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Pierre Paul Alphonse Lecuve, naît le 30 avril 1851 à Vexaincourt, petite localité du département des Vosges, où son père est instituteur. Ce dernier, Pierre Lecuve (1830–1869) est originaire du village voisin, Allarmont, tandis que sa mère Marie Bart, vient de Bionville, qui jouxte le précédent dans le département de la Moselle.
Les Vosges sont sans doute la terre française la plus éloignée de toutes mers, mais il est néanmoins attiré par le large et rentre, dès l’âge de 16 ans, à 850 kilomètres de là, à l’école navale de Brest.
En 1870, il devient élève-officier, aspirant, cette fois sur les rives de la Méditerranée, à Toulon, où sa famille se fixera plus tard.
C’est en 1885 qu’il prend le départ pour le grand large à bord de la Naïade pour Madagascar et l’océan indien. Il obtient un commandement en 1889 et croise avec l’aviso Alouette en Indochine (Cochinchine, Cambodge, Tonkin).
Après un retour en Méditerranée, sur le cuirassé Dévastation, il embarque pour deux ans dans le Pacifique. Les pays européens se disputent alors la colonisation des îles du sud, Allemagne et surtout Angleterre et France. Alphonse Lecuve va jouer un rôle diplomatique dans ces querelles à Tonga et aux Nouvelles-Hébrides.
Pour protéger ses intérêts, la France ouvre une agence consulaire à Tonga, territoire placé sous la juridiction du Haut-commissariat britannique pour le Pacifique oriental depuis 1893. Le capitaine de frégate Lecuve, qui rencontre le roi George Tupou II lors d’une escale, raconte l’entrevue dans une lettre : « Le 4 novembre 1897, accompagné d’une partie des officiers, je faisais ma visite au roi. Dans le cours de notre entretien, il appuya fortement la crainte qu’il éprouvait de voir son pays annexé par l’Angleterre et dit qu’il espérait bien que la France ne le permettrait jamais. Quelques jours plus tard, le père du roi me fit demander une entrevue, et il accentua plus fortement encore que ce dernier le désir de voir la France se mettre en travers des projets supposés de l’Angleterre, insistant sur les excellentes relations qui avaient toujours existé entre les deux pays. Je me contentai à l’un comme à l’autre de répondre par des paroles aimables et courtoises, mais sans aucune portée. Dès lors, l’archipel de Tonga fut livré aux Anglais »
Aux Nouvelles-Hébrides, devenues depuis le Vanuatu, Alphonse Lecuve montre aussi peu d’enthousiasme face à ceux qui lui proposent d’annexer des territoires au risque de provoquer un conflit avec les anglais. C’est le quotidien La Croix qui relate (22/08/1924) : « Le 18 septembre 1898, à Port-Sandwich, en présence de M. Lecuve, commandant de l’Eure, de M. Milliard, agent de la Société française, et d'autres personnalités coloniales, Mgr Fraysse conférait le baptême à 50 catéchumènes et bénissait la première église hébridaise, érigée par le P. Pionnier. À l'issue de la cérémonie, les indigènes venus des îles voisines avec leurs missionnaires acclamèrent le drapeau tricolore. C'était une invite indirecte à la France à prendre sans tarder possession de l'archipel. On tergiversa, et il fallut se contenter du condominium franco-anglais. »
De retour en Europe, il devient commandant de plusieurs cuirassés et croiseurs : Saint-Louis, d'Entrecasteaux, Desaix, Pothuau, Brennus.
Promu contre-amiral en septembre 1908, il est major général de la marine à Cherbourg.
En 1911, il commande la division navale dans la régence de Tunisie; sur son dernier bâtiment, le cuirassé Henri-IV. Il se consacre non seulement à ses tâches politiques et militaires, mais appuie également des activités culturelles donne des réceptions qui restent fameuses.
Au 1er janvier 1912, il rejoint l’état-major, comme président de la Commission d'essais des bâtiments de la Flotte. Il prend sa retraite en janvier 1914.
Devenu commandeur de la Légion d'honneur en décembre 1912, il porte également des médailles malgache, italienne et tunisienne. Mais, même sorti du service actif, Alphonse Lecuve reste fort actif : il est président d'honneur de l'Alliance française et siège au conseil d’administration de l’Observatoire de Paris et à celui de l’Observatoire d’astronomie physique de Meudon.
Il s’installe à Toulon. En mai 1918, il y participe à une commémoration patriotique en mémoire de l'équipage du sous-marin Bernouilli, disparu en février dans l’Adriatique. Il y meurt le 26 février 1944.
L’amiral Lecuve était l’époux de Marguerite Peyron (1868-1969) ; leur grande différence d’âge et la longévité de sa femme font que l’État français leur aura servi une pension de retraite pendant 55 ans.
Alphonse était le frère de Charles Lecuve, maire d’Allarmont, fusillé comme otage par l’armée allemande au début de la Première Guerre mondiale, en août 1914 (voir Fusillades dans les Vosges en 1914).