs et partisans (FTP), est arrêté sur dénonciation puis condamné à mort par les autorités allemandes et fusillé en octobre 1943 au Mont-Valérien (Suresnes, Seine, act. Hauts-de-Seine).

Après-guerre, Juliette Derrien vit à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), est, d’après le Maitron, vendeuse ambulante de chaussures et adhère en novembre 1944 au parti communiste et à l’Union des femmes françaises (UFF). Le maire, Robert Deloche, également résistant et communiste, la sollicite pour figurer lors des élections municipales d’avril 1945 sur la liste d’Union républicaine et résistante, qui rassemble des communistes, des socialistes SFIO, des radicaux et des personnalités classées comme divers-gauche. Avec 61,7% des suffrages exprimés, la liste emporte les 27 sièges à pourvoir dès le 1er tour.

Comme il s’agit du premier scrutin dans lequel les femmes sont électrices, Juliette Derrien fait donc partie des toutes premières élues françaises ; elle obtient 3 786 voix pour 6 447 suffrages exprimés (58,7%) sur 6 621 votants et 7 811 inscrits et arrive au dernier rang des candidats élus. Trois autres joinvillaises entrent en même temps qu’elle dans l’assemblée locale : Adrienne Chagnon, Valentine Nicolas et Amélie Trayaud (future maire de la commune en 1953). Le conseil est composé officiellement de 7 communistes, 6 socialistes SFIO, 5 radicaux et 9 indépendants de gauche, catégorie à laquelle semble être rattachée Juliette Derrien bien qu’elle soit membre du PCF. Robert Deloche est réélu maire.

Citant des sources provenant des archives du parti communiste, la notice du Maitron mentionne que Juliette Derrien se considère, en 1947, qu’elle est « trop faible politiquement » pour assurer des responsabilités électives et ne se représente pas. En avril 1947, elle est embauchée comme employée du Centre de diffusion du livre et de la presse (CDLP), organisme lié au parti communiste.

Juliette Derrien meurt le 5 décembre 1995 à Plouzané (Finistère). Elle était mère d’une fille.

Goûter organisé en 1945 par l'Union des femmes de France à Joinville-le-Pont

 

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22 juillet 2022 5 22 /07 /juillet /2022 00:01

Henriette Raymonde Barbotte naît le 5 février 1905 à Bouilland (Côte-d'Or). Elle est la fille de Jeanne Marie Hoffner et de son mari, Pierre Barbotte, manouvrier.

Elle épouse, à Bouilland, en novembre 1923, Émile Mény, ouvrier des PTT (Postes, télégraphe et téléphone) à Dijon. Ils s’installent dans cette ville, chemin des Saules, puis dans un village proche, Marsannay-la-Côte, rue du Carré, où son mari est devenu employé des chemins de fer de la compagnie PLM (Paris-Lyon-Méditerranée). Ils divorcent en 1935.

Henriette Barbotte devient alors serveuse dans un café à Lyon-Perrache ; elle réside à Saint-Didier-au-Mont-d'Or, Rhône. Elle fait la rencontre de Jules Serval, ouvrier aux chemins de fer PLM, syndicaliste et militant communiste, qu’elle épousera en février 1948 à Lyon (7e arr.).

Selon l’historien Maurice Moissonnier, Henriette Barbotte adhère au Parti communiste en 1935 et participe à la grande grève des employés de café qui se déroule à ce moment à Lyon.

Pendant la deuxième guerre mondiale, toujours d’après la notice de Moissonnier dans le Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, Henriette Barbotte contribue à la récupération de matériel d'impression et de reproduction destiné au parti communiste clandestin. Elle assure ensuite les liaisons de Jules Serval, qui est devenu résistant, responsable du parti communiste et du Front national pour la Drôme et l'Ardèche. Après l’arrestation de Serval, elle se rend d’abord à Montpellier (Hérault). Moissonnier indique qu’en 1943 et 1944, elle fut l'une des responsables des organisations de la Résistance féminine à Marseille (Bouches-du-Rhône).

Après le conflit, Henriette Barbotte et Jules Serval reviennent en région lyonnaise, et lui devient conseiller municipal de Lyon. Elle travaille comme ouvrière à l'usine de matériel électrique Grammont de la ville.

Ayant pris sa retraite en 1951, Jules Serval devient secrétaire de l’Union CGT des cheminots retraités. Henriette et Jules Serval s’installent alors à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), dans le quartier de Polangis.

En 1953, Henriette Serval devient responsable du comité de l'Union des femmes françaises de Joinville, organisation proche du parti communiste. Elle conduit notamment, en 1967, une collecte en faveur du Vietnam. Elle est également membre du bureau de la cellule de Polangis et du comité de la section locale du PCF à Joinville.

Lors des élections municipales de mars 1965, Henriette Serval est candidate avec l’étiquette communiste sur la liste d'Union démocratique, conduite par Henri Bideaux, qui comprend essentiellement des communistes mais également un socialiste, un radical-socialiste et une personnalité républicaine qualifiée d’indépendante. La liste obtient au premier tour une moyenne de 29,9% des voix, derrière le maire sortant Georges Defert (Rassemblement des gauches républicaines, centre-droit) à 43,6% et devant les gaullistes à 26,6%. Au second tour, les candidats de Defert emportent les 27 sièges à pourvoir avec 60,4% des suffrages exprimés, les communistes se situant à 38,1% en moyenne. Henriette Serval n’est pas élue.

Jules et Henriette Serval ayant décidé de se retirer en région lyonnaise, les communistes de Joinville organisent pour eux une soirée d’adieux le 25 septembre 1968. Ils s’installent à Vénissieux (Rhône). Henriette Serval entre au bureau local de l'UFF, milite à à la section de la Fédération nationale des déportés, internés, résistants patriotes (FNDIRP) et fait partie de l'Amicale rhodanienne des Vétérans du PCF.

Henriette Serval meurt le 23 octobre 1990 à Bron (Rhône). Elle était âgée de 85 ans et mère de quatre filles, issues de son premier mariage.

Henriette Serval

 

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