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20 mai 2023 6 20 /05 /mai /2023 01:01

Adrienne Louise Léonide Jadin naît le 27 janvier 1816 à Paris (10e arr.). Elle est la fille d’Annette de Molière et de son mari, Adolphe Jadin.

Fils du professeur de chant Georges Jadin, son père est né à Paris en 1794. Il fait une carrière militaire, en tant que capitaine dans l’infanterie, mais mène également, comme bon nombre de membres de sa famille, une activité artistique. Il est l’auteur de plusieurs pièces de théâtre et de livrets pour des opéras-comiques mis en musique par son père. Il compose également de la musique et publie des articles et poèmes, notamment dans la presse pour enfants ou pour femmes.

En 1830, Adolphe Jadin est membre du conservatoire royal et publie, dans un recueil de Charles Lafillé, Le souvenir des ménestrels, une romance dédiée à Léonide intitulée Plus de bonheur. Au sein du même ouvrage, on trouve une chanson de cette dernière, Le souvenir suppliant, adressée à sa sœur Césarine, avec des paroles de son père. Plusieurs autres œuvres sont attribuées à Léonide, comme La Jouvencelle, ou le Chant chevaleresque. Elle épouse en juillet 1835 à Paris (9e arr.) un avocat, André François Borel d’Hauterive, historien et fondateur de la Revue historique de la noblesse de France.

Léonide Jadin avait été élevée au couvent royal de Versailles. Après des études à Paris, elle enseigna la musique.

Sa sœur cadette, Charlotte Louise, a épousé en août 1848 un employé de la préfecture de police de Paris et orateur régulier de la Société républicaine centrale, présidée par le dirigeant socialiste Louis-Auguste Blanqui, appelé Marie Alexandre Lucien Routier de Bullemont. C’est sans doute par l’intermédiaire de ce dernier qu’elle rencontre Joseph Timoléon Routier de Bullemont, lui aussi républicain engagé, arrêté après l’insurrection de juin 1848.

Il s’oppose au coup d'État du 2 décembre 1851, organisé par Louis-Napoléon Bonaparte, président de la République, pour se maintenir au pouvoir. Après avoir participé à une assemblée républicaine, rue d’Assas, il est incarcéré à la prison de Mazas, dans la capitale. La résistance, menée par les républicains et soutenue notamment par Victor Schœlcher et Victor Hugo, est un échec. Son frère Lucien lui rend visite dans sa cellule ; il lui conseille de choisir de s’exiler en Amérique pour sortir de prison. Libéré en janvier 1852 sur cette promesse, il obtient du futur empereur Napoléon III l’autorisation de passer neuf mois en Belgique auprès de sa famille avant de traverser l’Atlantique, suite à l’intercession en sa faveur de Léonide Jadin, à deux reprises, auprès du président de la République. Elle semble en effet bien introduite à l’Élysée.

Joseph Timoléon Routier de Bullemont épouse Claire Augustine Suleau en août 1852, à Paris (9e arr.). Mais c’était avec Léonide qu’il quitte la France le 8 novembre. Les deux exilés arrivent à San Francisco, le 31 mai 1853, en provenance du Havre et après avoir contourné le Cap Horn. Selon son témoignage, un juge ou un officiel, dont elle ne se rappelle plus la fonction exacte en 1898, les aurait alors mariés juste après leur arrivée. À ce moment-là, ils ont tous les deux des époux en France. La femme légitime de Joseph Timoléon meurt à Paris moins d’un mois plus tard, le 22 juin.

Par républicanisme, assurera-t-il, le fils d’aristocrate adoptera le nom de Joseph Routier pendant tout son séjour en Amérique. Au contraire de son nouveau compagnon, Léonide assure avoir conservé les sentiments royalistes et légitimistes de sa famille.

Immédiatement après leur débarquement, ils s’installent près de Sacramento, capitale de l’État de Californie, où Joseph Routier doit devenir intendant d’une vaste propriété appartenant au capitaine Joseph Folsom, pour y planter et entretenir une vigne et un verger. Les premières plantations ne peuvent être faites, les semences transportées par bateau ayant pourri. Folsom meurt quelques mois plus tard. Joseph Routier reste cependant sur place, reprenant la gestion et, plus tard la propriété du domaine.

Une cérémonie religieuse à Sacramento, en novembre 1863, officialise l’union de Joseph, devenu veuf, avec Léonide, bien qu’elle soit toujours légalement mariée en France. C’est en juillet 1876 qu’André Borel d’Hauterive fait constater, à Paris, la séparation de corps d’avec son épouse. Le divorce, aboli en France par la loi du 8 mai 1816, puis rétabli par une loi du 27 juillet 1884, fait l’objet d’un jugement par le tribunal civil de la Seine en juillet 1888 ; Léonide avait donc vécu, pendant 35 ans, dans une situation de polyandrie.

La famille Routier devient riche, avec la production de vin et de fruits, notamment des prunes et des abricots. Le domaine est souvent cité en exemple dans les publications agricoles. La construction d’une ligne ferroviaire amène une desserte par train, et la gare prend le nom de station Routier, tout comme la poste qui lui est attenante puis le petit village qui se forme. Joseph Routier figure parmi les personnalités éminentes de la communauté française, et Léonide ; elle-même recueille en septembre 1884, notamment parmi les émigrés, une souscription pour les victimes du choléra en France, dont le premier donateur est le gouverneur G. Stoleman.

Joseph Routier s’engage aussi dans la vie politique locale, devenant sénateur de l’État californien au cours des années 1880 avec l’étiquette de Républicain ; après la fin de son mandat, il rejoindra le parti Démocrate.

Au milieu des années 1890, les affaires des Routier périclitent : des sécheresse, et la montée de mouvements antialcooliques les obligent à mettre en vente une partie de leur propriété. À la mort de son mari, survenue en février 1898 à Sacramento après un accident, Léonide, qui ne parle pas l’anglais, assure être sans ressources. Avec l’aide d’amis de son époux, elle peut cependant s’installer dans une demeure plus petite, où elle décède quatre mois plus tard, le 25 juin 1898 à Sacramento.

Elle avait donné naissance à deux enfants pendant son union avec André Borel d’Hauterive : Charles Édouard Edmond (1838-1840) et Jeanne (décédée en 1870). Elle eut ensuite trois enfants de son mariage avec Joseph Routier de Bullemont, dont un seul survécut jusqu’à l’âge adulte, George Louis (1859-1888).

Léonide Routier de Bullemont (coll. Lucie Catlin)

 

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