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30 octobre 2022 7 30 /10 /octobre /2022 01:01

Simone Marguerite Lahaye naît le 11 janvier 1906 à Reims (Marne). Elle est la fille de Marie Léonie Lobry, lingère, née à Bruxelles (Belgique) et de son compagnon Édouard Théodore Lahaye, ouvrier boulanger, qui la reconnaît. Ses parents se marient à Reims en janvier 1907.

Pendant la première guerre mondiale, son père est mobilisé dans une section de commis et ouvriers. Il est condamné pour « désertion à l’intérieur en temps de guerre » par le 2e conseil de guerre le 21 septembre 1917 ; du fait que des circonstances atténuantes lui sont accordées, sa peine est limitée à deux mois de prison.

À la fin de ses obligations militaires, en février 1919, la famille est installée à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), avenue Gille, dans le quartier de Palissy ; ils s’installent ensuite dans le quartier voisin de Polangis, avenue Arago. Le père est toujours boulanger puis sera manœuvre, la mère est lingère et nourrice.

Simone Lahaye fait un apprentissage en tant que dactylographe et devient ensuite ouvrière dans une usine. En avril 1926, elle épouse à Joinville Jean Savu ouvrier ébéniste, syndicaliste et militant du parti communiste qui vivait dans la même ville, quai Moisson (act. quai Gabriel-Péri). Ils s’installent après leur mariage dans la commune voisine de Champigny, avenue d'Alsace-Lorraine, rue Diderot puis rue de Port-Arthur (act. Eugène-Pottier).

Pendant la deuxième guerre mondiale, Jean Savu s’engage comme résistant à l’occupation allemande dans les Francs-Tireurs et Partisans, mouvement clandestin proche du parti communiste. Arrêté en juillet 1943 par la police française, il est condamné à mort le 15 octobre par un tribunal allemand et fusillé le 23 octobre de la même année au Mont-Valérien à Suresnes (Seine, act. Hauts-de-Seine).

Son épouse est la destinatrice d’une de ses deux dernières lettres, datée du 23 octobre : « Ma pauvre petite chérie, Je viens d’apprendre la triste nouvelle : nous avons été condamnés à mort le 15 courant et apprenons aujourd’hui que nous allons être exécutés à midi. Ma Simone chérie, écoute ma prière : je t’en supplie, sois courageuse. Le seul regret que j’emporterai dans la tombe, c’est de te faire de la peine en te quittant. Tu ne méritais pas cela. Tu m’as rendu très heureux et t’en remercie. Si tu savais comme je t’aimais. Je n’ai pas toujours su te le faire comprendre malheureusement. Surtout ma petite chérie, soit forte et élève bien Jeannot. Fais-en un homme comme je l’ai été et qu’il n’oublie jamais son Papa et pourquoi il est mort, pour sa Patrie et pour son Parti. Je te lègue notre petit avoir. Cette lettre te suffira, je l’espère, pour aplanir les difficultés qui pourraient survenir, mais je crois que la Patrie ne vous abandonnera pas. C’est ton image, ma Simone, que je verrai au dernier moment et je saurai mourir courageusement, crois-moi. (…) Je finis cette lettre, la dernière, en te bénissant. Je t’aimais tant. »

Après-guerre, Simone Savu témoigna par écrit des violences faites à son mari et porta plainte selon les historiens Annie et Claude Pennetier, témoignant qu’il avait « été violemment frappé à coup de nerf de bœuf par les inspecteurs de la BS2 », les policiers français qui l’avaient interpellé. Elle est adhérente du parti communiste, dans une cellule de Champigny qui porte le nom de « Jean Savu ». Selon l’historien Paul Boulland, elle est candidate aux élections municipales de sa commune en mai 1945 et novembre 1947 sur la liste d’Union républicaine et résistante, soutenue par les communistes. Il y voit la volonté du PCF de « valoriser des figures au fort pouvoir d’évocation symbolique », remarquant qu’une autre veuve de fusillé est également présentée à Joinville (Juliette Derrien). La fille d’un autre fusillé campinois, Taravella, figure également sur les mêmes listes les deux années.

Les archives de la fédération communiste, consultées par Paul Boulland, contiennent ces appréciations de deux responsables de la section « bonne camarade, veuve d’un fusillé, mère d’un enfant en bas âge, candidate sur la liste de notre Parti à Champigny » et « Pas très forte politiquement étant au Parti depuis la Libération. Camarade très dévouée. »

Si Simone Savu n’est pas élue à l’issue des scrutins de 1945 et 1947, elle intègre le conseil municipal de Champigny en avril 1951, remplaçant une démissionnaire. Elle est réélue toujours sur les listes communistes, en mai 1953, en juin 1959 puis en mars 1965. Pendant toute la durée de son mandat, le maire de la commune est le communiste Louis Talamoni, élu de 1950 à 1975.

En mai 1960, Simone Savu, qui réside toujours à Champigny, avenue Guy-Môquet, se remarie avec Georges Mesnard, ancien résistant à l’occupation allemande pendant la deuxième guerre mondiale et également conseiller municipal de Champigny. En application du code électoral, il dut démissionner de son mandat après leurs épousailles.

Simone Mesnard meurt le 18 février 2001 à Limeil-Brévannes (Val-de-Marne), où elle était probablement hospitalisée. Elle était âgée de 95 ans et avait eu au moins un enfant de son premier mariage, dénommé également Jean Savu.

Portrait de Jean Savu, époux de Simone Savu [ph. Maitron]

 

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14 février 2022 1 14 /02 /février /2022 00:01

Raymond Auguste Dedonder naît le 30 août 1920 à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Il est le fils de Blanche Louvet et de son époux Marcel Dedonder, ouvrier joaillier puis bijoutier puis grainetier.

Il mène des études au lycée Lakanal à Sceaux (Seine, act. Hauts-de-Seine) puis au lycée Saint-Louis à Paris (6e arr.). Selon l’historien Michel Pinault, il adhère en 1938 aux étudiants communistes. Il en démissionne en 1939, à la suite du Pacte germano-soviétique, et adhère à la IVe Internationale par l’intermédiaire d’Yvan Craipeau. Il démissionne du mouvement trotskiste en 1941, par opposition à la consigne de fraternisation avec les soldats allemands.

Pendant la deuxième guerre mondiale, il est vacataire au Centre national de la recherche scientifique (CNRS, 1939-1940), puis instituteur suppléant (1941). Toujours d’après Michel Pinault, il est en 1942, réfractaire au service du travail obligatoire (STO). Il poursuit ses études et obtient une licence ès sciences en 1943 à la Faculté des sciences de Paris. Il s’engage sous l’égide du journaliste et militant catholique Marc Sangnier, dans la Ligue française des Auberges de jeunesse. Il se lie avec Andrée Fouilloux, qui fait fonction de secrétaire de Marc Sangnier. Selon le témoignage de Dedonder, recueilli par les chercheurs Jean-François Picard et Xavier Polanco, elle fut arrêtée. Raymond Dedonder contribue à l’organisation d’un réseau de soutien aux parents, aux gens emprisonnés et aux déportés et diffuse le journal clandestin Combat. Le 20 août 1944, pendant l’insurrection parisienne, occupe le siège du mouvement des Auberges de jeunesse, rue de Valois à Paris.

Après la fin du conflit, Raymond Dedonder fut le premier secrétaire du Mouvement uni des auberges de jeunesse (MUAJ). Il épouse, en novembre 1946 à Fontenay-aux-Roses (Seine, act. Hauts-de-Seine) Andrée Fouilloux, alors institutrice. En 1947-1948, le MUAJ devient le Mouvement laïque des auberges de jeunesse (MLAJ), et Dedonder le préside. Il termine son cursus universitaire par un doctorat ès sciences naturelles en 1951.

Sur le plan professionnel, embauché comme contractuel au CNRS en 1945, il participe au cabinet du directeur Frédéric Joliot et collabore à la Mission scientifique du CNRS dans les territoires occupés (Allemagne, Autriche). Attaché de recherches en 1947, chargé de recherches en 1952, maître de recherches en 1957 puis directeur de recherches en 1961 il devient ensuite directeur de recherches émérite. Tout en restant au CNRS, il rejoint des laboratoires à l’Institut national d’agronomie (1946) puis à l’Institut Pasteur (1948). De 1959 à 1965, il est chef de service à l’Institut Pasteur, directeur de l’institut de biologie moléculaire du CNRS (1970-1978), professeur à la faculté des sciences de Paris (1966-1976).

En matière politique, Dedonder rejoignit après la Libération, le parti socialiste SFIO, où il appartenait à la tendance Franc-Tireur. Il rompit du fait de ce qu’il appelait, selon Pinault, « la trahison de Guy Mollet », secrétaire général de la SFIO, assurant qu’il était en « quête d’un idéal à la fois progressiste, humaniste et libéral ». Il participa à la formation du Parti socialiste autonome, avec Édouard Depreux et Gilles Martinet, puis à sa transformation en Parti socialiste unifié. Il rejoignit le parti socialiste après le congrès d’Épinay (1971).

Son engagement principal se situait cependant dans le domaine syndical. Il était membre du Syndicat national de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, alors adhérent à la fois à la Fédération de l’éducation nationale (FEN, autonome) et à la Confédération générale du travail (CGT, proche du parti communiste). Il participa à la scission qui donna naissance en mars 1956 au Syndicat national des chercheurs scientifiques. Membre du bureau élu en mars 1956, Dedonder en devint premier secrétaire en 1957 et continua d’y siéger jusqu’en 1960, représentant le syndicat à la commission administrative nationale de la FEN.

Opposé à la guerre en Algérie, Dedonder signe, en octobre 1960, un appel pour une « paix sans équivoque et sans ruse ». Au cours des évènements de mai 1968, Dedonder s’adresse au gouvernement pour réclamer la fin des menaces contre le mouvement étudiant.

Directeur scientifique du développement (1981-1982) de l’Institut Pasteur. Il en devient directeur en 1982 et jusqu’en 1988. Il contribue notamment à la défense des intérêts de l’Institut face aux scientifiques américains, à propos de la découverte du virus du SIDA.

Raymond Dedonder meurt le 5 septembre 2004 au Kremlin-Bicêtre (Val-de-Marne). Il était âgé de 84 ans et père de trois enfants. Il avait été décoré comme officier de la Légion d’honneur en janvier 1991, commandeur de l’Ordre national du Mérite et commandeur des Palmes académiques.

Son fils aîné, Jean-Pierre Dedonder (né en 1946), docteur ès-sciences, professeur de physique nucléaire, a été président de l'université Paris-VII (1992-1997) puis recteur de l'académie de Créteil (1998-2000). Il est chevalier de la Légion d’honneur.

Raymond Dedonder, 1988, Institut Pasteur

 

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4 février 2022 5 04 /02 /février /2022 00:01

Suite de la biographie de Nguyên Thê Truyên

Résidant à Nam-Dinh, Nguyên Thê Truyên demeure rue de Saïgon et exerce son métier de chimiste. Il est toujours en bute aux autorités française. Le résident supérieur au Tonkin a fait ordonner la saisie conservatoire des rizières de sa famille en janvier 1933. Le prétexte est une dette de 1 000 piastres, mais la valeur des propriétés est estimée à plus de 50 000 piastres. Mais le Conseil du Contentieux se déclare incompétent en janvier 1933. Le même conseil rejette, en novembre la même année, une requête de Nguyên Thê Truyên pour qu’on lui délivre de son casier judiciaire et que cesse la confiscation de son certificat de moralité.

Séjournant de nouveau à Paris en 1934, Nguyên Thê Truyên devient une cible pour les communistes. Le journal Vô Sản (Le Prolétaire, 1934/06), publié par le PCF, le qualifie de « traître qui fréquente les flics, les fascistes ».

Le Conseil d’État examine, en appel, la plainte de N. T. Truyên au sujet de la délivrance d’un bulletin de casier judiciaire et d’un certificat de bonnes vie et mœurs. Il rejette sa requête, estimant qu’elle relève de la relation entre la République française et l’administration indigène et non du droit administratif français, même si un fonctionnaire français est mis en cause. Comme plusieurs autres revues juridiques, la Revue générale de droit international public critique en 1938 les conclusions de l’arrêt.

Pendant son séjour en France, Nguyên Thê Truyên participe à la constitution du Rassemblement Colonial, déclaré à Paris en avril 1937 et basé rue Monge (5e arr.). Il regroupe une douzaine d’organisations politiques et d’associations, comme le Parti du Peuple Algérien, la Ligue de Défense de la Race Nègre ou le Rassemblement Indochinois, dont N. T. Truyên est le délégué. Le comité directeur provisoire comprend l’algérien Messali Hadj, publiciste, le martiniquais Raoul Cénac-Thaly, professeur agrégé, le malgache Ramananjato, comptable et N. T. Truyên, qui assurent de manière tournante la présidence. Le sénégalais Emil Faure, ingénieur conseil est secrétaire général et la guadeloupéenne Melle Toubland, chirurgienne-dentiste, est trésorière.

En septembre 1937, une députation du Rassemblement colonial, dont fait partie Nguyên Thê Truyên est reçue à l’Hôtel Matignon, pour rencontrer William Bertrand, sous-secrétaire d’État à la Présidence du Conseil et l’entretenir « des graves évènements d’Indochine et d’Extrême-Orient ». N. T. Truyên demande l’amnistie pour les victimes de la répression, soulignant qu’ils sont accusés de complots contre la Sûreté de l’État, ce qu’il qualifie « d’accusations vagues et monotones ». Il souligne que des « jeunes gens d’origine bourgeoise, revenus de Paris où ils s’étaient initiés à la vie militante, sont jetés en prison pour des articles de journaux, souvent inspirés et même reproduit des écrits publiés dans des grands quotidiens de Paris ». Il déplore que « de pauvres coolies en haillons, des ouvriers harassés, des employés, des femmes, des enfants, travaillant dans des conditions déplorables, touchant un salaire dérisoire, sont incriminés parce qu’ils ont fait la grève, dans l’ordre et la discipline pour améliorer leur sort. Des paysans affamés, des petits commerçants ruinés, des artisans grevés de patentes sont emprisonnés pour avoir réclamé la suppression des impôts archaïques ou des taxes impopulaires ». N. T. Truyên réclame ensuite des libertés politiques et syndicales, voulant notamment l’application de la loi française du 28 juillet 1881 sur la liberté de la presse et le droit d’association, y compris pour les syndicats. Enfin, N. T. Truyên soutient l’idée d’organiser un Congrès National des Indochinois.

C’est lui qui conduit la délégation reçue en février 1938 par Théodore Steeg, ministre des colonies et ancien président du conseil. Elle évoque notamment le point de vue des indigènes devant les revendications coloniales de l'Allemagne, et les répercussions de la guerre sino-japonaise en Indochine.

Dans le courant de cette année 1938, Nguyên Thê Truyên retourne au Vietnam. Il publie un long article en octobre, dans L'Effort Indochinois sur « Phan-Van-Truong et son chef d’œuvre: Le droit pénal à travers l’ancienne législation chinoise », en hommage à un avocat, cofondateur de la Fraternité des compatriotes en 1914.

Do Duc Ho, ancien secrétaire de l'Association générale des étudiants indochinois, fait part d’une conversation qu’il a eue en septembre 1938 avec Nguyên Thê Truyên. Selon ce dernier, le gouverneur général de l’Indochine, Jules Brévié « entend se servir du parti communiste annamite pour administrer à la population la preuve de la supériorité de la démocratie-impérialiste française sur le fascisme agresseur nippon. Ses manifestations de sympathie pour la Chine expriment une solidarité qui doit émouvoir les indigènes et leur faire oublier que M. Brévié est le représentant de l'impérialisme français. Le parti communiste annamite est là pour servir d'interprète à M. le Gouverneur général. »

Après le début de la deuxième guerre mondiale, Nguyên Thê Truyên et son frère Nguyên Thê Song sont arrêtés en septembre 1939 et envoyés à la prison de Lang Son, au centre du Tonkin, soupçonnés de sympathie pour les Japonais. Madeleine Latour, qui avait soutenu l’action de Nguyên Thê Truyên avant même leur mariage et l’avait accompagné en Indochine, meurt en 1940. Elle était née en septembre 1890 à Paris (12e arr.) – et non pas en 1898 comme plusieurs sources le mentionnent. Enterrée au cimetière européen de Dalat, ses cendres ont été transférées dans la crypte de l'église Saint-Nicolas.

Les deux frères sont exilés en 1941, en compagnie de neuf communistes, sur l’île malgache de Nosy Lava. Ils ne se mêlent pas aux détenus communistes, espérant manifestement une occupation de Madagascar par le Japon. Ils sont libérés en 1946 et retournent à Saïgon.

À suivre

 

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2 février 2022 3 02 /02 /février /2022 00:01

 

Suite de la biographie de Nguyên Thê Truyên

Revenu dans son pays natal en 1920, il bénéficie toujours d’une bourse et reprend la mer à Haiphong pour Marseille en août 1921. Il vit rue Champollion à Paris (5e arr.) puis, l’année suivante, villa des Gobelins (13e arr.). S’il est ingénieur chimiste, Nguyên Thê Truyên, poursuit des études à l’université, où il obtient une licence de philosophie en 1923, et consacre une part importante de son temps à l’activité politique.

Il est un des fondateurs et le secrétaire adjoint de l'Union intercoloniale, association proche du parti communiste, créée en mai 1922. Elle aurait compté selon la police environ 120 membres, dont seize Vietnamiens fin 1923, parmi lesquels une vingtaine de militants actifs. Elle porte des revendications d’égalité politique (droit de vote) et sociale (« À travail égal, salaire égal ») et condamne les guerres coloniales menées par la France au Maroc (Rif, 1925-1926) ou en Syrie (1925-1927).

Le 12 avril 1925, Nguyên Thê Truyên apparaît comme la cheville ouvrière du meeting, organisé par la Fédération du parti Kuomintang chinois en France salle des Coopérateurs à Paris, boulevard Auguste-Blanqui. Selon le quotidien de droite, L’Écho de Paris, six cents personnes environ y ont assisté, officiellement pour commémorer la mémoire du révolutionnaire chinois Sun Yat Sen. Nguyên Thê Truyên prône l’union des révolutionnaires chinois et du peuple indochinois pour renverser la domination des impérialismes mondiaux et les chasser définitivement de l'Asie. Il attaque Ernest Outrey, député de la Cochinchine, et Martial Merlin, gouverneur général de l'Indochine, qu'il qualifie de pirates et de requins. Il appelle à ce que « les Chinois et les Annamites se préparent pour soulever la race jaune contre les Impérialismes et en particulier contre la France. »

Lié à l'Union intercoloniale, le journal Le Paria tire en 1923 à deux mille exemplaires, dont mille étaient expédiés dans les colonies africaines. Il a 150 abonnés vietnamiens, dont seulement treize en Indochine. Malgré cette diffusion limitée, son écho est réel au Viêt-Nam, au vu des reprises que font des journaux saïgonnais de langue française et des mesures d'interdiction et de surveillance dont il est l'objet de la part des autorités coloniales. Nguyên Thê Truyên en est le rédacteur en chef. Il est également présenté comme le principal rédacteur du Procès de la colonisation française, signé par Nguyen Ai Quoc (Hô Chi Minh) et paru en 1925.

 

 

À partir de l'automne 1925, l'Union intercoloniale entre en sommeil et Le Paria cesse de paraître en avril 1926.

S’étant éloigné du mouvement communiste pour s’engager dans l’action nationaliste, Nguyên Thê Truyên lance en janvier 1926 une nouvelle publication Viêt-Nam Hon (L’Âme du Vietnam), qui paraît clandestinement. Il publie également Phuc Quoc (Restauration de la Patrie) et La Nation annamite. Il fonde le Parti annamite de l’indépendance (PAI, Viêt-Nam Doc Lap Dang, VNDLD), qui est constitué officiellement en mai 1927. Lié au Kuomintang chinois, le PAI conserve cependant des liens avec les communistes, l'Internationale communiste soutenant le Kuomintang. Il organise des réunions publiques en province, notamment à Lille, au Havre (où se retrouvent beaucoup de marins indochinois) ou à Montpellier. Nguyên Thê Truyên préside le comité central provisoire.

Le 17 octobre 1927, un meeting de protestation « contre la terreur en Indochine » est organisée par deux formations nationalistes, le PAI et le Parti constitutionaliste indochinois. Le quotidien Le Soir estime le nombre de participants à six cents. Nguyên Thê Truyên, selon L'Écho annamite, « définit les causes de toutes ces persécutions abominables dont est victime le peuple indochinois et dénonça les coupables. Ce sont, d'une part, les missions étrangères, surtout la mission catholique représentée par le fameux Père Robert. »

D’après le préfet de police de Paris, il est, entre 1925 et 1927, « le plus actif des agitateurs du mouvement révolutionnaire annamite en France [...] l'animateur du mouvement dans la région parisienne. »

À Paris (4e arr.), Nguyên Thê Truyên épouse en novembre 1927 Madeleine Marie Clarisse Latour, modiste. Ils vivent rue Saint-Louis-en-l'Île.

Nguyên Thê Truyên retourne au Vietnam en janvier 1928. Il est accueilli favorablement par l’organe nationaliste L'Ère nouvelle, qui apprécie qu’il se soit engagé dans « la politique d'indépendance immédiate ». Par contre la police s’inquiète et, ayant reçu une lettre anonyme l'informant que ses partisans détenaient des milliers de fusils et une quantité considérable de munitions dans quelques grottes et cavernes du nord de la province de Thudaumot, en Cochinchine, décide de mener une perquisition, qui n’a aucune suite.

En France, le PAI est dissous en mars 1929 par mesure judiciaire. Mais au Vietnam, Nguyên Thê Truyên se rapproche du Viet Nam Quoc Dan Dang (VNQDD) ou parti nationaliste annamite. Les affiliés du VNQDD prononcent le serment suivant : « Devant les Monts et les Fleuves du Pays d'Annam ; devant les Camarades rassemblés; je jure sur l'honneur de remplir intégralement mes devoirs de membre, d'obéir ponctuellement aux ordres du parti, de garder un secret absolu sur toutes ses affaires, de lui sacrifier ma vie, mes biens et ma situation, de subir la peine de mort si je me parjure. »

À suivre

Nguyên Thê Truyên

 

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17 octobre 2021 7 17 /10 /octobre /2021 00:01

Mohamed Lakhdar-Toumi est né le 12 avril 1914 à Tiaret (département d’Oran) en Algérie. Il milite aux Jeunesses communistes (JC). Il s’installe à Paris en 1936 et habite 11, rue Joseph de Maistre. Rectificateur de profession, il est inscrit au syndicat des métaux en 1937 et reste militant des JC. Fin 1940, il se rapproche de deux membres du PCF et en juin 1941, il intègre l’organisation spéciale du Parti chargée d’organiser des sabotages contre l’occupant. L’usine Lavalette de Saint-Ouen où il est ouvrier consacre la majorité de sa production à l’Allemagne nazie. Avec deux de ses collègues, il en détruit le transformateur. Pour éviter les représailles, il entre dans la clandestinité, puis intègre les Francs-tireurs et partisans français (FTPF) de Paris rive droite. Le 1er août 1942, il participe au service d’ordre de la « manifestation patriotique » de la rue Daguerre.

Le 30 janvier 1943, Mohamed Lakhdar-Toumi est arrêté par la Gestapo à Joinville-le-Pont, torturé, emprisonné à Fresnes, avant d’être mais déporté, le 12 juillet de la même année, au camp de concentration de Natzweiller-Struthof (aujourd’hui en Alsace, mais alors annexé au Reich). Envoyé à Dachau, le 5 septembre 1944, il en sera l’un des rares rescapés.

À la Libération, on lui octroie le statut de sergent des Forces françaises de l’intérieur. Il repart en Algérie et participe au soulèvement du 1er novembre 1954. Arrêté par les militaires, il sera interné jusqu’en 1961. Dans l’Algérie indépendante, il devient syndicaliste au sein de l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA).

Mohamed Lakhdar-Toumi serait décédé en Algérie le 30 août 1987, à l’âge de 73 ans.

Le souvenir de Mohamed Lakhdar Toumi est évoqué dans la série Frères d'armes réalisée par Rachid Bouchareb, pour France Télévisions et diffusée en avril 2015. Son nom est inclus dans une liste de 318 noms proposés par le comité scientifique dirigé par l’historien Pascal Blanchard, diffusée le 10 mars 2021, suite à la demande président de la République, Emmanuel Macron, en date du 4 décembre 2020 « aider notamment les maires à renouveler les noms des rues ou des bâtiments publics et qu’une plus juste représentation de l’histoire française soit visible dans l’espace public. »

 

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6 avril 2021 2 06 /04 /avril /2021 00:01

Henri Eugène Greslon naît le 9 avril 1904 à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Il est le fils d’Yvonne Zélia Mary, couturière, et de son époux, Octave Marie Greslon, serrurier mécanicien, qui vivent 15, rue du Canal, dans le quartier du Centre. Le père, Octave Greslon est militant radical-socialiste et coopérateur.

La famille Greslon comprend six enfants, les trois aînés étant issus du 1er mariage du père, Henri étant l’aîné des trois autres. En mars 1913, le plus âgé des six, Octave Clément, meurt à Charenton-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), alors qu’il était déjà marié. Les autres vivaient toujours à Joinville.

Après la première guerre mondiale, la famille déménage à Maisons-Alfort (Seine, act. Val-de-Marne), où Henri est apprenti-mécanicien. Il est probable qu’il réside ensuite à Tillières-sur-Avre (Eure) et qu’Henri Greslon sr soit marié. Son fils Robert y voit le jour en avril 1926. Les deux cadets de la famille, Jeanne et Raymond, s’y marient en septembre 1929 et septembre 1930. Ce dernier revient ensuite sur les bords de Marne, à Maisons-Alfort, où il est recensé en 1936.

Le témoignage de Robert Greslon mentionne également, sans le dater, un séjour à Brunoy (Seine-et-Oise, act. Essonne).

À partir de 1933, les époux Greslon et leur fils sont installés à Dives-sur-Mer (Calvados), rue du Nord. Ils vont rejoindre plus tard les Cités rouges, rue de Normandie. Henri Greslon est ouvrier dans l’usine de laminage de la cité métallurgique.

Plusieurs témoignages, notamment celui de son fils, assurent qu’Henri Greslon était communiste pendant la deuxième guerre mondiale. L’usine de Dives ayant fermé pendant le conflit, il travaille dans une entreprise près de l’écluse de Périers-en-Auge.

D’après l’archéologue Vincent Carpentier, auteur d’une étude sur la ville pendant la guerre, les communistes clandestins étaient nombreux à Dives-sur-Mer. En avril-mai 1942, le sabotage à deux reprises du chemin de fer Paris-Cherbourg, perpétré à Airan par les Francs-Tireurs et Partisans (FTP), qui provoque la mort de soldats allemands, est suivi de l’arrestation de plus de cent cinquante otages. Cinquante-deux juifs et communistes, dont de nombreux Divais, sont exécutés, et quatre-vingts autres déportés à Auschwitz-Birkenau. En octobre, la Feldkommandantur de Caen exige des otages «préventifs», destinés à être exécutés en cas d’attentat. Onze communistes du Calvados, dont six habitants de Dives-sur-Mer sont arrêtés. Parmi eux, Henri Greslon est pris sur son lieu de travail par la police allemande le 21 octobre 1941.

En passant par Caen, les otages sont transférés au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht. Henri Greslon peut écrire à son épouse, en juillet 1942, signalant le départ pour « une destination inconnue, sans doute l’Allemagne » de certains de ses camarades.

Il est déporté le 24 janvier 1943 vers le camp de concentration de Sachsenhausen, dans la commune d’Oranienburg (Brandebourg, Allemagne), où il porte le matricule 59238.

Le transport comprend 1 557 hommes et 230 femmes, soit un total de 1 787 personnes, dont 673 sont décédées et 114 portées disparues.

Henri Eugène Greslon meurt le 1er août 1943 à Sachsenhausen. Il était âgé de 39 ans et père d’un enfant. Son décès est retranscrit, en septembre 1946, sur l’état-civil de Joinville-le-Pont. Un arrêté du 3 février 1994 a décidé que son acte de décès porterait la mention « Mort en déportation ». Son fils, Robert, a apporté un témoignage, recueilli en janvier 2017 par l’association la Mémoire ouvrière de Dives-sur-Mer, présidée par Christine Le Callonec.

Deux stèles portent son nom : l’une est la plaque commémorative Résistance-Déportation placée l’hôtel de ville de Caen (Calvados) ; l’autre est gravée sur le monument commémoratif des déportés de Dives-sur-Mer.

 

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7 novembre 2020 6 07 /11 /novembre /2020 00:01

Ernest Proupin nait le 28 janvier 1895 à Saint-Bonnet-de-Bellac, en Haute-Vienne. Il est le fils de Marie Desbordes, cultivatrice, et de son mari, Jean Proupin, scieur de long, qui vivent dans le hameau de Lauberge.

Son père étant devenu gendarme, Ernest Proupin va avec sa famille résider dans l’Isère à La Tour-du-Pin en 1896 puis à Grand-Lemps en 1906.

Il fréquente sans doute l’école militaire préparatoire de Billom, dans le Puy-de-Dôme, puisque c’est dans cette commune, en janvier 1913, qu’Ernest Proupin s’engage dans l’armée pour cinq ans, le lendemain de son dix-huitième anniversaire. Il est affecté au 2e régiment d’artillerie de campagne et nommé brigadier en août 1913.

Pendant la première guerre mondiale, il est blessé en octobre 1914 au ravin du Bois-Mulot à Mécrin (Meuse) d’un éclat d’obus dans la tête. Nommé maréchal des logis en mars 1915, il est affecté à l’armée d’Orient en mai de la même année. Il est cité à l’ordre du régiment pour avoir « fait preuve de courage et de sang-froid en maintenant les hommes de sa pièce à leur poste malgré que cette dernière était soumise à un violent bombardement ennemi ».

De nouveau blessé d’un éclat de bombe à la gorge à en Turquie, il est rapatrié en France en juillet, puis exclu du service armé, qu’il reprendra en novembre 1918. Il devient maréchal des logis chef en juillet 1919 puis est démobilisé deux mois plus tard. Suite à ses blessures, il bénéficie d’une pension pour une invalidité estimée à 50%.

Après le conflit, Ernest Proupin s’installe à Saint-Sulpice (act. Ham, Somme) où il est toujours domicilié en 1924. Il est ensuite à Paris (3e arr.), boulevard Beaumarchais en 1926 puis à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne) en janvier 1927. Il est domicilié dans le quartier de Palissy, avenue des Platanes.

Lors des élections municipales de mai 1929, Ernest Proupin est candidat sur la liste du Bloc ouvrier et paysan, conduite par le communiste Roger Bénenson. Il figure en 13e position sur 27. Proupin obtient, au premier tour, 337 voix pour 1 715 votants (19,7%) sur 2 491 inscrits. Proupin est l’assesseur de sa liste dans le bureau de vote qui couvre les quartiers de Palissy et Polangis. Les candidats communistes se maintiennent au second tour, mais ils n’ont pas d’élus, le radical Georges Briolay emporte 22 sièges dans une coalition de groupement des gauches associant radicaux-socialistes, socialistes SFIO et indépendants. La droite du maire sortant Stephen Durande gagne les 5 derniers postes.

En 1931, Proupin est représentant de commerce. Il est victime d’un grave accident de la route dans l’Oise, à Breuil-le-Sec, en février 1931. Sa voiture s'écrase contre un arbre après avoir tenté de dépasser un autre véhicule. Il est grièvement blessé.

C’est probablement Proupin qui, sous la désignation d’Ernest, remporte le concours d’abonnements lancé en 1933-1934 par l’hebdomadaire La Défense du Secours Rouge international.

Adhérent à la section de Joinville de l’association républicaine des anciens combattants (ARAC), Proupin en est exclu en août 1935 par la commission des conflits fédérale « en raison des malversations commises » par lui.

Au cours de la deuxième guerre mondiale, Proupin est rappelé en activité en février 1940 dans le 21e régiment d’artillerie de campagne. À la fin de la campagne de France, il s’évade et se rend en Algérie, où il est démobilisé à Oran en septembre 1941. Il est rappelé à sa demande en novembre 1942, d’abord dans l’artillerie puis dans l’infanterie en 1945. Il est au sein des troupes françaises d’occupation en Allemagne en octobre 1945, avant de rejoindre le fort de Vincennes (Seine, act. Val-de-Marne) en janvier 1946 puis d’être démobilisé en mars de la même année.

Son appartenance à la résistance à l’occupation allemande est reconnue au titre des Forces françaises libres.

Se présentant désormais comme métreur et toujours domicilié à Joinville, Ernest Proupin est convaincu d’avoir commis plusieurs abus de confiance, notamment dans les communes de Nyoiseau (act. Segré-en-Anjou Bleu, Maine-et-Loire) et Daon (Mayenne). Il est condamné à 6 mois de prison par le tribunal correctionnel d’Angers en décembre 1949.

Ernest Proupin meurt le 26 septembre 1962 à Joinville. Il était âgé de 77 ans. Il avait été décoré de la Médaille militaire, de la Croix de guerre avec étoile de bronze, de la médaille de la Victoire et de la médaille commémorative de l’armée d’Orient.

La tranchée du ravin du Bois-Mulot

 

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5 novembre 2020 4 05 /11 /novembre /2020 00:01

Louis Noger est fusillé le 23 octobre 1943 à Suresnes, au fort du Mont-Valérien avec ses co-inculpés. Il était âgé de 36 ans et père de deux enfants. Il est d’abord inhumé à Ivry-sur-Seine. Son frère Joseph, résistant comme lui, était mort de la tuberculose en 1942.

À titre posthume, Louis Noger est nommé en février 1946 au grade de sous-lieutenant dans l’armée de terre, avec effet au 1er octobre 1943. Le décret promeut au même rang deux autres résistants également liés à Joinville-le-Pont, Jean Savu, fusillé en sa compagnie et Joseph Belbéoch, mort lors des combats de la Libération à Joinville.

Un décret de septembre 1959 nomme Louis Noger chevalier de la Légion d’honneur.

L’ancienne rue du Centre de Noisy-le-Grand porte, depuis novembre 1944, le nom de rue des Frères-Noger. Une plaque est apposée sur le domicile des Noger au numéro 3 de cette rue. La structure communiste des Richardets à Noisy a adopté le nom de cellule des Frères-Noger, tandis qu’une autre cellule communiste, à Joinville-le-Pont, porte également le nom de Noger.

Le nom de Louis Noger figure sur le Monument commémoratif au Mont-Valérien dédié « Aux résistants et aux otages fusillés au Mont-Valérien par les troupes nazies 1941-1944 ». Il est également inscrit sur le monument aux morts du cimetière de Joinville-le-Pont ainsi que sur celui de Noisy-le-Grand. Il est aussi gravé sur la plaque commémorative de la Bourse du Travail de Paris (10e arr.).

Les deux fils de Louis et Fernande Noger contribueront à la mémoire de leur père.

Pierre Noger, probablement né en septembre 1937 et décédé en juillet 2010, fait partie des « 150 fils de martyrs de la Résistance » qui adressent une lettre au président de la République dénonçant le fait que le général allemand Hans Speidel siège à l'OTAN (Organisation du traité de l’Atlantique Nord) et annonçant qu’ils refusent de servir « sous ses ordres », considérant qu’il était ainsi « à la tête de l’armée française » et critiquant le fait qu’il avait servi Hitler. Pierre Noger est arrêté, au domicile familial de Noisy-le-Grand, le 26 mars 1958. L’hebdomadaire La Défense du Secours Populaire (ex-Secours rouge) remarque que « Au moment de l'arrestation, des bouquets de fleurs, déposés par les habitants du quartier, fleurissaient la plaque portant le nom des deux frères [Joseph et Louis Noger] au coin de la rue ». Il est libéré quelques jours plus tard. Une pancarte « Non à Speidel » était apposée sur la maison de Noisy. En décembre 1962, avec le même groupe et toujours le soutien du Secours Populaire, Pierre Noger lance un appel en faveur de militants allemands du mouvement de la paix.

Pierre Noger

Michel Noger, ébéniste comme son père et résidant toujours à Noisy, conçoit, en 2017, le prototype en bois des neuf panneaux d’information placés aux endroits où eurent lieu des actes de résistance pendant l’occupation allemande à Noisy et dans la commune voisine de Gournay, dont celui placé devant la maison familiale.

Pancarte Non à Speidel devant la maison de la rue des Frères-Noger

 

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3 novembre 2020 2 03 /11 /novembre /2020 00:01

Louis Noger naît le 7 octobre 1907 à Limoges (Haute-Vienne). Il est le fils d’Antoinette Marquet et de son mari Léonard Noger, journalier. Sa mère meurt à Limoges en août 1914. Son père, mobilisé dans l’artillerie pendant la première guerre mondiale, se remarie en juin 1916 à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), commune où il s’installe à sa démobilisation en janvier 1919.

Avec son frère aîné Joseph, Louis vit à Joinville chez son père et sa belle-mère, dans le quartier de Palissy, avenue Galliéni puis dans celui voisin de Polangis, avenue de Blois.

En 1926, Louis Noger est devenu ébéniste. Il fait probablement son service militaire en 1927-1929 en 1931. Il se marie en février 1930 avec Fernande Marie Aglaé Cattiaux, modiste, à Noisy-le-Grand (Seine-et-Oise, act. Seine-Saint-Denis), où vit désormais son frère. Noger exploite un atelier d’ébénisterie à Paris (11e arr.). Le couple vit d’abord à Joinville dans le logement familial en 1931 puis déménage à Noisy.

Louis Noger va s’engager sur le plan politique et syndical. Adhérent au parti communiste en 1934, il participe cette année-là à une manifestation le 1er mai, est arrêté puis condamné à vingt jours de prison « pour s'être défendu contre les brutalités d'un agent » selon l’hebdomadaire du Secours rouge international, La Défense. Les historiens Daniel Grason et Annie Pennetier racontent que le rapport du commissaire du quartier Bel-Air à Paris (12e arr.) mentionne donna « un coup de tête » dans la poitrine de l’agent ; le jugement retint qu’il donna « un coup de poing ». Condamné le 3 mai, il purgea sa peine à la prison de Fresnes.

C’est probablement Louis Noger qui, désigné comme le camarade Noger, apporte la contribution du Syndicat général des travailleurs du bois à la souscription « Au secours du peuple espagnol » lancée dans l’hebdomadaire de la Confédération générale du travail, Le Peuple, en septembre 1936. En 1939, Louis Noger travaille pour un ébéniste de Joinville-le-Pont,

Louis Noger

Au cours de la deuxième guerre mondiale, Louis Noger est rappelé à l’armée en septembre 1939, puis est réformé temporairement en avril 1940 à Besançon (Doubs) selon Grason et Pennetier.

Revenu à Noisy-le-Grand, il intègre au cours de l’année 1942, selon les Amis de la Fondation pour la mémoire de la déportation (AFMD), un groupe de résistants des Francs-tireurs et partisans (FTP), organisé dès 1941 à Champigny-sur-Marne (Seine, act. Val-de-Marne), qui réalise quelques attentats spectaculaires dans la commune. Ayant repris contact avec le parti communiste clandestin, Noger est désigné comme responsable politique et à la propagande du groupe. Il mettait en rapport des réfractaires au Service du travail obligatoire (STO) avec un médecin qui établissait des certificats de complaisance pour les exempter de repartir en Allemagne, relèvent Grason et Pennetier.

Sur dénonciation, d’après l’AFMD, plusieurs membres du groupe sont identifiés. Louis Noger est arrêté sur son lieu de travail le 23 juillet 1943. Neuf autres personnes furent appréhendées dont plusieurs FTP : Jean Savu, le chef du groupe, Augustin Auguste Taravella, Pierre Marie Derrien, Maurice Pirolley et Lucien Rigollet. Ils sont condamnés à mort le 15 octobre 1943 « pour activités de franc-tireur et favorables à l’ennemi » par le tribunal allemand de la région de Paris.

S’adressant à son épouse, le 23 octobre, Louis Noger annonce qu’il va être exécuté : « je partirai dans l’espoir de laisser derrière moi d’une famille que j’ai voulu unie et aimante ». L’AFMD a publié sa dernière lettre.

Dernière lettre de Louis Noger

 

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1 novembre 2020 7 01 /11 /novembre /2020 00:01

Joseph Noger naît le 31 décembre 1902 au Palais-sur-Vienne (Haute-Vienne). Il est le fils d’Antoinette Marquet et de son marié Léonard Noger, journalier. Plusieurs membres de sa famille orthographient leur patronyme en Nouger.

Après le décès de leur mère, Léonard Noger et ses deux fils quittent le Limousin pour s’installer à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), dans le quartier de Polangis, d’abord avenue Galliéni où ils résident en 1921 puis avenue de Blois où ils sont domiciliés en 1926.

Retourné au Palais pour épouser, en juin 1925 Fanny Geneviève Nouger, Joseph Noger est au départ journalier, avant de devenir machiniste puis, à partir de 1931, toupilleur-chef (ébéniste). Avant 1930, la famille s’installe à Noisy-le-Grand (Seine-et-Oise, act. Seine-Saint-Denis) où elle réside rue des Ondines puis, en 1931, rue du Centre, dans le quartier des Richardets.

En compagnie de son frère, Louis Noger, qui l’a rejoint à Noisy-le-Grand, Joseph Noger s’engage dans la résistance à l’occupation allemande pendant la deuxième guerre mondiale. Il meurt de la tuberculose en 1942. Il était âgé de 39 ans et père de deux filles.

L’ancienne rue du Centre de Noisy-le-Grand porte, depuis novembre 1944, le nom de rue des Frères-Noger. Une plaque est apposée sur le domicile familial de Fanny et Joseph. La structure communiste des Richardets à Noisy a également adopté le nom de cellule des Frères-Noger.

La maison des Noger dans l'ancienne rue du centre, actuelle rue Frères-Noger à Noisy-le-Grand

 

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