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13 juin 2023 2 13 /06 /juin /2023 01:01

Début de la biographie d’Albert Kownacki

Stanislas Albert Jean Kownacki naît le 6 juin 1850 à Noyon (Oise). Il est le septième enfant d’Alexandrine Bullet et de son époux Joseph Kownacki. Son père, jeune officier polonais réfugié en France, a été un des artisans de l’insurrection polonaise contre l’occupation russe en 1830 ; il avait d’abord été ingénieur dans les chemins de fer et était devenu professeur de dessin.

Après avoir vécu à Noyon, Albert Kownacki suit un cours de rhétorique au lycée Charlemagne à Paris (4e arr.). Au cours la guerre franco-allemande de 1870, Kownacki se retrouve enfermé dans la capitale pendant le siège de Paris (20 septembre 1870 – 28 janvier 1871). Âgé de 20 ans, il décide de s’engager dans l’armée, mais le bureau de recrutement de la mairie du quatrième arrondissement refuse sa candidature à cause de sa petite taille (il fait 1 mètre 49) et de son état maladif. Il tente alors de rejoindre la garde nationale, milice supplétive, sans plus de succès. Enfin, il rejoint le Bataillon des jeunes qu’organisait Joachim Durandeau, directeur du journal Le Baccalauréat. Mais le commandant de la place de Paris, le général Louis Jules Trochu s’écria, selon le témoignage de Kownacki : « Il ne manquait plus que cela : jouer aux soldats ! ». Et il refusa l’autorisation de constituer la nouvelle unité et de lui fournir des armes.

Faute de pouvoir combattre, Albert Kownacki passe son baccalauréat à la session de novembre 1870. Il réside en 1877 rue du Petit-Musc, dans le quartier du Marais (4e arr.). L’année suivante, Kownacki devient directeur associé de l'institution Mary, une école privée de Clichy-la-Garenne (Seine, act. Hauts-de-Seine) ; il y vit, rue de Neuilly.

En mars 1877 à Paris (3e arr.), Albert Kownacki, qui vit alors rue du Petit-Musc (4e arr.), épouse Gabrielle Krahnass, artiste peintre qui expose aux salons de Paris sous le nom de Gabrielle Kownacka après l’avoir fait à Poitiers (Vienne) sous son patronyme. Elle est, comme lui, fille d’un officier polonais réfugié en France, François Krahnass, devenu comptable.

Membre de l’Association française pour l’avancement des sciences, Kownacki présente une communication sur les maîtres d’études à son congrès de Montpellier en 1879 et y constitue, l’année suivante une section pédagogique. Il est l’un des principaux orateurs et le secrétaire général du Congrès de l'Éducation et de l'Enseignement qui se tient à Paris en octobre 1879 puis en mars 1880.

Ayant déménagé à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), le couple s’installe en 1883 d’abord dans le quartier de Palissy, rue de Brétigny (act. Avenue du Président-Wilson) puis sur la rive droite, avenue de la Marne. En 1891, la famille retourne à Palissy, rue du 42e de Ligne, où elle restera installée des dizaines d’années.

Kownacki enseigne la biologie en lycée et est notamment chargé du cours de morale à l’École de sociologie à Paris en 1887. Il est connu par ses idées anticléricales. Mais son activité principale est celle de publiciste. Il collabore notamment à des publications à vocation pédagogique : Bien Public, Estafette du Nord, La Science pour tous, Le Journal du lundi, Cahiers de l’Université populaire, Bulletin de l'Association philotechnique, L'Union morale (organe de la ligue française d'éducation).

Il consacre en 1889 un ouvrage au directeur d’une de ces publications, Le Journal du lundi, Émile Baras, journaliste économique, ancien responsable de La Semaine financière, un auteur dont il vantait la probité.

Dans son nouveau territoire de résidence, Albert Kownacki est délégué cantonal de l’Éducation nationale pour la circonscription de Saint-Maur et membre de la commission d’examen du certificat d’études.

Albert Kownacki est affilié à la franc-maçonnerie française. Il donne en février 1883, une Conférence intitulée « La France maçonnique et le gouvernement de la République d'après les cléricaux » pour l’installation des officiers de la loge L'École mutuelle, du Grand-Orient de France. À partir de 1884, il est orateur et surveillant de la loge L'Avant-Garde Maçonnique, dont le temple se situe au siège du Grand-Orient, rue Cadet. Il en est le vénérable en 1886. Il rejoint en 1903 la loge Les Rénovateurs de Clichy, dont le ministre de la guerre, Maurice Berteaux, a été le vénérable.

À suivre

Le premier ouvrage d'Albert Kownacki

 

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11 juin 2023 7 11 /06 /juin /2023 01:01

Cécile Élisabeth naît le 12 décembre 1866 à Paris (14e arr.) et est déclarée par la sage-femme à l’état-civil sous le nom de « Baptiste », un des prénoms de sa mère, couturière qui se nomme en réalité Jeanne Baptiste Virginie Badoz ; son père n’est pas dénommé. Sa mère, qui ne la reconnaît pas alors, vit rue du Géorama (act. rue Maurice Ripoche).

En juillet 1875, sa mère, qui est marchande de chaussures à Levallois-Perret (Seine, act. Hauts-de-Seine), rue Saint-Louis, est déclarée en faillite. Redevenue couturière et vivant rue de La Glacière à Paris (14e arr.), elle épouse en octobre 1878 à Paris (13e arr.) Alexandre Jérôme Marcou, charpentier. Près de trois ans plus tard, en août 1881, les deux époux reconnaissent Cécile Élisabeth comme leur fille. Elle prend alors, à 14 ans, le nom de Marcou.

À l’âge de 16 ans, Cécile Marcou rentre à l’administration des Postes en mai 1883. Elle travaille à la poste centrale de Paris, rue du Louvre.

En septembre 1889 à Paris (14e arr.), elle se marie avec Lismon Tamisier, également postier. Elle change de fonction en entrant à la direction de la Caisse nationale d’épargne, qui dépend de la même administration. Son salaire continue, de manière régulière à augmenter, de 1 100 francs en 1888 à 1 900 en 1898.

Lors de la constitution des conseils de discipline des services postaux centraux, en mai 1907, Cécile Tamisier fait partie des trois élues de l’instance qui couvre la Caisse nationale d’épargne.

En janvier de la même année, son mari a été promu receveur des postes et nommé à l'Isle-sur-Sorgue (Vaucluse). Elle le suit quelques temps plus tard et est affectée dans la même ville comme employée de la poste, mais son salaire a été considérablement baissé, puisqu’il est fixé à 1 500 francs en 1909. Ils résident avec leurs deux filles quai Rouget-de-l’Isle. Madeleine, l’aînée a épousé à l'Isle-sur-Sorgue, en septembre 1912, Émile Eugène Jouvent, également employé des postes, qui, sergent dans un régiment de génie, sera tué au combat en dans l’Aisne en juillet 1917.

Lismon Tamisier est muté en 1913 à Saint-Just-en-Chaussée (Oise). Trop âgé pour être mobilisé pendant la première guerre mondiale, il est promu en 1917 au bureau de Neufchâtel-en-Bray (Seine-Maritime).

Après le conflit, la famille revient en région parisienne ; ils sont installés, en 1921, à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), où les deux parents travaillent dans le bureau local. Leur fille aînée, Madeleine, devenue mère et veuve, vit avec eux et est aussi employée des postes. Leur fille cadette, Suzanne, épouse à Joinville en mars 1921 le beau-frère de sa sœur, Léon Stanislas Jouvent, tailleur, et ils vivent dans une rue voisine.

Le service postal est assuré à Joinville-le-Pont par le bureau central, quai du Barrage, et une annexe, dans le quartier de Polangis, avenue du Parc. En octobre 1923, Lismon Tamisier fait valoir ses droits à une pension de retraite et la structure auxiliaire de Joinville Polangis devient un bureau de plein exercice. En quittant sa fonction, la famille doit déménager. Ils vont résider à Paris (12e arr.), rue Taine, toujours avec leur fille aînée et leur petit-fils, tandis que leur fille cadette occupe l’appartement voisin.

Cécile Tamisier poursuit sans doute son activité. Elle était probablement retournée à la Caisse d’épargne, en tant que surveillante, fonction dans laquelle elle prend sa retraite en 1925.

Elle décède le 22 octobre 1936 à Paris (12e arr.), dans son logement. Elle était âgée de 69 ans.

La Poste à Joinville

 

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30 mai 2023 2 30 /05 /mai /2023 01:01

Suite de la biographie de Louis Soullière

Sa disgrâce terminée, Soullière est de nouveau nommé commissaire à Aubervilliers (Seine, act. Seine-Saint-Denis) en mars 1897, mais il est transféré immédiatement dans la commune voisine de Saint-Ouen où il inaugure, en janvier 1898 un nouveau commissariat de police. En octobre la même année, il rejoint Neuilly-sur-Seine (Seine, act. Hauts-de-Seine). Il y crée une brigade d'agents cyclistes, qui est à l’origine de l’arrestation de malfaiteurs qui s’attaquaient aux promeneurs dans le bois de Boulogne, désignés comme la bande du « Grand Caïman ».

En août 1901, Soullière, ouvre une enquête suite au cambriolage du Pavillon des Muses, propriété située boulevard Maillot de Robert de Montesquiou, alors en villégiature à Capvern, dans les Pyrénées. Le comte, poète, dandy et critique d'art, était très proche du milieu littéraire de son époque. Il entretint une abondante correspondance avec Marcel Proust, pour lequel il fut un des inspirateurs d’un des personnages de La Recherche du temps perdu, le baron de Charlus.

Promu commissaire de police de la ville de Paris, Soullière est chargé du quartier de Javel (15e arr.) en mai 1902. Il devient commissaire-chef deux ans plus tard et est nommé à la tête de la première brigade des recherches, dite brigade des jeux. Il organise de très nombreuses opérations de police dans les Cercles de jeux parisiens. Mais il conduit également des enquêtes sur l’exercice illégal de la médecine ou le trafic de drogue. En avril 1906, il réalise une perquisition au siège du Comité antimaçonnique et chez son président, l’abbé Joseph Tourmentin, s’attirant une protestation dans les milieux catholiques.

Le quartier Le Soleil, commente son attitude en juin 1906 dans les Propos d’une parisienne : « Il y a des magistrats qui ont du tact et savent à l’occasion se montrer conciliants, voire même courtois en certaines circonstances. (…) M. Soullière, par exemple ! l’intelligent commissaire de la première brigade des jeux. Dernièrement encore il faisait une descente dans un cercle mixte, quand il s’aperçut qu’à son entrée une femme très élégante, en robe décolletée, avait brusquement saisi l'enjeu et l'avait vivement caché dans son corsage, puis... simulant un évanouissement, s'était laissé tomber dans un fauteuil. Le tenancier du cercle, avec un air de circonstance, cherchant à attendrir M. Soullière, lui demanda l’autorisation de faire conduire Mme X... à sa voiture. (…) Le spirituel commissaire des jeux, moins farouche et plus humain que celui de Longchamp, mais ne voulant pas laisser croire qu’il était dupe de la comédie, se tourna vers ses agents et d’un geste plein de convoitise : Messieurs, leur dit-il, laissez passer la cagnotte. »

Avant les législatives, Soullière produit en avril 1910 un rapport sur « La Ligue patriotique des Françaises et les élections », une institution qu’il surveille depuis deux ans. Il souligne le rôle des jésuites dans la mobilisation féminine selon l’historienne Magali Della Sudda, qui relève la « bonne connaissance de l’association et de l’inquiétude que suscite la compagnie de Jésus » à une époque où le « péril clérical » reste un thème politique important, le gouvernement et la presse voyant dans les jésuites une « Internationale noire (…) aux ordres d’une puissance étrangère. »

En avril 1911, tout en restant chargé du service des jeux, M. Soullière est nommé commissaire divisionnaire. Il fait partie, en novembre 1912 de la commission chargée d’étudier la réglementation des séances publiques de boxe. Il fait également saisir la comptabilité du Sou du Soldat et de nombreux documents dans les bureaux de la Fédération communiste anarchiste, rue Henri-Chevreau, en mai 1913.

Après la première guerre mondiale, durant laquelle il dirige un des districts de la police de Paris, M. Soullière, est chargé en décembre 1919 du service des locataires expulsés et des réfugiés. Le journaliste et écrivain Gabriel Reuillard, proche du romancier Henri Barbusse, l’interroge pour le quotidien socialiste L’Humanité qui publie leurs longs échanges le 26 janvier 1920 :

« - Ce que je fais des personnes qui viennent me demander un domicile, nous dit-il, je les héberge, actuellement, boulevard Jourdan, en des masures dont je suis en quelque sorte le gérant.

- Sont-elles nombreuses et habitables ?

- Euh !... On doit en trouver d'autres plus vastes et mieux aménagées, car les solliciteurs sont nombreux et je suis accablé de requêtes.

- Prévoyez-vous que la crise actuelle puisse avoir une fin prochaine ?

- Hélas ! je te voudrais ; mais je n'y vois pas de solution possible avant des années ! Car les raisons qui l'ont provoquée et qui ne cessent de l'entretenir sont loin de disparaître, La crise provient de la congestion de Paris pendant la guerre Les régions libérées ne sont pas reconstruites et un grand nombre de réfugiés ne peuvent regagner encore des pays dévastés et que l'on ne se hâte pas, il faut le dire, de reconstruire. C'est difficile, je le sais : pas de transports, de matériel, de machines et peu de main-d’œuvre. Alors... Alors...

- Alors, il faudra des années ?

- Des années... Du moins, c'est à craindre... Ce sont aussi les expropriations de plus en plus importantes et de plus en plus nombreuses de maisons d'habitation à cinq, six ou sept étages, en vue de l'agrandissement de tel ou tel grand magasin ou pour souscrire à la folie d'édification de cafés, de dancings, de restaurants, de cinémas ou de boites à spectacles ou à plaisirs, qui aggravent le mal. Le gouvernement devrait autoriser les administrations qu'il a chargées de chercher des remèdes à cet état de choses, à employer des mesures énergiques.

- Lesquelles ?

- Elles sont très simples. Ce ne sont, pas les logements inhabités qui manquent. Tel ou tel grand appartement que je pourrais citer abrite depuis 7, 8, 9 ou 10 ans, le mobilier de familles qui se sont retirées au bord de la mer ou à la montagne. Ce système de garde-meubles est onéreux, me dites-vous. Ces personnes-là sont riches. Quelques milliers de francs par an de plus ou de moins, n'est-ce pas, pour elles !...

Et les maisons entières, les maisons d'exhibition ou de rendez-vous, les garçonnières de toutes sortes !...

Il faudrait pouvoir réquisitionner tous ces logements et distribuer les locaux disponibles à ceux dont la mauvaise volonté de certains propriétaires intransigeants a l'ait comme une espèce nouvelle de vagabonds...

Il faudrait, il faudrait que l'on nous autorise à prendre des mesures énergiques. »

Et M. Soullière ajoute :

« - Tout le mal provient de ce que certains ont trop de moyens et de ce que d'autres n'en ont pas assez. De là le déséquilibre constant entre les situations, les heurts de plus en plus fréquents, de plus en plus violents, de plus en plus pénibles, entre les individus de catégories diverses. Les uns ont trois ou quatre appartements spacieux, les autres n'en ont pas du tout. Et pour tout, c'est la même chose ! »

L’écrivain pacifiste conclut : « La conclusion de cette juste argumentation ? M. Soullière ne pouvait la formuler : le caractère et l'essence même de ses fonctions le lui interdisent, on le comprend. Mais son impression pessimiste demeure et l'on s'explique combien il est difficile, impossible même, de trouver une solution : équitable à la crise des loyers dans l'état actuel de notre société bourgeoise. »

Louis Soullière prend sa retraite en octobre 1920. Il meurt le 22 octobre 1934 à Boulogne-Billancourt, où il résidait rue de l'Est. Il était âgé de 73 ans.

Un médecin, ami de longue date de la famille, rapporte, dans la Revue métapsychique en 1935, que le décès de Louis Soullière fut pour lui l’objet, la veille, d’une « monition de mort ». Il raconte sa disparition : « M. Soullière qui avait été bien portant, gai et allant le 21 octobre, fut réveillé le lundi 22 octobre, à 2h moins le quart, par une crise d’étouffement, accompagnée d’un vomissement. Il dit « J’étouffe, comme j’étouffe ! ». Sa femme envoya de suite sa bonne chercher un docteur dans le voisinage. Celui-ci arriva et lui mit des ventouses. M. Soullière dit : « S'il me faut encore souffrir comme ça, j'aime mieux mourir. » Et il expira à trois heures moins le quart. »

Le commissaire Soullière était officier dans l’ordre de l'Étoile noire du Bénin (Dahomey) depuis mai 1900, commandeur dans celui du Medjidié (empire Ottoman) depuis février 1905, décoré des Palmes académiques comme officier d'académie en décembre 1905. Il était chevalier de l'ordre de Victoria, dont la croix lui avait été remise en mai 1906 par le roi d'Angleterre Edouard VII. Il avait été fait chevalier de la Légion d’honneur en février 1919.

Son épouse avait accouché d’un enfant sans vie en octobre 1892. Par testament rédigé en 1925, il lui avait légué 50 000 francs. Elle sollicita, mais n’obtint pas, une aide du conseil général du département, en sus de sa pension de réversion.

Fin

Un cercle de jeux à Paris

 

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28 mai 2023 7 28 /05 /mai /2023 01:01

Début de la biographie de Louis Soullière

Louis Marius Barnabé Soullière naît le 11 juin 1861 à Orange (Vaucluse). Il est le fils de Pauline Perrin et de son époux Jean Pierre Gustave Soullière, négociant en matériaux de construction (bois et pierre). Son père décède moins d’un an plus tard en mai 1862, à Serrières (Ardèche), où la famille était implantée.

Son grand-père paternel, Jean Marie Amédée Soullière (1783-1863) y meurt également peu après, en janvier 1863. Médecin, ancien chirurgien major, il avait accompagné l’empereur Napoléon Ier dans diverses campagnes, en Autriche, Prusse, Pologne, Espagne, Portugal, Russie et Saxe. En 1850, sous la présidence de Louis-Napoléon Bonaparte, il avait été fait chevalier de la Légion d’honneur et était également titulaire de la médaille de Sainte-Hélène

Résidant alors à Marseille, probablement avec son frère aîné Jean Marie, il s’engage, à 18 ans, dans l’armée à Avignon en novembre 1879, devançant de deux ans l’appel du service militaire. Il rejoint le 38e régiment d’artillerie. Nommé brigadier en août 1880, il est promu maréchal des logis en octobre 1881 puis maréchal des logis chef en février 1884. Il quitte l’armée en novembre 1884. Dans la réserve, il est nommé sous-lieutenant en janvier 1885, affecté comme officier d’approvisionnement, il est promu ensuite lieutenant dans l'artillerie territoriale.

Il quitte la Provence après sa période militaire et rejoint Paris, où il est embauché comme commis dans la police municipale en février 1885. Il travaille comme secrétaire de M. Goron, chef de la Sûreté. Il est ainsi un des quatre cadres de ce service qui compte plus de 340 agents. En mars 1889, le journaliste Horace Valbel lui consacre un portrait dans le quotidien La Petite République ; « Depuis quatre ans, M. Soullière appartient au service de la Sûreté. Il a subi avec succès les examens exigés des secrétaires du commissariat. Très assidu à son travail, très dévoué à son chef, dont il est fort estimé, M. Soullière aura, j'en suis certain, un fort bel avenir. »

En avril 1889, il est chargé des soixante agents du service de sûreté qui sont détachés au Champ-de-Mars et à l'Esplanade des Invalides pendant toute la durée de l'Exposition universelle de Paris.

Nommé dans le grade de commissaire de police des communes de la Seine en juillet 1891, il est d’abord affecté à Courbevoie (Seine, act. Hauts-de-Seine) mais son poste est modifié et il rejoint finalement Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), en remplacement d’Armand Routier de Bullemont. Le commissariat, qui existe dans cette commune depuis 1874, a dans sa circonscription les villes de Bry-sur-Marne, Champigny, Nogent-sur-Marne et Saint-Maur-des-Fossés. Il comptait en 1883 14 agents : le commissaire, un secrétaire, un brigadier et onze sergents de ville. En mars 1887, son territoire est élargi à la commune du Perreux, qui vient de se détacher de Nogent.

En janvier 1891, le commissaire fait interpeller deux enfants de six à neuf ans qui s’étaient enfuis à pied du domicile de leurs parents, rue des Batignolles à Paris, et tentaient de traverser la Marne par un gué. Les agents voulurent les ramener chez leurs parents mais, selon la presse, ils refusèrent : « On nous maltraite, on nous roue de coups pour la moindre chose. Souvent on nous envoie coucher avec un morceau de pain et un verre d’eau. Quelquefois même nous passons la journée tout entière sans manger ». Ils assurent vouloir gagner Château-Thierry (Oise), où ils connaissaient « une famille honorable ». Ils racontent : « Nous avions sept sous à nous deux pour les frais du voyage [35 centimes] ; ce matin nous avons acheté un petit pain de deux sous ». Le commissaire dut les envoyer au Dépôt, après leur avoir donné un déjeuner et une paire de souliers neufs puis il fit prévenir les deux familles des garçons.

En décembre 1891 à Paris (17e arr.), Louis Soullière épouse Marie Thérèse Eugénie Fabre (1863-1939), pianiste, professeure de musique et compositrice, élève de César Franck et amie de Gabriel Fauré. Ce dernier est un des témoins du mariage, avec notamment le Jean comte de Montebello et le chef de la sûreté de Paris, François Marie Goron.

Au sein de son commissariat, pour faire face aux cambriolages dans les pavillons des bords de Marne, Soullière crée fin 1891 une brigade spéciale de sûreté, basée dans le poste de police de Saint-Maur. En juillet 1892, il doit gérer une affaire qui est mise en avant dans la presse comme relevant de la haute trahison, un en comptable de la manufacture de Bourges, employé chez un teinturier à Joinville s’étant vanté de pouvoir se procurer des armes et des munitions de guerre. Il avait pour maîtresse une domestique d’origine allemande. Une perquisition ne permit cependant de trouver qu’une seule cartouche, mais la police mit la main sur des objets volés chez les employeurs de la bonne. Tous deux ne furent écroués que sous l’inculpation de vol.

Le jour de Noël 1893, une femme complètement nue se présenta au commissariat, déclarant « être une fille naturelle du prince de Galles, se nommer Jeanne d'Arc et être envoyée par Dieu pour sauver la France de l’anarchie ! ». Selon la presse, elle était d’une rare beauté et voulait du commissaire « une lettre d'audience pour le président de la République ». Elle avait déjà été internée pour troubles psychiatriques et fut envoyée à l'infirmerie du Dépôt de la préfecture de police.

Dans un contexte d’attentats politiques, le commissaire Soullière fait arrêter, à La Varenne, quartier de Saint-Maur-des-Fossés, début juillet 1894, un jardinier de 16 ans, Joseph Léger, que son patron a dénoncé comme préparant des manipulations chimiques. Il fait procéder à une perquisition dans chambre du jeune homme, trouve une boîte cylindrique et des produits chimiques, en conclut qu’il s’agit donc d’un anarchiste préparant une bombe. Le garçon, orphelin, s’était enfui deux mois auparavant d’une ferme-école dans les Vosges. Il est incarcéré à la prison de Fontevraud (Maine-et-Loire) pendant 18 mois environ, bien qu’il ait nié toute intention de fabriquer un engin explosif, que le caractère inoffensif de ses produits ait été certifié et qu’il n’y ait pas trace d’un engagement dans un mouvement terroriste.

Les jours suivants, le commissaire fait arrêter plusieurs militants anarchistes dans les communes de sa circonscription : Naudé, à Saint-Maur, Albert Mainfroy, imprimeur, au Perreux et Didier Laurent sur le pont de Joinville, après qu’il ait crié « Vive l'anarchie ! Les bourgeois s'inclineront devant nous » et fait l'apologie des crimes commis par Ravachol, Vaillant, Émile Henry et Caserio.

Fin juillet 1894, Louis Soullière est remplacé en tant que commissaire de police de Joinville par M. Rougean et redevient simple commis à la Préfecture de police. Les motifs de cette disgrâce, qu’il partage avec cinq autres anciens de la Sûreté parisienne, dont son ancien chef et témoin de mariage, M. Goron, est constitué par des irrégularités découvertes par le service de contrôle, dans des comptes relatifs à l’année 1889. La presse évoque largement la rétrogradation. Pour L’Intransigeant, « ce n’est pas autre chose qu’une vengeance » du préfet de police Louis Lépine. Soullière tarde cependant à rejoindre son nouveau poste et réclame, selon Le Libéral, « contre la façon de procéder à son égard. Nommé commissaire de police par décret présidentiel, il estime que le préfet de police n'a pas le droit de toucher à [cette] décision ». Selon Le Soleil, il ne veut pas qu’on le rétrograde d’un « poste de 12 000 francs (…) à un emploi de 3 000 francs. »

Évoquant de nouveau l’affaire, en Une cette fois-ci, L’Intransigeant assure qu’il « proteste contre la mesure lépinière qui le frappe et principalement contre les procédés anticonstitutionnels du préfet (...) Il n’admet pas qu’un vulgaire préfet de police touche à une décision qu’une révocation ou une démission peut seule rendre nulle. Il ne veut pas permettre au préfet de défaire ce qu’a fait le président de la République ». L’Univers s’interroge : « Est-ce que les décisions du président de la République comptent devant la volonté du tout-puissant cancre du boulevard du Palais ? »

À suivre

Mairie de Joinville-le-Pont, où était installé le commissariat, années 1890

 

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26 mai 2023 5 26 /05 /mai /2023 01:01

Marie-Thérèse-Eugénie Fabre naît le 24 août 1863 en Avignon (Vaucluse). Elle est la fille de Thérèse Blanc et de son mari, Joseph Xavier Fabre, employé de préfecture.

Au début des années 1880, Marie Fabre suit au conservatoire de musique d’Avignon des cours de piano auprès de Mary Soullière, élève du chanteur, compositeur et pianiste français Théodore Ritter.

En rejoint Paris et vit, avec son père devenu attaché à la direction des cultes, rue des Acacias (15e arr.). Elle suit les cours de piano et de composition de César Franck (1822-1890) au Conservatoire de Paris, ainsi que probablement son enseignement d’orgue. En mars 1885, elle participe au concert, donné par son ancienne professeure d’Avignon à la salle Kriegelstein de la rue Charras à Paris (9e arr.). Le programme a été composé par César Franck et comprend des morceaux de Mendelssohn, Meyerbeer, Beethoven et Schubert, que Marie Fabre accompagne au piano avec César Franck. La Tarentelle de Louis Moreau Gottschalk, clôture la soirée, interprétée par Mlles Soullière et Fabre.

Le 20 mai 1887, Marie Fabre donne à Paris son premier concert. Le compositeur Guy Ropartz (1864-1955) commente ainsi dans L'Indépendance musicale sa prestation : « Elle avait, pour débuter, abordé la sonate en fa dièse mineur de Schumann, œuvre d’une extrême difficulté et qui demande une grande ampleur d’exécution ; la jeune artiste s’en est tirée tout à fait à son avantage, la première émotion, bien compréhensible, une fois passée. Différentes œuvres de Chopin, Heymann, Alkan, deux petites pièces d’elle, heureusement écrites pour l’instrument, ont fait ressortir ses bonnes qualités de mécanisme ; mais où elle a été supérieure, c’est dans la sonate pour piano et violon de C. Franck, que l’on entendait à Paris pour la seconde fois seulement. En résumé, Mlle Marie Fabre a beaucoup de doigts, une grande sûreté, beaucoup de nerf, trop peut-être ; son style n’est pas encore absolument défini, bien qu’elle donne déjà aux œuvres qu’elle interprète une certaine physionomie qui n’est pas celle de tout le monde : nous pouvons attendre d'elle une excellente artiste. »

Poursuivant ses cours au Conservatoire ans la classe de Mme Angot-Montier, elle participe aux concerts devant le jury d’examen, présidé par le compositeur Antonin Marmontel en janvier 1889 puis en mars 1890, la presse remarquant à ces occasions son interprétation.

Le 16 mars 1889, à la Société nationale de musique à Paris, Marie Fabre exécute avec le quatuor Heymann une Étude de Charles Valentin Alkan pour piano et quatuor à cordes, arrangée par César Franck.

En avril 1891, à l’occasion de l’inauguration de l’hôtel de la comtesse de Montebello, rue Barbet-de-Jouy, Marie Fabre donne un concert, en compagnie du violoncelliste Liégeois. Ils interprètent la sonate de Grieg, la Polonaise de Chopin, et la romance du prince Serge Walkonsky.

Frère de son ancienne professeure d’Avignon, Louis Soullière, commissaire de police à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), l’épouse à Paris (17e arr.) en décembre 1891. Les deux témoins qu’elle avait choisis sont le comte Jean de Montebello et le compositeur Gabriel Fauré. Elle poursuit son activité en tant que professeure de musique.

Le nouveau couple vit d’abord à Joinville puis, au gré des nominations du mari par la préfecture de police, à Paris, Saint-Ouen et Neuilly-sur-Seine (Seine, act. Hauts-de-Seine). Marie Soullière accouche, en octobre 1892, d’un enfant mort-né et n’aura pas de descendant.

Après le décès de son époux, en octobre 1934 à Boulogne-Billancourt (Seine, act. Hauts-de-Seine), où ils s’étaient installés après sa retraite rue de l’Est, Marie Soullière reste vivre dans la commune rue de Sèvres. Elle demande une pension au conseil général du département, qui la lui refuse, soulignant qu’elle percevait déjà une réversion de la retraite de son mari. Il lui avait légué, par testament, 50 000 francs.

Le 30 mars 1939, Marie Soullière meurt à Boulogne-Billancourt. Elle était âgée de 75 ans. Décorée des Palmes académiques, elle avait été faite officière d'académie en janvier 1900 puis officière de l’instruction publique en mars 1906 pour son activité de compositrice et de professeure de musique.

César Franck lui a dédié le manuscrit de la première page de sa symphonie en ré mineur, transcrite pour piano à quatre mains. Le journaliste Louis Schneider, dans le quotidien Le Gaulois, considérait, en novembre 1922, qu’elle avait été « une des meilleures élèves du maître. »

Symphonie en ré mineur de César Franck, offerte à Marie Soullière

 

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10 mai 2023 3 10 /05 /mai /2023 01:01

Louis Carpin naît le 27 janvier 1861 à Charenton-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), au domicile de son grand-père maternel, rue des Bordeaux. Il est le fils de Julie Virginie Charlotte Boissenot et de son époux, Anthelme Carpin, négociant en vin et ancien commissaire de police dans l’Ain, la Sarthe et la Haute-Vienne. La famille de son père possède des domaines agricoles, notamment viticoles à Virignin (Ain).

La famille émigre aux États-Unis en 1876, « pour essayer de reconquérir la fortune que lui avait fait perdre la guerre de 1870 », d’abord en Floride, puis, après que différents sites ont été examinés, elle rejoint le Piedmont de Caroline du Sud, près de Greenville. Le père acquier un domaine boisé à cinq kilomètres au nord-ouest de la ville, qu’il transforme en exploitation viticole à la française tout en utilisant des cépages locaux. Louis, qui a alors 15 ans, aide son père dans la propriété, baptisée Mammoth. Cependant, Louis tombe malade de fièvre typhoïde et sa mère, qui craint pour sa vie, rentre avec lui en France. Il son hébergé par un de ses frères aînés, Charles, boulevard de Reuilly à Paris (12e arr.).

Ce dernier, comptable dans une librairie, assure la subsistance de la famille. Pour éviter que sa mère se retrouve sans ressource, Louis, après son rétablissement, s’engage en mars 1879 pour cinq ans dans l’armée, ce qui permet à son frère d’être dispensé de ses obligations militaires. Il sert dans le 123e de Ligne, à Valenciennes (Nord). Devenu caporal, puis sergent fourrier, Louis Carpin finira sa période sous les drapeaux en tant que secrétaire copiste à la préfecture du département Nord, dans le bureau chargé du recrutement. Il est démobilisé en septembre 1883.

En 1881, son frère Charles, qui avait perdu son emploi de comptable du fait de la faillite de la librairie qui le salariait, est embauché comme secrétaire de commissariat à la préfecture de police de Paris. Louis fait de même, dès sa sortie du régiment, en novembre 1883. Il est affecté à Paris, dans le quartier de la Porte Saint-Martin (10e arr.), comme secrétaire suppléant. Il est titularisé en décembre 1884 et affecté dans sa commune natale, Charenton-le-Pont. Il raconte y avoir été félicité par le secrétaire général de la préfecture pour son « attitude et initiative à l’occasion d’une manifestation organisée par Louise Michel, tombée actuellement dans l’oubli, et pour cause… ». Il mentionnait l’écrivaine, militante anarchiste et oratrice du mouvement ouvrier. Nommé, un an plus tard au commissariat du quartier Vivienne, toujours secrétaire, il est de nouveau apprécié pour son rôle au cours de l’incendie de l’Opéra-Comique, qui fit 84 morts en mai 1887.

Le mois précédent, à Anzin (Nord) en avril 1886, Louis Carpin épousait Noémie Céline Victorine Farez, fille d’un vétérinaire, dont la famille exploitait une sucrerie et avait joué un rôle significatif du côté républicain pendant la révolution française de 1789. Il avait probablement rencontré son épouse, native de Valenciennes, lors de son séjour dans le Nord à l’armée.

Promu officier de paix en août 1889, Louis Carpin sert d’abord dans le 19e puis le 12e arrondissement, où il doit surveiller les grèves des terrassiers et des conducteurs de la compagnie des Omnibus (ancêtre de la RATP).

Nommé commissaire du quartier de la Monnaie (6e arr.), en septembre 1895 ; il écrit : « je n’y suis resté que dix mois parce qu’il n’y avait rien à faire », si ce n’est la surveillance de bâtiments officiels. Il revient alors Porte-Saint-Martin, où son équipe assure la surveillance de la salle Rivoli-Vauxhall, qui accueille des rencontres de révolutionnaires, notamment espagnols. Mais il se mobilise aussi pour empêcher une manifestation royaliste en saisissant des photos du duc d’Orléans, ce que la justice considèrera comme illégal.

Son poste suivant est celui du quartier le plus chargé de France, selon ses dires, celui de Clignancourt (18e arr.), qu’il rejoint en juin 1898. Après la séparation de l’Église catholique et de l’État, en 1905, il doit procéder à l’inventaire des lieux de culte qui deviennent propriété des pouvoirs publics, notamment Notre-Dame de Clignancourt, Saint-Pierre de Montmartre et la basilique du Sacré-Cœur.

Dans le même poste, Carpin eut à procéder en 1909 à l’arrestation de Detollenaere, dit Delaunay, voleur et assassin de deux policiers. L’homme se suicida quand il entrait dans son repaire.

Après avoir assumé pendant 14 ans la responsabilité de ce commissariat, une durée inhabituellement longue, il est nommé en septembre 1912 dans le quartier du Faubourg-Montmartre (9e arr.), situé rue de la Folie-Méricourt.

Le 16 mars 1914, il procède à l’interrogatoire d’Henriette Caillaux, qui vient de tirer dans son bureau sur le directeur du Figaro, Gaston Calmette, lequel mourra ensuite de ses blessures. Elle se disait exaspérée par l’intense campagne de presse lancée par le quotidien contre son mari, Joseph Caillaux, ancien président du conseil et président du parti radical. Alors ministre des finances, il préparait l’introduction de l’impôt sur le revenu dans le droit français, et le journal, comme l’opinion de droite, contestait ce projet, y compris en attaquant Joseph Caillaux sur sa vie privée, notamment qu’il avait eues avec sa future épouse, alors qu’ils étaient encore mariés à d’autres personnes. La meurtrière avait déclaré « Il n’y a pas de justice… je la fais moi-même. »

Lors du procès de Mme Caillaux devant la Cour d'assises de la Seine, Louis Carpin fut amené à témoigner le 20 juillet 1914. Répondant à la question sur l'attitude de Mme Caillaux le soir du drame, il assura « Mme Caillaux fut d'abord très calme, elle devint nerveuse un peu plus tard ». Interrogé ensuite sur son opinion concernant la sincérité de Mme Caillaux qui avait dit qu'elle ne croyait pas avoir tué M. Calmette, il assura « Cette déclaration me parut sincère et spontanée ». La déposition de Carpin, jointe à d’autres témoignages, contribua à écarter la préméditation, ce qui permit de faire acquitter Henriette Caillaux, le jury retenant la thèse d’un crime passionnel.

Peu après le début de la première guerre mondiale, en septembre 1914, Carpin mit à disposition du sous-préfet de Senlis (Oise) une propriété qu’il avait dans cette ville pour y installer ses bureaux et accueillir des officiers et sous-officiers blessés. La sous-préfecture venait d’être détruite par les bombardements allemands lors de la première bataille de la Marne.

Louis Carpin prit sa retraite de la police en septembre 1917. Le quotidien Le Gaulois assura alors qu’il « détient le record pour le nombre des affaires traitées et plus particulièrement pour les affaires sensationnelles ». La Presse écrivit : « il sut toujours exercer avec équité ses délicates fonctions. »

Ayant quitté l’administration, Carpin devint inspecteur chargé d’enquête de la compagnie d’assurances Foncière Transport, fondée en 1879. Il résidait alors rue Baudin à Paris (9e arr.). En 1927, il s’installe à Saint-Maur-des-Fossés, boulevard des Corneilles. Il était toujours actif dans cette fonction en 1931, à ses 70 ans. Selon Police Magazine, qui lui consacre un long article en juin 1933, il était président du déjeuner trimestriel des commissaires de police en retraite de la Ville de Paris et du département de la Seine.

Louis Carpin meurt le 21 février 1941 à Saint-Maur-des-Fossés. Il était veuf et âgé de 80 ans. Son fils était décédé quatre ans plus tôt, tandis que son gendre, Eugène Lucien Dupuis, fut également commissaire de police à Paris.

Titulaire de nombreuses décorations, Louis Carpin avait été fait officier de l’Ordre du Cambodge en mars 1899, officier de l’instruction publique en février 1903 et chevalier du Mérite agricole en décembre la même année pour sa « contribution à la répression des fraudes sur les denrées alimentaires ». Il était décoré de la médaille de bronze de la Mutualité en mars 1907, avait reçu celle du Courage et du dévouement en juillet 1909. Enfin, il était devenu chevalier de la Légion d’honneur en décembre 1925, après avoir multiplié les démarches pour ce faire.

Portrait de Louis Carpin, Police magazine, juin 1933

 

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8 mai 2023 1 08 /05 /mai /2023 01:01

Charles Philippe Wilfrid Carpin naît le 28 décembre 1858 à Charenton-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), au domicile de son grand-père maternel, rue des Bordeaux. Il est le fils de Julie Virginie Charlotte Boissenot et de son époux, Anthelme Carpin, commissaire de police, alors en poste à Bellac (Ain). La famille de son père possède des domaines agricoles, notamment viticoles, dans le même département, à Virignin. Peu après sa naissance, son père devient négociants en vin à Charenton.

Comptable dans une librairie de la rue Bonaparte, Charles Carpin doit prendre en charge en novembre 1878, sa mère et son frère, revenus des États-Unis où ils avaient suivi leur père. Le jeune Louis, qui aidait dans l’exploitation viticole de Greenville, en Caroline du Sud, avait attrapé une fièvre typhoïde. Ils vivent boulevard de Reuilly à Paris (12e arr.).

Pour éviter à Charles de devoir faire un service militaire et l’autoriser, ainsi, à continuer à contribuer à l’entretien de la famille, Luis, après son rétablissement, s’engage en mars 1879 dans l’armée.

La librairie qui employait Charles fait faillite en 1881 et, la même année, il est embauché comme secrétaire suppléant de commissariat de police, reprenant l’activité qui fut celle de son père, mais dans le ressort de la préfecture de police de Paris. En 1886, il est secrétaire du commissariat du quartier Saint-Merri à Paris (4e arr.). Il est nommé commissaire de police à Joinville-le-Pont en mars 1886. Il prend la succession de François Auguste Douçot, promu à Paris, selon la progression classique dans cette fonction.

Dans cette fonction, il aura notamment à gérer en septembre et octobre 1886 l’affaire Cabis, du nom d’un gendarme, Eugène Cabis. Ce dernier tue un jeune homme, Albert Dufeutrelle qui se promenait avec son amie dans un petit massif forestier annexe du Bois de Vincennes. L’évènement provoque un émoi considérable dans la presse. Cabis est traduit, comme militaire, devant un conseil de guerre, qui l’acquitte mais il est ensuite obligé de quitter la gendarmerie.

En tant que commissaire, Carpin interroge le gendarme après le meurtre et décide de ne pas l’arrêter. Son attitude lui vaudra des attaques virulentes d’une partie des journaux.

Le quotidien Gil-Blas commentait : « Que les gendarmes n'arrêtent pas les assassins, cela, est déjà désagréable, mais qu'on ne les arrête pas, du moins préventivement, lorsqu'ils assassinent, c'est peut-être un peu trop de condescendance à l'égard de leur baudrier. »

Un autre journal parisien est encore plus sévère. L'Intransigeant fustige la « négligence » du commissaire Carpin, qui n’a pas saisi le revolver de Cabis, et qu’il présente comme « un ami intime de l’assassin ». La publication, dirigée par Henri Rochefort, considère que « Carpin avait conduit l’enquête en dépit du bon sens ». Le 11 septembre, une lettre de Carpin est publiée, dans laquelle il assure ne pas avoir interrogé l’amie du jeune tué et ne pas être le supérieur de Cabis. La direction de L'Intransigeant maintient pourtant son point de vue, assurant pour conclure : « Vous feriez presque douter de votre intelligence, commissaire Carpin » mais assure s’en prendre plutôt « à l’institution policière, à ses vices, à ses scandaleuses complaisances, à ses indignes procédés de chantage sans nous soucier le moins du monde de l’obscur comparse dont nous ne faisions intervenir la mince personnalité que pour donner plus de relief à nos arguments. »

En juillet 1888, Carpin cède son poste à Marie Armand Routier de Bullemont tandis qu’il rejoint Neuilly-sur-Seine (Seine, act. Hauts-de-Seine). C’est dans cette ville qu’il épouse en décembre 1889 Marie Louise Roullier.

C’est en février 1894 qu’il sera promu à Paris (3e arr.), dans le quartier du Temple à Sainte-Avoye. Chargé en décembre 1898 du quartier Val-de-Grâce (Paris, 5e arr.), il y reste jusqu’en octobre 1911, date à laquelle il fait valoir ses droits à la retraite. En septembre 1895, son frère cadet Louis était également devenu commissaire de police à Paris.

Bien que travaillant toujours à Paris, Carpin acquiert une villa à Sarcelles (Seine-et-Oise, act. Val-d'Oise), rue de Paris. En mai 1909, la presse fait état d’un cambriolage chez le commissaire. Un journal local rectifiera en précisant que les malfaiteurs lui ont dérobé sept pigeons, mais n’ont pas touché aux poules et aux lapins tandis que Le Petit Parisien rectifiera son annonce précédente en précisant qu’ils n’ont « pu, malgré leurs efforts, pénétrer dans l'habitation. »

Après la mort de son épouse en janvier 1913 qui suit d’un an sa retraite, Carpin va s’installer avec son fils à Sarcelles, un bourg qui compte alors plus de 3 300 habitants.

Il participe, en novembre 1919, aux élections municipales dans la commune, sur une liste de concentration républicaine, comprenant l’Union républicaine (droite) et des personnes de centre-gauche. En l’absence du maire sortant, M. Dessaigne, elle est conduite par le Dr Galvani avec l’adjoint sortant, Daunard. Charles Carpin y figure en huitième position. La liste présente un programme limité : élever un monument aux morts, obtenir des améliorations pour le combustible, l’éclairage, le ravitaillement, la voirie, les lavoirs. Elle proclame soutenir l’Union dans le travail et la liberté. Une seule liste, incomplète, les concurrence, celle du Parti socialiste SFIO.

Lors du premier tour, la liste de concentration emporte 19 des 21 sièges à pourvoir avec de 297 à 473 voix sur environ 600 votants. Carpin est élu en septième place avec 371 suffrages. Les deux sièges en ballotage lui reviennent au deuxième tour.

Bien que le Dr Galvani ait mené la liste et soit arrivé très nettement en tête du vote, il ne se présente pas en tant que maire. Ses deux suivants, Lignez et Daunard seront élus adjoints, mais c’est Carpin qui devient maire. Il présidera en septembre 1920 aux obsèques du Dr Galvani et fera donner son nom à une voie de la commune.

En juin 1920, le nouveau maire s’émeut que « À Sarcelles, sur la place du Marais, se trouvent, depuis l’armistice, près de deux cents voitures du train et autant de cuisines roulantes et d’avant-trains de caissons. Tout cela pourrit et n’est point surveillé ». Il propose de vendre le matériel, dont, selon lui, « une grande partie pourrait être utilisée par les cultivateurs ou les entrepreneurs de transports de la région. »

Carpin inaugure en août 1921 le monument aux morts de sa commune. Il connaît une première épreuve politique en octobre la même année, avec, à l’occasion d’une élection municipale partielle pour remplacer deux départs du conseil, l’élection à des deux postes d’un communiste. Il démissionne d’une association culturelle, Tambours & clairons, dont il était membre honoraire, parce son président avait pris position pour ses opposants pendant la campagne.

Au cours d’un nouveau scrutin partiel, en avril 1923, ce sont trois radicaux-socialistes qui sont élus, tandis que la liste catholique qu’il soutenait n’arrive qu’en seconde position, talonnée par les communistes. S’estimant désavoué, le maire présente sa démission au préfet. Il est remplacé en juillet par son premier adjoint, Ernest Georges Langlois.

Charles Wilfrid Carpin meurt le 13 mars 1924 à Sarcelles. Il était âgé de 65 ans et décoré des Palmes académiques, comme officier de l’instruction publique, depuis janvier 1907.

La mairie de Sarcelles, vers 1911

 

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28 avril 2023 5 28 /04 /avril /2023 02:01

Suite de la biographie de Mayer List

Installé à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), dans le quartier du Centre, rue Chapsal en 1939 après son départ d’Espagne, Mayer List est dans une situation dangereuse après l’occupation allemande en juin 1940. Juif apatride, il ne parle pas le français à son arrivée en France ; cependant, comme il maîtrisait déjà six langues, il a sans doute une capacité à apprendre cette langue et, en 1943, il sera capable de l’écrire correctement.

Selon l’historien David Diamant (pseudonyme de David Erlich), c’est à l’automne 1941 que Mayer List apprend la formation de groupes juifs au sein de la Résistance communiste. Bien qu’il soit toujours en mauvaise santé, il intègre le 2e détachement de l'Organisation spéciale-MOI (main-d’œuvre immigrée), qui devient en 1942 les Francs-tireurs et partisans (FTP-MOI) ; il est membre du triangle de direction avec Samuel Weissberg et Léon Pakin. Il en devient le responsable politique et prend la direction opérationnelle en juin 1942, suite à l'arrestation de Léon Pakin. Dans la clandestinité, il utilise notamment le pseudonyme de Markus.

D’après Fabrice Bourrée, « Mayer List est à l’origine d’une ruse de guerre très efficace : des partisans organisent une diversion dans une rue voisine du lieu qui devait être attaqué. Les gardiens de police accourent, quittant leur poste. Pendant ce temps, un autre groupe s’approche rapidement de l’objectif et dépose les bombes à retardement. »

Selon un bilan établit par Boris Holban (pseudonyme de Baruch Bruhman, fondateur et chef militaire des FTP-MOI), entre le 8 juillet 1942 et le 31 mai 1943, le détachement de List a mené cinquante-huit actions contre les troupes d’occupation : incendies de camions, dépôts de bombes à retardement devant des hôtels occupés par des Allemands, grenadage de restaurants fréquentés par l'occupant, de détachements militaires...

Le site Paris révolutionnaire situe cinq opérations dans la capitale. En 1942, il répertorie quatre attaques à la grenade : le 2 décembre 1942, un bureau d’embauche allemand avenue de Breteuil (7e arr.) ; le 12 du même mois, un groupe de militaires allemands place de la Nation (11e arr.) ; encore le même mois, le jour de Noël, un camion allemand rue Desaix (8e arr.) ; le lendemain, 26 décembre, un restaurant fréquenté par des officiers allemands faubourg du Roule (8e arr.). Le détachement de Markus établit rue de Meaux (19e arr.), à la mi-mai 1943, une cache de matériel pour les FTPF, destinée à préparer des déraillements de trains.

Depuis fin avril 1943, des inspecteurs de la 2e brigade spéciale (BS2) de la police parisienne l’ont identifié, lui ont attribué le surnom « Lunettes », et procèdent à sa filature.

Mayer List est arrêté le 2 juillet 1943. Son arrestation a lieu, si l’on en croit le site Paris révolutionnaire, dans un bistrot de la rue aux Ours où il mangeait régulièrement. Mais Jean-Pierre Besse et Daniel Grason, qui signent sa biographie dans le Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, l’interpellation a eu lieu vers 10h30 « alors qu’il se présentait au domicile de Régine Castellane (Ruchla Widerker), avenue Pauline à Joinville-le-Pont ». Des perquisitions infructueuses des furent faites dans les deux adresses de Joinville, rue Chapsal et avenue Pauline.

L’opération menée par la BS2 provoque 77 arrestations au sein des FTP-MOI. List est trouvé en possession d’une fausse carte d’identité française au nom d’Oscar Maguin, né à Teruel (Espagne), d’un certificat de travail et d’une feuille de démobilisation au même nom. Lors de son interrogatoire, le même jour, il donne son vrai nom et se déclare « de nationalité polonaise et de race juive », de profession tailleur d’habits, mais sans activité, domicilié rue Chapsal à Joinville-le-Pont. Il nie appartenir au parti communiste clandestin et à une organisation dite terroriste.

Mayer List est livré aux nazis et jugé par le tribunal militaire allemand du Gross-Paris rue Boissy-d'Anglas (6e arr.), avec quatre co-inculpés, le 20 septembre 1943, qualifiés comme lui d’israélites. Selon Fabrice Bourrée, « Les faits qui leur sont reprochés montrent qu’ils n’ont rien avoué si ce n’est des éléments déjà connus de la police. Mayer List ne cache rien de ses activités au sein des Brigades internationales mais reste muet quant à ses actions résistantes. »

Mayer List André Engros, Boruch Lerner et Nonnique Tuchklaper sont condamnés à mort et exécutés le 1er octobre 1943 au Mont-Valérien à Suresnes (Seine, act. Hauts-de-Seine). Le cinquième FTP, Hirsch Loberbaum, est condamné à une peine de déportation d’où il ne reviendra pas. Ruchla Widerker, déportée à Auschwitz, aurait survécu et émigré après-guerre en Argentine.

Avant d’être fusillé, Mayer List adresse une lettre à sa famille en Argentine. Elle est également destinée à sa femme. À ses parents, Mayer List indique « Ma femme s’appelle Lamba Bluss » et qu’elle réside à Riga (Union soviétique, act. Lettonie), ce qui permet de supposer qu’ils ne la connaissaient pas, et donc que, probablement, elle n’était pas avec lui en Argentine. Selon David Diamant elle s’appelait Louba Bluss Bliumas, native de Riga en 1907. Peut-être l’a-t-il connue au Brésil, si Mayer List y a séjourné ? Des personnes d’origine lituanienne portant les noms de Bluss et Bliumas y sont signalés. Il conclut à son attention « Ma chère Lamba, j’ai déjà dit que ce n’était pas de ma faute de ne pouvoir ensemble vivre et arranger notre vie heureuse, alors je te souhaite une vie félice et travaille pour pouvoir aider mon frère ». Vu le ton de ce courrier, on peut supposer qu’il l’encourage à poursuivre un engagement politique.

L’une des deux compagnies de Juifs polonais qui se constituèrent à la Libération au sein du bataillon 51/22 dit bataillon Liberté prit le nom de Markus, en souvenir de Mayer List.

La mention « Mort pour la France » lui est attribuée le 12 juillet 2007.

Fin

Communiqué FTP-MOI

 

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26 avril 2023 3 26 /04 /avril /2023 02:01

Suite de la biographie de Mayer List

Les frères List Izhak, Herschs, Mayer et Shlomo ont émigré tous les quatre de Pologne en Argentine en 1929, où ils se font désormais appeler Jacob, Marcos, Gregorio et Julio. Ils deviennent membres du parti communiste argentin (PCA) et d’organisations syndicales, poursuivant les activités dans lesquelles ils étaient engagées avant le coup d’État polonais de 1926, selon les informations de Chaja Palgon-Urlant, chroniqueur des Juifs originaires d’Ostrów Mazowiecka. Marcos (Mayer) devient éditeur d’un journal édité en yiddish.

Il est membre actif du PCA lors du coup d’État argentin de septembre 1930, qui porte au pouvoir le lieutenant-général José Félix Uriburu. Le nouveau dictateur fit interdire le PCA et voter une loi prévoyant l'expulsion des militants d'origine étrangère. Une « section spéciale de lutte contre le communisme » est chargé de la mise en œuvre de ces mesures.

D’abord arrêté, Marcos (Mayer) émigre ensuite en Uruguay, en compagnie notamment de son frère Jacob (Izhak). Ce dernier, rentré clandestinement en Argentine, organise en septembre 1931 une grève des ouvriers du bâtiment à Rosario de Santa Fe pendant laquelle il trouve la mort.

Revenu également de manière illégale à Buenos Aires, Marcos est arrêté à plusieurs reprises, incarcéré à la prison du quartier de Devoto où il est torturé, d’après le témoignage familial d’Ezequiel Goldberg. Il y conduit une grève de la faim pour y obtenir de meilleures conditions de détention.

Devenu influent au sein du PCA clandestin, Marcos List est à la tête d’un groupe de choc, qui prépare notamment une tentative révolutionnaire au Brésil. Cependant, le Bureau sud-américain de l’Internationale communiste jugera que cette opération était « mal coordonnée » et avait des « objectifs équivoques. »

En mars 1936, Marcos est expulsé d'Argentine en compagnie de plusieurs personnes, dont son frère Gregorio (Herschs) sur un bateau à destination de la ville libre de Dantzig (act. Gdansk, Pologne). Il s’évade lors d’une escale au Brésil mais est repris par la police locale et doit poursuivre son voyage. Il fuit une deuxième fois à l’occasion d’une autre escale à Vigo (Galice, Espagne). Il participe, en juillet 1936, aux manifestations organisées à Vigo pour protester contre le putsch du général Franco. Il est arrêté avec deux autres polonais. Ils obtiennent un sauf-conduit du consul polonais, sous prétexte de retourner en Pologne. Marcos List stoppe son trajet à Paris. Selon Jean-Pierre Besse et Daniel Grason, qui signent sa biographie dans le Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français de Jean Maitron, il aurait demandé l’asile politique en France, qui lui aurait été refusé.

Il se rend au siège du parti communiste français pour s’engager dans les Brigades internationales qui viennent de se créer et luttent pour défendre le régime républicain espagnol contre les forces nationalistes. En septembre, il est envoyé à Valence.

Marcos List parlait plusieurs langues : l'hébreu, le yiddish, l'espagnol, le portugais, l'allemand et le russe. Il est recruté en tant qu’interprète au sein du Bataillon Dombrowski, constitué en octobre 1936 par 600 hommes, originaires de Pologne, placés sous le commandement de Stanislaw Ulanowski, et intégrés à la XIe Brigade Internationale puis en décembre à la XIIe.

Avec son bataillon, Marcos List combat sur les fronts de Motril (Andalousie), de Bilbao, de Santander, des Asturies, de Teruel et de Castellón. Il est blessé dans un accident à Valence et ensuite est employé au ministère de la Défense nationale.

La dissolution des Brigades internationales est décidée en septembre 1938 par le gouvernement républicain, suite à une décision de la Société des Nations. Les volontaires étrangers sont renvoyés dans leur pays. N’ayant plus de nationalité, Marcos List, qui ne peut retourner ni en Argentine, ni en Uruguay, dont il avait été expulsé auparavant, souhaite se rendre à Moscou. Cependant, le récit d’Ezequiel Goldberg assure que les cadres du parti communiste espagnol se méfiaient de lui, comme de beaucoup d'autres étrangers, considérés comme des espions ou des trotskistes. Il présentait d'excellentes références du PCA et du parti communiste d'Uruguay, mais son frère David List, qui était adhérent du parti bolchevique et membre d’un soviet de Moscou avait été, en novembre 1937, victime des purges staliniennes dans cette ville.

Marcos List entre clandestinement en France à Saint-Cyprien (Pyrénées-Orientales) au printemps 1939, réussissant à ne pas être repéré par les gardes-frontières. Selon l’historien David Diamant, il arrive sans papier et sans moyen de subsistance, dans la région de Toulouse. Il est contrôlé, couché dans un champ et à demi-évanoui, par des gendarmes, qui ne l’arrêtent pas, du fait de son état de santé, étant tuberculeux. Il gagne Paris.

À suivre

Photo Mayer List, arch. fam.

 

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24 avril 2023 1 24 /04 /avril /2023 02:01

Début de la biographie de Mayer List

Mayer List naît le 7 octobre 1907 (ou le 10 juillet) en Pologne, dans le village de Małkinia, situé à une quinzaine de kilomètres de la ville d’Ostrów Mazowiecka, en Mazovie, dans le nord-est de l’actuelle Pologne. Il est le fils de Judes Liba Aida Kavouch ou Kaczorek, originaire de la ville proche de Łomża, et de son mari Israël (ou Srul) Berl List, chauffeur. Ils auront 9 enfants, 5 garçons et 4 filles.

Cette partie de la Pologne comporte une importante proportion de Juifs. Lors du recensement de 1897, la ville comptait 10 500 habitants dont 54% étaient Juifs.

Son prénom est parfois retranscrit en tant que Meier ou Mejer ; son surnom est orthographié Markus, Marcus ou Marcos. Son lieu de naissance est parfois désigné dans certains documents comme Ostrawa, localité polonaise de Basse-Silésie, mais l’origine familiale est bien située à Ostrów Mazowiecka, dont dépend le village de Małkinia.

D’après Chaja Palgon-Urlant, chroniqueur des Juifs originaires d’Ostrów Mazowiecka, Mayer List est, à 16 ans, ouvrier fabricant de chaussures dans une usine de sa ville et un membre actif du syndicat des chausseurs d’Ostrów Mazowiecka. Selon Ezequiel Goldberg, qui fait l’histoire familiale des Lis, Mayer est, comme sa famille, adhérent au Parti socialiste polonais (PPS), engagé dans la fraction soutenant l’Internationale communiste et impliqué dans le Secours rouge.

Il s’installe ensuite à Varsovie, devenu tailleur, et il y poursuit son activité syndicale. Le coup d’État de mai 1926, voit Józef Piłsudski, aidé de l'armée, imposer une dictature ; même s’il fut, à l’origine, soutenu par le PPS, le régime autoritaire oblige les militants communistes à passer dans l’illégalité. Arrêté, Mayer List est déchu de sa citoyenneté polonaise.

La famille List était soumise à deux menaces, étant engagée dans le mouvement ouvrier et, comme les autres Juifs, sujette à des persécutions. Tous vont quitter le territoire national entre 1923 et 1935. Son frère aîné Izhak dit Jacob part pour l’Argentine en 1923 et le troisième, David, passe la même année en Union soviétique, à Minsk (URSS, act. Biélorussie).

Pour sa part, Mayer List embarque le 4 août 1928 à Brème (Allemagne) à bord d’un paquebot de la compagnie Norddeutscher Lloyd à destination de Montevideo (Uruguay) via Baltimore (États-Unis). Il voyage en troisième classe, est mentionné comme apatride et résidant à Varsovie, exerçant le métier de compagnon tailleur.

Il passe en Argentine où il obtient le statut de réfugié politique d’après Ezequiel Goldberg. Il retrouve à Buenos-Aires son frère Izhak et sa sœur Fejga (Felisa). Son père ainsi que ses deux frères Herschs et Shlomo suivront l’année suivante. Ses trois autres sœurs viendront plus tard, tandis que sa mère fera le voyage en 1932.

À suivre

Photo Mayer List, arch. fam.

 

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