Suite de la biographie d’Achille Mermet
Les élections municipales de mai 1912 à Joinville-le-Pont se présentent dans un contexte particulier. Pour la première fois sous la troisième République, le maire sortant ne se représente pas. Le nombre de listes (quatre) est lui-même inédit : radicaux-socialistes, socialistes SFIO, libéraux-conservateurs et radicaux dissidents. De plus, les trois dernières listes ont pris l’engagement de fusionner au second tour sur une base proportionnelle, sans toutefois vouloir gérer la ville en commun. Une cinquième liste était même envisagée, celle des socialistes évolutionnistes de 1908, mais une partie de ses membres a rejoint dès le premier tour les radicaux dissidents.
L’application de ces règles fait qu’au second tour, alors qu’aucun candidat n’a été élu au premier, la liste coalisée rassemble 10 radicaux dissidents et leurs alliés, sept socialistes et six libéraux-conservateurs. Ils sont tous élus. Les radicaux-socialistes officiels n’ont aucun représentant. Achille Mermet est élu maire par 14 voix sur 23 votants. Il est probable que les socialistes unifiés, et peut-être certains conservateurs, n’ont pas voté pour lui. Le bureau municipal est complété par deux adjoints, Henri Vel-Durand, radical dissident, et Pierre Dalbavie, libéral. En juillet 1913, Vel-Durand est exclu du parti radical.
S’éloignant des attitudes anticléricales des municipalités précédentes, Mermet préside en décembre 1913 l’assemblée générale de l’Union des mères en présence du curé, le père Léon Roger.
Probablement moins motivés par la politique non locale, le groupe radical dissident laisse plus de place à ses alliés parmi les délégués sénatoriaux : en février 1914, il y a sur 9 délégués trois socialistes et quatre libéraux-conservateurs ; en mai de la même année, on note quatre socialistes et trois libéraux-conservateurs.
Le déclenchement de la première guerre mondiale prend de court la municipalité. Comme tous les étés, Mermet est à Noirmoutier, son premier adjoint Vel-Durand est à Arcachon et le second, Dalbavie est absent lui aussi. Ce sont donc des conseillers municipaux qui doivent lire le décret de mobilisation générale, Watrinet à la mairie et Beauvais dans les rues du Haut de Joinville. Mermet revient, en train, le 3 août Mermet et, selon le journal Voix des communes, est sifflé à son arrivée. Les laiteries qui vendent le produits Maggi, marque allemande, sont pillées. Une garde civique, que le maire voulait armer, est créée.
Le maire vient à la mairie tous les jours et même ses adversaires reconnaissent son labeur : secours aux familles, hygiène, ambulances, cérémonies religieuses et civiles. Dalbavie étant malade et Vel-Durand mobilisé, Mermet nomme un nouvel adjoint, Maurice Watrinet, ancien secrétaire général de la mairie et entrepreneur de pompes funèbres. Le conseil municipal fonctionne difficilement ; ainsi, en 1915, c’est le préfet qui impose un budget d’office, car les élus n’ont pu l’examiner à temps.
Malgré le climat d’unité nationale qui prévaut pendant la guerre, les animosités politiques locales perdurent et les radicaux-socialistes, avec notamment Briolay et Rey, s’appuyant sur l’hebdomadaire Voix des communes, attaquent vivement la gestion communale.
La révocation de deux professeurs de musique, début 1915, est une première occasion de critique. L’absence de réunion du conseil municipal est également mise au pilori : depuis août 1914 jusqu’en mai 1915, une seule séance publique a été organisée. La mémoire de la précédente guerre est aussi un sujet : Mermet, qui se dit volontaire de 1870, tient en suspicion l’association des Vétérans, dont Briolay est le trésorier.
Un arrêté du maire d’interdiction partielle de vente de l’alcool dans les débits de boisson est mis en cause par les commerçants, et les radicaux en janvier 1916. Le mois suivant, le ton monte fortement. Voix des communes dénonce le fait que le maire utiliserait, « comme bon lui semble » les fonds remis par la société du Bi-Métal, estimant qu’elle aurait dû être remise au bureau de bienfaisance.
La plupart des membres du conseil municipal réagissent, dans plusieurs lettres signées y compris par les socialistes : ils s’insurgent contre « diffamation et calomnie » visant le maire, assurant : « Nous sommes vos collaborateurs, vos complices ! Non seulement nous approuvons votre manière de faire, mais nous y applaudissons ». Le conseil décide que des poursuites seront demandées contre l’auteur de l’article calomnieux (Louis Rey) – ce qui sera abandonné – et vote félicitations et encouragement au maire. Le socialiste Lebègue, conseiller municipal, lui écrit « M. le maire, vous êtes pour moi un adversaire politique irréductible, mais je reconnais votre scrupuleuse honnêteté. »
Les polémiques suivantes vont porter sur l’approvisionnement de la population en charbon, la vente de viande frigorifiée ou le prêt de la salle municipale au curé qui organise une fête pour les blessés.
L’organe radical reproche en septembre 1916 : « Le maire déserte son poste en temps de guerre, il part pour Noirmoutier ». Il laisse Dalbavie « pour garder la mairie » avec un secrétaire général « accablé de travail ». Dans un des derniers articles de Voix des communes en décembre 1916, avant la suspension de sa parution, Rey s’indigne des difficultés de l’achat de pommes de terre et conclut : « Il n’y a pas de commune plus mal administrée que Joinville ! »
Au contraire, l’ingénieur Félix Marboutin assure que « Mermet apporte le réconfort, soulage les infortunes, visite les affligés, s’associe à toutes les détresses, trouve les paroles qui conviennent à toutes les situations et ne s’éclipse qu’après avoir assuré, sous la forme la plus discrète, l’avenir immédiat des malheureux. »
Mermet encourage la création de jardins potagers de guerre, pour pallier les difficultés d’alimentation des familles, sur les terres de l’ancien château de Polangis, mises à la disposition par le propriétaire, Chavignot. Il laisse les commerçants créer une monnaie locale, pour suppléer l’absence de numéraire. Dans sa commune, un hôpital américain est installé dans l’ancienne école du Parangon. Un vase hôpital canadien se crée également en 1918 dans le Bois de Vincennes.
Mais, de plus en plus souvent retenu par des problèmes de santé, Mermet se fait régulièrement représenter dans les manifestations publiques.
Le mandat de maire de Mermet aurait dû prendre fin en 1916, mais il fut prolongé du fait de la guerre jusqu’en novembre 1919. La ville comptait, au recensement de 1911, 8 349 habitants. 367 Joinvillais seront inscrits comme morts pour la France, en 1926, lors de l’érection du monument aux morts de la commune. Une partie de la population féminine travaille à la cartoucherie du Bois de Vincennes, où une garderie d’enfants est installée à leur intention en 1917. Les bombardements de Paris par l’aviation et l’artillerie allemande (qui font 22 morts et 76 blessés en banlieue parisienne, en février 1918) amènent les Joinvillais à trouver un refuge dans le tunnel du canal de Saint-Maur. Du coup celui-ci fut éclairé à l’électricité en 1918.
Le 1er décembre 1919, Achille Mermet meurt, quelques heures après qu’ait été proclamée la victoire de la liste conduite par son ancien adjoint, Henri Vel-Durand. Il était toujours juridiquement le maire en exercice. Âgé de 70 ans, il n’avait pas eu d’enfant.
Achille Mermet était attributaire de la Cocarde du souvenir, au titre de sa participation à la guerre de 1870-1871. La Société d'encouragement pour l'industrie nationale lui avait accordé une médaille de platine en 1876 puis une médaille de vermeil en 1908. Décoré des Palmes académiques, Mermet était officier d’académie depuis juillet 1889 puis officier de l’instruction publique en juillet 1900. Il avait été fait chevalier de la Légion d’honneur en octobre 1908 avec plusieurs autres scientifiques, au titre de ses 37 ans de service dans l’enseignement à l’époque (il en compta 40 au moment de sa retraite).
Dans le Larousse Mensuel-Illustré d’octobre 1921, l’ingénieur Félix Marboutin, professeur à l'École centrale, publie une notice hagiographique, insistant sur son « dévouement à l’humanité. »
Fin
Achille Mermet
/image%2F1166198%2F20201030%2Fob_63643d_mermet-larousse-1921.png)
commenter cet article …