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18 février 2022 5 18 /02 /février /2022 00:01

Suite de la biographie de Léon Belhomme

Le régime de l’État français, dirigé de Vichy (Allier) par le maréchal Philippe Pétain, réorganise les corps municipaux qui ne sont plus élus, mais nommés. Un arrêté du préfet désigne, le 20 février 1942, ceux qui siégeront au conseil municipal de Joinville. Le maire, Lesestre, et trois des quatre adjoints sont reconduits. Léon Belhomme est également maintenu en place.

Le 25 août 1944, les résistants à l’occupation allemande pendant la deuxième guerre mondiale chassent le conseil municipal en place et installent à la mairie de Joinville-le-Pont le comité local de Libération, dirigé par le communiste Robert Deloche. De ce fait, Léon Belhomme quitte ses fonctions municipales. Il n’est pas élu en 1945, mais figure en octobre 1947 sur la liste présentée, sous l’étiquette du Rassemblement du peuple français (RPF, gaulliste, droite) par Pierre Perly. Avec une moyenne de 3 066 voix pour 6 974 suffrages exprimés (44%) sur 7 073 votants et 8 376 inscrits, elle arrive en tête devant l’Union républicaine et résistante (communistes et divers gauche, 43,2%) et les socialistes SFIO (6,5%). Cependant, elle a 13 élus comme les communistes et le seul élu socialiste fera la décision en reconduisant le sortant.

Deloche démissionne en février 1953, mis en cause pour des raisons personnelles dans son propre parti. Les divisions au sein de la droite, où deux candidats se présentent, Perly et Calmon, permettent la désignation, pour les deux mois de mandat restants, de la communiste Amélie Trayaud à la majorité relative de 12 voix sur 25.

Lors des élections municipales générales de mai 1953, Belhomme figure sur la liste des dissidents de droite, conduite par Georges Defert. Les communistes arrivent une nouvelle fois en tête, avec 2 405 voix pour 6 748 suffrages exprimés (35,6%) sur 6 979 votants et 8 482 inscrits, mais ils n’ont plus que 10 sièges. Les deux listes de droite en ont six chacune, celle de Defert, qui a le soutien du Rassemblement des gauches républicaines (RGR, centre-droit) arrive en tête (22,1%), la liste des gaullistes du RPF ayant 19,8%. La SFIO revient avec trois élus (12,3%) et le Mouvement républicain populaire (MRP, démocrate-chrétien) entre au conseil avec 9,2% et deux élus. Grâce aux voix RGR, RPF et MRP, Georges Defert est élu par 14 voix sur 27. Belhomme devient quatrième adjoint au maire.

Les élections municipales de mars 1959 se déroulent de nouveau au scrutin majoritaire. La liste de la majorité sortante est concurrencée, outre par les communistes, par une alliance entre les gaullistes du RPF, les démocrates-chrétiens du MRP et les socialistes SFIO ainsi que par une liste divers. Defert l’emporte au second tour avec 52,4% des suffrages exprimés. Belhomme est élu deuxième adjoint au maire.

Il est reconduit au même poste après les élections municipales de mars 1965, qui se déroulent dans la même configuration. Il ne se représente pas en mars 1971.

Quand il quitte ses fonctions, Belhomme, alors âgé de 80 ans, aura siégé pendant 33 ans au conseil municipal de Joinville, dont 18 ans en tant qu’adjoint au maire : 5 sous la troisième République, 4 pendant le régime de Vichy, 11 sous la quatrième République et 13 sous la cinquième République.

Léon Belhomme meurt le 11 janvier 1981 à Créteil (Val-de-Marne). Il résidait toujours à Joinville, était âgé de 90 ans et père de trois enfants. Il avait été décoré de la Croix de guerre avec deux étoiles de bronze.

Fin

Joinville, vers 1960

 

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16 février 2022 3 16 /02 /février /2022 00:01

Début de la biographie de Léon Belhomme

Léon Georges Belhomme naît le 14 janvier 1890 à Paris (11e arr.). Il est le fils de Berthe Emma Flobert et de son mari Louis Alexandre Belhomme, négociants, qui vivent cité Guénot. Ils sont installés à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), dans le quartier de Palissy, avenue Palissy, en 1909, au moment de la mort du père. La famille y vit pendant la grande inondation de la Marne au premier trimestre 1910.

Devenu employé de commerce et disposant du permis de conduire, Léon Belhomme est appelé au service militaire en octobre 1911 où il intègre le 46e régiment d’infanterie. Il est nommé caporal en septembre 1912 et démobilisé en novembre 1913.

Il épouse en avril 1914 à Paris (12e arr.), Suzanne Marie Agnès Gervaise, fille d’un négociant en vins espagnols. Ils s’installent rue de Montreuil dans l’arrondissement.

Mobilisé dès le début de la première guerre mondiale, Léon Belhomme rejoint les 156e puis 79e puis 160e régiments d’infanterie. Début octobre 1915, quelques jours après la naissance de leur fils, Suzanne Belhomme meurt à Paris. Devenu caporal-fourrier en avril 1916 puis sergent-fourrier en juillet la même année, Belhomme est nommé adjudant en janvier 1918. Il devient officier, en tant que sous-lieutenant, en juillet 1918 et est démobilisé un an plus tard.

Son comportement lui a valu deux citations à l’ordre du régiment. En mai 1917, il est qualifié de « bon sous-officier, très énergique et très courageux ; a assuré la liaison d’une façon parfaite pendant l’attaque malgré un feu violent de mitrailleuse ennemie ». En novembre 1918, il avait été « chargé d’assurer avec sa section une liaison rendue difficile par le bombardement et des tirs de mitrailleuses très violents, a rempli sa mission avec un sang-froid et un courage remarquables. »

Dans la réserve, Léon Belhomme verra son grade confirmé en août 1922 puis il sera promu lieutenant en septembre 1924.

En août 1918, il épouse à Paris (11e arr.) Germaine Amélie Ferrette, employée de bureau. Après le conflit, ils viennent résider dans la maison familiale de Joinville.

Membre de l’Association générale des officiers de complément (AGOC), Léon Belhomme fait partie, en janvier 1920 des actionnaires fondateurs de la coopérative La vie moins chère fondée à Paris par le professeur de philosophie Joseph Bouteyre.

En matière professionnelle, il est devenu courtier en produits chimiques puis directeur commercial.

L’entrée dans la vie politique publique de Léon Belhomme a lieu en décembre 1934 quand l’assemblée générale du Comité d’union républicaine et d’action sociale de Joinville, qui regroupe les différentes formations de droite de la commune, l’élit membre du bureau présidé par le futur maire, Léon Lesestre. En mars 1935, le comité, qui avait été fondé en 1912, se transforme en Union des républicains. René Kirbuhler devient président, Belhomme restant dans le bureau. En avril, l’Union des républicains décide de rompre l’accord électoral qu’elle avait conclu avec les radicaux-socialistes, qui sont majoritaires dans la municipalité, prenant prétexte « des fusillades du 6 février [1934], des scandales Stavisky et autres dans lesquels figurent des députés, des magistrats, d’anciens ministres, tous radicaux et maçons ». Elle décide de présenter aux élections municipales de mai 1935 une liste « composée en totalité d’éléments modérés et nationaux ». Elle lance un « appel à la séparation de l’administration municipale et de la politique ». Le programme du groupement de droite se résume ainsi : « diminution des charges écrasantes, atténuation des dépenses publiques, simplification des rouages administratifs, application des lois sociales ». Belhomme en est un des signataires.

Au 1er tour des élections municipales de 1935, l’Union des républicains devance avec 32,6% des suffrages exprimés le Groupement des gauches républicaines du maire sortant, Georges Briolay (26,8%), la liste communiste de Robert Deloche (23,5%) et les socialistes SFIO de Robert Derivière (12,3%). Au second tour, une liste d’union communiste et socialiste est dirigée par André Blocher, président de l’ARAC (anciens combattants), qui n’est membre d’aucun des deux partis. Elle comprend 16 communistes et 10 socialistes. Les radicaux-socialistes se représentent également.

Avec 1 159 voix pour 2 899 suffrages exprimés (40%) sur 2 924 votants et 3 433 inscrits, Belhomme est élu. L’Union des républicains, qui avait appelé à « barrer la route aux communistes », remporte 25 des 27 sièges à pourvoir, deux communistes complétant l’assemblée locale. Léon Lesestre est élu maire.

Au sein du conseil, Belhomme fait partie, avec Hainsselin, Beylot et Faivre, d’une commission d’enquête municipale constituée suite à la défaillance de la Société HBM et loyers moyens de Paris et du département de la Seine, qui avait construit des logements à bon-marché à Joinville (la cité Égalité, dans le quartier de Palissy). La ville avait apporté sa garantie, et le prêteur, la Caisse des dépôts et consignations, se retourne vers elle pour obtenir le remboursement. La droite dénonce un « scandale des HBM ». Les enquêteurs concluent que l’ancien maire, Briolay, avait signé sans y avoir été autorisé par le conseil municipal et s’étonnent qu’il n’y ait pas eu de contrôle de la gestion par les ministères. En conséquence, ils engagent le conseil municipal à refuser de payer ; le préfet les y contraindra cependant.

Lors du vote du budget en mars 1937, c’est Belhomme qui présente devant le conseil le rapport au nom de la commission des finances. Il est désigné comme électeur sénatorial en avril 1938. Il en est de même en décembre 1938.

À suivre

Restaurant Le Petit Robinson, Joinville 1932

 

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14 février 2022 1 14 /02 /février /2022 00:01

Raymond Auguste Dedonder naît le 30 août 1920 à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Il est le fils de Blanche Louvet et de son époux Marcel Dedonder, ouvrier joaillier puis bijoutier puis grainetier.

Il mène des études au lycée Lakanal à Sceaux (Seine, act. Hauts-de-Seine) puis au lycée Saint-Louis à Paris (6e arr.). Selon l’historien Michel Pinault, il adhère en 1938 aux étudiants communistes. Il en démissionne en 1939, à la suite du Pacte germano-soviétique, et adhère à la IVe Internationale par l’intermédiaire d’Yvan Craipeau. Il démissionne du mouvement trotskiste en 1941, par opposition à la consigne de fraternisation avec les soldats allemands.

Pendant la deuxième guerre mondiale, il est vacataire au Centre national de la recherche scientifique (CNRS, 1939-1940), puis instituteur suppléant (1941). Toujours d’après Michel Pinault, il est en 1942, réfractaire au service du travail obligatoire (STO). Il poursuit ses études et obtient une licence ès sciences en 1943 à la Faculté des sciences de Paris. Il s’engage sous l’égide du journaliste et militant catholique Marc Sangnier, dans la Ligue française des Auberges de jeunesse. Il se lie avec Andrée Fouilloux, qui fait fonction de secrétaire de Marc Sangnier. Selon le témoignage de Dedonder, recueilli par les chercheurs Jean-François Picard et Xavier Polanco, elle fut arrêtée. Raymond Dedonder contribue à l’organisation d’un réseau de soutien aux parents, aux gens emprisonnés et aux déportés et diffuse le journal clandestin Combat. Le 20 août 1944, pendant l’insurrection parisienne, occupe le siège du mouvement des Auberges de jeunesse, rue de Valois à Paris.

Après la fin du conflit, Raymond Dedonder fut le premier secrétaire du Mouvement uni des auberges de jeunesse (MUAJ). Il épouse, en novembre 1946 à Fontenay-aux-Roses (Seine, act. Hauts-de-Seine) Andrée Fouilloux, alors institutrice. En 1947-1948, le MUAJ devient le Mouvement laïque des auberges de jeunesse (MLAJ), et Dedonder le préside. Il termine son cursus universitaire par un doctorat ès sciences naturelles en 1951.

Sur le plan professionnel, embauché comme contractuel au CNRS en 1945, il participe au cabinet du directeur Frédéric Joliot et collabore à la Mission scientifique du CNRS dans les territoires occupés (Allemagne, Autriche). Attaché de recherches en 1947, chargé de recherches en 1952, maître de recherches en 1957 puis directeur de recherches en 1961 il devient ensuite directeur de recherches émérite. Tout en restant au CNRS, il rejoint des laboratoires à l’Institut national d’agronomie (1946) puis à l’Institut Pasteur (1948). De 1959 à 1965, il est chef de service à l’Institut Pasteur, directeur de l’institut de biologie moléculaire du CNRS (1970-1978), professeur à la faculté des sciences de Paris (1966-1976).

En matière politique, Dedonder rejoignit après la Libération, le parti socialiste SFIO, où il appartenait à la tendance Franc-Tireur. Il rompit du fait de ce qu’il appelait, selon Pinault, « la trahison de Guy Mollet », secrétaire général de la SFIO, assurant qu’il était en « quête d’un idéal à la fois progressiste, humaniste et libéral ». Il participa à la formation du Parti socialiste autonome, avec Édouard Depreux et Gilles Martinet, puis à sa transformation en Parti socialiste unifié. Il rejoignit le parti socialiste après le congrès d’Épinay (1971).

Son engagement principal se situait cependant dans le domaine syndical. Il était membre du Syndicat national de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, alors adhérent à la fois à la Fédération de l’éducation nationale (FEN, autonome) et à la Confédération générale du travail (CGT, proche du parti communiste). Il participa à la scission qui donna naissance en mars 1956 au Syndicat national des chercheurs scientifiques. Membre du bureau élu en mars 1956, Dedonder en devint premier secrétaire en 1957 et continua d’y siéger jusqu’en 1960, représentant le syndicat à la commission administrative nationale de la FEN.

Opposé à la guerre en Algérie, Dedonder signe, en octobre 1960, un appel pour une « paix sans équivoque et sans ruse ». Au cours des évènements de mai 1968, Dedonder s’adresse au gouvernement pour réclamer la fin des menaces contre le mouvement étudiant.

Directeur scientifique du développement (1981-1982) de l’Institut Pasteur. Il en devient directeur en 1982 et jusqu’en 1988. Il contribue notamment à la défense des intérêts de l’Institut face aux scientifiques américains, à propos de la découverte du virus du SIDA.

Raymond Dedonder meurt le 5 septembre 2004 au Kremlin-Bicêtre (Val-de-Marne). Il était âgé de 84 ans et père de trois enfants. Il avait été décoré comme officier de la Légion d’honneur en janvier 1991, commandeur de l’Ordre national du Mérite et commandeur des Palmes académiques.

Son fils aîné, Jean-Pierre Dedonder (né en 1946), docteur ès-sciences, professeur de physique nucléaire, a été président de l'université Paris-VII (1992-1997) puis recteur de l'académie de Créteil (1998-2000). Il est chevalier de la Légion d’honneur.

Raymond Dedonder, 1988, Institut Pasteur

 

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12 février 2022 6 12 /02 /février /2022 00:01

Lucien Fernan Barbier naît le 30 novembre 1863 à Villers-Outréaux (Nord). Il est le fils de Firmie Zoé Stéphanie Letient et de Louis Joseph Henri Barbier, tisseur. Ses parents sont originaires de Gouy (Aisne). Ils tiendront ensuite une auberge à Villers-Outréaux, commune du Cambrésis.

Devenu cordonnier, Lucien Barbier épouse Augustine Delamotte en avril 1887 à Banteux (Nord). Ils vivent à Walincourt (Nord), auront une fille et divorceront en 1902. Augustine Delamotte se remarie, toujours à Banteux, en octobre 1904 avec Jean Louis Estenave, adjudant. Celui-ci la tuera le 1er février 1923 à Paris (16e arr.) où il était employé municipal, déclarant l’avoir étranglée alors qu’elle le menaçait après une scène de jalousie dont elle aurait été coutumière. Il se pend alors qu’il est incarcéré à la prison de Fresnes le 22 février.

Exerçant désormais la profession d’employé, Lucien Barbier vit rue André-del-Sarte à Paris (18e arr.) où il épouse en septembre 1903 Laure Berne. Ils s’installent d’abord rue Boutarel (4e arr.) puis, à partir de 1906, à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Ils sont installés dans le quartier de Polangis, avenue des Lilas (act. avenue Pierre-Allaire).

Lucien Barbier enseigne la grosse caisse, la batterie et la caisse claire à Paris en 1905. À Joinville, il rejoint la société symphonique, présidée par Édouard Clément. Il en est le directeur dès le premier concert de la société en décembre 1906. Il associe, en mars 1906, à une souscription lancée par le quotidien Le Matin en faveur des sinistrés de la catastrophe minière de Courrières (Pas-de-Calais). La société cesse son activité pendant la première guerre mondiale.

Après le conflit, Lucien Barbier est un militant actif de la section de Joinville du parti socialiste SFIO. Il n’est pas candidat au premier tour des élections municipales de novembre 1919, mais il figure cependant sur la liste, légèrement remaniée, présentée par cette formation pour le second tour, qui l’oppose à l’Union républicaine et sociale d’Henri Vel-Durand (radical dissident). Il obtient 507 voix pour 1 518 suffrages exprimés (33,4%) sur 1 537 votants et 2 491 inscrits et n’est pas élu.

Lors du renouvellement du bureau de la section socialiste de Joinville, en février 1920, il intègre le bureau en tant que trésorier-adjoint ; le secrétaire est le cheminot André Flambard. Il participe en mai la même année à une souscription « Pour les victimes de la grève et des violences gouvernementales. »

En décembre 1920, Barbier est désigné comme chef de la philharmonie constituée au sein du groupe artistique de la Jeunesse socialiste de Joinville-le-Pont. Sans doute, comme l’ensemble des membres de la SFIO à Joinville, rejoint-il le nouveau parti communiste ce même mois.

Toujours en décembre 1920 Lucien Barbier épouse à Levallois-Perret (Seine, act. Hauts-de-Seine) Eugénie Alphonsine Juliette Leclercq, couturière. Il était veuf depuis mars 1915. Il cesse son activité d’employé de commerce, qu’il exerçait encore en 1926, et reprend son métier initial de cordonnier qu’il exerce comme artisan indépendant à Joinville en 1931.

En 1936, Lucien Barbier, qui est retraité, vit en Dordogne à La Force, avec son épouse et son fils. Il y est toujours en 1938 où il semble continuer une activité musicale et est alors âgé de 74 ans. La date de son décès n’est pas connue.

Pour son activité artistique, Lucien Barbier a été décoré des Palmes académiques, comme officier d’académie en mars 1913 puis comme officier de l’instruction publique en février 1938.

L'île Fanac et le pont de Joinville

 

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10 février 2022 4 10 /02 /février /2022 00:01

Robert Ferdinand Doit naît le 5 septembre 1910 à Paris (2e arr.). Il est le fils de Blanche Rousselin et de son compagnon, Denis Doit, représentant de commerce, qui le reconnaît dès la naissance. Se parents se marient en novembre 1910 dans le même arrondissement, et sa naissance est ainsi légitimée.

Devenu électricien et vivant à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), Robert Doit épouse en novembre 1932 à La Ferté-sous-Jouarre (Seine-et-Marne) Paulette Suzanne Godefroy, couturière au hameau du Limon. Ils s’installent à Joinville, rue du Canal.

À l’occasion des élections municipales de mai 1935 à Joinville, Robert Doit est candidat, au premier tour, en 18e position, sur la liste communiste conduite par Robert Deloche. Il est crédité de 670 voix pour 2 856 suffrages exprimés (23,5%) sur 2 923 votants et 3 433 inscrits. Au second tour, Doit figure sur la liste dirigée par le responsable de l’association d’anciens combattants ARAC, André Blocher, qui rassemble les communistes et les socialistes SFIO. La liste devance les radicaux-socialistes de la municipalité sortante, mais est légèrement devancée par la droite, de l’Union républicaine ; Doit recueille 1 104 votes pour 2 899 suffrages exprimés (38,1%) sur 2 924 votants ; il n’est pas élu mais deux communistes entrent au conseil municipal à côté de 25 élus de droite. Léon Lesestre (droite) est élu maire.

Après la deuxième guerre mondiale, Robert Doit est candidat sur la liste d’Union républicaine et résistante, dirigée par Robert Deloche, maire sortant, pour les élections municipales de novembre 1947. Avec une moyenne de 3 017 voix pour 6 974 suffrages exprimés (43,5%) sur 7 073 votants et 8 376 inscrits, la liste communiste a onze élus et arrive en seconde position. La liste RPF (droite, gaulliste) se situe à 44% mais a le même nombre d’élus. C’est le seul élu de la liste socialiste (6,4%) qui permet au communiste Deloche de rester maire. Doit est élu conseiller municipal.

Peu avant la fin de son mandat municipal, Deloche, mis en cause au sein du parti communiste, démissionne et est remplacé, en février 1953, par Amélie Trayaud, communiste, qui reste maire pendant deux mois. Doit n’est pas réélu en avril 1953.

Robert Doit meurt le 19 février 1981 à Vincennes (Val-de-Marne). Il était âgé de 70 ans et père d’au moins deux enfants.

Joinville, années 1960

 

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8 février 2022 2 08 /02 /février /2022 00:01

Robert Charles Albert Derivière naît le 25 février 1896 à Bruxelles (Belgique). Il est le fils d’Élisabeth Elvira Céline Fould et de son mari Aimé Charles François Derivière. Son père, originaire d’Amiens (Somme), est lapidaire. Sa mère est native de Saint-Hélier, à Jersey.

Résidant à Saint-Maur-des-Fossés (Seine, act. Val-de-Marne), Robert Derivière est sténodactylographe en 1915.

Convoqué pour son service militaire de manière anticipée, du fait de la première guerre mondiale, Robert Derivière est mobilisé en avril 1915 au sein du 76e régiment d’infanterie. Il passe au 404e régiment d’infanterie en août 1916 et devient caporal en février 1918 puis caporal-fourrier en juillet la même année. Il est démobilisé en septembre 1919 et deviendra, dans la réserve caporal-chef en septembre 1930.

Son comportement pendant la guerre lui vaut quatre citations, deux à l’ordre du régiment, une à l’ordre de la brigade et la dernière à l’ordre de la division. En décembre 1917, Derivière est considéré comme un « très bon soldat, énergique et très brave. A réussi au cours d’une patrouille difficile à capturer un ennemi, permettant ainsi d’obtenir de précieux renseignements ». Il est qualifié ainsi  en juillet 1918 : « excellent gradé, brave et dévoué. Au cours d’un coup de main a, sous un feu violent de mitrailleuses, avec le plus grand mépris du danger, assuré la liaison entre les différents groupes du régiment ». De nouveau en août 1918, on voit en lui un « excellent caporal. Lors de l’attaque du 9 juillet 1918, a assuré constamment la liaison entre les éléments des premières lignes et son commandant de compagnie, pour lequel il a été un auxiliaire précieux ». Enfin, le même mois, on le remarque comme « jeune fourrier qui s’est distingué dans maintes circonstances. Lors des attaques 20 et 21 août 1918 a assuré de façon parfaite la transmission des ordres, malgré un bombardement continu et un feu violent de mitrailleuses. »

Quelques jours après la fin de sa période militaire, Robert Derivière épouse en octobre 1919 Madeleine Lucie Petibon à Morlhon-le-Haut (Aveyron). Elle est la fille de l’instituteur du village de Marmont. Ils s’installent à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne), rue de Paris.

Continuant de travailler comme secrétaire sténodactylo, Robert Derivière est membre, en 1919, du Syndicat des employés du commerce et de l'industrie, qui est le principal fondateur de la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) en novembre 1919.

En janvier 1924, Derivière devient secrétaire de la section de Joinville de la Ligue des droits de l’Homme (LDH), dont le professeur d’allemand Jules Edmond Neumann est le président. Active, comptant 56 adhérents en 1924, la section a pour responsables principalement des personnalités membres du parti socialiste SFIO et des socialistes indépendants, notamment d’anciens communistes. En février la même année, la section demande qu’une enquête soit lancée sur les socialistes-révolutionnaires russes, victimes d’une répression de la part du gouvernement soviétique et réclame la libération de trois prisonnières.

La section participe à une collecte pour les affamés d'Allemagne en février 1924 et s’oppose aux sanctions décidées par la France et ses alliés contre les populations civiles. Avec les partis socialiste, communiste et d’autres formations, la section de la LDH même campagne contre la guerre du Rif (Maroc) en 1925. Elle proteste contre la dislocation du Cartel des gauches en août la même année. Elle intervient en 1926 contre la suppression des libertés en Afrique du Nord.

La section joinvillaise remet en question le comportement de la LDH au début de la première guerre mondiale, demandant en mai 1927 « à la Ligue d’avouer qu’elle a contribué à tromper le monde en cautionnant tous les mensonges de 1914. »

Comptant un maximum de 75 adhérents en 1927, la section va ensuite voir décliner son nombre de militants. Robert Derivière préside la section en avril 1930 et exerce toujours cette fonction en septembre 1934. À cette date, il y a 45 membres.

À titre personnel, Robert Derivière signe une pétition, destinée en août 1927 au gouverneur du Massachusetts (États-Unis) pour lui demander la grâce des anarchistes d'origine italienne Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti,

À partir de mai 1930, apparaît comme un des principaux animateurs de la section de Joinville du parti socialiste SFIO. Il en est le secrétaire en décembre et s’occupe notamment de la diffusion du quotidien Le Populaire.

Des élections municipales partielles sont organisées à Joinville en octobre 1934, dans un contexte de tensions au sein de la majorité municipale, élue en 1929 dans le cadre du groupement des gauches (radicaux-socialistes, socialistes SFIO et socialistes indépendants). La liste que Derivière conduit obtient une moyenne de 403 voix soit 17,5% des 2 297 suffrages exprimés pour 2 360 votants sur 3 225 inscrits. Elle arrive légèrement derrière la liste communiste (17,8%), pour laquelle elle se désiste au second tour. La liste comprenant des candidats radicaux favorables au maire reçoit 25,4% et est devancée par une liste de concentration républicaine, plus à droite, qui a 36,9%. Elle emporte les dix sièges au second tour.

En février 1935, un groupe de socialistes se rend au poste de police de Joinville pour réclamer la libération d’un vendeur de journaux qui avait été arrêté. Roger Jamet, le secrétaire du groupe des Jeunesses socialistes de Joinville, mutilé d'une jambe, est bousculé, tombe, et traite les policiers de « saligauds ! » Ce qui lui vaut d’être poursuivi pour outrages à agents. À l’audience, en mars 1935, Derivière témoigne en faveur de Jamet. Défendu par Me Betty Brunschvicg, Jamet est condamné à 50 francs d'amende avec sursis ce qui équivaut selon Le Populaire « fort équitablement, à une absolution. »

Pour les élections municipales générales de mai 1935, Robert Derivière conduit de nouveau une liste socialiste SFIO. Elle obtient une moyenne de 12,3% des voix, nettement distancée par la liste communiste de Deloche (23,5%), celle des sortants de Georges Briolay, radical-socialiste (26,7%) et l’Union des républicains (droite, 32,6%).

Au second tour, la SFIO et le PCF décident de fusionner leurs listes et font appel au responsable de l’association des anciens combattants ARAC, André Blocher, pour conduire la liste unifiée. Cette dernière, avec une moyenne de 36,6% des voix devance la liste radicale (19,5%) et talonne la droite (39,8%). La gauche gagne deux sièges, contre 25 à la droite. Les élu sont deux communistes, les candidats socialistes faisant des scores bien inférieurs à ceux issus du PCF. Derivière lui-même est crédité de 999 voix, soit 34,4% des 2 899 suffrages exprimés pour 2 924 votants sur 3 433 inscrits.

 

En tant que secrétaire de la section de Joinville, Derivière signe, en septembre 1935 l'Appel pour la création de la Gauche révolutionnaire du Parti socialiste SFIO, tendance conduite par Marceau Pivert qui quittera cette formation en 1938 pour créer le Parti socialiste ouvrier et paysan (PSOP).

Comme à la LDH, Robert Derivière prend la succession de Jules Edmond Neumann dans le groupe local de la Fédération ouvrière et paysanne des anciens combattants (FOP). Fondée en 1929, cette organisation est proche des milieux socialistes.  Il siège en novembre 1933 à la commission de contrôle de la section de la région parisienne. Il signe, pour le 11 novembre 1936, l’appel des associations d’anciens combattants de Joinville avec la société des mutilés et anciens combattants et l’ARAC.

Robert Derivière meurt le 21 avril 1946 à Joinville. Il était âgé de 50 ans et père de deux enfants. Il avait été décoré de la Croix de guerre avec étoile de bronze et étoile d’argent ainsi que de la Médaille militaire en janvier 1921.

Le café des sports à Joinville

 

 

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6 février 2022 7 06 /02 /février /2022 00:01

Suite de la biographie de Nguyên Thê Truyên

Après la défaite du Japon en août 1945, Hô Chi Minh s'installe à Hanoï le 25 août 1945 et, le 2 septembre, déclare sur la place Ba Dinh que le peuple du Viêt Nam s'affranchit « complètement de tout rapport colonial avec la France impérialiste ». Dans sa proclamation il reprend en grande partie les mots de la brochure Procès de la colonisation française, élaborée avec Nguyên Thê Truyên.

Selon l’historien Pierre Brocheux, il est sollicité par Hô Chi Minh pour devenir vice-président de la République démocratique du Vietnam en 1946, mais il refuse l’offre. En 1953, Le Monde, assure que c’est le portefeuille des affaires étrangères qui lui fut proposé.

Alors que le Vietminh contrôle une partie du territoire, mais que la capitale, Nguyên Thê Truyên a refusé de rejoindre le gouvernement révolutionnaire installé dans les montagnes. Il reste à Hanoï, toujours contrôlée par les autorités françaises et le gouvernement de la République du Vietnam. Des élections municipales y sont organisées en janvier 1953.

Nguyen Thé Truyen, présenté par Jean Lacouture dans Le Monde comme un ancien compagnon d'Ho Chi-Minh en France, figure sur une liste d’unification, qualifiée de nationaliste de gauche, qui comprend également le docteur Hoang Co Binh, directeur du journal, Giang Son, et Tran Hung-Dung, militant nationaliste. Leur programme comprend des élections rapides à l'Assemblée constituante afin que soit institué un régime constitutionnel, le vote des femmes et l'installation du gouvernement à Hanoï. Le scrutin permet aux nationalistes de gauche de remporter tous les sièges, sauf un. Selon Le Monde, « la personnalité de son leader Nguyên Thê Truyên a été l'une des raisons les plus fortes de ce succès. »

Reçu en mars 1953 à Saigon par Jean Letourneau, ministre français chargé des relations avec les États associés, Nguyên Thê Truyên, désigné par Le Monde comme grand vainqueur du scrutin de Hanoï, a suggéré des élections plus larges et une politique sociale plus hardie.

Lors de la division du Vietnam en deux États en 1954, Nguyên Thê Truyên rejoint le Sud-Vietnam et vit à Saïgon. Il participe à l’élection à la présidence de la République qui est organisée en février 1961. Le sortant, Ngo Dinh Diem, est réélu avec une très forte majorité, N. T. Truyên est candidat, en tant que vice-président, aux côtés de Hô Nhat Tan, praticien de médecine orientale traditionnelle. Bernard Fall voit dans Nguyên Thê Truyên « la seule figure respectable » du scrutin qu’il qualifie de « farce ». Sa liste obtient 4% des suffrages dans tout le pays, contre 7% pour l’autre opposant Ngo Dinh Diem. Le Monde commente les résultats dans la l'agglomération saïgonnaise, où la liste Hô Nhat Tan et Nguyên Thê Truyên a recueilli 150 000 voix, contre 300 000 au président. Il estime que ce résultat est significatif, car Nguyên Thê Truyên « porte un nom fameux : il fut, chacun le sait, le plus proche compagnon d'Hô Chi Minh pendant le long séjour que le fondateur du Vietminh fit à Paris entre 1917 et 1923. Ce qui donne un sens particulier à la plupart des voix qui se sont portées sur son nom. »

En mai 1961, les quatre candidats d’opposition aux élections présidentielles, Hô Nhat Tan, Nguyên Thê Truyên, Nguyen Dinh Quat et Nguyen Thanh Phuong, créent une alliance politique sous le nom de Khoi Dan Chu.

Nguyên Thê Truyên  en 1961

Après l'assassinat du président Ngo Dinh Diem, Nguyên Thê Truyên est reçu en février 1964 par le général Nguyen Khanh, président du conseil militaire révolutionnaire vietnamien, qui a pris le pouvoir au Sud-Vietnam. Il est de nouveau candidat à la vice-présidence en septembre 1967 au côté de Nguyen Hoa Hiep. Ils recueillent 160 790 voix, soit 3,5% des 4 868 266 suffrages exprimés pour 5 853 251 inscrits. Le général Nguyễn Văn Thiệu, qui avait pris le pouvoir en 1965, est élu.

Malade, Nguyên Thê Truyên meurt le 19 septembre 1969 à Saïgon. Âgé de 71 ans, il est inhumé au cimetière du Cong Phan (Go Vap). Il était père de quatre enfants, les trois premiers étant nés en France en 1923, 1925 et 1927, le dernier étant natif de Nam Dinh en 1931 : Christiane Nguyen Trung Trac, Niquette Nguyen Trung Nhi, Claude Nguyen Quoc Tuan et Jean Nguyen Le Hao.

Le poète Vu Hoang Chuong, lui rend hommage par un poème qu’il publie après sa mort en 1969.

Fin

 

 

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4 février 2022 5 04 /02 /février /2022 00:01

Suite de la biographie de Nguyên Thê Truyên

Résidant à Nam-Dinh, Nguyên Thê Truyên demeure rue de Saïgon et exerce son métier de chimiste. Il est toujours en bute aux autorités française. Le résident supérieur au Tonkin a fait ordonner la saisie conservatoire des rizières de sa famille en janvier 1933. Le prétexte est une dette de 1 000 piastres, mais la valeur des propriétés est estimée à plus de 50 000 piastres. Mais le Conseil du Contentieux se déclare incompétent en janvier 1933. Le même conseil rejette, en novembre la même année, une requête de Nguyên Thê Truyên pour qu’on lui délivre de son casier judiciaire et que cesse la confiscation de son certificat de moralité.

Séjournant de nouveau à Paris en 1934, Nguyên Thê Truyên devient une cible pour les communistes. Le journal Vô Sản (Le Prolétaire, 1934/06), publié par le PCF, le qualifie de « traître qui fréquente les flics, les fascistes ».

Le Conseil d’État examine, en appel, la plainte de N. T. Truyên au sujet de la délivrance d’un bulletin de casier judiciaire et d’un certificat de bonnes vie et mœurs. Il rejette sa requête, estimant qu’elle relève de la relation entre la République française et l’administration indigène et non du droit administratif français, même si un fonctionnaire français est mis en cause. Comme plusieurs autres revues juridiques, la Revue générale de droit international public critique en 1938 les conclusions de l’arrêt.

Pendant son séjour en France, Nguyên Thê Truyên participe à la constitution du Rassemblement Colonial, déclaré à Paris en avril 1937 et basé rue Monge (5e arr.). Il regroupe une douzaine d’organisations politiques et d’associations, comme le Parti du Peuple Algérien, la Ligue de Défense de la Race Nègre ou le Rassemblement Indochinois, dont N. T. Truyên est le délégué. Le comité directeur provisoire comprend l’algérien Messali Hadj, publiciste, le martiniquais Raoul Cénac-Thaly, professeur agrégé, le malgache Ramananjato, comptable et N. T. Truyên, qui assurent de manière tournante la présidence. Le sénégalais Emil Faure, ingénieur conseil est secrétaire général et la guadeloupéenne Melle Toubland, chirurgienne-dentiste, est trésorière.

En septembre 1937, une députation du Rassemblement colonial, dont fait partie Nguyên Thê Truyên est reçue à l’Hôtel Matignon, pour rencontrer William Bertrand, sous-secrétaire d’État à la Présidence du Conseil et l’entretenir « des graves évènements d’Indochine et d’Extrême-Orient ». N. T. Truyên demande l’amnistie pour les victimes de la répression, soulignant qu’ils sont accusés de complots contre la Sûreté de l’État, ce qu’il qualifie « d’accusations vagues et monotones ». Il souligne que des « jeunes gens d’origine bourgeoise, revenus de Paris où ils s’étaient initiés à la vie militante, sont jetés en prison pour des articles de journaux, souvent inspirés et même reproduit des écrits publiés dans des grands quotidiens de Paris ». Il déplore que « de pauvres coolies en haillons, des ouvriers harassés, des employés, des femmes, des enfants, travaillant dans des conditions déplorables, touchant un salaire dérisoire, sont incriminés parce qu’ils ont fait la grève, dans l’ordre et la discipline pour améliorer leur sort. Des paysans affamés, des petits commerçants ruinés, des artisans grevés de patentes sont emprisonnés pour avoir réclamé la suppression des impôts archaïques ou des taxes impopulaires ». N. T. Truyên réclame ensuite des libertés politiques et syndicales, voulant notamment l’application de la loi française du 28 juillet 1881 sur la liberté de la presse et le droit d’association, y compris pour les syndicats. Enfin, N. T. Truyên soutient l’idée d’organiser un Congrès National des Indochinois.

C’est lui qui conduit la délégation reçue en février 1938 par Théodore Steeg, ministre des colonies et ancien président du conseil. Elle évoque notamment le point de vue des indigènes devant les revendications coloniales de l'Allemagne, et les répercussions de la guerre sino-japonaise en Indochine.

Dans le courant de cette année 1938, Nguyên Thê Truyên retourne au Vietnam. Il publie un long article en octobre, dans L'Effort Indochinois sur « Phan-Van-Truong et son chef d’œuvre: Le droit pénal à travers l’ancienne législation chinoise », en hommage à un avocat, cofondateur de la Fraternité des compatriotes en 1914.

Do Duc Ho, ancien secrétaire de l'Association générale des étudiants indochinois, fait part d’une conversation qu’il a eue en septembre 1938 avec Nguyên Thê Truyên. Selon ce dernier, le gouverneur général de l’Indochine, Jules Brévié « entend se servir du parti communiste annamite pour administrer à la population la preuve de la supériorité de la démocratie-impérialiste française sur le fascisme agresseur nippon. Ses manifestations de sympathie pour la Chine expriment une solidarité qui doit émouvoir les indigènes et leur faire oublier que M. Brévié est le représentant de l'impérialisme français. Le parti communiste annamite est là pour servir d'interprète à M. le Gouverneur général. »

Après le début de la deuxième guerre mondiale, Nguyên Thê Truyên et son frère Nguyên Thê Song sont arrêtés en septembre 1939 et envoyés à la prison de Lang Son, au centre du Tonkin, soupçonnés de sympathie pour les Japonais. Madeleine Latour, qui avait soutenu l’action de Nguyên Thê Truyên avant même leur mariage et l’avait accompagné en Indochine, meurt en 1940. Elle était née en septembre 1890 à Paris (12e arr.) – et non pas en 1898 comme plusieurs sources le mentionnent. Enterrée au cimetière européen de Dalat, ses cendres ont été transférées dans la crypte de l'église Saint-Nicolas.

Les deux frères sont exilés en 1941, en compagnie de neuf communistes, sur l’île malgache de Nosy Lava. Ils ne se mêlent pas aux détenus communistes, espérant manifestement une occupation de Madagascar par le Japon. Ils sont libérés en 1946 et retournent à Saïgon.

À suivre

 

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2 février 2022 3 02 /02 /février /2022 00:01

 

Suite de la biographie de Nguyên Thê Truyên

Revenu dans son pays natal en 1920, il bénéficie toujours d’une bourse et reprend la mer à Haiphong pour Marseille en août 1921. Il vit rue Champollion à Paris (5e arr.) puis, l’année suivante, villa des Gobelins (13e arr.). S’il est ingénieur chimiste, Nguyên Thê Truyên, poursuit des études à l’université, où il obtient une licence de philosophie en 1923, et consacre une part importante de son temps à l’activité politique.

Il est un des fondateurs et le secrétaire adjoint de l'Union intercoloniale, association proche du parti communiste, créée en mai 1922. Elle aurait compté selon la police environ 120 membres, dont seize Vietnamiens fin 1923, parmi lesquels une vingtaine de militants actifs. Elle porte des revendications d’égalité politique (droit de vote) et sociale (« À travail égal, salaire égal ») et condamne les guerres coloniales menées par la France au Maroc (Rif, 1925-1926) ou en Syrie (1925-1927).

Le 12 avril 1925, Nguyên Thê Truyên apparaît comme la cheville ouvrière du meeting, organisé par la Fédération du parti Kuomintang chinois en France salle des Coopérateurs à Paris, boulevard Auguste-Blanqui. Selon le quotidien de droite, L’Écho de Paris, six cents personnes environ y ont assisté, officiellement pour commémorer la mémoire du révolutionnaire chinois Sun Yat Sen. Nguyên Thê Truyên prône l’union des révolutionnaires chinois et du peuple indochinois pour renverser la domination des impérialismes mondiaux et les chasser définitivement de l'Asie. Il attaque Ernest Outrey, député de la Cochinchine, et Martial Merlin, gouverneur général de l'Indochine, qu'il qualifie de pirates et de requins. Il appelle à ce que « les Chinois et les Annamites se préparent pour soulever la race jaune contre les Impérialismes et en particulier contre la France. »

Lié à l'Union intercoloniale, le journal Le Paria tire en 1923 à deux mille exemplaires, dont mille étaient expédiés dans les colonies africaines. Il a 150 abonnés vietnamiens, dont seulement treize en Indochine. Malgré cette diffusion limitée, son écho est réel au Viêt-Nam, au vu des reprises que font des journaux saïgonnais de langue française et des mesures d'interdiction et de surveillance dont il est l'objet de la part des autorités coloniales. Nguyên Thê Truyên en est le rédacteur en chef. Il est également présenté comme le principal rédacteur du Procès de la colonisation française, signé par Nguyen Ai Quoc (Hô Chi Minh) et paru en 1925.

 

 

À partir de l'automne 1925, l'Union intercoloniale entre en sommeil et Le Paria cesse de paraître en avril 1926.

S’étant éloigné du mouvement communiste pour s’engager dans l’action nationaliste, Nguyên Thê Truyên lance en janvier 1926 une nouvelle publication Viêt-Nam Hon (L’Âme du Vietnam), qui paraît clandestinement. Il publie également Phuc Quoc (Restauration de la Patrie) et La Nation annamite. Il fonde le Parti annamite de l’indépendance (PAI, Viêt-Nam Doc Lap Dang, VNDLD), qui est constitué officiellement en mai 1927. Lié au Kuomintang chinois, le PAI conserve cependant des liens avec les communistes, l'Internationale communiste soutenant le Kuomintang. Il organise des réunions publiques en province, notamment à Lille, au Havre (où se retrouvent beaucoup de marins indochinois) ou à Montpellier. Nguyên Thê Truyên préside le comité central provisoire.

Le 17 octobre 1927, un meeting de protestation « contre la terreur en Indochine » est organisée par deux formations nationalistes, le PAI et le Parti constitutionaliste indochinois. Le quotidien Le Soir estime le nombre de participants à six cents. Nguyên Thê Truyên, selon L'Écho annamite, « définit les causes de toutes ces persécutions abominables dont est victime le peuple indochinois et dénonça les coupables. Ce sont, d'une part, les missions étrangères, surtout la mission catholique représentée par le fameux Père Robert. »

D’après le préfet de police de Paris, il est, entre 1925 et 1927, « le plus actif des agitateurs du mouvement révolutionnaire annamite en France [...] l'animateur du mouvement dans la région parisienne. »

À Paris (4e arr.), Nguyên Thê Truyên épouse en novembre 1927 Madeleine Marie Clarisse Latour, modiste. Ils vivent rue Saint-Louis-en-l'Île.

Nguyên Thê Truyên retourne au Vietnam en janvier 1928. Il est accueilli favorablement par l’organe nationaliste L'Ère nouvelle, qui apprécie qu’il se soit engagé dans « la politique d'indépendance immédiate ». Par contre la police s’inquiète et, ayant reçu une lettre anonyme l'informant que ses partisans détenaient des milliers de fusils et une quantité considérable de munitions dans quelques grottes et cavernes du nord de la province de Thudaumot, en Cochinchine, décide de mener une perquisition, qui n’a aucune suite.

En France, le PAI est dissous en mars 1929 par mesure judiciaire. Mais au Vietnam, Nguyên Thê Truyên se rapproche du Viet Nam Quoc Dan Dang (VNQDD) ou parti nationaliste annamite. Les affiliés du VNQDD prononcent le serment suivant : « Devant les Monts et les Fleuves du Pays d'Annam ; devant les Camarades rassemblés; je jure sur l'honneur de remplir intégralement mes devoirs de membre, d'obéir ponctuellement aux ordres du parti, de garder un secret absolu sur toutes ses affaires, de lui sacrifier ma vie, mes biens et ma situation, de subir la peine de mort si je me parjure. »

À suivre

Nguyên Thê Truyên

 

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31 janvier 2022 1 31 /01 /janvier /2022 00:01

Début de la biographie de Nguyên Thê Truyên

Nota : les sources donnent plusieurs translittérations du nom, avec une assimilation différente aux nom et prénom en usage en Europe. Nous adoptons ici de manière unique la graphie Nguyên Thê Truyên.

Selon les sources françaises d’état-civil, confirmées par sa signature, Nguyên Thê Truyên naît le 19 novembre 1898 dans le village de Hanh Thiên, province de Nam Dinh, au Tonkin, alors protectorat français depuis 1884, intégré aujourd’hui au Vietnam. D’autres sources biographiques donnent une date un peu différente pour sa naissance, le 17 décembre 1898.

Sa mère est Pham-Thi Truyên et son père Nguyên Duy Han, mandarin, fonctionnaire lettré, formé dans un temple littéraire confucéen et ayant obtenu son baccalauréat en 1886. Devenu gouverneur, il est condamné à mort par le mouvement nationaliste Quang Phuc, qui le considère comme un traître, et assassiné le 13 avril 1913. Une rue de Hanoï est rebaptisée par les autorités françaises de son nom.

Selon Trinh Van Thao (Les compagnons de route de Hô Chi Minh, Karthala, 2004), la propagande moderniste a rencontré une forte résonance à Hanh Thiên, qui devient un des premiers villages du Nord du Vietnam à s'offrir de « nouveaux lettrés » formés à l’occidentale avec les frères Nguyên Thê Truyên et Nguyên Thê Song.

Les sources divergent sur la date d’arrivée en France de Nguyên Thê Truyên, généralement située entre 1908 et 1910. En 1910, il est pensionnaire de l’école de l'École d'enseignement pratique colonial du Parangon à Joinville-le-Pont (Seine, act. Val-de-Marne). Ouverte en 1899 par le Dr Henri Rousseau, elle bénéficie notamment du soutien de l’Alliance française et reçoit un contingent significatif d’élèves indochinois. En juillet 1911, Nguyên Thê Truyên reçoit la distinction la plus élevée, le prix d’honneur des élèves en année du certificat d’études (fin du cycle primaire). Le gouvernement général de l’Indochine lui accorde en 1913 une bourse scolaire pour poursuivre ses études en France. En 1915, il est l'un des premiers Vietnamiens à passer le Brevet supérieur, ce qui assure sa réputation au Tonkin. Il retourne alors dans sa famille.

Revenu en France, il s’inscrit à l’Université de Toulouse (Haute-Garonne) où il fréquente l’Institut de chimie de la faculté des sciences. Il obtient, en juillet 1920, le diplôme d'ingénieur chimiste. Son frère, Nguyên Thê Song, est également reçu dans le même titre.

C’est au cours de cette même année 1920 que, de concert avec d’autres étudiants, il forme le groupe des Cinq Dragons ou groupe des Gobelins, du nom de la rue de Paris où ils se réunissent. Il est composé également de Phan Châu Trinh, Nguyên An Ninh, Phan Van Truong et de Nguyên Ai Quôc (le futur Hô Chi Minh). Avec les deux derniers, Nguyên Thê Truyên devient probablement, en 1920 membre du parti socialiste, section française de l’Internationale ouvrière (SFIO), qui se transforme, en décembre de cette année, pour donner naissance au parti communiste, dont tous les trois sont adhérents.

À suivre

Les Cinq dragons

 

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