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3 avril 2020 5 03 /04 /avril /2020 01:01

Début de la biographie de Georges Defert

Georges Maurice Defert nait le 5 avril 1896 à Montreuil (Seine, act. Seine-Saint-Denis). Il est le fils de Clémentine Enault et de son époux Charles Defert, menuisier. La famille s’installe peu après à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), où le père ouvre un atelier de menuiserie dans leur logement, 30, rue de Créteil (act. rue du maréchal Leclerc).

Dès l’âge de 13 ans, Georges Defert devient apprenti menuisier dans l’atelier paternel. Après la mort de son père en octobre 1919, c’est sa mère qui en reprendra la gestion.

Au début de la première guerre mondiale, Georges Defert s’engage pour la durée de la guerre dans le génie (1er RG puis 11e RG). Il est cité à l’ordre du 4e corps d’armée en août 1915. Blessé à Perthes en septembre 1915, il est de nouveau cité, à l’ordre des armées, en octobre 1915. En mai 1918, Defert est promu caporal. Démobilisé en août 1919, il obtient la croix du combattant volontaire en juillet 1936.

Le mariage de Georges Maurice Defert avec Madeleine Cécile Haas a lieu en novembre 1921 à Ville-d’Avray (Seine-et-Oise, act. Hauts-de-Seine). Ils auront deux enfants.

Après-guerre, Georges Defert et son frère Raymond poursuivent l’activité de la menuiserie familiale à Joinville. Un violent incendie en février 1933 les met au chômage et les contraint à s’installer provisoirement dans la commune voisine de Saint-Maur-des-Fossés. Les conditions d’intervention des sapeurs-pompiers émeuvent les voisins, qui lancent une pétition demandant de les équiper de bottes. Le conseil général leur attribue des secours.

C’est à partir de 1925 que Defert s’implique dans la vie politique locale. En avril, il fait partie du Comité d’union des républicains et d’action sociale, fondé en 1912, qui soutient la liste d’Union républicaine pour la défense des intérêts communaux, conduite par Henri Vel-Durand, ancien radical-socialiste qui a rassemblé les libéraux et conservateurs. Le comité est présidé par Félix Soulié. En mars 1935, Defert participe à la transformation du comité en Union des républicains, centrée sur les activités municipales, ce qui lui permet de rassembler l’ensemble de la droite joinvillaise. La nouvelle organisation a pour président René Kirbühler, futur adjoint au maire tandis que Léon Lesestre, qui était à la tête de l’ancien comité et deviendra maire suite au scrutin de mai, est nommé président d’honneur.

L’Union des républicains de Joinville a son siège au café de Paris, place de la Gare. Son programme vise à la diminution des charges écrasantes, l’atténuation des dépenses publiques, la simplification des rouages administratifs et l’application des lois sociales.

Pour le scrutin de mai 1935, la municipalité sortante, élue dans le cadre du Bloc des gauches, unissant radicaux-socialistes et socialistes SFIO, s’est réduite aux premiers. La SFIO et les communistes présentent chacun une liste. Pour sa part, l’Union des républicains rassemble l’essentiel de la droite. Georges Defert, toujours menuisier, figure sur la liste qui emporte, au second tour, 25 des 27 sièges à pourvoir, tandis que deux communistes sont élus sur la liste unifiée de la gauche, les radicaux n’ayant pas d’élu. Léon Lesestre devient le premier magistrat.

Au premier tour, Defert avait recueilli 919 voix pour 2 856 suffrages exprimés (32,2%) sur 2 923 votants et 3 433 inscrits. Il joue un rôle politique dans le conseil, étant notamment élu délégué sénatoriale en septembre 1935. Il s’occupe également de la passation des marchés municipaux.

Defert est en 1936 le président de la section de Joinville du Parti social français (PSF), formation d’extrême droite du colonel de La Rocque, fondateur des Croix de Feu, dont la devise est « travail, famille, patrie ». À ce titre, il co-organise une réunion pour le canton de Saint-Maur le 17 décembre, mais elle est interdite. Le PSF tient une permanence à Joinville au café Clerté, rue de Paris. En avril 1937, sa section accueille au cours de sa réunion mensuelle La Rocque.

Si la politique du PSF est clairement réactionnaire, François de La Rocque, le PSF ne soutint pas le régime de Vichy en raison de son caractère antisémite et défaitiste. En 1942, quand un nouveau conseil municipal est nommé, la plupart des colistiers de Lesestre figurent encore à ses côtés, mais pas Defert.

A suivre

Georges Defert

 

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29 mars 2020 7 29 /03 /mars /2020 00:01

Suite de la biographie de Louis Rey

Louis Rey a eu une activité sociale significative. En 1904, il fonde et administre une société d’assurance décès et d’achats en commun dénommée Les Mille débitants, hébergée dans son domicile quai des Célestins à Paris (4e arr.). Elle s’adresse aux marchands de vins de la région parisienne.

Secrétaire général du syndicat des marchands de vin et liquoristes de Paris depuis 1879 et toujours en poste en 1911, il est, depuis 1877 fondateur et administrateur de bureaux de placement gratuit, qui constituent un des ancêtres des institutions de gestion des services à l’emploi en faveur des chômeurs et des employeurs. Louis Rey est également membre du Syndicat central des chimistes et essayeurs de France, sans doute depuis sa fondation en 1890.

Ses amis politiques radicaux-socialistes ont connu la défaite lors de plusieurs scrutins au début du vingtième siècle : la ville de Joinville est passée en 1912 aux mains de radicaux  dissidents alliés à des libéraux et des conservateurs, avec le soutien des socialistes SFIO et il n’y a plus de conseillers municipaux fidèles au comité radical-socialiste. Le canton de Saint-Maur est aux mains d’un homme de centre-droit, Henri Naudin. Quant à la députation, la 2e circonscription de l’arrondissement de Sceaux a vu la défaite des candidats radicaux au profit du socialiste Albert Thomas en 1910. Même le poste de conseiller d’arrondissement appartient à l’un des dissidents radicaux de Joinville. La République radicale, dont Joinville était l’épicentre dans l’Est parisien à la fin du 19e siècle et à laquelle se vouait Louis Rey est en profond déclin.

Dans la commune, Louis Rey indique qu’il a démissionné du comité radical-socialiste de Joinville en 1911 parce qu’en faisaient partie Henri Vel-Durand et plusieurs autres des dissidents qu’il appelle les Saxons, en référence à la défection des troupes de cet État allemand qui, alors alliées aux Français et à Napoléon 1er, changèrent de camp pendant la bataille de Leipzig en 1813. Rey s’explique : « Je ne pouvais défendre la République en leur compagnie ». Mais, en juillet 1913 Vel-Durand est exclu du parti radical par décision de la fédération départementale tandis que les autres, comme Ernest Mermet, ont cessé d’y adhérer. Rey s’en réjouit dans l’hebdomadaire Voix des communes : « Je puis rentrer, la maison est maintenant propre, l’on ne risque plus d’y coudoyer les traîtres et les renégats. »

Dans sa chronique de Voix des communes, Rey poursuit la défense des valeurs laïques et sociales qui sont les siennes, et les critiques envers la nouvelle majorité municipale. Cependant, l’incomplétude de la collection conservée du journal aux archives, puis son arrêt au début de la première guerre mondiale ne permet guère de suivre son rôle. On sait cependant qu’une affiche est posée en août 1913 pour critiquer à nouveau son rôle dans l’affaire de l’école de Polangis. il s’insurge, à la fin de l’année, de l’absence de toute représentation municipale à l’enterrement d’un ancien élu radical-socialiste, le constructeur de bateaux Petrus Perre.

La reprise de la parution de l’hebdomadaire voit une réorientation des préoccupations de Rey, qui se focalise beaucoup plus sur les questions graves de la vie quotidienne des Joinvillais ; il signe une partie de ses nombreux papiers du pseudonyme de Lécouteux. Il publie ainsi une lettre aux boulangers dans le premier numéro de 1915, leur reprochant de supprimer le portage à domicile sans diminuer le prix. Il s’inquiète de la pénurie de charbon, moyen de chauffage quasi-unique à cette période. Il relaie aussi les protestations des bouchers, pénalisés par l’interdiction d’entrée des marchandises la nuit.

S’intéressant toujours autant à la chose publique, Rey prononce, au nom de la franc-maçonnerie, un éloge de Régis Clavel, receveur des Postes, responsable de la Ligue des droits de l’Homme et militant radical-socialiste, qui est aussi salué par Georges Briolay au nom de ces deux institutions dont il est le responsable local. En mars, il s’insurge contre le fait que le prêtre ait traversé Joinville en habits sacerdotaux pour le premier enterrement d’une victime de la guerre au cimetière municipal. Pour lui, « En temps de guerre comme en temps de paix, la loi de séparation [de l’église et de l’État] doit être respectée. »

Le pavillon dont il avait été expulsé, deux ans plus tôt, restant inoccupé, Rey fait remarquer pourrait loger 2 ou 3 familles. Il conseille les familles de soldats qui ont des difficultés  obtenir les allocations auxquelles elles devraient avoir droit. Il propose sinon qu’elle soit mise à la disposition de la Société des secours aux blessés (la Croix-Rouge). Finalement, le terrain servira pour des plantations de pommes de terre et les arbres finiront en bois de chauffage.

S’il est très patriote, Rey s’inquiète pourtant de ce que « Des gens voient des espions partout ». Ainsi, Andrès, membre du comité radical-socialiste de Joinville et candidat aux élections municipales de 1912, alsacien, soldat français, propriétaire à Polangis, membre de la Symphonie, était en Alsace en visite dans sa famille à la déclaration de guerre ; il est arrêté par les Allemands, s’évade et revient à Joinville. Mais il est dénoncé par la rumeur comme s’étant rendu en Allemagne.

La situation des animaux concerne aussi Rey, qui avait saisi la Société protectrice des animaux, laquelle, après enquête, confirme qu’une décision du maire concernant le stationnement des chevaux leur portait préjudice. Il conteste également la taxe qu’on veut imposer à son chien, qualifié de chien de luxe par la municipalité, alors qu’il l’a déclaré comme chien de garde. Le préfet lui donne raison en 1916.

S’agissant de la vie politique municipale, Rey explique son positionnement, à propos de ce qu’il appelle le devoir du maire : « Nous voulons bien respecter la trêve des partis, respecter l’union sacrée. Est-ce la rompre que de signaler ce qui devrait être fait ? » Il se plaint que le conseil municipal ne fonctionne presque plus, malgré la présence sur place de plusieurs élus. Mais il défend leur honnêteté, face aux rumeurs qui prétendent qu’ils accaparent une partie des allocations destinées aux chômeurs et aux femmes des mobilisés.

Le principal combat de Rey pendant la période de guerre va être autour du charbon. Dès avril 1915, il s’indigne qu’il atteigne, à Joinville, « des prix de famine », alors qu’il est deux fois moins cher à Saint-Maur et Maisons-Alfort où les municipalités ont fait des achats collectifs. Constatant, selon lui en octobre 1915, que « la municipalité ne fait rien », Rey lance le projet d’achat collectif d’une cargaison de charbon à Rouen. Il sera ensuite piloté par Georges Briolay  à partir de juin 1916. Une centaine de personnes souscrivent, venant de Joinville et de communes voisines. La municipalité achète un stock qu’elle compte revend à la population pour faire concurrence à l’achat groupé de Rey et Briolay.

Le prix du gaz est aussi dans le collimateur de Rey. Il remarque en janvier 1916 que des municipalités, notamment socialistes, ont refusé la hausse demandée par la compagnie du gaz, mais pas Joinville, contrairement à Nogent et Saint-Maur. Il approuve les quelques élus SFIO qui se sont prononcé contre l'augmentation. Le conseil de préfecture finira par l’annuler en décembre 1916.

Une très vive polémique va éclater, en janvier 1916, quand Rey reproche au maire de Joinville, Ernest Mermet, de faire des « largesses » avec la subvention que la société du Bi-Métal a remise pour la commune. Selon lui, il aurait dû la remettre au bureau de bienfaisance au lieu de l’utiliser « comme bon lui semble ». Le maire annonce qu’il veut intenter un procès contre Voix des communes, « organe de diffamation et de calomnies ». Les membres du bureau de bienfaisance et les élus, notamment les socialistes, protestent contre l’attaque de Rey et soutiennent Mermet.

Une boucherie municipale ayant été mise en place en mars 1916, vendant de la viande congelée, Rey critique le fait que, étant exemptée de taxes, elle fait une concurrence déloyale aux bouchers. Il soutient que, malgré cela, la viande est plus chère à Joinville qu’à Maisons-Alfort et affirme que la commune aurait le record de la vie chère. Racontant le début de la guerre comme il l’a vécu, Rey parle d’une émeute, le 2 août 1914, sur le marché d’alimentation quand les acheteurs eurent constaté l’augmentation des prix des pommes de terre ; des étals furent renversés. Des laiteries Maggi ont été mises au pillage, car il s’agissait d’une marque allemande.

S’agissant des boissons alcoolisées, Rey s’inquiète du déficit de la récolte de 1915. Il approuve la contestation par des débitants joinvillais de l’arrêté d’interdiction partielle de vente, désapprouvant qu’on utilise des agents pour verbaliser les débits de boisson qui ouvriraient après 22h ou avant 11h.

Annoncé comme souffrant en avril 1916, Rey reconnaît le mois suivant qu’il « a manqué à son devoir et au plaisir d’écrire pour la première fois depuis 9 ans ». Il s’absentera de nouveau en août pour raisons de santé.

Alors que la publication de Voix des communes était stoppée depuis plus d’un an, Louis Rey meurt le 5 août 1918 à son domicile de Joinville, quai Hector-Bisson (act. quai Gabriel-Péri). Il était âgé de 71 ans et n’avait pas eu d’enfant. Il continuait d’exercer son métier d’expert chimiste.

Rey était chevalier de la Légion d’honneur, décoré des Palmes académiques comme officier d’académie, officier du mérite agricole et avait reçu de nombreuses distinctions professionnelles ainsi qu’une médaille militaire.

Fin

La Marne à Joinville gelée, hiver 1917

 

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27 mars 2020 5 27 /03 /mars /2020 00:01

Suite de la biographie de Louis Rey

Après la victoire des dissidents, une des premières décisions du nouveau conseil municipal fut de donner congé, en août 1912, à Louis Rey et à son épouse qui louaient une propriété communale dans le quartier de Polangis, rue des Platanes, après en avoir doublé le loyer. Rey avait obtenu un bail d’une ancienne propriétaire, puis celle-ci avait à son décès légué l’immeuble à la ville, qui avait maintenu le locataire dans les lieux avant d’en faire usage. La famille Rey déménage alors quai Hector-Bisson (act. quai Gabriel-Péri), dans une maison nommée Villa des flots, près du barrage sur la Marne.

Homme aux engagements multiples, Louis Rey avait besoin d’organes de presse pour s’exprimer. Il écrivit dans un quotidien national, Le Voltaire, dans les années 1880. Il eut ensuite une rubrique dans le Bulletin commercial puis dirigea une publication professionnelle, le Bulletin vinicole, dans laquelle il n’hésitait pas à prendre des positions politiques. Après son installation à Joinville-le-Pont, il s’intéressa à la presse locale

L’hebdomadaire Voix des communes, fondé en 1883, fut jusqu’en 1935 (avec deux arrêts de parution au début puis à la fin de la première guerre mondiale) le premier puis un des principaux journaux d’information locale sur la partie Nord de l’actuel Val-de-Marne, couvrant principalement les communes des cantons de Charenton-le-Pont, Saint-Maur-des-Fossés et Nogent-sur-Marne.

Au sein de l’hebdomadaire, une chronique hebdomadaire consacrée à Joinville-le-Pont est créée en juin 1884 et assurée, jusqu’à sa mort en 1896, par Henry Vaudémont. Elle est poursuivie, de manière irrégulière jusque l’été 1901 par Félix Salmon puis par Louis Dehné (alias Ludovic) qui l’assure jusqu’à sa disparition en juillet 1902. Louis Rey devient le chroniquer pour Joinville à partir du 25 juillet 1908. Il avait, les mois précédents, envoyé plusieurs courriers déjà publiés. Pendant cette période, le directeur Alfred Westphal

Alfred Westphal (1869-1928), négociant et industriel était le trésorier de la Ligue des droits de l’Homme. Protestant, il était responsable radical à Charenton, président du Comité central d’union et d’actions républicaines de la 2e circonscription de Sceaux en 1909. Il avait repris la Voix des communes en 1907 après la mort de son président-fondateur, Gaston Meynet, ancien maire d’Alfortville. Il le maintint en tant qu’organe du parti radical-socialiste.

Étant le doyen des rédacteurs de Voix des communes, c’est Rey qui préside à une réunion de toute la rédaction chez Alfred Westphal en mai 1911. Il poursuit sa chronique jusqu’en décembre 1916 et peut-être au premier semestre 1917 (mais la collection pour cette année-là n’est pas conservée aux archives du Val-de-Marne).

Rey avait, comme Henry Vaudémont avant lui, l’ambition de jouer un rôle politique sans nécessairement se mettre au premier plan. S’il n’avait pas le talent littéraire de son prédécesseur, il avait cependant l’art du dialogue théâtralisé. Il publie ainsi, sous le pseudonyme d’Ironiste d’abord puis d’Un radical-socialiste ou d’EB, Les aventures du balai, dans lesquelles il met en scène ses adversaires Eugène Hainsselin et Théophile Leteuil, satyre en 13 épisodes de la vie politique locale en 1908-1909.

Ses critiques acerbes lui valent parfois quelques ennuis. Ainsi, quand en septembre 1908 il traite le conseiller municipal indépendant, le Dr Gripon, de « morphinomane », c’est le rédacteur en chef du journal radical, A. Deyres, qui doit présenter des excuses. La même année, à une date inconnue mais probablement fin novembre, il rencontre en duel Eugène Hainsselin, qui publiait le journal l’Indépendant, qui n’est pas sorti vainqueur de la rencontre, selon Rey. En août 1912, reprochant au responsable d’un petit journal conservateur, Jean Contoux, d’avoir publié une liste de francs-maçons de la région à partir de documents volés, il le traite de « fripon ». Jean Contoux se plaint auprès du gérant de ne pas pouvoir provoquer Rey en duel, car, comme il a 65 ans, il se « couvrirait de ridicule ». Mais il entend demander à Westphal de lui rendre raison « aussitôt qu’il sera rentré de vacances. »

À suivre

Signature de Louis Rey en 1909

 

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25 mars 2020 3 25 /03 /mars /2020 00:01

Suite de la biographie de Louis Rey

Tout en continuant à résider à Paris, Louis Rey prend en location une maison à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), dans le quartier de Palissy, d’abord avenue Naast  puis dans une propriété municipale inoccupée, rue des Platanes. Il y réside, avec son épouse, principalement aux beaux jours.

À partir de 1908, Rey, s’il conserve des activités dans le 4e arrondissement de Paris, en particulier comme membre de la commission scolaire où il siège depuis 1887 et est encore réélu en 1908, va cependant inscrire son activité politique dans sa nouvelle résidence.

Lors des élections municipales de mai 1908, il est présent sur la liste du comité radical-socialiste de Joinville, qui est présidé par Albert Gallas. La liste comprend, derrière le maire Eugène Voisin. Elle s’oppose à deux listes incomplètes, celle du comité socialiste évolutionniste qui comprend d’anciens socialistes comme Eugène Hainsselin et des personnalités plus à droite comme Provin ou Leteuil, et une autre qui a le soutien du parti socialiste SFIO, nouvellement constituée, conduite par Henri Lacroix.

Les 23 candidats radicaux obtiennent 604 voix en moyenne soit 45% des votants. Les 17 évolutionnistes recueillent 500 suffrages (37%) et les 5 socialistes SFIO 252 (18%). Il y a 6 élus au premier tour. Au total, la liste radicale gagne 21 sièges, les opposants évolutionnistes en ont un et il y a un indépendant. Louis Rey est élu au second tour avec 574 voix soit 48,2% des 1 189 votants.

Au sein du conseil municipal, il devient le porte-parole des radicaux, dont l’influence est contestée tandis que le maire, Eugène Voisin, au pouvoir depuis 1888 et dont la santé se dégrade, voit son autorité baisser. Rey polémique, au conseil et par journaux interposés, avec les élus et groupes d’opposition. François Provin, l’élu de la liste évolutionniste, prendra d’ailleurs prétexte du comportement de Rey pour démissionner en novembre 1908 : « je ne saurai siéger au conseil avec le sectaire qui nous traite de ratapoils et de ratichons ». L’autre élu indépendant, le docteur Gripon, qui a au premier semestre 1909 des ennuis familiaux et judiciaires, s’indigne que Rey soit « un intriguant prétentieux et borné. »

Conseiller actif, Rey tient le compte des réalisations, comparant par exemple en septembre 1908 ce qui a été fait par rapport à ce que demandaient les programmes des trois listes. Il s’intéresse en particulier à ce qui touche aux enfants, écoles et patronage, ainsi qu’à l’organisation de séjours pour les enfants de Joinville à la montagne, en l’occurrence dans son Ardèche natale. Rey s’intéresse aussi à l’hygiène publique et à la vie associative. Dans ce domaine aussi, il n’échappe pas à la controverse : ainsi, il encense la société de l’Allaitement familial, laïque, mais est accusé de calomnie pour avoir considéré que l’Union des mères de famille, catholique, faisait un tri parmi les personnes secourues.

Gardien de la ligne politique, Rey est élu électeur sénatorial en décembre 1908. En mars 1909, le conseil municipal et le comité radical et radical-socialiste organise un banquet en l’honneur de la médaille de chevalier de la Légion d’honneur que reçoit Rey et des Palmes académiques qu’obtient un autre radical, Georges Briolay, adjoint au maire.

Une élection partielle étant rendue nécessaire par l’élection au sénat d’Adolphe Maujan Rey soutient le candidat radical Amédée Chenal contre le socialiste SFIO Albert Thomas, appelant les républicains à voter « contre le représentant de la lutte de classes, pour celui qui représente la solidarité de tous les français dans la République sociale ». Il est élu.

À partir de mai 1909, un problème de voirie va dégénérer en crise politique locale. Un entrepreneur, Castella, utilise une rue de Joinville, le chemin de Brétigny (act. avenue du Président-Wilson), pour faire circuler des tombereaux de boues depuis le port sur la Marne provoquant une dégradation de la chaussée. La ville veut qu’il paie les réparations, ce qu’il conteste longtemps. Tous les opposants se retrouvent pour attaquer la majorité municipale, et notamment Rey : les socialistes, les royalistes, les libéraux… Ils utilisent des arguments parfois contradictoires, accusant parfois la ville de ne rien faire, s’inquiétant d’autres fois qu’elle menace une activité qui procure des emplois.

La majorité municipale éclate en juillet 1909 sur un prétexte. Rey voulait organiser un compte-rendu de mandat uniquement auprès de ceux qui avaient voté pour la liste radicale, mais sept de ses colistiers protestent, estimant avoir à rendre des comptes à tous les électeurs. Lors de cette réunion, finalement ouverte à tous, un socialiste traita Rey de « petit Clémenceau », il répliqua « vous êtes une caricature de Jaurès. »

Après avoir visité l’exposition nationale 1909 à Saint-Cloud (Seine, act. Hauts-de-Seine) en septembre, Rey propose d’en organiser une en 1910 à Joinville. Il met en place un comité ad-hoc, mais le projet n’aboutira pas.

La polémique avec l’opposition ne cesse pas ; en novembre 1909, Rey s’en prend au socialiste SFIO Émile Lebègue, lui reprochant d’avoir un arriéré d’impôt, assurant qu’être un « mauvais contribuable amoindrit son autorité de censeur ». Lebègue lui reproche d’être logé dans une propriété communale. Rey répond : « il m’accuse d’être petit et gros, comme si ça l’excusait d’être long et maigre. J’acquitte depuis 6 ans mon loyer à la commune, il n’a pas payé ses taxes. »

Toujours violemment anticlérical, Rey fait adopter une protestation contre l’exécution du pédagogue et anarchiste espagnol Francisco Ferrer, après l’insurrection de Barcelone. Il propose en janvier 1910 de créer un square ou un jeu de boules sur le terrain autour de l’église, ce qui est contesté par le curé, qui fait remarquer que le terrain accueille déjà la morgue.

L’affaire du chemin de Brétigny, que Rey croyait résolue fin 1909, continue cependant en janvier 1910. Une réunion publique, à laquelle participent les sept conseillers municipaux qui se sont détachés de la majorité radicale, exige que, à défaut d’exécution des travaux le 31 janvier, la municipalité démissionne. Cependant, une violente inondation de la Marne touche Joinville ce même mois, laissant tous les quartiers riverains sous les eaux pendant plusieurs semaines.

Malgré le contexte de submersion, la campagne électorale pour les élections législatives générales de mai 1910 est lancée. Face au socialiste Albert Thomas et à un libéral, Daboncourt, le parti radical-socialiste a investi Louis Bonnet, ancien adversaire à l’épée de Rey, mais qui sont réconciliés. Bonnet n’arrive qu’en deuxième position, loin de Thomas. Bonnet s’efface mais un radical indépendant, Adolphe Chéron, se présente au second tour. Rey avait annoncé que, si Bonnet devait se retire, il voterait pour Thomas « parce qu’il est trop intelligent pour ne pas évoluer une fois élu ». S’il dit regretter le vote il assure : « nous ne désespérons pas de la République radicale-socialiste ». Il change cependant d’avis : « J’abandonne Thomas pour venir à Chéron, préférant la grive républicaine au merle des unifiés ». La situation n’est pourtant pas très claire, car si Chéron est soutenu par les radicaux de la circonscription, du fait d’un accord fédéral, Thomas a le soutien du parti radical-socialiste. Thomas est élu. Il sera ministre pendant la première guerre mondiale puis maire de Champigny et directeur du Bureau international du travail après-guerre. Rey n’est pourtant pas peiné du résultat : « Thomas est élu, vive Thomas ! C’est un homme d’une haute culture intellectuelle. Thomas jaunira. C’est le lot des unifiés qui ont quelque chose dans le cerveau que de ne pas rester esclave du syllabus guesdiste ». Les revirements de Rey ont cependant des conséquences locales dont il témoigne dans la rubrique qu’il tient au sein de l’hebdomadaire Voix des communes : « Des évolutionnistes et des ratapoils sont venus dimanche dernier entre 11h et minuit crier sous ma fenêtre avenue des Platanes Vive Thomas !, m’invectivant et me criant de donner ma démission du conseil municipal et conspuant Voix des communes. »

L’échec législatif, dans une circonscription acquise aux radicaux depuis le retour au scrutin majoritaire en 1889, provoque des incidents. Plusieurs commerçants joinvillais assurent, selon Rey « Nous voilà débarrassés des radicaux ! » ou « les démissions pleuvent chez le président Gallas, c’est la débandade ». Reconnaissant la crise, Rey tente de la relativiser. Sur 80 adhérents au comité radical, il compte quatre démissions dont celles de trois élus.

La fin de l’inondation et celle de la période électorale relance de nouveau l’affaire du chemin de Brétigny. Rey est toujours l’objet d’attaques de ses adversaires : le conservateur Louis Gallas parle de lui comme d’un « petit gnome (vous le reconnaîtrez facilement au ruban rouge qui orne, on ne sait trop pourquoi d’ailleurs, sa boutonnière) ». Quant au socialiste Lebègue, il le traite « d’échappé de séminaire, zouave en rupture de courage, chimiste raté, empereur de carton, comédien de la salle des trois escobardes, habile jésuite, petit garçon… ». Rey assure n’avoir jamais mis les pieds au séminaire et compter quelques amis dans le parti SFIO.

La gestion de l’inondation devient aussi une source de polémique. Théophile Leteuil, candidat aux élections de 1908 sur la liste évolutionniste, se proclame président d’un Groupement des sinistrés de Joinville et met aussi en cause la gestion de la caisse des écoles. Rey récapitule attitude « girouettesque » : boulangiste en 1889, radical en 1900, évolutionniste en 1908, socialiste en 1909, proche des libéraux en 1910. Il regrette ces changements, car Leteuil fut son parrain lorsqu’il arriva à Joinville – qu’il lui fournissait du vin « excellent. »

En 1911, la crise s’accentue chez les radicaux avec la démission de leur président local Albert Gallas. L’un d’entre eux s’inquiète : « Y aura-t-il en 1912 une liste radicale et radicale-socialiste ? Y aura-t-il seulement un comité radical ? J’ai peur que non. Dès à présent, ce comité n’existe plus. Ce n’est même plus l’ombre d’un comité ». La réunion de compte-rendu de mandat du conseil municipal le 16 février met en scène la fracture, quatre dissidents (Watrinet, Vel-Durand, Mermet et Arnaud) se faisant applaudir à la fois par les socialistes et les évolutionnistes. Lebègue (SFIO) dénonce « l’incurie et la mauvaise gestion municipale » et appelle la municipalité à démissionner. À 23h, les conseillers municipaux qui, l’hiver, habitent Paris, demandent la permission de se retirer pour prendre leur train : c’est le départ de Guelpa, Roux, Boileau, Nivelet et Rey, tous fidèles du maire Eugène Voisin, souffrant. Des cris de « démission ! démission ! » fusent de la part des unifiés, évolutionnistes et libéraux.

Le libéral Louis Gallas considère que les quatre dissidents « ne veulent plus obéir servilement aux injonctions de la franc-maçonnerie » et reprend dans Le Courrier libéral des assertions de Lebègue qui considère Rey « comme un dégoûtant et répugnant personnage, ayant été chercher la Légion d’honneur qui orne sa boutonnière dans une officine louche de placement gratuit ». Rey assure que « Si la loi de 1904 sur l’abolition des bureaux de placement payant, trafic honteux du travail des prolétaires, a été votée, j’en suis le premier artisan. (…) Sept ans avant la loi de 1884 sur les syndicats, je créais des associations ouvrières et j’y instituai des offices de placement mutuel qui ont été honorées de récompenses aux expositions universelles de 1889 et 1900, économie sociale. Le ministre du travail voulut bien reconnaître la part prise par moi à cette émancipation des travailleurs. »

Un dernier évènement va renforcer la confusion au sein du conseil municipal. Rey dénonce un scandale avec des faits répréhensibles se passant depuis deux ans dans une classe de l’école de Polangis, dénoncés par une mère d’élève. Avec le directeur de l’école, les élus dissidents – qui sont devenus six – reprochent à Rey d’avoir mis l’affaire sur la place publique alors qu’il ne s’agissait que d’enfantillages ; il répond « Que la divulgation ne soit pas correcte, soit ; elle était nécessaire, les scandales ont cessé ». Il assure qu’il défend « la moralité des enfants des pauvres. »

Sept conseillers municipaux ayant démissionné en avril 1911, il devient nécessaire d’organiser des élections municipales complémentaires en mai. Rey qualifie les démissionnaires de « saxons ». Six d’entre eux se représentent. Anciens radicaux, ils ont désormais le soutien des socialistes unifiés et des libéraux. Rey s’étonne de l’attitude d’Henri Vel-Durand, l’un des plus en vue et futur maire de Joinville : « J’ai défendu Vel-Durand quand il était attaqué et qualifié de juif (…) Vel-Durand renierait son meilleur ami, s’il en avait, pour servir ses intérêts ». Les démissionnaires sont réélus face à une liste constituée par des commerçants. Rey assure que la réorganisation du parti radical-socialiste s’impose et annonce vouloir démissionner. Un de ses amis, Paul Guelpa, conseiller municipal, lui envoie une lettre ouverte formulée ainsi : « à SM Rey, empereur de Joinville. Malgré les objurgations de vos amis, vous persistez à rester démissionnaire ? Vous, le fougueux polémiste, vous resteriez étourdi au premier choc ? Descendez de votre trône, soyez le citoyen Rey. Vous prétendez être la cause directe de l’élection des dissidents ; leur succès est une victoire d’intrigues unifiés-réactionnaires. La majorité républicaine du conseil a besoin d’union. »

Répondant à Paul Guelpa, Louis Rey assure « J’ai ri de bon cœur. Pendant 3 ans, nous avons fait notre devoir, rempli notre mandat. J’ai dépensé sans compter mon activité et mon temps, j’ai pris à cœur mon rôle de conseiller municipal. J’ai défendu la municipalité et le conseil municipal attaqués par Lebègue et Leteuil. Je reste empereur, c’est autrement gai que de siéger à côté d’un croquemort comme vous allez être obligé de le faire. Vive Joinville, à bas les Saxons et leurs alliés les calotins ! » S’il ne démissionne pas, il ne siègera plus au conseil municipal.

Le comité radical-socialiste est en désarroi et son bureau démissionne tandis que certains membres demandent l’exclusion des élus dissidents. Vel-Durand répond qu’en attaquant Rey il attaque celui qui voulait être le maître du conseil municipal et qui attaquait tout le monde. Georges Briolay devient le nouveau président du comité. Diot, conseiller municipal, rejoint les sept opposants.

Pour les élections municipales générales de mai 1912, Rey assure qu’il n’est pas candidat. Il soutient par contre le comité radical-socialiste qui compte, selon lui, près de 100 adhérents et appelle « à l’union des radicaux ». Rey approuve « Soldat discipliné du parti, j’obéis, je veux oublier les attaques qui m’ont meurtri parce que j’avais fait mon devoir, j’espère que les citoyens Vel-Durand, Mermet et Poitevin, qui se recommandent du parti, feront de même et nous aideront à combattre la liste que Dalbavie est en train de recruter pour mettre hors de la mairie les républicains radicaux-socialistes dont ils font partie. »

Présentant son propre rôle, Rey indique « L’on m’a présenté aux électeurs de Joinville comme le maire occulte, une espèce d’éminence grise. (…) c’est me faire beaucoup d’honneur, me prêter beaucoup de pouvoirs, il n’en est rien. »

Les élections municipales de mai 1912 voient, au second tour, la victoire d’une alliance inédite entre trois listes présentes au premier tour : les dissidents radicaux, les libéraux et conservateurs et les socialistes SFIO contre la liste radicale conduite par Georges Briolay. Un des dissidents, Ernest Mermet, devient maire.

À suivre

Une caricature du naufrage du radicalisme en 1910

 

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21 mars 2020 6 21 /03 /mars /2020 00:01

En novembre 1890, Louis Rey s’amusait beaucoup qu’un tribunal eût fixé une valeur marchande à l'eau de Lourdes. Il racontait l’histoire suivante au critique dramatique et journaliste Francisque Sarcey, chroniquer du quotidien XIXe siècle : « Un de mes amis, m'écrit M. Louis Rey, propriétaire de bagares qui chargent sur le port les marchandises qu'on transbordera, à Pauillac et à Royan, sur les grands navires qui vont au Brésil, avait commission d'un moine franciscain d'embarquer des fûts remplis de l'eau miraculée, pour les transporter et les transborder sur un navire dans le port de Pauillac. Il arriva que pendant la manœuvre un des précieux fûts subit un accident : il fut défoncé, et l'eau de Lourdes se répandit dans la Garonne. Le mal, après tout, était réparable. Le chef de manœuvre avait offert de puiser dans la Garonne, à la même place, de quoi remplir un autre fût ; sans doute, la vertu miraculeuse de l'eau eût été quelque peu diluée, mais il en serait toujours bien resté quelque chose. Et puis, vous savez, il n'y a que la foi qui sauve. Le moine qui assistait au chargement fut inflexible. C'était de l'eau de Lourdes qu'il voulait, de l'eau sans mélange; il refusa avec horreur l'idée de l'étendre avec de l'eau puisée dans la Garonne. Il exigea des dommages-intérêts. On plaida. Savez-vous à combien fut estimée la barrique défoncée, contenant et contenu ? A trois cents francs que mon ami paya, enchanté d'avoir acquis, fût-ce à ses dépens, la preuve que l'eau de Lourdes était une marchandise comme une autre, un peu plus chère même que beaucoup d'autres. Car à cent francs, on a du bordeaux très passable. »

Francisque Sarcey faisait remarquer que, quelques années plus tôt, sous la période de l'ordre moral (1873-1876), « il nous en coûtait à nous-mêmes, au XIXe Siècle, 6 000 francs pour avoir pris la liberté de nous moquer des bons pères de Lourdes et de leurs bouchons. »

Anticlérical affirmé, Louis Rey était également franc-maçon. Certains de ses adversaires réactionnaires tentaient de le mettre en cause pour cela, par exemple en publiant une liste des francs-maçons de Joinville dans un journal conservateur, l’Écho républicain. Dans son propre hebdomadaire, Voix des communes, Rey répondit qu’il s’agissait de « braves gens » et que « en ce qui concerne Joinville, il y manque une soixantaine de nos frères ». Le quotidien d’extrême-droite La Libre parole fait de même en mai 1912.

Dans la commune, Rey avait mis en place une Union fraternelle, qui regroupait les francs-maçons appartenant à différentes loges autour d’un banquet annuel et d’un bulletin hebdomadaire. En octobre 1909, l’Union fraternelle adhère au programme du Parti radical et radical-socialiste, adopté au congrès de Nantes. Elle exprime sa sympathie pour Francisco Ferrer (1859-1909), pédagogue et anarchiste espagnol, fusillé après sa participation à l’insurrection de Barcelone au cours de l’été 1909.

Dans un climat politique local très tendu, la franc-maçonnerie est une cible. En mai 1911, Rey témoigne dans Voix des communes : « On avait sur le marché exposé un mannequin couvert d’emblèmes maçonniques qu’on devait ensuite brûler. C’est de l’intolérance. La peur du commissaire a empêché l’autodafé du bonhomme de paille. »

L'anarchiste et fondateur de "l'école moderne", Francisco Ferrer (Wikipédia)

 

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15 mars 2020 7 15 /03 /mars /2020 00:01

Suite de la biographie de Louis Rey. (mise à jour)

Rentré en 1873 d’un service militaire marqué par la guerre contre l’Allemagne en 1870 et une expédition en Algérie l’année suivante, Louis Rey retourne en Ardèche, dans le village de ses parents, Le Cheylard. Il est cuisinier quand il épouse, en mai 1875 à Lyon (2e arr.) Marie Louise Eulalie Vénard, cafetière dans cette ville, originaire de Fay-le-Froid (act. Fay-sur-Lignon, Haute-Loire).

Rey vient à Paris cette même année 1875. En 1879, il est embauché comme secrétaire-archiviste à la Chambre syndicale des marchands de vin. Il s’inscrit la même année aux cours du soir des Arts-et-métiers. Il a pour professeur de chimie Charles Boutmy, membre de la Société des ingénieurs civils de France et M. Robinet, ce qui lui permet ensuite d’exercer le métier d’expert chimiste, toujours pour la Chambre syndicale.

Devenu un spécialiste des vins, Rey fait plus de 1 000 expertises par an selon un témoignage de 1908. À la tête de son laboratoire syndical, il oppose au laboratoire municipal parisien. En mars 1889, il demande le changement du directeur de cette institution, qu’il accuse d’incompétence, dans le quotidien La Lanterne. Deux mois plus tôt, ce même journal avait noté que de nombreux débitants de vin s’adressaient à lui après avoir voté pour le général Boulanger lors d’élections législatives partielles, en espérant qu’il allait les débarrasser du laboratoire municipal, et en ayant constaté que ce n’était pas le cas.

S’intéressant beaucoup à la législation viticole, Rey s’oppose notamment aux mesures visant à interdire le mouillage des vins avec de l’eau, une pratique courante, selon lui, mais critiquée par les viticulteurs du Midi de la France. Les marchands parisiens y voient au contraire un moyen de proposer un vin à meilleur marché avec un titrage d’alcool inférieur, pour des productions venant d’Espagne ou d’Algérie.

Sa réputation fait qu’il est nommé en 1905 par les ministres de l’agriculture et du commerce membre de la commission extra-parlementaire chargée d’examiner le règlement d’administration publique pour la répression des fraudes dans les denrées servant à l’alimentation des hommes et des animaux. Désigné également comme expert auprès du tribunal de la Seine, il refuse d’y siéger, faisant état d’un excès de travail.

Constructeur d'appareils scientifiques, Louis Rey est notamment l’inventeur d’un sulfatomètre de poche et à étagère en 1890 et, deux ans plus tard, d’un œnomètre. Il réunit instrument les deux modes les plus usités de dosage de l'alcool, alambic et ébullioscope.

Rey fut le fondateur en 1890 du Syndicat des chimistes et essayeurs de France. Il est en 1904 également le fondateur et administrateur d’une société d’assurance décès et d’achats en commun appelée Les Mille débitants et basée à son bureau du 32, quai des Célestins à Paris.

Les activités professionnelles de Louis Rey lui valent de nombreuses récompenses. Il participe à l’exposition universelle de Paris en 1889 et reçoit une médaille d'or en tant que collaborateur des syndicats. Également partie prenante de l’exposition universelle de Paris en 1900, il cumule une médaille d'argent d’économie sociale et une médaille de bronze pour publication. C’est également pour son travail dans le milieu vinicole que Rey est fait chevalier du mérite agricole en 1891 puis officier en 1904, décoré à chaque fois par les ministres en poste, Develle puis Mougeot.

À suivre.

L'œnomètre de Rey

 

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23 février 2020 7 23 /02 /février /2020 00:01

Joseph Alphonse Louis Bourguignon naît le 2 juillet 1857 à Gentilly (Seine, act. Val-de-Marne). Il est le fils d’Adèle Marié Zélie Sigot, couturière, et de Joseph Bourguignon, menuisier en bâtiment puis mégissier.

Marié en mai 1880 à Paris (13e arr.) avec Joséphine Louise Dupré, blanchisseuse, ils vivent dans cet arrondissement passage Prévost, puis dans le 20e arr., rue des Amandiers. Ils auront sept enfants.

Il exerce en 1880 le métier de layetier emballeur, qui consistait à emballer les affaires de riches clients qui partaient en voyage. Il sera ensuite emballeur pour la société Couesnon puis, à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne) où il réside depuis 1900, pour la société Jougla (films et appareils photographiques et cinématographiques).

La rue dans laquelle ils s’installent, dans le nouveau quartier de Polangis, est désignée dès 1900 comme « rue Bourguignon ». Ils en sont alors les seuls habitants. Lors du classement de cette voie, avec les autres artères du quartier, dans le domaine public communal par arrêté préfectoral du 26 novembre 1926, la dénomination est conservée. Elle est cependant modifiée ultérieurement pour devenir « rue des Frères-Lumières. »

En janvier 1907, Bourguignon est un des membres fondateurs de la société de secours mutuels intitulée « les Trente-Cinq de Joinville-le-Pont ». Elle a pour but d'assurer à ses participants des secours en cas de maladie ou blessure et est présidée par Alfred Mallet, mécanicien, résidant dans le même quartier, avenue Pauline. Bourguignon, demeurant à Joinville-le-Pont en est le secrétaire-trésorier. Peut-être peut-on la rapprocher d’une autre mutuelle, l’Assurance fraternelle de Joinville et Nogent, qui est fondée en octobre 1909 par des résidents du quartier de Polangis ; elle a pour premier président Chéri Arnaud (1875-1931), sellier, négociant puis industriel, conseiller municipal de Joinville-le-Pont (1908-1929). Le gendre de Bourguignon, Paul Jouve, devient trésorier de l’Assurance fraternelle en 1924, puis président en 1928.

Joseph Bourguignon meurt le 2 septembre 1933 à Joinville. Il était âgé de 76 ans.

 

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7 février 2020 5 07 /02 /février /2020 00:01

Marcel Robert Gastal naît le 14 mars 1910 à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Il est le fils de Charlotte Léontine Guillon et de Casimir Paulin Gastal, mécanicien dans l’aviation militaire, militant et élu socialiste, responsable coopératif. Ils vivent dans le quartier de Polangis, avenue Pauline puis déménagent en 1912 à Vincennes, rue du Midi, et s’établissent en 1919 à Nanterre, rue du Bois et enfin rue Saint-Germain.

En 1931, Marcel Gastal est employé à l’Union des coopérateurs de Paris (UDC), dont son père est adhérent, comme secrétaire de la direction commerciale. La même année, il épouse, en octobre à Clamart Denise Albertine Pagès. Militant syndicaliste, il est chef de service à l’UDC en 1939. À ce moment, il vit à Paris (20e arr.), rue Alphonse-Penaud.

Après la deuxième guerre mondiale, Marcel Gastal devient directeur commercial de l’UDC en 1953 puis directeur en 1955. Il quitte cette fonction en 1961, pour devenir président-directeur général de la société coopérative nationale d'assurances La Sauvegarde, dont il présidait déjà le conseil d’administration depuis 1960. Il assume cette fonction jusqu’en 1975, date de sa retraite.

Parallèlement, Marcel Gastal était membre du comité exécutif central de la Fédération nationale des coopératives de consommation (FNCC) jusqu'en 1975. Il fut également président de l’Institut de prévoyance et de retraite des cadres et assimilés de la FNCC (IPRCA) et administrateur l’Union coopérative de Crédit ménager, de la SACM, de la Société des Hôtels Coop, de la Société coopérative d'équipement, de la Caisse interprofessionnelle du logement, de la CPAV, et de l’Association pour l'emploi des sociétés coopératives de consommation de la FNCC. Il avait, en 1953, été nommé membre du comité départemental des prix pour la Seine en tant que représentant des coopératives de consommation.

Intervenant régulièrement dans les congrès coopératifs, Marcel Gastal présenta, lors du 37e congrès de la FNCC à Cannes, en juin 1954, un rapport sur « Comment accroître la productivité du mouvement coopératif ». Il publia plusieurs articles, notamment dans Coopération, organe de la FNCC, ou la Revue des études coopératives, où il signait en 1955 un Hommage à Charles Fourier, précurseur de la Coopération.

Selon un avis transmis par le consulat général de France au Mexique, Marcel Gastal est mort le 6 décembre 1987 à un endroit indéterminé entre l’île de Cozumel (Yucatán) et la ville de San-José-Chiltepec (Oaxaca). Il était âgé de 77 ans.

 

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5 février 2020 3 05 /02 /février /2020 00:01

Suite de la biographie de Casimir Gastal

Pendant la première guerre mondiale, Casimir Gastal est exclu du service armé pour entérite chronique et reste sur son lieu de travail dans une compagnie d’ouvriers de l’établissement d’aviation militaire de Vincennes. Son état de santé médiocre lui vaudra une pension militaire en 1922.

Après le conflit, Gastal se fixe à Nanterre, d’abord rue du Bois en 1919 puis rue Saint-Germain en 1920, toujours pour suivre son affectation professionnelle. Il est, en 1930, chef d'équipe de l’entrepôt spécial d'aviation n° 2.

Dans sa nouvelle résidence, Gastal adhère à l’Union des coopérateurs de Paris (UDC), où il est en charge de la promotion des cercles de coopérateurs. Il est aussi correspondant de la Banque des Coopératives. À ces divers titres, il participe aux congrès régionaux et au congrès national coopératif de 1924.

Retraité en 1934, alors qu’il n’a que 55 ans mais sans doute du fait de ses problèmes de santé, Casimir Gastal s’installa à Breuil-Bois-Robert (Seine-et-Oise, act. Yvelines), petit village à proximité de Mantes qui compte à ce moment environ 200 habitants. La commune est le fief de Marcel Bucard (1895-1946), militant d’Action française‎‎ (1918-1933) puis fondateur Mouvement franciste (1933-1944), expressément fasciste. Les cadets francistes, portant des chemises bleues, disposent d’un camp d’entraînement dans la commune. À l’issue des élections municipales de mai 1935, la presse socialiste se félicite de l’élection de deux antifascistes dans la commune ; Gastal en faisait peut-être partie. Au premier tour, il avait recueilli 17 voix pour 71 votants (24%) et cinq sièges étaient encore à pourvoir.

Membre du parti socialiste SFIO, il est prend part aux activités de la Fédération de Seine-et-Oise et est candidat dans le canton de Mantes lors du scrutin départemental d’octobre 1937. Il recueille 644 voix (9,4% des suffrages exprimés), derrière un député de centre-gauche, Bergery (2 632), le candidat de droite (1 895) et un communiste (1 191). Au second tour, il se désiste, en faveur de Bergery, dont le parti est adhérent au Front populaire et qui est élu malgré le maintien de ses concurrents communiste et radical.

Il est de nouveau candidat en mars 1939, dans une élection cantonale partielle à Houdan (Seine-et-Oise, act. Yvelines), et reçoit 83 votes (2,7%), pour 179 à un communiste, 535 à un radical-socialiste et 1 284 à Mahieu, réactionnaire, élu.

À l’issue du premier scrutin municipal suivant la deuxième guerre mondiale, en mai 1945, Gastal est élu adjoint au maire de Breuil-Bois-Robert. Il cesse cette fonction au renouvellement du conseil municipal en octobre 1947. Il était devenu président du groupe coopératif de Mantes, La Solidarité, adhérente à l’Union des coopérateurs (UDC).

En 1953, Gastal s’installa à Vigneux-sur-Seine (Seine-et-Oise, act. Essonne). Il fonda un groupe d’action coopérative et devint membre du comité général de l’UDC, dont son fils était un des cadres.

Casimir Gastal meurt le 19 février 1962 à Maisons-Alfort (Seine, act. Val-de-Marne). Il était âgé de 82 ans.

Fin

Une plaque apposée en 1862 à Breuil-Bois-Robert

 

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3 février 2020 1 03 /02 /février /2020 00:01

Suite de la biographie de Casimir Gastal

Effectuant son service militaire au sein du 4e régiment de zouaves, Casimir Gastal part fin novembre 1900 en Tunisie, où il reste pratiquement trois ans.

De retour en France fin 1903, il reprend ses activités politiques, manifestement sans avoir beaucoup apprécié son séjour à l’armée. Il intervient auprès de la Ligue des droits de l’Homme du 20e arrondissement de Paris et fait partie, en septembre 1904, des orateurs d’une réunion publique pour le départ de nouveaux conscrits sur le thème : Socialisme et antimilitarisme, l'armée et les grèves. Un ordre du jour est voté, protestant « contre l'envoi des troupes sur les champs de grève où les soudards militaires s'exercent à massacrer les prolétaires réclamant leurs droits. En attendant la suppression des armées permanentes, ils engagent les jeunes soldats qui partent au régiment à ne pas oublier que, sous la livrée de servitude ils sont toujours des prolétaires et que la classe bourgeoise ne se servira d’eux que pour maintenir sa domination capitaliste. »

À la fin de cette même année, en décembre 1904, Casimir Gastal se marie avec Charlotte Léontine Guillon, couturière, originaire d’Indre-et-Loire à Paris (20e arr.).

Secrétaire du groupe socialiste unifié, au sein de la SFIO, de son arrondissement, Gastal est un des organisateurs de la réunion électorale, rue Vitruve, qui porte la candidature, qui sera victorieuse, d’Édouard Vaillant pour les élections législatives de mai 1906 devant 1 200 électeurs.

Devenu agent technique dans l’aviation militaire, Casimir Gastal s’inscrit au syndicat des agents de maîtrise de la profession. Pour se rapprocher de son lieu de travail, dans le Bois de Vincennes, il s’installe en 1907 à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), dans le quartier de Polangis, avenue Pauline.

S’il continue d’assumer des activités politiques dans son ancien quartier parisien, Gastal s’implique également dans sa ville d’accueil. Il est candidat aux élections municipales de mai 1908 sur une liste, très incomplète, soutenue par la section socialiste SFIO avec Lacroix, Lebègue, Thiébault, et Lozet. Au premier tour, il recueille 179 sur 1 319 suffrages exprimés (13,6%). Les socialistes ne sont pas présents au second tour, les radicaux-socialistes emportant tous les sièges, sauf deux. Le maire sortant, Eugène Voisin, est réélu.

Après la naissance de son fils Marcel en 1910, la famille recueille également un neveu, Octave, orphelin du frère de Casimir Gastal. En novembre 1911, il est désigné comme membre de la commission exécutive du groupe municipal SFIO de Joinville, dont Émile Lebègue est le secrétaire.

Administrateur de la société coopérative La Travailleuse de Champigny-Joinville, Gastal y côtoie Albert Thomas, maire de la commune et député, futur ministre puis directeur général du Bureau international du travail à Genève. Il est le porte-parole du conseil en 1909 et anime le Cercle de propagande et d’étude constitué au sein de la coopérative.

Conduit, du fait de sa fonction dans les fabrications militaires, à se fixer près de son lieu de travail, Gastal déménage rue du Midi à Vincennes en 1912, où il devient sociétaire de la coopérative L’Amicale.

À suivre

La maison Denis, avenue Pauline, à Joinville

 

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