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1 février 2025 6 01 /02 /février /2025 00:01

La poète et résistante Marietta Martin a vu son nom donné en octobre 2024 à une rue de la ville d’Arras, sa commune natale. L'inauguration de la rue Marietta Martin est a priori prévue aux alentours du 8 mars 2025. C’est l’occasion de reprendre ici sa biographie.

 

Marietta Martin, née le 4 octobre 1902 à Arras (Pas-de-Calais), est la fille d’Arthur Martin, rédacteur en chef du quotidien d’Arras, le Courrier du Pas-de-Calais, et d’Henriette Martin-Le Dieu. Orpheline de père à l'âge de quatre ans, Marietta vit avec sa mère, professeur de piano à Arras et sa sœur, Lucie. Lors de l'offensive allemande dans le nord de la France en août 1914, sa mère et sa sœur se réfugient à Paris et s'installent dans le 16ème arrondissement, où Marietta les rejoindra après un séjour en Angleterre.

Elle fait ses études secondaires au Lycée Molière, où travaille sa mère, s'inscrit comme étudiante à la Faculté de médecine puis change de voie et prépare une licence de lettres et un doctorat. Elle parle couramment l’anglais, l’allemand, l’espagnol, l’italien, le polonais et le danois. Musicienne, elle joue du piano et du violon. Marietta voyage dans une bonne partie de l’Europe, malgré une santé très délicate, et fait notamment de longs séjours en Pologne, où vivent sa sœur et son beau-frère, Adam Rosé, diplomate et ministre. Ses voyages lui inspirent la rédaction d’un essai sur Marie-Thérèse Rodet Geoffrin, visiteuse française du roi de Pologne Stanislas Auguste à Varsovie en 1766.

En 1925, elle présente sa thèse de doctorat en littérature comparée sur la vie et l'œuvre d'un médecin allemand qui a eu Stendhal pour patient, le docteur Koreff, qu’elle qualifie d’aventurier intellectuel. Elle poursuit ses travaux par un mémoire sur le Saint-Simonisme qui fait l’objet de deux articles dans le Journal des débats en 1926.

Malade des poumons, Marietta Martin passe plusieurs années en Suisse, dans un sanatorium de Leysin (canton de Vaud) entre 1927 et 1931. Elle y écrit de nombreuses lettres, parfois poignantes, mais toujours gaies et optimistes. Dans un de ces courriers, elle résume sa pensée : « S’il faut lancer un message par le monde, il ne peut pas partir porteur de douleur pour augmenter cette douleur, il serait un faux message. Si c’est un message pour la terre, ce doit être un message de corps et d’esprit ; vivre comme il faut, selon toutes les règles, l’enseignement définitif est : soyez joyeux. Il ne faut pas rester dans le bizarre chemin qui y conduit. »

Elle publie en 1933 son premier ouvrage littéraire, Histoires du paradis. Comme l’ensemble de son œuvre, elle relève d’un style mystique. Marquée par sa culture chrétienne et son affirmation de l’amour comme sens de la mort, elle assure écrire du point de vue de Dieu. Elle écrit « J'ai du respect pour le Dieu qu'ils cachent en eux » et se décrit « J'ai tellement de soleil dans mon cœur que tout ce que je regarde en est illuminé. »

Bien que n’ayant pas d’engagement politique connu, elle accepte de travailler en 1936 pour rédiger les documents de propagande de la campagne électorale de Maurice Tailliandier (1873-1951), député sortant de la 2ème circonscription du Pas-de-Calais (Arras), membre du groupe Républicain et social (droite modérée). Il sera battu par un partisan du Front populaire.

En 1938, Marietta Martin rédige en un recueil des poèmes qu’elle signe du pseudonyme de François Captif. Le livre, intitulé, Adieu temps, paraîtra en 1947. En 1939, elle rassemble la plupart de son œuvre, sauf les écrits universitaires, sous le titre d’Enfance délivrée.

L’expérience mystique de la poète Marietta Martin est marquée par une prescience de la mort et de l’engagement patriotique. Dans un cahier de 1936, elle écrit : « Nuit ! Nuit ! Non, pour toi, Nuit, il faut partir. Le soldat sait qu’il part demain. Il sait où il part ; il sait qu’il veut partir pour le lieu dont il ne sait pas le nom. Les convois de troupes vers le lieu de l’action montent en ligne pour une destination inconnue. Il n’en sait qu’une et il l’aime, il l’aime tellement, enfin ! »

Marietta Martin entre peu après le début de la guerre dans le Réseau Hector, un important groupe de combat et de renseignement de la zone nord de la France, animé par le colonel Alfred Heurteaux, officier du 2ème Bureau de l'Armée d'armistice.

Elle participe, à la demande du diplomate Paul Petit, au réseau « La France Continue », mouvement de résistance créé notamment par Henri de Montfort, journaliste et secrétaire de l’Institut de France, et Annie de Montfort. Cette dernière fut étudiante aux Langues orientales avec Marietta. On comptait également parmi les collaborateurs l’historien Émile Coornaert, Suzanne Feingold ainsi que le professeur du lycée Buffon Raymond Burgard. La chambre de Marietta, rue de l'Assomption à Paris (18e), devient la salle de rédaction du journal publié par le réseau.

La France Continue, un des premiers véritables journaux clandestins, connaîtra 12 numéros entre 1941 et 1942. Marietta Martin écrit pour le journal et assure, à bicyclette, la diffusion de numéros dans Paris. Elle en expédie également plusieurs milliers d’exemplaires par la poste.

A la suite d'une dénonciation, une perquisition a lieu dans sa chambre au cours de la nuit du 7 au 8 février 1942. Un ouvrage est saisi, intitulé « Avec Charles de Gaulle de Gaulle, avec l’Angleterre ». Il s’agirait selon le jugement rendu en 1943 d’un « écrit politique assez long, rédigé par elle et plusieurs fois remanié » ; il aurait été « mis en lieu sûr » par les autorités allemandes et n’a pas été retrouvé depuis.

Marietta Martin est inculpée de « rédaction et diffusion de publications clandestines » et accusée d'être une militante du mouvement Libération nationale. Incarcérée à la prison de la Santé, elle est déportée le 16 mars 1942 en Allemagne dans huit établissements pénitentiaires successifs. Elle est condamnée à mort le 16 octobre 1943 par le « tribunal populaire » (Volksgerichtshof) de Sarrebruck pour « complicité avec l'ennemi » en même temps que Paul Petit et Raymond Burgard.

Emprisonnée en attente de son exécution à la prison de Cologne elle est soignée par Gilberte Bonneau du Martray, dans la cellule voisine de celles d’Elizabeth Dussauze, Jane Sivadon, Hélène Vautrin et Odile Kienlen. Elle est transférée suite aux bombardements, sur une civière en raison de sa faiblesse, à Francfort-sur-le-Main. Elle y décède le 11 novembre 1944. En 1949, son corps est rapatrié à Paris. Elle est inhumée avec les honneurs militaires au cimetière de Clichy-sous-Bois, car elle a été nommée, à titre posthume, sous-lieutenant, au titre des Forces françaises combattantes.

Marietta a été décorée de la Légion d'honneur et de la Croix de guerre avec palmes. Elle a fait l’objet d’une citation à l'ordre du corps d'armée. La poète fait partie des 157 écrivains morts pour la France dont le nom figure au Panthéon de Paris. Une plaque est déposée sur son ancien domicile rue de l'Assomption à Paris (16e arr.) et une rue du même arrondissement porte le nom de « Marietta Martin ».

Une école est baptisée de son nom dans sa ville d’origine, Arras et une plaque a été déposée sur sa maison natale. En octobre 2024, une rue a été baptisée à son nom dans cette commune.

Une allée de la Forêt des écrivains combattants a été baptisée en 1961 du nom de Marietta Martin dans la forêt des écrivains combattants au sein du massif montagneux du Caroux-Espinouse, situé sur le territoire des communes de Combes (Hérault).

Voir aussi :

Portrait de Marietta Martin (arch. fam.)

 

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6 août 2023 7 06 /08 /août /2023 01:01

Suite de la biographie de Marie Rose Astié de Valsayre

Au tournant du 20e siècle, installée à Joinville-le-Pont, Astié de Valsayre poursuit de manière régulière son activité politique, sociale et féministe. On la voit ainsi participer de manière rituelle à tous les anniversaires de la libre-pensée ou sur socialisme révolutionnaire, où elle prononce des discours de circonstance mentionnés dans la presse : le 9 janvier pour l’anniversaire de la mort du révolutionnaire Auguste Blanqui, 18 mars, pour le début de la Commune de Paris, le 1er mai, en souvenir des massacres des ouvriers de Chicago et de ceux de Fourmies, le 28 mai, pour la fin de la Commune, le 3 août pour l’anniversaire de la naissance et de la mort d’Étienne Dolet, brûlé vif après avoir été condamné par l’Inquisition…

La vie privée d’Astié de Valsayre, qualifiée par un journaliste comme « Une des plus jolies femmes de Paris », intéresse la presse. On annonce en 1893 son divorce d’avec Albin Rousselet, son compagnon depuis une dizaine d’années ; on annonce aussi son mariage avec Louis Champy. Elle dément les deux. Elle annonce une candidature à l’Académie française, à laquelle elle ne donne guère de suite. Mais elle va effectivement se consacrer, de plus en plus à des travaux littéraires.

Des nouvelles signées d’Astié de Valsayre paraissent dans Le Cri du Peuple, L’Express et dans L’Humanité. Le secret d'Hermine sort sous le pseudonyme de Fernand Marceau ; l’anarchiste Han Ryner n’aime pas ce « petit feuilleton très sombre, très patriotique, très révolutionnaire et très empoignant » où un « ange féminin et français » fait face à un « salaud de prince allemand. »

Dans les œuvres on compte aussi un conte grivois, L'Amour à la hussarde, réédité en 2022.

En compagnie de Camille Hayot, qui est sans doute un acteur ayant vécu à Lausanne, Astié de Valsayre s’essaie à l’art dramatique, en proposant deux pièces au Théâtre-Populaire de Belleville en 1904 et 1905. Mais ni La Grande Coupable, ni La Chasse aux millions ne semblent avoir été jouées.

La dernière intervention publique connue d’Astié de Valsayre fut, en avril 1914, le discours qu’elle fit, en compagnie de Séverine avec celle que la presse qualifiait de doyenne des féministes, Hubertine Auclert.

Claire Tastayre, alias Marie Rose Astié de Valsayre, meurt le 8 juin 1915 à Paris (13e arr.), à l’hôpital de la Salpêtrière. Elle était âgée de 68 ans et toujours domiciliée à Joinville-le-Pont. Le contexte de la guerre fait qu’il n’y a pas eu de notices nécrologiques dans les journaux de l’époque. Par contre, plusieurs publications ultérieures rendront compte de son activité et de sa personnalité ; elles feront l’objet d’un article prochain.

Fin

Marie Rose Astié de Valsayre

 

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4 août 2023 5 04 /08 /août /2023 01:01

Suite de la biographie de Marie Rose Astié de Valsayre

Après avoir dissout en décembre 1889 la Ligue des femmes socialistes, Astié de Valsayre constitue, en juillet 1890, la Ligue de l’affranchissement des femmes. Elle a la participation de citoyenne Léonie Rouzade et le soutien de dirigeants socialistes, comme Jean Allemane, qui vient de fonder le Parti ouvrier socialiste révolutionnaire après avoir quitté la FTSF, ou Henry Louis Champy, un ancien communard et conseiller prud’homme. Une des premières actions de la nouvelle ligue est d’ailleurs de solliciter l’inscription des ouvrières comme électrices aux prochaines élections générales prud'homales. Le ministre du commerce répond en août qu’il ne le peut pas, renvoyant la demande à la commission parlementaire compétente ; le quotidien y voit Le Soleil « un bel enterrement de première classe ! » En novembre, le syndicat des blanchisseuses tentera, sans succès, de présenter des candidates à son instigation.

Astié de Valsayre participe à la création de la Revue européenne, dans les bureaux de laquelle elle installe le siège de sa ligue. Le féminisme connaît toujours des polémiques internes ; la Ligue de l’affranchissement des femmes adresse ainsi « un blâme sévère » à Séverine, la journaliste libertaire Caroline Rémy, coupable, à leurs yeux, d’avoir demandé à son compagnon, Georges de Labruyère, de sa battre pour elle en duel face à un homme partisan du boulangisme. La Ligue considère « que toute, femme, qui ne veut pas avoir la responsabilité de ses actes, en obligeant un homme à se battre pour elle, commet un crime en toute circonstance. »

Lors des grèves des ouvriers des dentelles de Calais, en octobre 1890, Astié de Valsayre, encourage « l'union défensive des sexes ». Elle poursuit son combat anticlérical, participant au congrès de la Libre-Pensée et déclarant que « le prêtre est l'ennemi mortel de l'amélioration du sort de la femme ». En décembre, sa ligue assimile le budget des cultes à un « vol légal. »

En décembre, commentant une affaire d’avortement jugée à Toulon (Var), la Ligue de l’affranchissement des femmes s’insurge contre « la coutume de blâmer les femmes, qui disposent de ce qui leur appartient le mieux : leur corps ». L’année suivante, après un nouveau drame à Paris, elle est plus explicite : « l’état social donne ainsi à la femme le droit d’avortement. »

En janvier 1891, Astié de Valsayre est secrétaire du Syndicat des couturières qui organise son congrès de fondation le mois suivant avec une cinquantaine d’ouvrières. Elle dénonce aussi la concurrence des « congrégations religieuses exploitant sur une grande échelle l'industrie du blanchissage » et responsables ainsi de « la misère féminine ».

En mars, elle tente également, sans y parvenir cette fois, de constituer un Syndicat des filles de brasserie, les « verseuses. »

La Ligue de l'affranchissement des femmes quitte parfois le terrain social, comme en mars 1891 où elle demande « la suppression en France des courses de taureaux, ces inutiles scènes de boucherie. »

Astié de Valsayre participe à la naissance de l'Union universelle des femmes, annoncée à Paris en avril 1891. Clémence Royer y proclame : « Surtout ne demandons rien, mais prenons tout. Un jour viendra où le monde sera entre nos mains. »

Manifestant le 1er mai à Paris Astié de Valsayre s’est plaint d’avoir reçu, place de la Concorde des coups de pèlerine. Mais elle n’en veut pas aux sergents de ville, qu’elle traite de « vils esclaves » selon le quotidien La République française.

Polémiquant avec d’autres militants, elle regrette que l’on ait refusé qu’elles puissent signer la pétition en faveur d’un chemin de fer métropolitain.

Faisant une conférence en juin 1891 sur La question féminine à Paris, Astié de Valsayre elle a de nouveau plaidé pour faire la femme l’égale de l’homme, relevant que la liberté du costume puisqu'elle a pour but de donner ainsi aux femmes accès à beaucoup de professions, que leur ferment justement leurs vêtements.

Cette même année, en septembre, Astié de Valsayre signale qu’elle réside désormais à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne) ; sa villa sera dévalisée en décembre 1898, lors de vacances qu’elle passait dans le sud de la France.

Elle est en 1891 la compagne du docteur Albin Rousselet, rédacteur en chef de la revue de l’Assistance publique. Sa vie familiale n’est pas sans heurts ; le deuxième fils qu’elle a eu de son défunt mari, Gaston, né en 1872, a quitté le domicile familial dès ses 13 ans. Il a de nombreux ennuis avec la police, arrêté une première fois pour vagabondage puis, en novembre 1891 pour vol. La presse parisienne ne manque pas de relater l’inconduite du fils. Elle-même le traite de « vaurien ». À ses intervieweurs, Astié de Valsayre assurera qu’elle avait un enfant « presque tous les ans » ; cependant, seuls deux garçons survécurent, tandis qu’une fille ne vécut que quelques mois.

L’installation sur les bords de Marne permet à Astié de Valsayre de pratiquer plus régulièrement le cyclisme.

En décembre 1892, la Ligue de l'affranchissement des femmes décide de présenter une quinzaine de candidates pour les élections municipales à Paris. Elles essaient, sans y réussir, d’enrôler l’actrice Sarah Bernhardt. Astié de Valsayre ne fait pas partie de la liste « faute de pouvoir tout faire ». Mais elle prépare avec elles le programme : protection de l'enfant, de la femme et des faibles, lutte contre la spéculation, dénonciation des guerres coloniales, comme au Tonkin, demande d’exclusion des curés des activités sociales. Face à plusieurs défections, Astié de Valsayre rejoint la demi-douzaine de candidates. Elle adresse dans le même temps une pétition à la Chambre des députés, demandant l’inscription de certaines femmes sur les listes électorales ; une commission rejette sa demande.

Une réunion électorale, organisée en avril 1893 rue de la Montagne-Sainte-Geneviève à Paris (5e arr.), est totalement perturbée par les lazzis des étudiants qui y sont venus pour s'amuser. Comme en 1889, les bulletins de vote à son nom dans le 7e arrondissement ne sont pas décomptés.

Les élections sénatoriales de janvier 1894 voient de nouveau Astié de Valsayre se présenter, sous l’étiquette de « candidate à perpète ». Elle prend un programme original « 1° N'aller au Sénat que pour dormir ; 2° N'y ouvrir la bouche que pour bailler ; 3° Porter une perruque blanche, pour avoir l'air suffisamment abrutie. »

En novembre 1895, après avoir démenti des rumeurs répandues dans la presse sur sa retraite politique, Astié de Valsayre fait partie du comité d’accueil de Louise Michel qui débarque gare Saint-Lazare à Paris, revenant de son exil à Londres. Elle l’accompagne à son meeting de la salle Tivoli-Vauxhall. Au retour de la longue tournée en province de l’ancienne communarde et déportée, Astié de Valsayre intervient à ses côtés dans la conférence qu’elle tient en juin 1897 sur L’imminence et la nécessité de la révolution sociale.

Exclue d’un Congrès féministe, tenu à Paris en avril 1896, Astié de Valsayre, proteste par une lettre contre « ces affreuses bourgeoises, qui ne connaissent pas le premier mot de la question ouvrière, qui semblent ignorer que la galanterie n'est concédée aux femmes qu'en échange de leurs droits et qui, véritables accapareurs, prétendent garder les deux ».

L’activité d’Astié de Valsayre ne se limite pas au domaine politique. Elle devient secrétaire d’un patronage de jeunes filles du 6e arrondissement de Paris en septembre 1890. Il les accueille gratuitement les dimanches et fêtes pour leur offrir des activités sportives et récréatives.

Au cours des années 1890, Astié de Valsayre rédige, en le signant Mère Marthe, un petit ouvrage, L’Aisance par l'économie (1892), d’une tonalité très classique à l’image des livres sur la vie domestique, expliquant que la femme doit se lever tôt, travailler beaucoup et savoir se taire. Le relatif succès du livre fait qu’il est réédité en 1902 et signé alors Grand-Mère Marthe. Ce texte est très éloigné des thèses défendues par ailleurs par Astié de Valsayre.

Renouant avec la littérature patriotique, en 1896, Le Secret d'Hermine est publié sous le nom de Fernand Marceau. Reprenant le pseudonyme de Jehan des Etrivières, elle donne peu après un texte érotique, L'Amour à la hussarde.

Dans son Histoire de la littérature française, parue en 1909, le critique Léo Claretie range Astié de Valsayre parmi les écrivains socialistes, au côté de Jules Guesde et Paul Lafargue notamment. Mais le journaliste anarchiste Han Ryner considère qu’elle a une écriture de « cantinière. »

L’activité principale d’Astié de Valsayre est toujours le journalisme. Elle fonde et dirige, de 1897 à 1901, La Femme de l'avenir, où elle publie en particulier des articles sur l'instruction des jeunes filles ou sur l'hygiène.

Sensible au thème du racisme, qu’elle fustige à plusieurs reprises, Astié de Valsayre écrit en décembre 1898 à un journal antisémite : « J’apprends que L'Antijuif organise une équipe de photographes pour prendre les instantanés des Françaises achetant chez les Juifs, et que ces photographies seront exposées dans la salle des dépêches. Je serais particulièrement flattée de figurer dans celte galerie de « mises à l’index ». Craignant donc d'être absente quand se braqueront les appareils, je m’empresse de vous faire savoir que ma photographie est à votre disposition. Un mot m’apprenant que vous me faites l’honneur de m’admettre, et mon photographe vous l’enverra immédiatement. Astié de Valsayre, secrétaire général de l’affranchissement ». Le directeur de l’hebdomadaire, qui publie sa lettre, Jules Guérin, estime qu’elle est « une des plus jolies femmes de Paris », oratrice distinguée, élégante et spirituelle. Mais il lui reproche d’avoir « demandé qu’on coupât les curés en morceaux », même s’il y voit une fantaisie d’artiste.

À suivre

Marie Rose Astié de Valsayre

 

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2 août 2023 3 02 /08 /août /2023 01:01

Suite de la biographie de Marie Rose Astié de Valsayre

Devenue une oratrice en vue, Astié de Valsayre participe de manière régulière aux actions politiques. Elle est ainsi l’oratrice principale, assistée d’Eugénie Potonié-Pierre, d’une réunion publique organisée dans la grande salle de la Bourse du travail le 15 novembre 1888 « pour la réorganisation du syndicat des dames ». Elle est cependant mécontente de l’organisation de cette réunion par le Parti socialiste possibiliste FTSF, considérant que le montant fixé pour l’adhésion au syndicat écarte de nombreuses femmes du peuple. Elle démissionne alors de la commission de réorganisation.

Mais elle va s’intéresser aux luttes menées par des travailleuses, en tenant, en janvier 1889, sous l’égide du mensuel L’Union Internationale des Femmes, un meeting au bénéfice d’ouvrières teinturières en grève, conjointement avec Louise Michel, icône de la Commune de Paris, revenue au début de la décennie du bagne de Nouvelle-Calédonie. Elle critique, dans un article dudit journal, l’inégalité salariale fondée sur le concept selon lesquels les femmes seraient des êtres inférieurs : « l’ouvrière travaille le double de l’ouvrier pour gagner moins que lui. »

Toujours avec Louise Michel, Astié de Valsayre tient au cours de l’année 1889 plusieurs réunions à Paris et en banlieue sur les questions sociales. Elle soutient l’idée que « la femme doit être socialiste parce qu'elle est l'opprimée ». Elle n’oublie pas ses combats pour le droit des femmes à s’habiller comme elles le veulent. Ainsi, elle écrit au préfet du département de la Seine en février de cette année-là : «Ayant été faire une conférence à Fontenay-sous-Bois, le 10 de ce mois, par le temps de grande neige que vous avez vu et, grâce aux jupons qui s’imprègnent jusqu’à la ceinture, en étant naturellement revenu avec un refroidissement ; Considérant que le costume féminin n’est possible que pour les femmes qui n’ont rien à faire, je vous préviens que dorénavant je m’habillerai en homme, chaque fois que mes occupations le nécessiteront. »

Parmi les thèmes favoris d’Astié de Valsayre figure celui de l’éducation. La différence entre le baccalauréat féminin et celui des garçons fait que les filles n’ont pas le droit de s’inscrire aux études de médecine. Elles doivent d’abord faire deux années complémentaires d’études pour maîtriser les langues anciennes et matières scientifiques qui étaient écartées du cursus des lycées qui leur étaient réservés. Une des conséquences est qu’elles n’ont pas accès à l’internat des hôpitaux, dont l’âge limite est fixé à 27 ans, et Astié de Valsayre demande au ministre de l’éducation de changer en premier lieu cette limitation pour les filles, avant d’égaliser les programmes en vigueur dans les études secondaires. Mais au fond, ce que Astié de Valsayre revendique, c’est « Une éducation virile, scientifique et anticléricale des citoyennes. »

Rédactrice du journal l'Égalité, prend part au Congrès français et international du droit des femmes tenu à Paris en 1889 en tant que déléguée du Cercle des femmes indépendantes de France. Elle y fait une communication sur les « Recherches sur la dissolution des mœurs et sur les moyens d'y remédier » ; sa conclusion est claire, il faut « la parfaite égalité des deux sexes et la concession à la femme de tous les droits donnés à l’homme sans exception. »

En août 1889, Astié de Valsayre prend l’initiative de fonder la Ligue des femmes socialistes, dont elle devient la déléguée. En septembre, elle participe en tant que telle au congrès de la Libre pensée. Le premier objectif de la Ligue est de présenter Des candidatures féminines aux prochaines élections législatives.

Léonie Rouzade, qui avait déjà candidaté à Paris aux municipales de 1881 et aux législatives de 1885, fait partie des quatre candidates promues par la Ligue mais elle ne donnera pas suite. Elles seront trois à tenter de s’aligner : Eugénie Potonié-Pierre, Émilie Saint-Hilaire et Astié de Valsayre. Cette dernière se présente dans la circonscription de Clignancourt à Paris (18e arr.) revendiquant l’étiquette de socialiste. Dans son programme, elle fait figurer l’abolition de la réglementation de la prostitution et la suppression du mariage.

Une réunion, convoquée par la Ligue des femmes socialistes le 19 septembre à Montmartre se fait devant une salle comble d’environ 300 femmes selon la presse, un millier pour les organisatrices. Mais l’ambiance est hostile ; ainsi, la majorité applaudit quand, selon le quotidien Le Matin, une assistante déclare que les femmes ne doivent pas s'occuper de politique.

Dans son carnet d’une candidate, pour L'Égalité, Astié de Valsayre convient qu’elle n’a pas pu « dominer le tumulte » mais se félicite qu’un ordre du jour ait été voté la félicitant, avec les autres intervenantes « de l’énergie qu'elles déploient chaque jour pour obtenir l’émancipation de la femme. »

Le préfet met de nombreux obstacles au dépôt des candidatures, même s’il ne peut les empêcher de faire campagne. Les voix qu’elle recueille ne sont pas comptées. Le général Boulanger (populiste, alors réfugié en Angleterre) obtient la majorité absolue et est déclaré élu, mais il est bientôt jugé comme inéligible et Jules Joffrin (socialiste)  proclamé à sa place.

En octobre, lançant un appel Aux femmes dans L'Égalité, Astié de Valsayre proclame « Mes sœurs, il n’y a plus d’hommes ! Le mâle se meurt, le mâle est mort et celui qui se pare de ce nom n'est plus digne de le porter ! » et elle conclut : « Il y a quelques années j’avais déjà songé à organiser un bataillon de franches-tireuses pour ces cas douloureux où il faut bien répondre à la violence par la violence !... Puisqu’il n’y a plus d’hommes, c'est actuellement le vrai moment. »

La Ligue des femmes socialiste restera une organisation politique, soutenant les grévistes, dénonçant les conditions de travail dans les couvents, promouvant les droits politiques des femmes. Cependant, suite à un conflit avec le directeur du quotidien L'Égalité, qui l’hébergeait, Astié de Valsayre démissionne en novembre 1889. Elle reproche à Roques de vouloir interdire l’adhésion d’hommes à son organisation.

À suivre

Marie Rose Astié de Valsayre

 

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31 juillet 2023 1 31 /07 /juillet /2023 01:01

Suite de la biographie de Marie Rose Astié de Valsayre

S’intéressant toujours à la médecine, Astié de Valsayre qui avait été mordue en juillet 1878 par un chien enragé à son domicile de la rue Saint-Jacques, avait elle-même cautérisé ses plaies au fer rouge, selon son témoignage, avec l’aide de son mari d’après ce dernier. Le docteur Astié meurt en juin 1881. Il lui lègue un certain capital.

Suivant, dans la presse, les travaux de Louis Pasteur, elle lui propose, en novembre 1884, soit plus de six mois avant qu’il n’en fasse les premiers essais, de lui inoculer son vaccin antirabique. Le chimiste lui répond : « Il serait très dangereux, madame, de tenter l'épreuve ». Elle insiste, sans succès, en mettant les journaux au courant de ses démarches.

En avril 1886, ayant entendu que le docteur Gruselbach, de l'Université d'Uppsala (Suède) aurait mis au point un dispositif de conservation d’être humain en les plongeant dans le froid pendant plusieurs années (cryonie) elle lui écrit pour se porter candidate. Elle n’aura pas de réponse.

Marie Rose Astié de Valsayre publie dans la seconde partie des années 1880, des textes littéraires généralement courts, comme Le retour de l'exilé, poème patriotique, qu’elle signe Jean Misère, en 1887 ou une épître, la Deuxième aux Pharisiens, la même année où elle s’adresse au grand quotidien, Le Petit Journal, en lui demandant de cesser de publier des annonces mercantiles pour les « somnambules et tireuses de cartes. »

L’intérêt d’Astié de Valsayre pour le sport, joint à sa préoccupation de l’émancipation féminine et à son patriotisme, vont provoquer sa notoriété d’une manière spectaculaire.

En octobre 1884, un journaliste du quotidien le Cri du Peuple, ayant traité Astié de Valsayre de « Veuve vautour », elle lui demanda une réparation par les armes. Mais le publiciste, nommé Polignac refusa de se battre avec une femme ; en compagnie de deux personnes, dont son compagnon Albin Rousselet, elle le roua de coups dans un café.

En décembre 1885, reconnaissant que ce qu’elle avait écrit dans les Amazones du siècle pouvait être considéré comme une offense à certaines des personnes visées, Astié de Valsayre se mit à leur disposition si elles voulaient se battre et le signifia notamment à Eugénie Pierre. Cette dernière refusa : « Je suis absolument contre le duel, et le sexe des combattants ne changerait pas mon opinion. Le duel, ce reste de barbarie, n’a jamais rien prouvé. Si Mme de Valsayre a pu m'offenser, elle m'a loyalement demandé de lui tendre la main en signe de pardon, ce que j'ai fait. »

C’est au tour d’une Américaine, miss Shelby, de se frotter, en mars 1886, à la vindicte belliqueuse d’Astié de Valsayre. Lors d’une conversation, la féministe américaine affirme la supériorité dés doctoresses françaises sur les doctoresses américaines. Comme Astié de Valsayre conteste l’affirmation, elle la traite d’idiote ; la française lui jette alors son gant au visage. Elles conviennent de régler leur différend à l’épée, sur le champ de bataille de Waterloo (Belgique). N’ayant pas trouvé de français acceptant ce rôle, les quatre témoins seront tous américains. Au second engagement, l’Américaine a été légèrement touchée au bras ; puis elle présente ses excuses à Astié de Valsayre, qui salue alors la noblesse de son comportement.

Un mois plus tard, elle s’en prend à la maréchale Booth, anglaise et responsable en France de l'Armée du Salut. Elle lui reproche les « doctrines pernicieuses » de son organisation et lui intime de quitter la France ou d’accepter son défi. La missionnaire protestante refuse de se battre, et se dérobe également au débat public que la militante laïque française veut lui imposer.

Quelques semaines après, Astié de Valsayre tint seule, et devant un petit public, une conférence sur L’escrime et la femme mettait en avant son opinion que la pratique de l’escrime contribuait à leur réhabilitation physique tout en renforçant leur rôle central de leur mission en tant que mères.

Une pétition contre « l’abus des droits paternels » est adressée à chambre des députés en janvier 1887 par Maria Martin, militante féministe qui la signe au nom du « suffrage des femmes », et Astié de Valsayre, qui s’exprime « pour les mères de France. »

C’est toujours sous la forme pétitionnaire auprès des élus du peuple que Astié de Valsayre soulève, en juillet 1887 une autre question qui va soulever une considérable masse d’articles dans la presse. Elle y demande, pour les femmes, « la liberté du costume ». L’assemblée charge une commission d’étudier les arguments. Elle explique : « Dans toutes les bagarres de terre ou d'eau, la femme, en raison de son costume, est une victime prédestinée à la mort, et les accidents de tramways survenant pour le même motif sont quotidiens. À la seule pensée des malheureuses ainsi empêchées de fuir lors de l'incendie de l'Opéra-Comique, il semble logique et humain d'éliminer la loi routinière qui interdit aux femmes de porter le costume masculin, tout aussi décent, quoi qu'on en puisse dire, surtout Incontestablement plus hygiénique. Au nom de celles qui ne sont pas esclaves du luxe, je viens vous prier, messieurs, de bien vouloir décréter la liberté du costume, liberté qui, après tout, ne peut nuire à personne. »

Un an plus tard, la 17e commission de la Chambre des députés considère « qu'il n'y a pas matière à œuvre législative » du fait que « Aucune loi n'impose aux femmes les vêtements compliqués dont elle se recouvrent et le port de l'habit masculin n'est interdit aux femmes que par mesure de police. »

Poursuivant son engagement, Astié de Valsayre rejoint une des premières organisations socialistes, l'union fédérative du centre, adhérente à la Fédération des Travailleurs socialistes de France (FTSF). Elle participe au congrès d’août 1887 en tant que déléguée du groupe le Droit des femmes, qui se présente comme une société du suffrage des femmes. Elle intervient pour défendre l’existence de l'Assistance publique, en se félicitant de sa laïcisation. La FTSF, de tendance possibiliste, est dirigée par Paul Brousse. Astié de Valsayre interviendra désormais régulièrement dans ses débats.

A suivre

Marie Rose Astié de Valsayre

 

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29 juillet 2023 6 29 /07 /juillet /2023 01:01

Suite de la biographie de Marie Rose Astié de Valsayre

Pendant la guerre franco-prussienne de 1870, Marie Rose Astié de Valsayre, qui était mère d’un garçon de deux ans et venait de perdre une fille de quatre mois, était sans doute encore professeure de musique. Elle décide de s’engager auprès des troupes françaises combattant l’avancée des allemands en tant qu’ambulancière. Lors des combats sur le plateau d'Avron (Seine, act. Seine-Saint-Denis), qui durèrent d’octobre à décembre 1870, elle est a eu le lobe de l'oreille entamé par une balle. Elle en gardera une surdité partielle.

Il est probable qu’elle ne s’est pas impliquée dans la Commune de Paris, le régime socialiste qui prit le contrôle de la ville en refusant la capitulation devant les troupes germaniques. Mais elle est liée à Henry Louis Champy, ouvrier coutelier, élu au Conseil de la Commune, déporté en Nouvelle-Calédonie après la défaite de l’insurrection en mai 1871. À son retour, il adhère au Parti ouvrier socialiste révolutionnaire. Plusieurs dizaines de journaux les prétendirent mariés en 1891, ce qu’elle démentit.

En avril 1872, Astié de Valsayre donne naissance à son deuxième garçon.

Si les compositions musicales de celle qui se faisait alors appeler Marie de Valsayre lui avaient déjà apporté une certaine notoriété, ce sont ces études qui la mirent en avant dans la presse parisienne. En novembre 1874, venant de recevoir un certificat de grammaire, elle se présente devant une Commission d’inspecteurs de l'Académie, parmi 36 candidats, pour suivre un cursus médical. Son examen a porté sur l’appréciation critique du Misanthrope, pièce de Molière. Le Soleil indique qu’il y eut dix reçus et qu’elle fut « en première ligne ». C’était quelques années plus tôt, en 1868, que le droit de s’inscrire pour des études médicales avait été ouvert aux femmes, mais aucune n’avait encore été diplômée comme médecin. Astié de Valsayre publia une brochure en 1874, Certificat de grammaire, à l’usage des officiers de santé et pharmaciens, qui était une sorte de guide pour préparer l’examen.

Pendant une dissection dans un cours d'anatomie, elle se piqua et fut amputée d'une phalange de la main gauche. Une autre agression vint, en juillet 1878, d’un chien enragé qui la mordit aux deux mains. Elle cautérisa elle-même les plaies au fer rouge, avec l’aide de son mari, le docteur Astié. Ce sont cependant les suites de sa blessure de guerre qui la conduire à abandonner, en 1879, la voie qui aurait pu l’amener au titre de docteur. Camille Delaville, dans Le Constitutionnel (1887/02/14) explique : « Mme Astié est fort savante, mais sourde, elle n'entend que la moitié des questions des examinateurs et aime mieux être refusée que d'avouer cette innocente infirmité. »

Cependant, ayant réussi les trois années de scolarité requises, elle eut le titre d’officier de santé, équivalent à celui d’infirmier actuellement.

Elle se tourne vers la presse, devenant secrétaire d’Émile de Girardin, patron du quotidien La Presse. Elle écrit également des articles scientifiques dans Civilisation, par exemple en 1880 sur le Père Galien d'Avignon, sous le titre La Science et le clergé, ou sur l’astronome allemand Pierre Ungeschick. L’hebdomadaire La Femme de France publie un texte d’elle sur La Femme et la science, en septembre 1879. Elle soutient que « être mère de par la nature, c’est-à-dire involontairement, n’est rien ; tandis qu’être mère de par l’instruction est une œuvre grandiose » et elle appelle : « mes sœurs ; continuez à secouer le joug avilissant de l’homme ! » Un de ses lecteurs s’étonne « Mme Astié de Valsayre ne serait-elle pas un homme caché sous un pseudonyme féminin ? Je dois vous l’avouer, j’ai fait une enquête dans votre quartier ; j’ai appris que vous existiez réellement, ce qui m’a stupéfié. »

Les publications scientifiques se poursuivent, sur la Cuisine physiologique en juin 1880 puis une tentative en anthropologie au sujet du Croisement des races en octobre la même année.

Astié de Valsayre est associé aux travaux du groupe de l'enseignement secondaire des jeunes filles, qui fait suite à l’adoption en décembre 1880 de la proposition de loi du député Camille Sée. Le texte législatif institue les collèges et lycées publics de jeunes filles, mais « les dispense de certaines études pour faire place aux travaux et aux occupations de leur sexe ». Les langues mortes sont exclues, la morale tient lieu de philosophie et l'enseignement scientifique reste élémentaire. Au contraire, Astié de Valsayre dépose en mars 1883 un Mémoire sur l'enseignement secondaire des jeunes filles et la question du latin, plaidant pour leur accès à un baccalauréat identique à celui des garçons. Elle envoie en mai 1883 aux députés un Mémoire sur l'utilité de l'enseignement de grammaire dans l'instruction de la femme. Elle explique que, malgré son titre universitaire, on ne lui permet pas d’enseigner aux jeunes filles. Elle soutient également que, si ces dernières pouvaient apprendre le latin, on cesserait de les discriminer en matière salariale dans les institutions éducatives.

Sous un pseudonyme masculin, Jehan des Étrivières, Astié de Valsayre publie en 1882 un pamphlet, Les Amazones du siècle, sous-titré les Gueulardes de Gambetta. Elle y attaque Louise Michel, Léonie Rouzade ou Eugénie Potonié-Pierre, toutes féministes dont elle sera ensuite proche. En décembre 1885, après de vifs échanges, elle reconnaîtra dans L’Événement qu’elle les avait « sottement attaquées. »

À suivre

Marie Rose Astié de Valsayre

 

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27 juillet 2023 4 27 /07 /juillet /2023 01:01

Début de la biographie de Marie Rose Astié de Valsayre

Claire Léonie Ferdinande Tastayre naît le 30 août 1846 à Paris. Elle est la fille naturelle de Claire Rosalie Tastayre. Son père n’est pas dénommé dans son état-civil. Ses parents ne la reconnaissent pas légalement. Cependant, selon son biographe, Eutrope Lambert (1842-1916), elle fut élevée par sa mère, et très partiellement par son père. Il le décrit ainsi, sans le désigner par son nom : « Son père, d'une famille noble et ruinée par les révolutions, donnait des leçons de droit, — et la médiocrité, pour ne pas dire la misère, régnait au logis. Hélas ! chaque fois que le gentilhomme pauvre arrêtait son regard sur le petit berceau qui contenait toutes ses espérances, il devenait triste et songeait à conquérir une fortune. Si bien qu'un jour il s'embarqua pour l'Amérique, d'où il ne revint jamais. La fièvre l'avait emporté quelques jours après son arrivée ! » Pour le journaliste Jean Bernard (Express, 1900/06/01), son père était un avocat breton. Sa mère était originaire d’une vieille famille du Pas-de-Calais qui, bien que non noble, avait émigré sous la révolution. Elle fut institutrice.

Le même Eutrope Lambert – un poète qui lui voua toute sa vie une grande admiration -, décrit ensuite son enfance : « Les premières années de Marie de Valsayre [un pseudonyme qu’elle adopta ensuite] s'écoulèrent comme les flots bruyants d'un fleuve qui court vers la mer. L'impatience semblait mêlée au sang de cette enfant. Il fallait qu'elle courût avec les petits drôles du quartier, qu'elle se déchirât, qu'elle battit les chats et les chiens, qu'elle crevât les yeux aux petits oiseaux et qu'elle fit enrager sa mère, — sa pauvre mère qui s'imposait tant de travail et de privations pour l'élever. — Cependant, il y avait quelque chose qui calmait le petit démon, quelque chose qui la rendait douce — elle, la méchante, — la musique ! — Oh ! comme elle s'arrêtait au milieu de ses innocentes cruautés quand les vibrations d'un piano arrivaient jusqu'à elle ou que la musique militaire passait sous ses fenêtres. Alors elle devenait toute sérieuse et son regard semblait inspiré ; puis elle courait dans un coin de la chambre, revenait traînant une vieille guitare, — le seul de ses jouets qui eût survécu, — et, la posant devant elle, pinçait les cordes pour en tirer des accords. Sa vocation était trouvée et sa mère lui fit donner des leçons de solfège et de piano. L'étude calma un peu sa turbulence sans la faire disparaître. Ses progrès furent rapides, et à six ans, dans les petites solennités classiques, c'était toujours elle qu'on choisissait pour chanter ou tenir le piano. Ce n'est pas tout : Marie voulut aussi apprendre à jouer du violon, et, bon gré mal gré, il fallut lui donner un maître italien. Puis elle perfectionna son chant avec Duprez ; déjà les romances qu'elle chantait prenaient cette expression ravissante qui est le charme de son talent. Elle semblait aimer plus particulièrement ce genre de musique qui est le plus sympathique et le plus beau ; mais de fréquents vomissements de sang survinrent, et elle y renonça pour s'adonner entièrement à l'étude de l'harmonie, de la fugue et du contre-point. A treize ans, Marie de Valsayre entrait dans le monde des artistes et était reçue membre de plusieurs sociétés musicales. Une schotisch : Follette, — composée à cinq ans et corrigée par elle, — venait de paraître chez Meissonnier. Son talent sur le violon la faisait rechercher. Digne émule des jeunes sœurs Milanollo, elle exécutait sur cet instrument, avec une pureté et une délicatesse infinies, les morceaux les plus difficiles. »

Élève du Conservatoire de musique de Paris, Marie de Valsayre devient ensuite professeur de violon et de piano. À partir de 1862, quand elle a donc 15 ans, et jusqu’en 1866, elle publie des romances, chœurs ou opérettes, notamment sur des textes d’Eutrope Lambert, Joseph Gouverneur et Théodore Leclerc. Ces œuvres lui valent une certaine notoriété, dans la société aristocratique et bourgeoise parisienne.

En avril 1863, elle donne un premier récital, jouant au piano des œuvres de Beethoven et les siennes. Elle en donne un autre, sur l’Hippodrome d’Auteuil, en août la même année. Le Conseiller des artistes salue, en février 1864, sa « musique intelligente et sentimentale ». Le Grand dictionnaire universel du XIXe siècle de Pierre Larousse qualifie ses mélodies de « pleines de sensibilité ». Cependant, en août 1865, La Semaine musicale considère à propos d’une de ses compositions, Un Ange, que « Le chant ne manque pas de charme mais la prosodie est très-défectueuse ». Les personnes auxquelles elle dédicace ses œuvres sont des artistes, comme son professeur Eugène Gérard, ainsi que des personnes de la bonne société parisienne, notamment des aristocrates.

C’est également à 15 ans qu’elle assure s’être mariée ; cependant, la célébration officielle à la mairie du cinquième arrondissement n’aura lieu qu’en juin 1869, sept ans plus tard. Son époux est Louis Charles Astié, docteur en médecine originaire du Tarn. Dans un entretien paru en 1892, elle raconte : « j'ai toujours fait, douloureusement et consciencieusement, mon devoir d'épouse » mais assure que « par malheur », « le docteur Astié, était alcoolique ». Elle adopte le patronyme « Astié de Valsayre », auquel elle ajoute parfois, mais rarement, les prénoms Marie Rose.

Sa mère, qui partageait alors la vie d’un lithographe d’origine suisse, Marcelin Maggi, meurt quand Marie a 18 ans, en janvier 1865.

Le premier garçon des époux Astié, Octave, était né en février 1868 et sera reconnu à l’occasion du mariage ; une fille, Anne, naîtra deux mois après les épousailles légales mais ne vivra que quatre mois.

La famille vit dans à Paris (5e arr.), d’abord rue du Val-de-Grâce puis rue Saint-Séverin.

À suivre

Marie Rose Astié de Valsayre

 

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25 juin 2023 7 25 /06 /juin /2023 01:01

Suite de la biographie de Louis Defert

Faisant l’objet d’un nouvel avancement, en tant que commissaire de police de la Ville de Paris, Louis Defert rejoint le quartier Saint-Victor (5e arr.) en avril 1908. Il y reste jusqu’en janvier 1911, quand il doit rejoindre le quartier de Rochechouart (9e arr.), repassant sur la rive droite de la Seine.

Fin novembre 1924, le commissaire Defert est réveillé par un de ses agents qui lui indique : « il faut que vous veniez tuer l'éléphant ». Agra, que Le Figaro qualifie d'éléphant facétieux, avait peu auparavant fait une randonnée boulevard Beaumarchais qui avait provoqué un grand émoi. Il s’était de nouveau échappé lorsque le cirque auquel il appartient avait voulu le faire monter dans un camion pour se rendre en tournée à Niort. Inquiet de voir l’animal furieux même après qu’il ait été rattrapé, le cornac voulait qu’on l’abatte. Mais M. Defert n'était pas de cet avis. Il le fit enchaîner et conduire de nuit vers la gare d'Austerlitz.

Un mois plus tard, la veille de Noël, Louis Defert épouse à Paris (15e arr.) Berthe Léonie Hugues, fille de tapissiers parisiens.

Parmi les affaires dont il a la charge figure, en août 1913, la découverte, chez un cambrioleur, d’une édition complète de Voltaire, en quarante-trois volumes, dont il fait rechercher le propriétaire. Deux mois plus tard, il voit débarquer dans son bureau un garçon de treize ans qui, à la suite d'une dispute avec son père, avait quitté le domicile familial avec le vélo paternel et était arrivé à Paris (environ 90 kilomètres) où il déclara : « maintenant je ne sais plus comment me débrouiller ». Defert le fit rapatrier.

En juillet 1914, Defert, malade, a pris sa retraite. Il est tiré au sort pour figurer dans le jury de la cour d’assises de la Seine qui doit juger Henriette Caillaux, épouse du ministre des Finances Joseph Caillaux, qui a assassiné le journaliste Gaston Calmette, directeur du Figaro. Cependant, il ne reçoit pas sa convocation, étant alors hospitalisé à Villers-Cotterêts (Aisne), où existe alors une maison de retraite gérée par la préfecture de Police. Il ne prend donc pas part au procès.

Du fait de la première guerre mondiale, il est appelé à reprendre sa fonction et est, de nouveau, commissaire de police du quartier Rochechouart en 1916. Il rejoint le quartier de Bercy (12e arr.) en 1918 et assure l’intérim du poste de commissaire aux délégations judiciaires en février cette même année.

Ayant été chargé par le ministre du Travail et de la Prévoyance sociale du contrôle d'une importante société mutuelle d'assurance-vie, comprenant plus de 10.000 adhérents, dont il accompagne la dissolution, il publie en 1918 une brochure sur L'Administration et la liquidation des sociétés de secours mutuels. Préfacée par Maurice Fenoux, sénateur du Finistère, elle est saluée par les milieux de la Mutualité, qui lui accordent une médaille.

Le gouvernement de Georges Clemenceau avait, à partir de novembre 1917, constitué un ministère des régions Libérées en prévision de la fin de la guerre, confié à Albert Lebrun puis, à partir de novembre 1919, à André Tardieu. Defert, de nouveau retraité de la préfecture de police, est recruté en tant qu’inspecteur dans ce ministère. Il est chargé d'inspecter les dix principaux camps américains achetés par la France pour prendre les mesures de protection du matériel qui y est entreposé. Il propose, en octobre 1919, la création d'un Service général de protection et de défense contre le pillage des camps.

Yves Le Trocquer, député du Finistère, sous-secrétaire d'État aux finances, chargé de la liquidation des stocks, intègre Louis Defert dans son cabinet et le nomme chef du service central de la sûreté des camps. Il reste en poste lorsqu’Emmanuel Brousse prit la succession de Le Trocquer comme sous-secrétaire d'État début 1920. Le quotidien L’Œuvre consacre un long reportage, en mai 1920, à son service dont il assure qu’il « fonctionne fort bien ». Defert fait remplacer les intendants militaires par des civils et veille à la coordination de leur action avec la police et la gendarmerie régionale, contrairement aux habitudes antérieures.

Ayant probablement cessé alors son activité professionnelle, Louis Defert s’engage dans la vie associative. Il est en 1922 vice-président de l'Association des retraités de la préfecture de police, dont Raoul Rongiéras est le président. Ensemble, ils font des démarches auprès de M. Lemarchand, rapporteur général du budget de la Ville de Paris, pour améliorer le paiement des pensions en décembre 1922. Defert abandonnera cette fonction en 1925.

Son engagement principal est au sein de la Fédération Nationale des Retraités municipaux, départementaux et hospitaliers de France. Il prend part à son congrès constitutif en janvier 1923 à Paris et en devient vice-président, Cauderelles, de Boulogne-sur-Mer étant le président. Il lui succède en juin la même année. Il est désigné, en août 1924 pour faire partie de la commission extraparlementaire chargée de préparer un nouveau régime de retraite des employés départementaux et communaux. Il défend l’idée d’une obligation de péréquation au profit des vieux employés et ouvriers retraités des services publics.

En 1926, suite à la dégradation de son état de santé, il demande a être remplacé mais accepte d’être nommé président d'honneur et conseiller technique de la Fédération. Il est remplacé par Gobert, issue de l’association de Troyes (Aube), qui avait joué un rôle très actif dans la création du groupement. Defert continue de participer aux travaux de la commission d'administration générale de la Chambre des députés, saisie du projet sur les retraites des municipaux déposé par le gouvernement. Avec les autres dirigeants fédéraux, Defert rencontre en août 1927 le ministre de l'intérieur, Albert Sarraut, qui adresse aux préfets une circulaire pour encourager l’amélioration des pensions versées par les conseils généraux et les conseils municipaux aux retraités. En novembre 1927, Defert préside la cinquième assemblée générale de la Fédération nationale dans la mairie du 9e arrondissement de Paris.

Les retraités municipaux de Lille, Roubaix et Tourcoing lui rendent hommage en janvier 1928. Les quotidiens La Lanterne, Le Rappel et La Nation publient le 19 avril 1927 dans le cadre d’une série consacrée aux militants des groupements de retraités un long article qui lui est consacré, accompagné d’un portrait dû au photographe Henri Manuel (1874-1947).

Jusqu’alors domicilié Paris, rue Condorcet, dans le quartier de Rochechouart (9e arr.), les époux Defert sont installés en 1931 à Viarmes (Seine-et-Oise, act. Val-d'Oise). Ils reviennent ensuite dans leur appartement parisien pour le reste de leur vie.

Trois ans après son épouse, Louis Defert meurt le 9 novembre 1956 à Paris (18e arr.) où il était hospitalisé, à l’âge de 89 ans. Ils n’ont pas eu d’enfants.

Titulaire de la médaille de la Mutualité et de celle de l'Hygiène, Defert avait obtenu à deux reprises des médailles d'argent pour actes de courage et de dévouement en 1898 et 1910. Il avait aussi été attributaire d’un Grand diplôme d'honneur de l'assistance aux animaux en 1903. En avril 1911, il était décoré de chevalier de l’Ordre du Dragon de l’Annam (Indochine, Vietnam).

Fin

Louis Defert, Photo Henri Manuel, 1927.

 

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23 juin 2023 5 23 /06 /juin /2023 01:01

Début de la biographie de Louis Defert

Jean Louis Augustin Defert naît le 16 avril 1867 à Paris (11e arr.). Il est le fils d’Augustine Jeanne Soreau, blanchisseuse, et de son mari Louis Constant Defert, sergent de ville. Ses parents vivent rue de Montreuil. Il est le troisième des sept enfants du couple, dont quatre meurent en bas âge. Ses parents sont originaires de la Sarthe ; il se séparent peu après la naissance du dernier en 1881 puis divorcent en juillet 1887.

Après des études à la Faculté de Paris, Louis Defert obtient en 1890 une capacité en droit et exerce comme clerc dans une étude d'avoué au tribunal de première instance de la Seine puis en tant que secrétaire d'agréé au tribunal de commerce de la Seine.

Il rejoint, en 1892, les services de la préfecture de police de Paris, d’abord comme ire suppléant près les commissariats de police de la Ville de Paris. Il est nommé secrétaire titulaire en novembre 1892 à Ivry (Seine, act. Val-de-Marne). Les secrétaires sont les adjoints des commissaires de police. Il est transféré, en mars 1893 à Asnières (Seine, act. Hauts-de-Seine) puis en janvier 1894, dans le quartier Sainte-Avoye de Paris (3e arr.).

Dans cette dernière fonction, il organise, en septembre 1896, une présentation de presse d’une « invention qu'il a faite dans le but d'enrayer le cambriolage et de protéger les bureaux du ministère de la guerre ». Il présente son matériel dans une brasserie de la rue Montmartre, en compagnie d’un professeur de physique à l'École de pharmacie, M. Séguy. Il s’agit d’alarme électrique, qui sonne dans les locaux privés et s’affiche sur un tableau dans la loge du concierge pour les établissements publics. De nombreux articles rendent compte de son invention, estimant qu’il « a imaginé un appareil fort bien combiné » (XIXe Siècle, 1896/09/20).

Devenu en mai 1897 secrétaire aux délégations judiciaires, Defert est nommé inspecteur principal des gardiens de la paix en février 1901. C’était la fonction qu’avait exercé son père.

Parallèlement à ses fonctions policières, Defert rédige un ouvrage, L'Enfant et l'adolescent dans la société moderne, qui est publié la même année aux éditions Montgrédien à Paris. Il est préfacé par le Dr Théophile Roussel, sénateur de la Lozère, médecin et philanthrope, qui est considéré comme l'un des premiers hommes politiques français à avoir contribué à la protection de l’enfance. L'Académie de médecine lui décerne une médaille d'argent et le conseil de Paris lui vote des remerciements. Son livre est réédité, en 2013, par Hachette-Livre.

Il est promu, en septembre 1901 commissaire de police des communes de la Seine et obtient son premier poste à Saint-Ouen (Seine, act. Seine-Saint-Denis).

Dans la même fonction, il remplace en décembre 1905 M. Rogeaux à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Sa circonscription comprend des villes souvent plus importantes que celle qui accueille le siège du commissariat : Bry-sur-Marne, Champigny, Nogent-sur-Marne, Le Perreux et Saint-Maur-des-Fossés. Il compte une trentaine d’agents.

Au cours de l’année 1905, Louis Defert fait paraître un Code de police (éd. Giard et Brière, Paris). Il s’agit d’une compilation des textes des ordonnances depuis l'origine applicables dans le ressort de la préfecture de police (arrêtés, règlement sanitaire, lois et décrets). Le quotidien La Lanterne y voit « un travail aride », mais souligne qu’il vient d’un « juriste distingué » et qu’il est honoré par le conseil général de la Seine et le conseil municipal de Paris.

En février 1906, Defert doit assurer le service d'ordre lors des inventaires des biens des fabriques, qui géraient les paroisses catholiques, après la séparation de l’église et de l’État en 1905. À Joinville et au Perreux, ces actes se déroulent « sans autre incident que la protestation des curés de chaque paroisse » selon le quotidien Le Radical. C’est plus difficile à Saint-Maur, où l'agent des domaines doit se retirer lors de sa première visite, car la sacristie de l’église Saint-Nicolas était barricadée. Mais il peut revenir et procéder quelques jours plus tard à l’inventaire de ce bâtiment et des autres lieux de culte de Saint-Maur. À Champigny, les opérations furent conduites « pendant qu'une centaine de vieilles dévotes chantaient des cantiques » selon le même journal radical-socialiste.

En décembre 1906, le trente-sixième anniversaire de la bataille de Champigny, pendant la guerre franco-allemande de 1870, est l’occasion d’une manifestation de militants nationalistes dans cette commune, avec à leur tête Paul Déroulède. Defert à quelques difficultés à contenir la foule qui s'écrase aux grilles de l’entrée.

À suivre

Administration et liquidation des Sociétés de secours mutuels, ouvrage de Louis Defert, 1918

 

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16 mai 2023 2 16 /05 /mai /2023 01:01

Marie Joseph Alfred Routier de Bullemont naît le 15 juillet 1840 à Louvain, Brabant (Belgique). Il est le fils de Lucie Jenny Joseph Vassel et de son mari, Alexandre Annibal Routier de Bullemont, propriétaire. Ils sont originaires de la Somme, en France, où son père est agriculteur. Alfred est le onzième des douze enfants nés vivants du couple.

La famille s’installe en Belgique vers 1836, résidant dans la province de Liège, le Brabant puis le Luxembourg belge où Annibal Routier de Bullemont a une exploitation dans laquelle il procède a des essais de cultures nouvelles, notamment la spergule pour laquelle il est récompensé à l’exposition de Bruxelles en décembre 1848.

En 1865, Alfred de Bullemont publie plusieurs articles, dans la revue Les Beaux-arts, sur La peinture d'histoire. S’il apprécie l’orientalisme de Guillaumet, qu’il présente comme « Africain, de beaucoup de talent », il est bien plus critique sur beaucoup d’autres artistes. S’agissant d’Henri Fantin-Latour, il écrit : « Ainsi M. Fantin voudrait nous persuader que la Vérité c'est cette grosse fille rousse aux chairs flasques, aux yeux gris, et que le vrai c'est le vin bleu qu'on boit aux barrières, dans des verres communs. Il nous accordera que ce n'est qu'une vérité relative, vraie seulement pour les matelots et les charretiers, les brutes et les ivrognes qui n'aiment que la fille qui jure et le vin qui gratte. »

Commentant l’œuvre d’Ernest Meissonier, il écrit « On n'en est plus aujourd'hui à nier le talent de M. Meissonier, mais ce talent nous semble si uniforme, si monotone, que nous ne pouvons comprendre l'engouement ridicule dont il est l'objet ». Il attaque aussi Victor Mottez : « M. Mottez, déjà assez coupable d'avoir abîmé l'église Saint-Germain-l'Auxerrois, essaye de nous faire rire avec sa Médée. Si M. Mottez était jeune, nous ririons peut-être de sa caricature, mais M. Mottez a l'âge du repos. »

Alexandre Protais, proche de la famille impériale, n’est pas épargné par de Bullemont : « La mode a pris M. Protais sous sa protection : il est peintre de cour ; il fait de mauvaises choses, mais on le trouve toujours admirable ». C’est peut-être Eugène Courbet qui est le plus férocement attaqué : « Terminons ce premier article en parlant des erreurs d'un homme entêté, qui veut rompre en visière avec le genre humain et que ses amis, ses élèves et ses admirateurs sont obligés d'abandonner. Le portrait de la Famille de Proudhon est le dernier mot du mauvais. M. Courbet n'avait encore rien fait d'aussi peu raisonnable, et, comme le disait un de nos camarades, en présence de cette nullité : Il aimait trop Proudhon, c'est ce qui l'a tué ! »

En avril 1870, Alfred de Bullemont épouse Marie Dupuis à Paris (17e arr.).

Il fait paraître, en août 1871, peu après la fin de la Commune de Paris, un Catalogue raisonné des peintures, sculptures et objets d'art qui décoraient l'hôtel de ville de Paris avant sa destruction. Il en avait fait un relevé en 1869, et il estime nécessaire de publier ce témoignage alors que l’insurrection parisienne a détruit l’ancienne mairie et ses nombreuses œuvres d’art.

Il publie en 1872 deux tomes d’un Catalogue des peintures, sculptures et objets d'art des églises de Paris, concernant Saint-Étienne du Mont et Saint-Denis du Saint-Sacrement.

Alfred de Bullemont meurt le 5 octobre 1872. Il était âgé de 32 ans et résidait rue du Faubourg-Saint-Denis. L’écrivain Armand Renaud lui a dédié un des poèmes de son recueil Les nuits persanes (1870), intitulé Le supplice.

L'ancien Hôtel de Ville de Paris, avant sa destruction en 1871

 

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