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12 novembre 2025 3 12 /11 /novembre /2025 00:01

Suite de la biographie de Georges Capgras

À la sortie de la guerre, la situation du peintre Georges Capgras change beaucoup. Il se sépare de sa seconde épouse et son fils, revenu d’Amérique pour combattre pendant le conflit, d’abord dans l’Est de la France puis dans les zouaves avec l’armée d’Orient, est grièvement blessé. Après un bref retour aux États-Unis, il revient en France et meurt, en décembre 1919 des suites de ses infirmités de guerre. Il est enterré à Saint-Maur-des-Fossés, ville de ses grands-parents paternels. En matière professionnelle, Georges Capgras ne fait plus mention de son emploi au Crédit foncier et paraît se consacrer exclusivement à ses activités artistiques. Il vit de nouveau à Paris (9e arr.), dans le quartier Saint-Georges, rue Gaillard renommée ensuite rue Escudier.

Il entreprend des randonnées, en particulier en Alsace, qu’il parcourt à pied et sac au dos. Outre sa participation systématique au Salon des artistes français à Paris, il a des expositions personnelles, comme en novembre 1920 à la galerie Allard, rue des Capucines à Paris mais aussi à Lille, Nancy, Tokyo ou Copenhague. Récompensé par la médaille d'or au Salon des artistes français en 1923 pour le triptyque Terre d’Alsace, il est mis hors compétition dans les salons suivants.

Un des éléments marquants de l’évolution du peintre, c’est son adhésion au spiritisme où, selon ses compagnons, « il trouva la consolation » de la disparition de son fils. Il devient vice-président de l’Union spirite de France (USF) et reste membre du comité de l’association jusqu’à son décès. Il participe activement aux travaux, donne en avril 1936 une conférence sur Le spiritisme et l’art à Paris. Il fait également cadeau à l’USF de son triptyque, Vers la lumière pour sa salle de réunion.

Après avoir eu en 1926 une compagne, Jeanne Chaumon, veuve et employée de commerce, Georges Capgras épouse en novembre 1927 à Paris (6e arr.) l’artiste peintre Henriette Louise Emma Desportes. Parmi les témoins du mariage, on compte Paul Doumer, alors président du Sénat, qui deviendra président de la République en 1931 et sera assassiné l’année suivante. Autres témoin, le peintre Paul Chabas (1869-1937), qui était comme Capgras un ancien élève de Bouguereau ; un autre artiste peintre, Marcel Baschet (1862-1941), malade le jour de la noc, s’était fait excuser. Avec Henriette Desportes, Géo Capgras s’intéresse à la Bretagne, notamment à la ville de Dinan (Côtes-d'Armor) où son épouse réside. Leur union est dissoute par un troisième divorce en juillet 1930 à Paris.

Paul Doumer (1857-1937), qui deviendra président de la République en 1931 et sera assassiné l’année suivante, avait « une très profonde affection », selon la présentation faite en en septembre 1937 par la Revue spirite. Leurs sentiments mutuels s’étaient resserrés leurs deuils cruels : le Président perdit quatre de ses fils à la guerre et Capgras, son fils unique. Ce dernier avait fait le portrait de Paul Doumer qui était présenté au Salon de 1927, et la présidence du Sénat avait acquis le triptyque Terre d’Alsace pour l’exposer dans son salon d’honneur. Paul Doumer avait reçu Georges Capgras dans sa résidence officielle de Rambouillet (Seine-et-Oise, act. Yvelines).

Même si Capgras n’enseigne pas, des artistes se réfèrent à lui, notamment Hélène Benoit-Courcier (1891-1982), peintre versaillaise, originaire du Pas-de-Calais. Selon des sources qu’il n’a pas été possible de vérifier, il aurait également eu une influence sur les peintres Paul-Albert Laurens, Albert Malet, Marcel-Lenoir, Georges Pacouil, Alexander Ossipovich Orlowsky, Renée Unik, Louis, Ludovic et Henri Louis Vallée ainsi qu’Yves Pallies.

Sociétaire des Artistes français depuis 1898, Georges Capgras était également en 1928 membre du comité directeur de la Société des peintres de montagne. En tant que membre du comité de l’Association des artistes peintres, sculpteurs, architectes, graveurs et dessinateurs, c’est lui qui présente le rapport annuel lors de l’assemblée générale de cette association, en mai 1939 dans l'École des beaux-arts de Paris.

Georges Capgras meurt le 5 août 1947 à Paris (16e arr.), dans la pension de la rue Chardon-Lagache où il résidait. Il était âgé de 81 ans et père de deux enfants.

Le peintre a été décoré des Palmes académiques comme officier d'académie en janvier 1905 puis comme officier de l’instruction publique en janvier 1909, en tant qu’artiste peintre. Il est fait chevalier du Mérite agricole en septembre 1913 pour sa contribution en tant que dessinateur du Crédit foncier de France. En avril 1925, il devient chevalier de la Légion d’honneur. Son nom est inscrit, sous la forme Géo Capgras, sur la liste des bienfaiteurs de la ville de Saint-Maur, figurant sur une plaque installée dans la mairie.

Georges Gonzalès lui rend hommage en novembre 1947 dans le bulletin de l’Union spirite de France, Survie. Dans le même numéro, le président de l’union, André Dumas, consacre un article intitulé « Géo Capgras se manifeste » au sujet d’une « apparition » qui serait survenue à Paris et qui est racontée par Mlle Leguet, adhérente à l’association.

Plusieurs expositions ont présenté des tableaux de Géo Capgras au 21e siècle. C’est la cas en particulier du musée de Saint-Maur (Val-de-Marne) qui a présenté, en février 2014 une maquette du triptyque Terre d’Alsace, qui est conservé au musée du Luxembourg à Paris, dans la collection du Sénat. Une conférence de Carine Delaporte, attachée de conservation et médiatrice du musée, a été consacrée au peintre, dont une quarantaine d’œuvres sont conservées dans la commune. Dans la même ville, une exposition lors de l’hiver, 2019-2020. Montre La nature sous la neige. « Art/Enfer. Créer à Verdun, 1914-1918 », organisée en novembre et décembre 2022 au Mémorial de Verdun-Champ de bataille à Fleury-devant-Douaumont (Meuse), a affiché L’Enlisé (1917).

Les œuvres de Géo Capgras figurent dans les collections de musées internationaux, notamment en Argentine, à Buenos-Aires ; au Brésil, à la Pinacothèque de São Paulo ; au Danemark, au musée de Copenhague et aux États-Unis, au musée des beaux-arts de San-Francisco (Californie). En France, ses toiles sont conservées par les musées des beaux-arts de Calais (Pas-de-Calais) et de Dijon (Côte-d'Or) et par le musée de Saint-Maur-des-Fossés (Val-de-Marne) ; à Paris, on garde sa production au Musée du Luxembourg au Musée de l'armée aux Invalides et à l’hôtel de ville.

Fin

 

Portrait publié dans la Revue moderne 15/09/1922

Portrait de la Revue moderne retouché par intelligence artificielle (ChatGPT) – la coupe de cheveux paraît très irréaliste

 

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10 novembre 2025 1 10 /11 /novembre /2025 00:01

Début de la biographie de Georges Capgras

Georges Capgras naît le 16 mai 1866 à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Il est le fils de Julienne Germaine Malice et d’Antoine Capgras, le quatrième et dernier de leurs enfants. Sa mère est la fille d’un entrepreneur carrier et propriétaire foncier de Saint-Maur-des-Fossés, commune voisine de Joinville. Son père est boulanger dans le village de Poigny (Seine-et-Marne), où la famille vit dans le lieudit Les Forges ; il est originaire de cultivateurs de Caumont (Tarn-et-Garonne).

Les parents vivent ensuite séparés et, en 1880, lors du décès du fils aîné, le domicile du père est déclaré comme « ignoré » dans l’état-civil. Georges vit alors avec sa mère et ses deux sœurs à Pantin (Seine, act. Seine-Saint-Denis), route de Flandres puis dans le 9e arrondissement de Paris rue Rodier et ensuite, dans le 18e, rue Ordener. Il fait un service militaire, sans doute de 1887 à 1889.

Lorsqu’il se marie en février 1893 à Paris (9e arr.), Georges Capgras est employé au Crédit foncier de France, une fonction qu’il continuera au moins jusqu’en 1913, alors comme dessinateur industriel. Il épouse une brésilienne, Joséphine de Barros, native de Bahia, fille d’un importateur de machines pour la navigation fluviale. Ils vivent cité Gaillard (act. rue Paul Escudier).

Parallèlement à ses activités administratives, Georges Capgras suit une formation en peinture à l'école des Beaux-arts de Paris. Il a pour professeurs le peintre réaliste et académique William Bouguereau (1825-1905) ; Georges Callot (1857-1903), spécialiste de tableaux de nus et également décorateur ; Émile-Charles Dameron (1848-1908), artiste vagabond inspiré par la Bretagne ; Charles Hermann-Léon (1838-1907), auteur de d’œuvres animalières. Il fréquente également l'Académie d’Auguste Joseph Delécluse (1855-1928) et se rapproche de Gustave Moreau (1826-1898), représentant du courant symboliste, imprégné de mysticisme. Fin 1896, il fait partie des illustrateurs de La Revue de France, lancée par Georges Rocher et qui cesse de paraître trois ans plus tard.

À partir de 1897, Georges Capgras séjourne au Brésil. Il passe probablement par la Guyane. Sa première exposition connue a lieu à Sao-Paulo en 1898. Il rentre ensuite à Paris, adhère à la Société des artistes français et commence en 1899 à participer au Salon des artistes français, où il sera présent chaque année jusqu’à la fin de sa vie.

Il représente principalement des animaux, notamment des taureaux, dans des paysages du Brésil, de Guyane, de Belgique, de Hollande ou de Bretagne qui lui valent un certain succès et la réputation de peintre animalier. Il adopte la signature de « Géo Capgras ». En juillet 1902, il obtient le divorce. Il restera cependant lié à son fils, Jean Rodolphe Raoul Capgras, né en avril 1895 et qui, en 1914, réside à Lutz (Floride, États-Unis) où il ‘est horticulteur.

Pour sa part Georges Capgras vit dans le 18e arrondissement de Paris, rue Damrémont, rue Paul-Féval, rue Caulaincourt et rue de l'Orient. Il se remarie en octobre 1909 à Bois-le-Roi (Seine-et-Marne) avec Augustine Louise Brulin, employée de commerce.

Outre la peinture, Georges Capgras assure la décoration de la chambre à coucher royale, les plafonds et des panneaux du palais d'Abedin, au Caire, pour le roi d’Égypte Fouad 1er ; il a été reconstruit et agrandi par l'architecte Antonio Lasciac entre 1909 et 1911. Il aménage également le salon de musique du paquebot Gallia, lancé le 26 mars 1913, appartenant à la Compagnie de Navigation Sud-Atlantique, qui desservait l’Amérique latine depuis Bordeaux ; réquisitionné pour transporter des troupes pendant la première guerre mondiale, il fut torpillé par un sous-marin allemand et coulé en octobre 1916 en Méditerranée, entre l’Italie et la Tunisie, faisant environ 1 740 victimes.

Au cours de la première guerre mondiale, le couple s’installe à Fontenay-sous-Bois, rue des Charmes et dans la commune voisine de Saint-Mandé, rue de la Fraternité (Seine, act. Val-de-Marne). S’il n’est pas mobilisé pour porter les armes, du fait de son âge, Georges Capgras est « envoyé au front en tant que peintre officiel aux armées » selon l’écrivaine et chercheuse Jacqueline Chénieux-Gendron. Il est un des rares à s’intéresser aux tranchées, notamment avec L'Enlisé, toile immense, qui décrit l’agonie d’un homme se noyant dans la boue. Il réalise également Verdun, terre sainte, les Muletiers allant vers Douaumont ou une étude de cheval mort. Selon Clément Morro, critique d’art de la Revue moderne, « il remarque dans un entonnoir, un crâne humain ; dans chaque orbite une fleur a poussé ! »

À suivre

Pinacoteca de São Paulo, Géo Capgras, Arredores de São Paulo, 1898

 

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18 octobre 2025 6 18 /10 /octobre /2025 00:01

Antoine Joseph Kropper naît le 9 février 1735 à Paris. Il est le fils de Dorothée Colson (1700-1779) et de son époux Joseph Kropper (1683-1751). Sa mère est la fille d'un maître serrurier parisien. Son père est originaire d’Alsace et était à Strasbourg, le premier commis de Jean Adam Acker, plus célèbre poêlier strasbourgeois. Il s’installe à Versailles en 1715 puis constitue, en octobre la même année, une société avec Gabriel Hamon, faïencier au faubourg Saint-Antoine à Paris, pour faire le commerce de « poêles d'Allemagne, soit de terre ou faïence ». Ils installent leur manufacture rue de Charonne. L’introduction d’appareils de chauffage en faïence, moins coûteux, moins dangereux et beaucoup plus esthétiques, va avoir un grand succès. Son mariage lui apporta aussi des avantages, car les poêles nécessitaient des pèces relevant de la serrurerie. Il se voit décerner le titre de marchand poêlier ordinaire du roi.

À la mort de son père, en avril 1751, sa veuve poursuit la direction de l’entreprise, alors installée rue de la Roquette, comme marchande poêlière du roi. Elle transmet la fonction à son fils dans son contrat de mariage en février 1754. Antoine Joseph Kropper, reconnu lui aussi comme marchand poêlier ordinaire du roi, épouse Suzanne Lebrun, fille d’un marchand de laine. Elle meurt en février 1761, après avoir mis au monde deux enfants, dont un mort en bas âge. Antoine Joseph Kropper se remarie en novembre 1763 à Paris avec Marguerite Françoise Villaume, native de Raon-l’Étape (act. Vosges).

C’est la manufacture Kropper qui installe, en 1758, des poêles dans le château ce Versailles. Selon Régine de Plinval de Guillebon, historienne spécialiste de la céramique, la maison équipa également les hôtels de la Guerre et de la Marine ainsi que les châteaux royaux de Marly, Vincennes et Paris. II avait également dans sa clientèle des grands de la Cour, tels le duc de Chevreuse, le marquis de Polignac, le marquis de Villeroy ou le duc de Bouillon.

Dans le contexte très cloisonné des corporations de métier au 18e siècle, la maison Kropper dut faire face à de nombreuses contestations judiciaires. En 1762, des poêles d'Antoine Joseph Kropper sont saisis à la demande des maîtres peintres et sculpteurs, parce qu'ils étaient ornés de sculptures. Parmi eux, il y avait notamment trois poêles destinés au Roi et un à Madame de Pompadour. Antoine Joseph cède en 1775 à Jean Charles Kropper, son frère, la tête des affaires familiales. Il est aussi maître poêlier, puis entre à l'Académie Saint-Luc en 1778, émanation de la corporation des peintres et sculpteurs, ce qui lui permet d’orner les poêles de sculptures en toute impunité.

Parmi les innovations des Kropper, outre les décors, figure la possibilité de faire cuire des aliments directement dans les poêles grâce à de petits fours aménagés.

Ayant manifestement acquis une belle fortune, Antoine Joseph Kropper abandonne aussi à son frère le domicile de la rue de la Roquette à Paris, et s’installe en famille dans le château de Polangis. Situé sur la rive gauche de la Marne, relevant de la paroisse Saint-Nicolas et de la baronnie de Saint-Maur-des-Fossés, le domaine avait été aménagé et agrandi au milieu du 18e siècle par les Le Foullon, une famille de maîtres maçons et architectes. Il a été intégré, en 1790, dans la commune de La Branche-du-Pont-de-Saint-Maur (renommée en 1831 Joinville-le-Pont) ; une partie des terres relèvent aujourd’hui aussi de la commune voisine de Champigny-sur-Marne (act. Val-de-Marne).

Agrandi dans le style Louis XV, le manoir de Polangis dispose de 32 fenêtres en façade et est agrémenté d’un fronton triangulaire. Le domaine inclut plusieurs bâtiments annexe dont une chapelle et une ferme. Les terres ont une superficie d’environ 78 hectares.

Vendu vers 1761 à Jacques François Pascal Allain de la Bertinière, ancien capitaine et alors avocat, le domaine de Polangis est en location. Cependant, en 1791, si la famille Allain conserve la nue-propriété, l’usufruit est vendu à Kropper et à son épouse Marguerite Françoise. Il avait auparavant, en 1787, sous-loué la ferme à Joseph Brucelle, qui y installe une auberge. C’est dans cette auberge que séjourne discrètement, du 21 au 28 février 1789, Honoré-Gabriel Riqueti, comte de Mirabeau (1749-1791), qui vient de Provence et y retourne aussitôt.

Si Antoine Joseph Kropper ne s’occupe plus d’industrie, il garde une activité économique, par exemple en vendant en août 1775, une maison avec jardin qu’il possédait dans la village de Charonne, à François Gabriel Perrier, géographe du roi.

Pendant la révolution française, Antoine Joseph Kropper ne semble pas avoir de problème particulier. Il dispose d’une Carte de sureté, délivrée en avril 1793, qui indique qu’il a quitté Polangis et est revenu dans son ancienne demeure de la rue de la Roquette.

Cependant, son épouse Marguerite-Françoise Kropper est entendue comme témoin dans le cadre de l’instruction du procès des hébertistes, ou « exagérés », au début de l’année 1794, par le juge Charles Harny. Il en est de même de sa sœur, Marie Anne Dorothée Kropper, mariée à Nicolas Héricourt, autre poêlier renommé. Toutes deux assurent ne pas avoir d’informations au sujet du complot allégué.

Antoine Joseph Kropper retourne à Polangis, où il meurt le 8 messidor an 2 (26 juin 1794). L’état-civil de La Branche-du-Pont-de-Saint-Maur, commune dont dépendait le château, signale qu’il était domicilié rue du Faubourg-Saint-Antoine. Il était âgé de 59 ans et père de trois enfants, dont deux filles vivantes. Son frère et un neveu poursuivent l’activité de poêlerie.

Projet Kropper pour l’intendance de Besançon, Poêle Kropper de l’hôtel de La Lande, musée Adrien Dubouché, Limoges

 

 

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26 mai 2025 1 26 /05 /mai /2025 22:39

Louise Éléonore Delalonde naît le 7 novembre 1854 à Cherbourg (act. Cherbourg-Octeville, Manche). Elle est la fille de fille Sophie Louise Le Mignon et de son époux Napoléon Delalonde. Son père est vérificateur des douanes mais également poète. Il a été membre de la société académique des sciences, belles-lettres et arts de Cherbourg.

Ses deux parents sont décédés dans sa jeunesse : lorsqu’elle a 9 ans pour sa mère en 1863 et 14 ans pour son père. Louise Delalonde est alors confiée au docteur Frédéric Auguste Guiffart, médecin de la marine et directeur du service de santé de l’hôpital civil de Cherbourg, chevalier de la Légion d’honneur. Il l’envoie en région parisienne. En 1871, elle reçoit en tant qu’orpheline et fille d’un fonctionnaire, une pension civile de 1 140 francs.

Devenue professeure de lettres, elle épouse en octobre 1875 à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), où elle réside, le docteur Henri Jean Ferdinand Rousseau, professeur de sciences dans l’institution du Parangon. C’est un établissement laïque privé d’enseignement réputé de Joinville qu’exploite son père, Ferdinand Rousseau, à l’époque maire adjoint et l’année suivante maire de la commune.

À côté de son activité médicale et scientifique, Henri Rousseau s’implique dans la gestion du Parangon, derrière son demi-frère Théodore Quirot et son frère aîné Jules Rousseau. Il en prend seul la direction en 1897, après la mort de son père et de ses deux frères. Avec le concours actif de son épouse, il transforme le Parangon en une « école coloniale », destinée à former de manière pratique les jeunes Français ou originaires d’Indochine, d’Afrique, de Madagascar comme des Antilles à l’exploitation agricole de ces territoires.

Charles Pâquet, petit-fils du maire de Joinville, Eugène Voisin, qui sera président de la Société nationale des architectes de France, résistant et maire-adjoint de Vincennes, est élève au Parangon. Il témoigne en 1969 sur la vie dans l’établissement Rousseau : En 1897, « Le docteur Henri Rousseau en fut le directeur et vint également y habiter avec sa femme née Louise Delalonde, dont les cheveux étaient d'un beau blond vénitien et cela surprenait d'autant plus qu'elle était très brune de naissance et qu'alors les femmes n'avaient pas l'habitude comme à l'heure actuelle de changer, pour certaines, la couleur de leurs cheveux presque chaque semaine. (…) Certains élèves, les pensionnaires seulement, pris parmi les plus méritants, étaient une fois par semaine conviés à ce que l'on appelait « le salon », où toute la famille Rousseau était réunie, ainsi que certains professeurs dont M. Ferroni qui enseignait le violon et qui en charmait l'assistance ; des vers y étaient également récités, souvent par Mme Henri Rousseau qui s'intéressait aussi au théâtre. Il était alors servi ce qu'on appelait des rafraîchissements consistant en sirops de grenadine, citron, etc. »

Louise Rousseau s’intéresse à la botanique et notamment à la sériciculture (culture de la soie). Elle installe une magnanerie (élevage de ver à soie) dans le parc.

Elle promeut ses conceptions pédagogiques et intervient lors du Congrès colonial de Marseille, en 1904, pour défendre « l’importance du rôle colonial de la femme ». Elle regrette que « l’enseignement que l’éducation féminine en France a été jusqu’ici franchement hostile à la colonisation. »

Louise Rousseau fut un auteur prolifique. Elle était une des initiatrices de ce qu’on appelait, au tournant du vingtième siècle, le « roman pour jeunes filles », qui connaît encore quelques succès sous d’autres noms (roman de gare).

Parmi ses œuvres, on citera Amoureuses et jalouses (1894), Le Chagrin de Clélia (1894) ou Le Sacrifice de l’amour (1901). Louise Rousseau publie aussi des textes édifiants, des poèmes et du théâtre. Elle connaît un certain succès avec Histoire de chevalerie (années 1890). Elle utilise parfois le pseudonyme de Ludovic Delys.

Avec la Première guerre mondiale, l’école coloniale cesse de fonctionner. Un hôpital américain s’y installera en fin de conflit. Mais, dès 1914, Louise Rousseau anime une œuvre de patronage et d'hospitalisation des enfants dont le but est « de recueillir et de soigner les pauvres petits dont le père, veuf ou divorcé, est appelé sous les drapeaux » comme le rapporte le quotidien socialiste L'Humanité.

Louise Rousseau est morte le 16 novembre 1924 à Joinville-le-Pont. Elle était âgée de 70 ans et mère de deux enfants. Décorée des Palmes académiques comme femme de lettres, en tant qu’officier d'académie en février 1899 puis comme officier de l’instruction publique en janvier 1907, elle est faite chevalière du mérite agricole en février 1914 « pour ses travaux très importants et publications nombreuses sur la sériciculture en France et aux colonies ». Une voie de la commune s’appelle « villa Rousseau », mais il n’est pas clair qu’elle ait été dénommée du fait de sa famille ; par contre, une autre voie porte le nom d’impasse Jules-Rousseau, d’après son beau-frère.

Louise Rousseau

 

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1 février 2025 6 01 /02 /février /2025 00:01

La poète et résistante Marietta Martin a vu son nom donné en octobre 2024 à une rue de la ville d’Arras, sa commune natale. L'inauguration de la rue Marietta Martin est a priori prévue aux alentours du 8 mars 2025. C’est l’occasion de reprendre ici sa biographie.

 

Marietta Martin, née le 4 octobre 1902 à Arras (Pas-de-Calais), est la fille d’Arthur Martin, rédacteur en chef du quotidien d’Arras, le Courrier du Pas-de-Calais, et d’Henriette Martin-Le Dieu. Orpheline de père à l'âge de quatre ans, Marietta vit avec sa mère, professeur de piano à Arras et sa sœur, Lucie. Lors de l'offensive allemande dans le nord de la France en août 1914, sa mère et sa sœur se réfugient à Paris et s'installent dans le 16ème arrondissement, où Marietta les rejoindra après un séjour en Angleterre.

Elle fait ses études secondaires au Lycée Molière, où travaille sa mère, s'inscrit comme étudiante à la Faculté de médecine puis change de voie et prépare une licence de lettres et un doctorat. Elle parle couramment l’anglais, l’allemand, l’espagnol, l’italien, le polonais et le danois. Musicienne, elle joue du piano et du violon. Marietta voyage dans une bonne partie de l’Europe, malgré une santé très délicate, et fait notamment de longs séjours en Pologne, où vivent sa sœur et son beau-frère, Adam Rosé, diplomate et ministre. Ses voyages lui inspirent la rédaction d’un essai sur Marie-Thérèse Rodet Geoffrin, visiteuse française du roi de Pologne Stanislas Auguste à Varsovie en 1766.

En 1925, elle présente sa thèse de doctorat en littérature comparée sur la vie et l'œuvre d'un médecin allemand qui a eu Stendhal pour patient, le docteur Koreff, qu’elle qualifie d’aventurier intellectuel. Elle poursuit ses travaux par un mémoire sur le Saint-Simonisme qui fait l’objet de deux articles dans le Journal des débats en 1926.

Malade des poumons, Marietta Martin passe plusieurs années en Suisse, dans un sanatorium de Leysin (canton de Vaud) entre 1927 et 1931. Elle y écrit de nombreuses lettres, parfois poignantes, mais toujours gaies et optimistes. Dans un de ces courriers, elle résume sa pensée : « S’il faut lancer un message par le monde, il ne peut pas partir porteur de douleur pour augmenter cette douleur, il serait un faux message. Si c’est un message pour la terre, ce doit être un message de corps et d’esprit ; vivre comme il faut, selon toutes les règles, l’enseignement définitif est : soyez joyeux. Il ne faut pas rester dans le bizarre chemin qui y conduit. »

Elle publie en 1933 son premier ouvrage littéraire, Histoires du paradis. Comme l’ensemble de son œuvre, elle relève d’un style mystique. Marquée par sa culture chrétienne et son affirmation de l’amour comme sens de la mort, elle assure écrire du point de vue de Dieu. Elle écrit « J'ai du respect pour le Dieu qu'ils cachent en eux » et se décrit « J'ai tellement de soleil dans mon cœur que tout ce que je regarde en est illuminé. »

Bien que n’ayant pas d’engagement politique connu, elle accepte de travailler en 1936 pour rédiger les documents de propagande de la campagne électorale de Maurice Tailliandier (1873-1951), député sortant de la 2ème circonscription du Pas-de-Calais (Arras), membre du groupe Républicain et social (droite modérée). Il sera battu par un partisan du Front populaire.

En 1938, Marietta Martin rédige en un recueil des poèmes qu’elle signe du pseudonyme de François Captif. Le livre, intitulé, Adieu temps, paraîtra en 1947. En 1939, elle rassemble la plupart de son œuvre, sauf les écrits universitaires, sous le titre d’Enfance délivrée.

L’expérience mystique de la poète Marietta Martin est marquée par une prescience de la mort et de l’engagement patriotique. Dans un cahier de 1936, elle écrit : « Nuit ! Nuit ! Non, pour toi, Nuit, il faut partir. Le soldat sait qu’il part demain. Il sait où il part ; il sait qu’il veut partir pour le lieu dont il ne sait pas le nom. Les convois de troupes vers le lieu de l’action montent en ligne pour une destination inconnue. Il n’en sait qu’une et il l’aime, il l’aime tellement, enfin ! »

Marietta Martin entre peu après le début de la guerre dans le Réseau Hector, un important groupe de combat et de renseignement de la zone nord de la France, animé par le colonel Alfred Heurteaux, officier du 2ème Bureau de l'Armée d'armistice.

Elle participe, à la demande du diplomate Paul Petit, au réseau « La France Continue », mouvement de résistance créé notamment par Henri de Montfort, journaliste et secrétaire de l’Institut de France, et Annie de Montfort. Cette dernière fut étudiante aux Langues orientales avec Marietta. On comptait également parmi les collaborateurs l’historien Émile Coornaert, Suzanne Feingold ainsi que le professeur du lycée Buffon Raymond Burgard. La chambre de Marietta, rue de l'Assomption à Paris (18e), devient la salle de rédaction du journal publié par le réseau.

La France Continue, un des premiers véritables journaux clandestins, connaîtra 12 numéros entre 1941 et 1942. Marietta Martin écrit pour le journal et assure, à bicyclette, la diffusion de numéros dans Paris. Elle en expédie également plusieurs milliers d’exemplaires par la poste.

A la suite d'une dénonciation, une perquisition a lieu dans sa chambre au cours de la nuit du 7 au 8 février 1942. Un ouvrage est saisi, intitulé « Avec Charles de Gaulle de Gaulle, avec l’Angleterre ». Il s’agirait selon le jugement rendu en 1943 d’un « écrit politique assez long, rédigé par elle et plusieurs fois remanié » ; il aurait été « mis en lieu sûr » par les autorités allemandes et n’a pas été retrouvé depuis.

Marietta Martin est inculpée de « rédaction et diffusion de publications clandestines » et accusée d'être une militante du mouvement Libération nationale. Incarcérée à la prison de la Santé, elle est déportée le 16 mars 1942 en Allemagne dans huit établissements pénitentiaires successifs. Elle est condamnée à mort le 16 octobre 1943 par le « tribunal populaire » (Volksgerichtshof) de Sarrebruck pour « complicité avec l'ennemi » en même temps que Paul Petit et Raymond Burgard.

Emprisonnée en attente de son exécution à la prison de Cologne elle est soignée par Gilberte Bonneau du Martray, dans la cellule voisine de celles d’Elizabeth Dussauze, Jane Sivadon, Hélène Vautrin et Odile Kienlen. Elle est transférée suite aux bombardements, sur une civière en raison de sa faiblesse, à Francfort-sur-le-Main. Elle y décède le 11 novembre 1944. En 1949, son corps est rapatrié à Paris. Elle est inhumée avec les honneurs militaires au cimetière de Clichy-sous-Bois, car elle a été nommée, à titre posthume, sous-lieutenant, au titre des Forces françaises combattantes.

Marietta a été décorée de la Légion d'honneur et de la Croix de guerre avec palmes. Elle a fait l’objet d’une citation à l'ordre du corps d'armée. La poète fait partie des 157 écrivains morts pour la France dont le nom figure au Panthéon de Paris. Une plaque est déposée sur son ancien domicile rue de l'Assomption à Paris (16e arr.) et une rue du même arrondissement porte le nom de « Marietta Martin ».

Une école est baptisée de son nom dans sa ville d’origine, Arras et une plaque a été déposée sur sa maison natale. En octobre 2024, une rue a été baptisée à son nom dans cette commune.

Une allée de la Forêt des écrivains combattants a été baptisée en 1961 du nom de Marietta Martin dans la forêt des écrivains combattants au sein du massif montagneux du Caroux-Espinouse, situé sur le territoire des communes de Combes (Hérault).

Voir aussi :

Portrait de Marietta Martin (arch. fam.)

 

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14 décembre 2024 6 14 /12 /décembre /2024 00:01

Simone Marie Françoise Loth naît le 16 janvier 1922 à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Elle est la fille de Mélanie Marie Louise Lorin et de son époux Auguste Charles Loth, 25 ans, fourreur.

Son père, fourreur, est d’origine alsacienne ; il a été 14 mois prisonnier de guerre en Allemagne en 1917-1918. Sa mère, native de Joinville, est elle-même fille d’un candidat conservateur, sur la liste du Bloc indépendant, aux élections municipales de Joinville en novembre 1919. Ils vivent dans le quartier de Palissy, avenue des Platanes.

En juillet 1946 à Joinville, Simone Loth épouse Jean Louis Albert Pariselle, sculpteur.

Institutrice, Simone Pariselle deviendra directrice de l’école primaire publique de Polangis, qui accueille les enfants des deux quartiers de la rive gauche de la Marne, Palissy et Polangis. Ce dernier quartier étant à cheval sur les communes de Joinville et Champigny, des élèves de cette dernière ville fréquentent également l’école.

Depuis les années 1970 jusqu’aux années 1990, Simone et Jean Louis Pariselle vont être des militants du Parti socialiste. Ils aménagent un bureau dans leur domicile de l’avenue des Platanes, qui sert de bureau à la commission administrative de la section locale.

Simone est membre de cette commission, où elle assume la fonction de trésorière. Jean Louis est élu conseiller municipal de la commune en 1978 et désigné comme adjoint au maire, le communiste Guy Gibout, en charge des affaires scolaires. Il assume cette fonction jusqu’en 1983.

À la fin des années 1990, le couple Pariselle s’installe à Champs-sur-Yonne (Yonne), allée des Chaumes.

Après la mort de son mari, en octobre 2008, Simone va se consacrer à la sauvegarde de l’œuvre de Jean Louis Pariselle. Elle collabore avec Marianne Guyot, qui publie Vie et œuvres de Jean-Louis Pariselle (Vaux éd., 2011).

En janvier 2012, le conseil municipal de la commune accepte le legs des sculptures fait par Simone et « s’engage à ce qu’il reste la propriété inaliénable de la commune ». Une exposition est présentée lors des Journées du Patrimoine 2022 à Champs-sur-Yonne.

Elle assure la transmission de ses outils à l’école Boulle (Paris, 12e arr.), qu’il avait fréquentée. Une exposition est organisée en octobre 2013 dans les locaux de l’établissement ; bien qu’âgée de 91 ans, Simone Pariselle est présente au vernissage.

Simone Pariselle meurt quelques jours plus tard, le 24 octobre 2013 à Champs-sur-Yonne. Elle est inhumée à Joinville-le-Pont, auprès de ses parents et de son époux. Elle était mère d’un fils.

Voir aussi Jean-Louis Pariselle, sculpteur et grand cœur

Simone Pariselle (arch. BW)

 

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26 novembre 2024 2 26 /11 /novembre /2024 00:01

Suite de la biographie de Henry Coëylas

La toile donnée par Henry Coëylas au Salon de Paris de mai 1890 L’Atelier de maroquiniers de la rue Croulebarbe, est considéré dans La Nation par Alexandre Duchemin comme la meilleure composition de la salle : « Jamais l’artiste n’a été mieux inspiré et jamais il n’a traité un sujet avec autant de maestria et de sûreté ». Selon Olivier Merson (1822-1902) peintre et critique d'art, qui écrit dans Le Monde illustré, « Son tableau est tout bonnement très vrai. Une odeur sui generis vous prend au nez quand on le regarde ; vous sentez que vous êtes bien avec des gens qui lavent, brossent et ratissent des peaux ». L’œuvre est achetée par la Ville de Paris.

Continuant dans la représentation du travail, Coëylas expédie au Salon des Champs-Élysées en mars 1891 Les Trieuses de la cartonnerie Lourdelet à Aubervilliers, que le quotidien Le Public assure être « Un très beau tableau plein de vie et de vérité. »

En janvier 1892, Coëylas participe au concours pour la décoration de la salle à manger de l’Hôtel de Ville, avec un grand plafond qui représente la synthèse des Halles.

S’intéressant à l’histoire, Coëylas remet au Salon des Champs Élysées d’avril 1894 Marie-Stuart et François II qui est décrit ainsi dans Le Public : « La gracieuse et malheureuse reine était à l’époque choisie par le peintre dans tout l’éclat de sa beauté (1550). Son pauvre petit mari de seize ans, le roi François II, tout malingre, s’appuie contre elle d’un mouvement câlin et la contemple avec adoration. »

Une immense toile, représentant Une Séance du Conseil municipal de Paris, est réalisée en 1897. Il fait figurer les 80 conseillers, deux préfets et une soixantaine de personnes de l’administration ou de journalistes. Son travail est jugé assez sévèrement dans la presse parisienne. Pour L’Éclair, M. Coeylas « a fait un gros effort, mais un effort devant lequel les passions désarmeront ». L’avocat Léon Roger-Milès (1859-1928), signataire de l’article, estime que « cela manque de gaîté : je sais bien que beaucoup de têtes d’élus manquent de caractère ; c’est là une qualité que ne peut pas donner le suffrage universel ». Assurant que la toile est « d’un intérêt relatif », il conclut, en historien, en pensant à ce que pourront dire les futurs spectateurs : « Était-ce donc possible que ces gens-là fussent quelque chose, puisque leur souvenir n'est plus rien aujourd’hui ! »

Dans L’Événement, le romancier Léo Claretie (1862-1924) est encore plus sévère : « M. Coeylas a condamné une grande toile qui ne lui avait rien fait à supporter les figures de tous les conseillers municipaux en séance pour la discussion du budget de 1897. Voilà-t-il pas un événement à fixer sur le lin ? L’effet est piètre. C'est tout noir, vert et rouge, noir pour les redingotes, vert pour les banquettes, et rouge par les murs. »

Une des toiles les plus reproduites de Cœylas est celle qu’il montra au Salon de 1903, Au Muséum, Laboratoire de Taxidermie, Reconstitution du Dronte. Le dronte, ou dodo de l’île Maurice, est un animal disparu, dont la reproduction par le taxidermiste parisien est devenue célèbre.

On retrouve des travaux de Coeylas lors des expositions de la Société des artistes français, dont il était membre : en avril 1904, Le Gave, puis en 1906, Le Coin d'église. Il cesse de figurer sur les annuaires avec mention de son activité de peintre en 1913. Il réside alors rue de Navarre, dans le 5e arrondissement.

Pendant la première guerre mondiale, en juin 1916, Henry Coeylas répond à une enquête, lancée par la revue Les Annales politiques et littéraires sur le mot « poilu » et son remplacement éventuel par un autre mot exprimant la même idée. Il propose le mot diamant : « C'est peut-être moins sonore, mais plus riche de vérité. Diamant en grec, signifie indomptable : l'héroïsme de nos défenseurs n'est-il pas aussi pur, aussi brillant, aussi limpide, aussi résistant que le diamant ? (…) Les trois règnes de la nature auraient ainsi trois vocables dans l'armée, les représentant : Le règne animal : Marsouin, le règne végétal : Bleuet, le règne minéral : Diamant. »

Après-guerre, Henry et Jeanne Coëylas s’installent à Draveil (Seine-et-Oise, act. Essonne), à proximité de leur fils cadet.

L’aîné, Auguste, né en novembre 1875, docteur en médecine et dentiste, meurt pendant la première guerre mondiale en novembre 1914, mais sans doute pas du fait du conflit car il n’était pas mobilisé.

Le second, René, né en juin 1879 fut également artiste, en tant que dessinateur et sculpteur. Il devint fonctionnaire, notamment au ministère des finances et dans des instances publiques et ministérielles. Il fut un militant socialiste très actif au sein de la SFIO à Paris, en Seine-et-Oise (et notamment à Draveil) ainsi que dans le Var. Résistant à l’occupation allemande pendant la deuxième guerre mondiale, René Coëylas fit fonction de maire de Saint-Raphaël à la Libération (1944-1945) puis fut conseiller municipal de cette ville (1947-1959) où il mourut en août 1961.

Henry Coëylas meurt le 12 avril 1923 à Draveil, à son domicile du boulevard Beauséjour, à l’âge de 78 ans. Il est incinéré le 16 au cimetière du Père-Lachaise à Paris (20e arr.) et inhumé dans la tombe familiale, dans la 60e division. Il était décoré des Palmes académiques en tant qu’officier d'académie depuis janvier 1904.

En 2024, le Musée de Bruges (Belgique) présente une œuvre de Henry Coeylas dans le cadre de son exposition Rebel Garden. Son travail est également rappelé en, mars 2024, lors d’une nouvelle présentation du dodo de l’île Maurice au Muséum national d’histoire naturelle de Paris.

Fin

Henry Coëylas, L’Atelier de taxidermie

 

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24 novembre 2024 7 24 /11 /novembre /2024 00:01

Début de la biographie de Henry Coëylas

Marie Henry Coëylas naît le 7 juin 1844 à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). il est le fils de Louise Pauline Aubusson et de son époux Pierre Auguste Maximilien Coëylas Soupessendet, buraliste receveur des contributions indirectes. Par un jugement de janvier 1875, sa mère (avec ses frères et neveux) obtient de reprendre le nom patronymique « Aubusson de Cavarlay », que son propre père avait abandonné sous la Révolution, pendant la Terreur. L’acte de naissance de Henry Coëylas est alors rectifié.

Selon l’homme de lettres d'origine polonaise Apollon Mlochowski de Belina, qui dresse en juin 1882 un portrait de lui dans le quotidien La Presse, « Coeylas a commencé ses études artistiques en 1865, dans l'Académie artistique de la rue de l'École de Médecine. L'année suivante il entra à l'École nationale des beaux-arts, dans l'atelier de Pils, où il faisait déjà des progrès rapides quand des raisons particulières l'obligèrent à interrompre ses études. »

Ses premiers maîtres sont Isidore Pils, peintre militaire et orientaliste (1815-1875) et Gabriel Ferrier (1847-1914) également orientaliste.

Devenu employé de commerce, Henry Coëylas fait en janvier 1875 à Paris (1er arr.) ce que de Belina qualifie comme « un assez brillant mariage » avec Hélène Jeanne Jolly, fille de teinturiers de la rue de Rivoli. Il établit lui-même une teinturerie spéciale de noir rue du Jour (1er arr.) qu’il exploite en 1877 et jusqu’en 1884.

Parallèlement, Henry Coëylas a repris ses travaux artistiques dans l'atelier de Gustave Boulanger (1824-1888, orientaliste) et Jules Lefebvre (1834-1912, représentant de l'art académique). À partir de 1877, sans abandonner encore son métier de teinturier, il se présente comme artiste peintre.

La première fois qu’il expose, au Salon de Paris, en mai 1879, il présente un Portrait. C’est l’année suivante, en 1880, qu’il est remarqué par la critique, avec Cyparisse, pleurant le cerf qu’il vient de tuer. Pour de Belina, c’est « une toile véritablement remarquable ». Le poète Émile Blémont (1839-1927) lui envoie de « sympathiques encouragements » dans Le Réveil social trouvant le tableau « un peu grêle et un peu pâteux, mais d’un bon travail et d’une très sincère impression (…) avec une rare intuition synthétique. »

Le Pardon ! qu’il présente au Salon de Versailles en juillet 1882 est, pour le critique littéraire Jules de Marthold (1847-1927) « une scène sentimentale de la vie moderne avec un tact exquis et une couleur absolument juste » avec lequel il « est pardieu bien sûr d’avoir pour lui tous les cœurs et aussi les amateurs ». La toile lui vaut une médaille de vermeil.

Il reçoit une médaille d’argent au Salon d’Amiens (Somme) en juin 1883 puis la même année en septembre une médaille d’or à l’Exposition de Rochefort (Charente-Inférieure, act. Charente-Maritime) et, le même mois, de nouveau une médaille de vermeil à Versailles.

La Société des artistes indépendants présente La Jeune fille au papillon d’Henry Coëylas en 1884 à côté d’Odilon Redon, Georges Seurat ou Paul Signac. Il accroche au Salon de Paris en juin la même année L’Atelier de teinture, jugé comme « une très bonne étude » dans La Cravache parisienne qui voit « L’opposition de lumière ou plutôt la dissemblance de jour des deux salles de la teinturerie, celle où se passe la scène et celle de droite, éclairée d’en haut par un vitrail, est d’une justesse absolue ». Il reçoit une médaille de bronze à l’Exposition de Dijon (Côte-d'Or) en juillet 1887.

Si aucune activité politique significative de Coëylas n’est connue, c’est probablement lui (ou son père) qui participe en octobre 1887 à un souscription républicaine pour les élections législatives lancée notamment par le quotidien Le Siècle.

Lorsque, en février 1888, un incendie d'une importance considérable éclate hier dans un des pavillons des Halles Centrales de Paris, Henry Coëylas vient en voisin et réalise un croquis, qu’il remet dans la Salle des Dépêches du journal Le Figaro où il est fort remarqué.

À suivre

Henry Coëylas, portrait (arch. fam.)

 

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20 octobre 2024 7 20 /10 /octobre /2024 00:01

Baptiste Joseph Debau naît le 6 novembre 1825 à Grenoble. Il est le fils d’Anne Renouvin, d’origine normande (Manche) et de Jean Baptiste Debau, natif du Gard, sous-officier dans l’infanterie. Il utilisera la graphie « Debeau » pour son patronyme.

Engagé également dans l’armée, il sert comme musicien en 1852 au 6e régiment d'infanterie légère (6e Léger), stationné en 1852 à la caserne Ave Maria à Paris (4e arr.). Il épouse en janvier cette année-là Catherine Wéeber, brodeuse, originaire d’Alsace. Elle meurt, hospitalisée à Strasbourg en septembre 1855, mais ils étaient déjà séparés puisqu’un enfant naît de sa future seconde femme dès avril 1856. Il épouse celle-ci, Joséphine Dehon, blanchisseuse, en novembre 1856 à Saint-Denis (Seine, act. Seine-Saint-Denis).

L’infanterie légère est transformée en 1855, convertis en unités d'infanterie de ligne Toujours comme musicien, Baptiste Debeau sert au 3e RIL, en garnison à Romainville. Dix ans plus tard, il est basé à Nice (Alpes-Maritimes). Il devient sous-chef de musique, nommé en 1877 à l’École d’artillerie de Vincennes (Seine, act. Val-de-Marne).

Installé dans la commune de Joinville-le-Pont, riveraine du Bois de Vincennes, Baptiste Debeau est en 1888 le directeur de la Fanfare de Joinville, constituée dans le courant de la décennie et présidée alors par Théodore Létang (1835-1909), industriel, officier pendant la guerre de 1870 et conseiller municipal de la ville. Les Debeau vivent dans le centre-ville, rue de Paris.

Il participe en avril 1888 à l’organisation d’un bal de la fanfare au profit des pauvres. Elle compte 22 exécutants en 1893. En 1894, Debeau gère un festival-concours d'harmonie et de fanfares qui se tient en mai à Joinville. Après une grave explosion à la société métallurgique du Bi-Métal, à Joinville en février 1895, plusieurs compagnies musicales sont mobilisées pour les obsèques, dont celles de Saint-Maur-des-Fossés, Saint-Maurice et Joinville, sous la direction de Debeau.

Baptiste Debau meurt le 11 novembre 1896 à Joinville. Âgé de 71 ans, il était décoré de la Médaille militaire depuis août 1866. Ses deux fils, qui déclarent son décès à l’état-civil, ignorent le nom de sa première femme.

L’aîné, Alfred Joseph Debeau (1856-1937), sera également chef de musique, adjudant-chef au 32e régiment d'infanterie coloniale. Il s’est vu attribuer la Médaille militaire et a été fait chevalier de la Légion d’honneur.

Le cadet, Léopold Debeau (1865-1932), comptable, marié en juin 1889 à Nice avec Julie Augustine Thomas, a eu comme témoin à ses noces Joseph Pochon (1840-1908), alors député radical-socialiste, président du conseil général de l’Ain et franc-maçon.

Exercice à l’école d’artillerie de Vincennes (Arch. dép. Val-de-Marne)

 

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9 octobre 2024 3 09 /10 /octobre /2024 00:01

Suite de la biographie de Gaston Marot

Au cours des années 1870, Gaston Marot, auteur prolifique, produit des opérettes, comme Un télégramme, écrite avec Henry Buguet, sur une musique de Victor Robillard (1870) et des chansonnettes, toujours avec le même musicien. Il s’associe à Clairville pour une revue fantaisiste, Aristophane à Paris (1873). Son drame, Le Pont-Marie, est présenté à l’Alhambra national de Bruxelles en février 1874.

Gaston Marot s’associe à un autre auteur dramatique, Léon Pournin, pour reprendre en janvier 1875 le Théâtre-Cluny, boulevard Saint-Germain (Paris, 5e arr.). Le chroniqueur théâtral du quotidien Le Figaro s’interroge : « Qui peut les avoir poussés à jouer les pièces des autres lorsqu'on a déjà tant de mal à faire jour les siennes ? J'espère bien qu'ils respecteront les mœurs placides de ce théâtre, qui est presque, un théâtre de province. »

Leur première représentation est La Vie infernale, drame de Georges Richard. La gestion de l’établissement semble compliquée, puisque le théâtre est mis en vente en décembre 1875, dans une ambiance de conflit entre les deux directeurs.

Marié en juillet 1877 à Paris (19e arr.) à Sophie Eugénie Collard, fille d’un commissionnaire en vins, Gaston Marot poursuit une activité intense sur la scène parisienne. Il propose cette année-là à Bobino une revue ; l’année suivante, il offre deux opérettes, des chants patriotiques et un drame, Le Docteur Jackson, monté au Château-d’Eau.

Fin 1879 et début 1880, Gaston Marot tient une rubrique « Échos et nouvelles » des théâtres dans le quotidien Le Globe. Il collaborera aussi au Gaulois.

La décennie 1880 est sans doute la plus prolifique, avec des bouffonneries et vaudevilles, mais aussi des opéras-comiques. Le Ménétrier de Meudon, sur une partition de Germain Laurens, est programmé aux Fantaisies-Parisiennes en septembre 1880. La Cour d’amour, musique de Charles Hubans, est à l’affiche de l’Alcazar royal de Bruxelles en décembre 1882. Le Clairon, sur une musique de Georges Jacobi, est au théâtre de la Renaissance de Paris en novembre 1883.

Les affaires militaires et historiques intéressent aussi Gaston Marot, qui écrit un drame, Kléber, en 1882 et Les Français au Tonkin, en 1885. La même année, il livre Le Cardinal Dubois, La Convention nationale, et L'Ouvrier du faubourg. La Casquette au père Bugeaud, en 1886. La préparation de la pièce au théâtre du Château-d'Eau est l’objet d’un incident, qui sera traité au tribunal d’instance de Paris en mars. Gaston Marot témoigne dans le quotidien Le Matin : « J’étais dans la salle, suivant, avec anxiété mon premier acte qui n'était pas au point. J'étais fort énervé ! Tout à coup j'aperçus le sergent de pompiers qui non seulement avançait la tête sur la scène mais même entrait on scène (…) Perdant patience (…) je m'écriai Fichez donc le camp de là, pompier ! » S’estimant outragés, les pompiers portèrent plainte. Gaston Marot fut condamné à 25 francs d'amende – mais sa hiérarchie admonesta le pompier importun.

Poursuivant sa fibre biographique, Marot présente Augereau, en 1887 puis en 1889 Desaix. Les faits-divers l’inspirent également, et il a un certain succès avec Jack l'éventreur, drame qu’il cosigne avec Louis Péricaud, donné au théâtre du Château-d'Eau en août 1889.

Lors de l'assemblée générale de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques en mai 1889, Gaston Marot provoque un incident. Il considère que le contrôleur général « ne contrôle rien du tout, qu'il ne rend aucun service à la Société et que, par conséquent, ses 6,000 francs d'appointements seraient infiniment mieux employés en pensions à de vieux sociétaires ». Son intervention provoque un vrai tumulte, mais sa proposition est écartée. En mai 1892, Gaston Marot est candidat à l’élection des membres de la commission de l’association, mais il n’est pas élu.

Entre août et novembre 1889, le quotidien La France insère en feuilleton un roman, Mère et Fille, signé Gaston Marot-Belle. Il a peut-être construit ce pseudonyme en référence à sa belle-sœur, Marguerite Caillard dite Belle, épouse de son frère cadet Amédée Marot ; elle a peut-être collaboré à l’écriture.

Les année 1890 voient quelques uns des principaux succès de Gaston Marot. Il tire La Petite Mionne, du roman d'Émile Richebourg pour un drame présenté au Théâtre-historique de Paris en novembre 1890. En 1895, il donne Les Aventures de Thomas Plumepatte, au Théâtre de la République et adapte Le Fils de Lagardère, de Paul Féval. La Goualeuse, drame écrit avec Alévy en 1898 sera probablement sa pièce la plus reprise ultérieurement.

Après un bref passage au Raincy (Seine-et-Oise, act. Seine-Saint-Denis) en 1885, la famille Marot s’installe à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne) en 1886, dans le quartier de Palissy, rue de Brie (act. av. Gallieni). Le chroniqueur du quotidien Le Soir, J. des G., lui rend visite en novembre 1895, voyant en lui un « honnête fournisseur d’amusements » et le qualifie « d’excellent citoyen et bon père de famille » qui vit paisiblement à Joinville. Il chiffre sa production, qui n’est pas terminée, à 180 pièces.

Au cours des années 1900, continue dans la trame vaudevillesque avec La Fille du sergot au Château-d’Eau en février 1900. De nouveau avec Alévy, il donne Le Drame de la rue Murillo, pièce ambitieuse, en 1902 au théâtre de l'Ambigu. De retour à l’Alhambra de Bruxelles, il monte en septembre 1903 Le Tour du monde à pied. Tentant de reprendre le Gant rouge, sur une ébauche de jeunesse d’Edmond Rostand, il n’a aucun succès et la Société des auteurs intervient en juillet 1903 pour régler le conflit entre les deux écrivains.

C’est la censure officielle qui, en juin 1904, impose à Gaston Marot de faire de nombreuses modifications dans la pièce Le Rabiot, préparée pour le Théâtre-Cluny. Après un drame, Casse-museau, en 1906, la dernière pièce connue de Gaston Marot, faite en collaboration avec Victor Darlay, s’intitule Les Aventures de Gavroche. Elle est à l’affiche du Châtelet en janvier 1909.

Depuis 1904, la famille Marot a rejoint Montmorency (Seine-et-Oise, act. Val-d'Oise) et s’est installée avenue des Acacias.

Antoine Adolphe dit Gaston Marot meurt le 1er décembre 1916 à Marseille (Bouches-du-Rhône), où il séjournait rue Paradis, avec son épouse. Le Petit Marseillais publie une courte nécrologie, soulignant que « auteur dramatique et romancier, il eut des succès notoires » et annonce une messe de sortie de deuil le 14 décembre en l’église Saint-Adrien (8e arr., remplacée en 1920 par la basilique du Sacré-Cœur). La Société des auteurs et compositeurs dramatiques salue sa mémoire en mai 1917, parmi les auteurs « qui n'auront pu attendre l'heure de la victoire », comme Émile Verhaeren et Octave Mirbeau.

Les pièces de Gaston Marot continuent d’être à l’affiche des théâtres de boulevard parisiens dans les années 1920 et 1930 et même au cours de la deuxième guerre mondiale. Une partie de son œuvre est disponible, en téléchargement, sur la plateforme numérique de la Bibliothèque nationale de France, Gallica. Mort à l’âge de 79 ans, il était père de cinq enfants, dont quatre de son mariage avec Sophie Collard, parmi lesquels trois sont morts très jeunes. Il était décoré des Palmes académiques comme officier d'académie.

Fin

Les Français au Tonkin, pièce de Gaston Marot (1885)

 

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