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16 mai 2021 7 16 /05 /mai /2021 00:01

Suite de la biographie d’Honoré Jullien

L’année 1908 voit trois listes concourir aux élections municipales du mai à Joinville-le-Pont, plus un candidat indépendant. À la liste du comité radical-socialiste, menée par Eugène Voisin, s’ajoutent celle du parti socialiste SFIO et une autre d’un comité socialiste évolutionniste, qui regroupe d’anciens radicaux ou socialistes et des personnalités de tendance libérale. Les radicaux entendent mener « une gestion sage et une administration prudente des finances de la commune ». Ils veulent réaliser des économies, encourager les œuvres laïques d’instruction, d’éducation, d’assistance et de solidarité. Ils marquent également leur opposition à de nouveaux impôts, et enfin confirment leur souhait de faire un compte-rendu de mandat annuel. Tandis que la SFIO n’a pas d’élu, l’indépendant rentre au conseil en même temps qu’un des candidats évolutionnistes. Les radicaux se retrouvent à 21 sur 23 sièges. Cependant, Jullien n’est pas élu, recevant du second tour 488 voix sur 1 188 suffrages exprimés (41,1%).

Les évolutionnistes avaient mis en cause directement les candidats de la liste radicale « Si vous êtes satisfaits du gaspillage des finances municipales ; si vous approuvez les scandaleuses concessions accordées ; si vous voulez supprimer l’abus des subventions qui paient les complaisances électorales ; chassez de la mairie les mauvais administrateurs et votez pour nous ! Voter pour Vel-Durand, c’est voter pour l’incohérence ; voter pour Briolay, c’est vouloir continuer l’anarchie qui règne au conseil municipal ; voter pour Jullien et Villain, c’est voter pour la dictature. »

Selon le chroniqueur du journal radical Voix des communes, Louis Rey, Jullien « avait été battu par une coalition de rancunes et d’appétits ». En juin, le comité radical-socialiste lui offre un banquet où se retrouvent « tous les conseillers municipaux républicains de Joinville ». Il y a 50 couverts, en alternant un membre du conseil municipal et un membre du comité ; il se tient dans son restaurant, et un bronze lui est offert au nom du comité ainsi qu’une plaquette en argent au nom du conseil municipal. Le journal des évolutionnistes, L’Indépendant qualifia l’évènement de repas des « Mille-et-un-regrets. »

Ayant siégé pendant trente ans au conseil municipal, dont dix comme conseiller et vingt comme adjoint au maire, de 1878 à 1908, Honoré Jullien ne quitte pas la vie publique après sa défaite de 1908. En décembre, bien que n’étant plus élu, il est désigné comme délégué sénatorial.

Le restaurant Jullien reste un lieu important de la vie politique dans la circonscription. Il accueille ainsi en janvier 1909 un congrès pour désigner le candidat radical-socialiste à l’élection législative partielle liée à l’élection au poste de sénateur d’Adolphe Maujan. Il y a plus de 600 participants dans une ambiance commentée par la presse radicale : « agitation, vivacité, effervescence, émotion ». C’est Amédée Chenal qui est désigné, après plusieurs désistements. Il est élu, au second tour, face au socialiste SFIO Albert Thomas.

Lorsque que le préfet entend, en juin 1909, remettre en vigueur une ordonnance de Colbert, datant de 1669 et fixant une taille minimale aux bateaux, au côté de Rey et de Perre, conseillers municipaux et pour ce dernier constructeur de barques, Jullien est mobilisé avec deux autres constructeurs pour se rendre en audience auprès du sous-secrétaire d’État à l’intérieur, qui se trouve être le nouveau sénateur Maujan. Sur son instruction, le préfet réexamine sa circulaire.

Sur l’île Fanac, la guinguette Jullien est toujours sollicitée pour les manifestations politico-sociales. L’Union fraternelle, groupement de francs-maçons, y banquète en octobre 1909 pour défendre de l’école laïque et exprimer sa sympathie envers le pédagogue libertaire espagnol Francisco Ferrer, fusillé après avoir été accusé par le clergé catholique d'être l'un des instigateurs de l’insurrection de Barcelone.

Au premier trimestre 1910, comme toutes les constructions situées dans les zones basses sur les bords de Marne, Chez Jullien est inondé lors de la crue exceptionnelle de la rivière. Jullien fait partie avec Paul Purrey, franc-maçon et futur maire de Wissous (Seine-et-Oise, act. Essonne) de la commission nommée par le préfet et chargée de déterminer la nature et l’importance des dégâts causés par les crues de la Marne. L’activité reprend pendant l’été, et le restaurant sert même de lieu de substitution à la mairie, en cours de reconstruction à l’automne de cette année, pour la remise de prix de l’Association philotechnique, principale structure locale d’éducation populaire.

En mars 1912, Jullien est à l’origine de la création d’une société de secours mutuels intitulée Mutualité scolaire de Joinville-le-Pont. Elle est officiellement approuvée par arrêté en avril la même année. Jullien en est le président, tandis que deux instituteurs de chacune des école sont vice-présidents. L’objectif de la mutuelle est d’assurer des secours aux parents en cas de maladie ou blessures et de constituer des pensions de retraites à ses adhérents.

Cependant, la défaite des radicaux-socialistes lors des élections municipales de mai 1912 conduit Jullien à présenter sa démission, pour tenter d’éviter une rupture entre la nouvelle association et la municipalité. Il est remplacé par le docteur Pierre Vallat, lui aussi radical-socialiste et ancien conseiller municipal, mais dont le statut de médecin réputé est supposé faciliter la relation. Cependant, il n’obtient pas lui non plus, le versement de la subvention attribuée par le conseil municipal précédent.

Pendant la guerre, le restaurant continue de fonctionner, mais il semble avoir du mal à recruter son personnel.

Le retour, en novembre 1919, d’une municipalité dans laquelle figurent des radicaux fait que Jullien est de nouveau désigné, en décembre, délégué sénatorial.

En octobre 1920, Jullien met en vente son hôtel restaurant. Il reste sur l’île Fanac, mais déménage avec son épouse dans une maison voisine.

Honoré Jullien meurt à Joinville, le 9 août 1935, à l’âge de 73 ans. Il était décoré des Palmes académiques, comme officier d’académie en avril 1899 et officier de l’instruction publique en décembre 1904. Une salle de réunion de la mairie porte le nom de salle Jullien. L’ancienne guinguette Chez Jullien abrite l’école municipale de musique.

Fin

Guinguette Chez Jullien sur l'île Fanac

 

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14 mai 2021 5 14 /05 /mai /2021 00:01

Suite de la biographie d’Honoré Jullien

Lors des élections municipales de mai 1892 à Joinville-le-Pont, la liste Eugène Voisin, maire sortant, se retrouve confrontée à une liste de droite, dirigée par l’industriel Albert Bocquentin et le docteur Jean Barborin. Ces derniers recueillent 27% des 639 suffrages exprimés pour 644 votants au premier tour et ont un élu ; la liste Voisin, soutenue par le comité radical-socialiste, gagne les 22 autres sièges. Honoré Jullien est réélu avec 423 voix (66,2%) et reconduit en tant que premier adjoint au maire.

Pendant le mandat, Jullien siège à la commission de la caisse des écoles et préside celles de la bibliothèque et de l’octroi. Il participe également au travail de délimitation de la commune avec sa voisine de Nogent-sur-Marne mais en profite pour critiquer les lourdeurs de la procédure : il y a quatre habitants concernés par la modification des frontières, mais il faut sept membres dans le bureau chargé de les auditionner. Il propose en septembre 1894 au conseil municipal de faire « une grrrrande exposition des stupidités administratives » qu’il voudrait installer pendant l’Exposition universelle de 1900, selon l’hebdomadaire Voix des communes. Comme adjoint au maire et ancien combattant, il inaugure en décembre 1895 une plaque à la mémoire du 42e régiment d’infanterie de ligne, qui participa à la défense de Paris lors de la bataille de Champigny en décembre 1870.

Le scrutin municipal de mai 1896 constitue un moment particulier dans la vie du radicalisme à Joinville. Le maire, Eugène Voisin, qui a le soutien du comité radical-socialiste local est au faîte de sa popularité et sa liste est, exceptionnellement, élue sans concurrent avec une moyenne de 800 voix sur 918 électeurs inscrits. Le député est un radical joinvillais, Jules Ferdinand Baulard. Mais Alphonse Demeestère, pilier du radicalisme dans la circonscription est décédé deux mois avant et Henry Vaudémont, qui est la plume du mouvement dans l’hebdomadaire Voix des communes, quitte le conseil municipal de Joinville pour mourir quelques mois plus tard. Voisin est réélu maire, Jullien et Couppé le sont comme adjoints.

L’inauguration du groupe scolaire de Polangis-Palissy à Joinville, en avril 1899, est l’aboutissement d’une longue action des partisans de l’école laïque. Le préfet prend l’occasion pour décorer Jullien des Palmes académiques.

Retour à la normale lors des élections municipales de mai 1900. Le comité électoral socialiste-révolutionnaire présente une liste à Joinville. Elle n’empêche pas la liste Eugène Voisin, investie par le comité radical-socialiste, d’emporter tous les sièges dès le premier tour. Jullien arrive en seconde position des candidats, assez loin de Voisin toutefois, avec 661 voix pour 1 096 électeurs inscrits (60%). De nouveau, Voisin est maire, Jullien et Couppé adjoints.

En avril 1902, Jullien représente les joinvillais au sein du Comité d’union et d’action républicaines de la 2e circonscription de Sceaux, structure locale du parti radical-socialiste nouvellement constitué, avec le député Baulard, le maire Voisin, huit conseillers municipaux et deux autres personnalités. Ce même mois, c’est lui qui préside une réunion de campagne pour l’élection législative de 2002, à laquelle Adolphe Maujan se présente pour succéder à Jules Ferdinand Baulard, qui termine son troisième mandat et fait ses adieux politiques. La réunion accueille deux contradicteurs, les candidats socialiste-révolutionnaire Renier et conservateur Fatoux.

En juin 1902, le Comité républicain radical-socialiste de Joinville devient une instance permanente. Jusqu’ici, les comités étaient formés à l’occasion de chaque élection et ne lui survivaient pas. Jullien fait partie des huit membres de son bureau. Alors que l’État et l’église catholique ne sont pas encore séparés, le conseil municipal doit se prononcer, en juin 1902, sur la demande d’installation des Sœurs enseignantes de la Providence. Il s’y oppose par 13 voix (dont celles de Voisin, Jullien et Couppé) contre 5.

Les partisans de l’installation des religieuses vont constituer le socle de la liste conservatrice qui va contester, en mai 1904, l’élection municipale. Le maire se présente cette fois-ci sur une liste qui affiche très clairement le programme radical-socialiste, assurant s’opposer au nationalisme et au cléricalisme de la « coalition réactionnaire », menée par Provin et Dalbavie. Les partisans du maire obtiennent en moyenne 50,2% des votes, contre 31,9% pour la droite et 14,9% pour les socialistes-révolutionnaires. Jullien est réélu dès le premier tour avec 632 voix (56,5%) sur 1 119 votants pour 1 363 inscrits. Il arrive en quatrième position. La majorité sortante se retrouve avec 22 sièges sur 23, la droite ayant un élu.

L’ancien député radical, Jules Ferdinand Baulard, électeur à Joinville, commente le résultat : « Je souhaite que nous puissions décrasser notre commune dont nous avons été considérés pendant longtemps comme des anarchistes qui voulaient tout bouleverser ; c’est une satisfaction que nos efforts et nos idées ont gain de cause ». Voisin et Jullien reprennent leurs fonctions de maire et d’adjoint, Paul Villain remplaçant Couppé pour le deuxième poste.

Ce remplacement va être un des éléments qui vont progressivement faire monter la tension dans le conseil municipal au cours du mandat. Henri Vel-Durand, qui était arrivé en second par le nombre de voix, a du mal à admettre qu’on ne lui ait pas proposé le poste d’adjoint.

À suivre

Chez Jullien sur l'île Fanac

 

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12 mai 2021 3 12 /05 /mai /2021 00:01

Suite de la biographie d’Honoré Jullien

Un mois après avoir été réélu maire en juin 1888, le républicain Gabriel Pinson meurt. Honoré Jullien fait partie des successeurs possibles selon les supputations de la presse, avec Nicolas Chéret et Jules Rousseau. Ce sera cependant le premier adjoint sortant, Eugène Voisin, qui prend la fonction en août 1888, tandis que Jullien devient premier adjoint.

Scellant le rapprochement avec les radicaux, le conseil municipal adopte une proposition de Demeestère pour participer à une manifestation à l’occasion du trente-septième anniversaire de la mort d’Alphonse Baudin, tué sur une barricade le 3 décembre 1851 à Paris alors qu'il s'opposait au coup d'État du 2 décembre 1851 de Louis-Napoléon Bonaparte. Jullien fait partie de la délégation municipale qui va saluer ce « martyr du droit. »

Si sa clientèle principale est familiale, Chez Jullien accueille également des manifestations sociales. En janvier 1882, le fabricant de pianos Antoine Bord organise un banquet de 400 couverts pour remercier ses ouvriers qui, à l’occasion de la sortie du cinquante-millième instrument, lui avaient offert son buste en bronze, œuvre du sculpteur M. Mathurin Moreau. Bord assurait une participation de ses employés aux bénéfices de la société, innovation peu répandue. La fanfare municipale et la société de Tir organisent sur l’île Fanac leur bal annuel en 1890 et les pompiers font de même très souvent. Le comité s’action pour l’accès aux trains des ouvriers et employés y fait une fête familiale en 1898 et une réunion en avril 1905.

La vocation touristique de Joinville évolue, et l’établissement Jullien tente de s’y adapter. Dans les années 1880, la danse la principale raison de venir sur les bords de Marne, et Jullien est soumis à la concurrence d’autres bals à l’entrée gratuite. La pratique du canotage décline également. Un reportage du New-York herald en juin 1896 sur l’île Fanac montre le développement de l’usage de la bicyclette. Seulement, selon Honoré Jullien, les cyclistes arrivent trop fatigués pour ensuite pratiquer les sports nautiques. Son voisin, le constructeur de bateaux Turban, assure que « Le bicyclisme a tué tout par ici. »

La guinguette est le lieu également de réunions politiques, notamment celles d’organisations de gauche ; ainsi, le conseil municipal y tient, en mars 1894, son déjeuner annuel ; en juin 1898 l'Union des républicains radicaux-socialistes y offre, un banquet à l'occasion de la réélection de Jules Ferdinand Baulard à la députation. En janvier 1902, la Fédération socialiste révolutionnaire internationaliste de la 2e circonscription de Sceaux, accueille Charles Longuet, gendre de Karl Marx, pour présenter son programme axé sur la socialisation des moyens de production.

Le député nouvellement élu Adolphe Maujan reçoit, en avril 1903 dans le restaurant les instituteurs des cantons de Charenton, Nogent et Saint-Maur.

En décembre 1905, les comités républicains de la deuxième circonscription de Sceaux se réunissent dans l’île Fanac pour sélectionner leur candidat pour l’élection législative de mai 1906 ; ce sera le sortant Adolphe Maujan, choisi à la majorité des quelques 900 membres des vingt-quatre groupes radicaux et radicaux-socialistes présents Chez Jullien. En juin 1906, c’est au même endroit que le député réélu fête sa victoire, avec au menu la matelote d'anguilles Joinville, qualifiée de « triomphe culinaire de Jullien » par le quotidien Le Radical.

Le restaurant est vendu en juin 1900 au distillateur et commerçant René Martin, qui achète également l’hôtel-restaurant Bégat, toujours à Joinville. Cependant, Jullien reste l’exploitant du restaurant et continue de vivre sur place.

L’activité municipale de Jullien devient intense depuis qu’il est adjoint au maire. En janvier 1889, avec la plupart des républicains et tous les radicaux-socialistes de la commune, il appelle à voter contre le candidat populiste, le général Boulanger, lors d’une élection législative partielle du département de la Seine ; c’est cependant ce dernier qui l’emporte. Il est fréquemment désigné comme délégué sénatorial, à partir de décembre 1890. Le journaliste Henry Vaudémont assure qu’il « joue seul le rôle d’intelligence constante ».

Malgré l’estime que ce dernier lui porte, ils s’affrontent lors d’une élection municipale partielle, où Jullien soutient une liste tandis que Vaudémont en présente une autre. Ce dernier emporte trois des cinq sièges à pourvoir, tandis que ceux soutenus par Jullien ont les deux autres. Vaudémont et Jullien seront ensuite proches, le publiciste assurant qu’il a pour le restaurateur « une estime d’un calibre que je prodigue peu ». C’est chez Jullien que se discute, en avril, la désignation du deuxième adjoint, François Couppé.

En novembre 1890, Jullien assiste à la réunion où trois élus radicaux-socialistes (Demeestère, Diot et Vaudémont) rendent compte de leur mandat. Il demande au conseil municipal de souscrire au monument projeté pour le républicain socialiste Jules Joffrin, mais la majorité ne le suit pas, et une souscription particulière est lancée par Demeestère et Vaudémont. La même année en décembre, toujours avec Vaudémont, Jullien proteste contre l’inégalité de traitement entre Paris et la banlieue en matière d’approvisionnement en gaz et saisit de ce sujet les candidats au poste de sénateur.

Pour dynamiser la vie locale, et renforcer son attrait auprès de la clientèle parisienne, Jullien prend l’initiative de créer une commission des fêtes, avec la participation des commerçants de Joinville.

Fin octobre 1891, reprenant une idée chère aux radicaux-socialistes locaux, le conseil municipal organise un compte-rendu de mandat devant la population de Joinville. Seuls les deux élus les plus à droite de l’assemblée refusent d’y prendre part.

À suivre

Chez Jullien, île Fanac en 1891

 

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10 mai 2021 1 10 /05 /mai /2021 00:01

Début de la biographie d’Honoré Jullien

Honoré Jullien naît le 16 mai 1852 dans l’ancienne commune de Bercy, annexée ensuite en majeure partie dans le 12e arrondissement de Paris. Il est le fils d’Adèle Constance Chevalier et Jean Baptiste Honoré Jullien, restaurateur, originaire d’Allauch (Bouches-du-Rhône).

Son père, qui tenait un établissement quai de Bercy, constate l’engouement des parisiens pour les bords de Marne, devenus plus accessibles avec l’inauguration, en septembre 1859, du chemin de fer qui les relie depuis la gare de La Bastille. Il décide, vers 1863, de s’installer sur l’île Fanac, à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), où il ouvre un établissement intitulé Chez Jullien. Selon la cuisinière et journaliste Catherine Vialard, Jean Baptiste Jullien est le créateur du potage Julienne. Le restaurant devient, selon le publiciste Émile de La Bédollière, le rendez-vous des canotiers et canotières et contribue à la prospérité touristique dominicale de Joinville.

Dans un ouvrage intitulé Les joyeuses dames de Paris (1867), J. Neuville, assure que « Si l'on dressait de nos jours une carte de Tendre, on ne pourrait se dispenser d'y tracer dans un coin les contours de l’île de Joinville-le-Pont. Un homme intelligent et qui s'entend à donner aux moindres détails de la vie de plaisirs une direction particulière, M. Jullien s'est établi dans ce nid de verdure et y a créé l'établissement le plus charmant, le plus complet, le mieux disposé que l'imagination d'un poète idyllique puisse rêver. »

La maison, d'aspect rustique, est à l'intérieur avec un décor d'Opéra. Neuville estime le lieu si différent de ce qu'on voit ordinairement dans les environs de Paris, qu'il en trace un tableau physiologique. Pour lui, Jullien, Marseillais d’origine, est un commerçant parisien ce qui implique qu’il soit « un artiste doublé d'un philosophe et d'un observateur ». La clientèle éclectique qui se recrute parmi les artistes, les gens de finances et les étudiants.

Pendant le siège de Paris, entre septembre 1870 et mars 1871, la commune de Joinville est la cible de plusieurs bombardements, le pont qui relie les deux rives, et dessert par un escalier l’île Fanac, est détruit. La presque totalité de la population se réfugie dans la capitale, où Jean Baptiste Jullien meurt en novembre 1870.

Alors âgé de 18 ans, Honoré Jullien a rejoint le 99e régiment de volontaires. Il participe aux combats de la bataille de Champigny, qui se déroulent en partie sur le territoire de Polangis, à Joinville, et blessé est à la partie supérieure de la cuisse droite. La Société nationale des secours aux blessés, qui vient de se constituer et a installé une ambulance dans le château du Parangon, à Joinville, lui octroie un secours de 200 francs.

Après la fin du conflit, Joinville est occupé par des troupes allemandes, notamment bavaroises, jusqu’en septembre 1871. Honoré Jullien reprend l’exploitation de la guinguette familiale et la développe de manière importante. Émile Zola, dans Au bonheur des Dames, (1883) décrit les employés venant y manger quelques œufs, de la friture et du poulet sauté.

En juillet 1877 à Levallois-Perret, Jullien épouse Eugénie Pauline Bellot ; ils auront en 1878 un fils, Henri, qui sera tapissier.

Le publiciste Louis Rey témoigne en 1912 : « Je connaissais Jullien, comme tous les parisiens ayant fréquenté Joinville, je le savais bon restaurateur, homme aimable ».

Les élections municipales de 1878 voient s’affronter le maire sortant, Louis Ferdinand Rousseau, bonapartiste, à la tête d’une liste conservatrice, et des républicains rassemblés derrière Gabriel Pinson, descendants de deux maires et d’un adjoint qui a tenu son poste près d’un demi-siècle. Dès le premier tour, 16 républicains sont élus, et 4 autres sur les 21 sièges à pourvoir au second. Pinson devient maire. Honoré Jullien est élu avec lui conseiller municipal.

Au cours du mandat, un incident éclate parmi les élus sur l’attitude à adopter vis-à-vis des anciens insurgés de la Commune de Paris, amnistiés en 1879 par le gouvernement républicain. Un des nouveaux élus, futur dirigeant du comité radical-socialiste de la circonscription, Alphonse Demeestère, lance une souscription pour venir en aide à l’un d’entre eux, malade et sans ressource, Adolphe Morandy. Mais Pinson s’y oppose et fait voter par une majorité du conseil, dont Jullien, une motion au sein du conseil dans laquelle les élus « blâment sévèrement le citoyen Demeestère ». La presse s’étonne d’un tel comportement, n’y votant rien de blâmable, mais Pinson considère que Demeestère voulait se mettre en avant.

Comme la plupart des fidèles de Pinson, Jullien est réélu au cours des élections municipales de mai 1881. Les personnalités les plus radicales, comme Demeestère, ont été écartées.

Le scrutin suivant, en mai 1884, voit Pinson revenir mais les radicaux retrouvent leur place, avec notamment Demeestère et Jules Ferdinand Baulard, futur conseiller général et député. Jullien retrouve son poste dès le premier tour, comme 17 des 21 conseillers. Il est désigné comme secrétaire de l’assemblée. Il prend ses distances avec Pinson, auquel il reproche, en 1884, en plein conseil municipal d’avoir donné à chacun de ses « conseillers lèches-bottes » « son morceau de sucre ». L’assemblée lui vote alors un blâme ; Jullien abandonne sa fonction de secrétaire du conseil.

À la fin du mandat, Jullien s’est notablement rapproché de Demeestère, s’opposant par exemple avec lui au montant de l’octroi imposé sur les marchandises entrant dans la commune, contre la majorité du conseil.

Cependant, lors des élections municipales de mai 1888, Jullien reste fidèle à Pinson, qui se retrouve avec la concurrence d’une liste radicale-socialiste dirigée par Demeestère. Il est réélu dès le premier tour avec 337 voix sur environ 550 suffrages exprimés (61%). Les radicaux font élire trois des leurs, dont Demeestère. Pinson est réélu maire, Eugène Voisin est premier adjoint et Honoré Jullien devient le second adjoint.

À suivre

Chez Jullien, île Fanac, 1886

 

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25 septembre 2020 5 25 /09 /septembre /2020 00:01

Louis Saint-Martin naît le 26 août 1891 à Paris (10e arr.). Il est le fils de Louise Pascaline Gilbert, passementière et de son mari, Joseph Saint-Martin, employé des Postes. Son père, originaire du Gers, sera ensuite gérant d’hôtel dans le 11e arrondissement de Paris, rue Neuve des Boulets. Sa mère meurt en mai 1907. Louis Saint-Martin devient employé de commerce.

Pendant la première guerre mondiale, Louis Saint-Martin est mobilisé dans le 244e régiment d’artillerie de campagne, où il est maréchal des logis en 1919. Il est décoré de la Croix de guerre. Il est démobilisé en février de cette même année.

Alors qu’il vient de quitter l’armée, Louis Saint-Martin épouse à Paris (11e arr.) Jeanne Joséphine Putz, née à Paris et dont les parents sont originaires du Grand-Duché du Luxembourg. Ils vont s’installer à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), sur le quai de la Marne, sur la rive droite de la rivière. Ils y exploitent le restaurant du Chalet des sports. Il y adjoint un bureau de tabac en 1925.

En septembre 1926, Saint-Martin participe au 3e concours agricole organisé à Joinville et est gratifié du prix en herboristerie. Il est également désigné, cette année-là, par la municipalité pour surveiller le bon fonctionnement de l’éclairage public dans son quartier.

Lors des élections municipales de mai 1929 à Joinville, Saint-Martin est candidat sur la liste du Groupement des gauches, qui comprend des radicaux-socialistes, des socialistes SFIO et des socialistes indépendants.

La liste remporte 22 des 27 sièges à pourvoir face à celle de l’Union républicaine (droite, 5 élus) du maire sortant, Stephen Durande et à la liste du Bloc ouvrier et paysan (communiste, pas d’élu) de Roger Bénenson. Saint-Martin recueille au premier tour 751 suffrages, soit 44,1% des 1 715 votants pour 2 491 inscrits.

Toujours sur le quai de la Marne, Saint-Martin est épicier en 1931. Ayant quitté la commune, il est démissionnaire de sa fonction de conseiller municipal en 1933. Il est remplacé à l’occasion d’une élection municipale partielle en octobre 1934.

La famille reviendra ensuite à Joinville-le-Pont, car son épouse y décède en décembre 1981. La date et le lieu de décès de Louis Saint-Martin ne sont pas connus.

Joinville-le-Pont, quai de la Marne

 

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